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04/04/2024 | FRANCE | N°23/09861

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp référé, 04 avril 2024, 23/09861


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies conformes délivrées
le : 04/04/2024
à : - Me Ch.-É. FORGAR
- Mme [V] [T]

Copie exécutoire délivrée
le : 04/04/2024
à : - Me Ch.-É. FORGAR

La Greffière,

Pôle civil de proximité


PCP JCP référé

N° RG 23/09861 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3SVN

N° de MINUTE :
2/2024






ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 4 avril 2024


DEMANDERESSE
La Société à Responsabilité Limitée Unipersonnelle BE MENILMONTANT, dont le siège

social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Charles-Édouard FORGAR, Avocat au Barreau de PARIS, vestiaire : #P0112


DÉFENDERESSE
Madame [V] [T], demeurant [Adresse 1]
non compara...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies conformes délivrées
le : 04/04/2024
à : - Me Ch.-É. FORGAR
- Mme [V] [T]

Copie exécutoire délivrée
le : 04/04/2024
à : - Me Ch.-É. FORGAR

La Greffière,

Pôle civil de proximité

PCP JCP référé

N° RG 23/09861 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3SVN

N° de MINUTE :
2/2024

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 4 avril 2024

DEMANDERESSE
La Société à Responsabilité Limitée Unipersonnelle BE MENILMONTANT, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Charles-Édouard FORGAR, Avocat au Barreau de PARIS, vestiaire : #P0112

DÉFENDERESSE
Madame [V] [T], demeurant [Adresse 1]
non comparante, ni représentée

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Marie-Laure KESSLER, Vice-Présidente, Juge des contentieux de la protection
assistée de Madame Nathalie BERTRAND, Greffière

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 6 février 2024

ORDONNANCE
réputée contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition au greffe le 4 avril 2024 par Madame Marie-Laure KESSLER, Vice-Présidente, assistée de Madame Nathalie BERTRAND, Greffière.

Décision du 04 avril 2024
PCP JCP référé - N° RG 23/09861 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3SVN

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 1er février 1980, la SCI CHASTEL a donné en location à Mme [C] [T] un logement situé [Adresse 1] à [Localité 3] moyennant un loyer mensuel de 1.330 francs, outre les charges.

Suivant acte authentique du 29 avril 2020, la SARLU BE [Adresse 1] a fait l’acquisition de l’immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 3].

Courant 2022, d’importantes fissures ont été constatées sur le bâtiment entraînant un risque d’effondrement et la nécessité de réaliser des travaux hors la présence dans les lieux des locataires.

Par acte de commissaire de justice délivré le 14 février 2023, la SARLU BE [Adresse 1] a fait assigner en référé Mme [C] [T] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris, afin qu'il :
- ordonne à Mme [C] [T], ainsi qu'à tous occupants de son chef, d'évacuer provisoirement son logement sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir ;
- constate la proposition volontaire de reloger de la demanderesse ;
- condamne Mme [C] [T] aux dépens, ainsi qu’au paiement d’une somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Mme [V] [T] est intervenue volontairement, indiquant venir aux droits de sa mère, Mme [C] [T].

Un protocole d’accord a été conclu entre les parties le 28 avril 2023 au titre duquel :
- la bailleresse s’engageait à mettre à disposition de Mme [T] temporairement l’appartement n° 303 dans le même immeuble, bâtiment D fond de cour, 3ème étage,
- Mme [T] acceptait de libérer le logement n° 302, le 2 mai 2023,
- Mme [T] s’engageait à libérer l’appartement numéro 303 à l’issue des travaux prévus pour se terminer au plus tard le 30 juin 2023.

La SARLU BE [Adresse 1] s’est désistée de la procédure de référé engagée devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris.

Un état des lieux d’entrée de l’appartement n° 303 a été contradictoirement établi entre les parties le 28 avril 2023.

Un état des lieux d’entrée de l’appartement n° 302 a été contradictoirement établi entre les parties le 30 août 2023, précisant que les clés de l’appartement n° 303 devaient être remises le 11 septembre 2023.

Par acte de commissaire de justice délivré le 18 décembre 2023, la SARLU BE [Adresse 1] a fait assigner en référé Mme

[V] [T] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris, afin qu'il :
- ordonne l’expulsion de Mme [V] [T], ainsi que de tous occupants de son chef, de l’appartement n° 303 sis [Adresse 1] à [Localité 3], si besoin avec le concours de la force publique et d’un serrurier, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,
- condamne Mme [V] [T] au paiement, à titre provisionnel, d’une indemnité d’occupation de 900 euros mensuel à compter du 11 septembre 2023 à parfaire,
- condamne Mme [V] [T] aux dépens, ainsi qu’au paiement d’une somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

À l'audience du 6 février 2024, la SARLU BE [Adresse 1], représentée, s'est référée à ses conclusions, auxquelles il est renvoyé en application de l’article 455 du code de procédure civile.

Bien que valablement assignée à étude, Mme [V] [T] n’était ni présente, ni représentée à l’audience.

L'affaire a été mise en délibéré au 19 mars 2024 par mise à disposition au greffe.

Par mention au dossier du 19 mars 2024, le juge des contentieux de la protection a prorogé son délibéré au 4 avril 2024 afin de permettre à la demanderesse de justifier du transfert du bail conclu avec Mme [C] [T] à Mme [V] [T].

Par courrier électronique du 28 mars 2024, la SARLU BE [Adresse 1] a indiqué qu’elle ne pouvait justifier du transfert juridique du bail au profit de Mme [V] [T], mais que cette dernière était intervenue volontairement à la précédente procédure et occupait les lieux, en conséquence de quoi elle la considérait comme locataire de l’appartement n° 302 et occupante de l’appartement n° 303.

Par courrier électronique du 28 mars 2024, Mme [V] [T] a écrit au tribunal pour demander la réouverture des débats, indiquant qu’elle avait fait une demande d’aide juridictionnelle pour l’audience du 6 février 2024, mais n’avait pas compris que l’aide juridictionnelle ne lui avait pas encore été accordée au jour de l’audience et qu’elle ne s’était pas présentée.

Par courrier électronique du même jour, la SARLU BE [Adresse 1] a fait savoir qu’elle était opposée à la demande de réouverture des débats qu’elle considérait comme étant dilatoire.

MOTIFS

En application de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le Juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la demande de réouverture des débats

Aux termes de l’article 444 du code de procédure civile, le président peut ordonner la réouverture des débats. Il doit le faire chaque fois que les parties n'ont pas été à même de s'expliquer contradictoirement sur les éclaircissements de droit ou de fait qui leur avaient été demandés.

En l’espèce, Mme [V] [T] sollicite la réouverture des débats au motif qu’elle avait fait une demande d’aide juridictionnelle pour l’audience du 6 février 2024, mais n’avait pas compris que l’aide juridictionnelle ne lui a pas encore été accordée au jour de l’audience et qu’elle ne s’était pas présentée.

Ainsi qu’elle l’indique elle-même dans son courrier électronique du 28 mars 2024, Mme [V] [T] n’a pas jugé utile de se présenter à l’audience du 6 février 2024, alors même qu’elle n’avait pas eu de réponse à sa demande d’aide juridictionnelle, demande dont elle ne justifie d’ailleurs pas.

Il apparaît donc que Mme [V] [T] aurait pu s’expliquer contradictoirement à l’audience du 6 février 2024 si elle s’était présentée à l’audience, ce qu’elle n’a pas jugé utile de faire.

Il ne sera pas fait droit à la demande de réouverture des débats sollicitée par Mme [V] [T].

Sur le constat de la résiliation de plein droit, l'expulsion et les délais d'expulsion

En application de l'article 835 alinéa 1er du code de procédure civile, le juge des contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence, peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite est la perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit.

En vertu de l'article 544 du code civil, la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.

L'occupation sans droit ni titre du bien d’autrui constitue un trouble manifestement illicite auquel il appartient au juge des référés de mettre fin.

Aux termes de l'article 1103 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-131, applicable en l'espèce, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Aux termes de l'article 1104 du même code dans sa rédaction issue de

l'ordonnance n° 2016-131, applicable en l'espèce, les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

En vertu de l'article 1353 du même code dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-131, applicable en l'espèce, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'espèce, il est constant, à la lecture du protocole d’accord du 28 avril 2023 conclu entre les parties que le bailleur s’est engagé à mettre temporairement à la disposition de sa locataire l’appartement n° 303 dans le même immeuble, bâtiment D fond de cour, 3ème étage, en contre-partie de l’engagement de celle-ci de libérer le logement n° 302, le 2 mai 2023, pour le temps des travaux puis de libérer l’appartement numéro 303 à l’issue des travaux prévus pour se terminer au plus tard le 30 juin 2023.

Le bailleur produit l’état des lieux d’entrée du logement n° 303 du 28 avril 2023 et l’état des lieux d’entrée du logement n° 302 en date du 30 août 2023, précisant que les clés de l’appartement n° 303 devaient être remises le 11 septembre 2023.

La défenderesse ne justifie pas avoir quitté le logement n° 303 de sorte qu’elle occupe actuellement les deux logements.

En application des dispositions précitées, il y a donc lieu de considérer que Mme [V] [T] n'a pas libéré le logement n° 303 sis [Adresse 1] à [Localité 3], alors même qu’elle a repris possession du logement n° 302 depuis le 30 août 2023.

Dès lors, l'occupation des lieux par Mme [V] [T] est établie, de même que le défaut de tout droit ou titre d'occupation, Mme [V] [T] s’étant engagée à libérer le logement n° 303 à l’issue des travaux permettant de reprendre possession du logement n° 302.

Il convient donc d’ordonner son expulsion, selon les modalités détaillées dans le dispositif de la présente décision.

Il n'apparaît pas nécessaire d'assortir l'obligation de quitter les lieux d'une astreinte. En effet, la condamnation au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation (voir ci-après), de nature à réparer le préjudice subi par la bailleresse satisfait déjà l'objectif assigné à l'astreinte en cette matière par l'article L.421-2 du code des procédures civiles d'exécution.

Sur la demande d'indemnité d'occupation

Aux termes de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence, peut accorder une provision au créancier.

Décision du 04 avril 2024
PCP JCP référé - N° RG 23/09861 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3SVN

L'obligation non sérieusement contestable vise aussi bien les créances d'origine contractuelle, quasi contractuelle, délictuelle ou quasi délictuelle, le juge des référés étant cependant tenu de préciser la nature de l'origine de cette créance ou la nature de l'obligation la fondant. Il y a une contestation sérieuse chaque fois que la décision du juge des référés l'obligerait à se prononcer préalablement sur une contestation relative à l'existence d'un droit ou le conduirait à se prononcer sur le fond du litige, par exemple en portant une appréciation sur la validité, la qualification ou l'interprétation d'un acte juridique. Ce dernier apprécie souverainement le montant de la provision à accorder.

Le maintien dans des lieux, sans droit ni titre, constitue une faute civile de nature quasidélictuelle ouvrant droit à réparation en ce qu'elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l'occupation indue de son bien l'a privé de sa jouissance. Au-delà de cet aspect indemnitaire, l'indemnité d'occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des locaux.

Compte tenu l’absence de mise en demeure de quitter les lieux préalablement à la mise en œuvre de la présente procédure, l’indemnité sera due à compter de la présente décision et sera fixée à la somme de 30 euros par jour jusqu’à la libération effective des lieux.

Sur les demandes accessoires

Sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile, Mme [V] [T], qui perd le procès, sera condamnée aux dépens.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la demanderesse les frais exposés par elle dans la présente instance et non compris dans les dépens. La somme de 500 euros lui sera donc allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l'article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge des contentieux de la protection, statuant en référé par ordonnance réputée contradictoire rendue en premier ressort et par mise à disposition au greffe,

CONSTATONS que Mme [V] [T] occupe sans droit ni titre l’appartement n° 303 situé [Adresse 1] à [Localité 3] ;

ORDONNONS l’expulsion de Mme [V] [T] des lieux et de tous occupants de son chef, avec le concours de la force publique et d’un serrurier, dans un délai de quinze jours à compter de la signification de la présente décision ;

SUPPRIMONS les délais prévus par les articles L412-1 et suivants,

R411-1 et suivants, R412-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution ;

FIXONS l'indemnité d'occupation provisionnelle due à compter de la présente décision à la somme de 30 euros par jour, et CONDAMNONS Mme [V] [T], à titre provisionnel, à son paiement à la SARLU BE [Adresse 1] à compter de ce jour et jusqu’à la complète libération des lieux par la restitution des clefs ;

REJETONS le surplus des demandes ;

CONDAMNONS Mme [V] [T] au paiement de la somme de 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNONS Mme [V] [T] aux dépens.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe les jour, mois et an susdits, et signé par la Juge et la Greffière susnommées.

La Greffière, La Vice-Présidente,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp référé
Numéro d'arrêt : 23/09861
Date de la décision : 04/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-04;23.09861 ?
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