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03/04/2024 | FRANCE | N°24/51303

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Service des référés, 03 avril 2024, 24/51303


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS








N° RG 24/51303 -
N° Portalis 352J-W-B7I-C4AIR

N°: 4

Assignation du :
14 Février 2024


EXPERTISE[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le:
+1 Copie expert


ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 03 avril 2024



par Anne-Charlotte MEIGNAN, Vice-Président au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Daouia BOUTLELIS, Greffier

DEMANDEURS

Madame [O] [L]
[Adresse 7]
[Localit

é 12]

Madame [T] [X]
[Adresse 4]
[Localité 12]

Monsieur [E] [L]
[Adresse 7]
[Localité 12]

Monsieur [A] [X]
[Adresse 4]
[Localité 12]

représentés par Me Oriane FIEVET, avocat au ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS


N° RG 24/51303 -
N° Portalis 352J-W-B7I-C4AIR

N°: 4

Assignation du :
14 Février 2024

EXPERTISE[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le:
+1 Copie expert

ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 03 avril 2024

par Anne-Charlotte MEIGNAN, Vice-Président au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Daouia BOUTLELIS, Greffier

DEMANDEURS

Madame [O] [L]
[Adresse 7]
[Localité 12]

Madame [T] [X]
[Adresse 4]
[Localité 12]

Monsieur [E] [L]
[Adresse 7]
[Localité 12]

Monsieur [A] [X]
[Adresse 4]
[Localité 12]

représentés par Me Oriane FIEVET, avocat au barreau de PARIS - #P0412

DEFENDERESSE

Société ETIMMO
[Adresse 8]
[Adresse 8]
[Localité 9]

représentée par Maître Jean-christophe LUBAC de la SCP LONQUEUE - SAGALOVITSCH - EGLIE-RICHTERS & Associés, avocats au barreau de PARIS - #P0482

DÉBATS

A l’audience du 06 Mars 2024, tenue publiquement, présidée par Anne-Charlotte MEIGNAN, Vice-Président, assistée de Daouia BOUTLELIS, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

Vu l’assignation en référé délivrée le 14 février 2024 par Monsieur [A] [X] et Madame [T] [X] d’une part, et par Monsieur [E] [L] et Madame [O] [L] à l’encontre de la SARL ETIMMO, aux fins de voir désigner un expert concernant les désordres allégués de fissurations et désolidarisation de plinthes affectant leur habitation mitoyenne par le dos, situées [Adresse 7], [Adresse 4], [Adresse 5] et [Adresse 6] à [Localité 12], acquis en l’état futur d’achèvement auprès de la SARL ETIMMO ;

Vu les observations orales des requérants à l’audience du 6 mars 2024 ;

Vu les écritures développées oralement par la société ETIMMO ;

Vu les dispositions de l’article 455 du code de procédure civile ;

SUR CE,

Sur la compétence territoriale

La défenderesse soutient qu’en vertu des articles 44 du code de procédure civile et D.211-1 du code de l’organisation judiciaire, le juge des référés compétent devrait être celui du lieu où est situé l’immeuble. Elle soulève en conséquence l’incompétence territoriale du juge des référés de Paris au profit du juge des référés de Versailles.

En réponse, les requérants exposent que la demande d’expertise et l’action qui est envisagée, reposant sur une action en responsabilité contre les constructeurs, n’est pas une action réelle immobilière telle qu’envisagée par l’article 44 du code de procédure civile, mais une action personnelle qui relève des dispositions de l’article 42 du même code.

En vertu de l'article 75 du code de procédure civile, s'il est prétendu que la juridiction saisie en première instance ou en appel est incompétente, la partie qui soulève cette exception doit, à peine d'irrecevabilité, la motiver et faire connaître dans tous les cas devant quelle juridiction elle demande que l'affaire soit portée.

Il est admis que le juge territorialement compétent pour statuer sur une demande de mesure d’instruction est, au choix du requérant, soit le président de la juridiction appelée à connaître d’un litige éventuel sur le fond, soit le président de la juridiction du lieu où doit être exécutée la mesure demandée.

Si l'article 44 du code de procédure civile dispose qu’en matière réelle immobilière, la juridiction du lieu où est située l’immeuble est seule compétente, c’est à juste titre que les requérants soutiennent que l’action envisagée à l’encontre de la défenderesse, qui est une action en responsabilité, ne fait pas partie de la matière réelle immobilière. Dès lors, l’action envisagée par ces derniers est soumise aux dispositions de l’article 42 du code de procédure civile qui prévoit que la juridiction territorialement compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu ou demeure le défendeur.

En l’espèce, il n’est pas contesté que le siège social de la défenderesse est situé à Paris. Dès lors, le juge des référés de Paris apparaît compétent et l’exception de compétence sera rejetée.

Sur la recevabilité de l’action

La défenderesse soulève l’irrecevabilité de l’action des requérants sur le fondement de l’article L.242-1 du code des assurances au motifs qu’ils n’ont pas procédé à la déclaration préalable de sinistre auprès de l’assureur dommage-ouvrages et en l’espèce, compte tenu de la liquidation judiciaire de celui-ci, auprès du Fonds des garanties des assurances obligatoires.

En réponse, les requérants exposent que cette irrecevabilité aurait pu leur être opposée s’ils avaient mis en cause l’assureur dommage-ouvrages, ce qui n’est pas le cas.

En vertu de l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

S’il est constant que pour mettre en oeuvre la garantie de l’assurance dommages-ouvrage obligatoire, l’assuré est tenu de faire une déclaration de sinistre à l’assureur, les articles L.242-1 et A243-1 du code des assurances, d’ordre public, lui interdisant de saisir directement une juridiction aux fins de désignation d’un expert, cette obligation ne s’impose que dans les rapports entre le maître d’ouvrage et l’assureur dommages-ouvrages.

En l’espèce, l’assureur dommages-ouvrage n’a pas été assigné. Dès lors, le moyen tiré de la fin de non recevoir doit être également rejeté.

Sur la mesure d’instruction

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

L’application de ce texte, qui subordonne le prononcé d’une mesure d’instruction à la seule démonstration d’un intérêt légitime à établir ou à préserver une preuve en vue d’un litige potentiel, n’implique aucun préjugé sur la recevabilité et le bien-fondé des demandes formées ultérieurement, sur la responsabilité des personnes appelées comme partie à la procédure, ni sur les chances du procès susceptible d’être engagé.
En l’état des arguments développés par les requérants et compte tenu des documents produits, notamment les constats d’huissier dressés par Me [P], Commissaire de Justice, les 8 décembre 2023 et 30 janvier 2024, qui relève la présence dans l’habitation des époux [L], de fissures et désolidarisation en sous-sol, ainsi qu’une importe fissuration crevassée au bas de l’escalier venant du rez-de-chaussée, et dans l’habitation des époux [X], de fissures et désolidarisations à tous les étages, ainsi que les rapports techniques établis par la société ISTIA, le 9 octobre 2023, qui émet l’hypothèse que la construction aurait du être édifiée sur un radier général, le motif légitime prévu par l’article 145 du code de procédure civile est établi.

Les considérations relatives au caractère non décennal des désordres opposées par la défenderesse relèvent de l’appréciation du juge du fond, l’expertise étant notamment ordonnée afin de déterminer le caractère décennal de ces fissurations. De la même manière, la question de la responsabilité des désordres affectant les sous-sols des immeubles en raison de la notice descriptive annexée aux actes de vente est un débat qui devra se tenir devant le juge du fond et non devant le juge des référés, juge de l’évidence.

En conséquence, la mesure d’instruction sollicitée doit être ordonnée dans les termes du dispositif ci-après.

Compte tenu de la vaine mise en demeure adressée à la société ETIMMO aux fins de communiquer ses attestations d’assurance, celle-ci sera condamnée à communiquer les polices d’assurance souscrites postérieurement à la liquidation de la société CBL INSURANCE et toujours en cours, sous astreinte.

La partie demanderesse sera condamnée aux dépens, l’article 491 du code de procédure civile ne prévoyant pas qu’ils puissent être réservés.

Aucune raison d’équité ne commande de faire droit à la demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire en premier ressort,

Rejetons l’exception de compétence ;

Rejetons la fin de non-recevoir ;

Ordonnons une mesure d’expertise et désignons en qualité d'expert :

Monsieur [W] [C]
[Adresse 10]
[Localité 11]
☎ :[XXXXXXXX01]

qui pourra prendre l’initiative de recueillir l’avis d’un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne,

avec mission de :

- se rendre sur les lieux des désordres après y avoir convoqué les parties ;
- examiner les désordres, malfaçons ou inachèvements allégués dans l'assignation et les pièces annexées, et, le cas échéant, sans nécessité d’extension de mission, tous désordres connexes ayant d’évidence la même cause mais révélés postérieurement à l’assignation, sans préjudice des dispositions de l’article 238 alinéa 2 du code de procédure civile ;
- les décrire, en indiquer la nature, l'importance, la date d'apparition; en rechercher la ou les causes;
- indiquer notamment les conséquences de ces désordres, malfaçons ou inachèvements quant à la solidité, l’habitabilité, l’estéthique et plus généralement quant à l’usage qui peut être attendu des maisons,
- fournir tout renseignement de fait permettant au tribunal de statuer sur les éventuelles responsabilités encourues et sur les comptes entre les parties ;
- après avoir exposé ses observations sur la nature des travaux propres à remédier aux désordres, et leurs délais d'exécution, chiffrer, à partir des devis fournis par les parties, éventuellement assistées d'un maître d'œuvre, le coût de ces travaux;
- fournir tous éléments de nature à permettre ultérieurement à la juridiction saisie d'évaluer les préjudices de toute nature, directs ou indirects, matériels ou immatériels résultant des désordres, notamment le préjudice de jouissance subi ou pouvant résulter des travaux de remise en état ;
- dire si des travaux urgents sont nécessaires soit pour empêcher l'aggravation des désordres et du préjudice qui en résulte, soit pour prévenir les dommages aux personnes ou aux biens ; dans l'affirmative, à la demande d'une partie ou en cas de litige sur les travaux de sauvegarde nécessaires, décrire ces travaux et en faire une estimation sommaire dans un rapport intermédiaire qui devra être déposé aussitôt que possible ;
- faire toutes observations utiles au règlement du litige;

Disons que pour procéder à sa mission l’expert devra :

✏ convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l'occasion de l'exécution des opérations ou de la tenue des réunions d'expertise ;

✏ se faire remettre toutes pièces utiles à l'accomplissement de sa mission, notamment, s’il le juge utile, les pièces définissant le marché, les plans d’exécution, le dossier des ouvrages exécutés ;

✏ se rendre sur les lieux et si nécessaire en faire la description, au besoin en constituant un album photographique et en dressant des croquis ;

✏ à l’issue de la première réunion d’expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations; l’actualiser ensuite dans le meilleur délai :
→ en faisant définir une enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations ;
→ en les informant de l’évolution de l’estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui s’en déduisent, sur le fondement de l'article 280 du code de procédure civile, et dont l'affectation aux parties relève du pouvoir discrétionnaire de ce dernier au sens de l'article 269 du même code ;
→ en fixant aux parties un délai impératif pour procéder aux interventions forcées ;
→ en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ;

✏ au terme de ses opérations, adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception dont il s’expliquera dans son rapport (par ex : réunion de synthèse, communication d’un projet de rapport), et y arrêter le calendrier impératif de la phase conclusive de ses opérations, compte-tenu des délais octroyés devant rester raisonnable ;
→ fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse ;
→ rappelant aux parties, au visa de l’article 276 alinéa 2 du code de procédure civile, qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au delà de ce délai;

Fixons à la somme de 8000 euros le montant de la provision à valoir sur les frais d’expertise qui devra être consignée pour moitié par les époux [X] et pour l’autre moitié par les époux [L], chaque consorts pouvant se substituer à l’autre en cas de défaillance, à la régie du tribunal judiciaire de Paris au plus tard le 3 juin 2024 ;

Disons que, faute de consignation de la présente provision initiale dans ce délai impératif ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l’expert sera aussitôt caduque et de nul effet, sans autre formalité requise, conformément aux dispositions de l'article 271 du code de procédure civile ;

Disons que l’exécution de la mesure d’instruction sera suivie par le juge du contrôle des expertises, spécialement désigné à cette fin en application des articles 155 et 155-1 du même code ;

Disons que le terme du délai fixé par l'expert pour le dépôt des dernières observations marquera la fin de l'instruction technique et interdira, à compter de la date à laquelle il est fixé, le dépôt de nouvelles observations, sauf les exceptions visées à l'article 276 du code de procédure civile;

Disons que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 255, 263 à 284-1 du Code de procédure civile et qu'il déposera l'original de son rapport au greffe du Tribunal judiciaire de Paris (Contrôle des expertises) avant le 3 février 2025, pour le rapport définitif, sauf prorogation de ces délais dûment sollicitée en temps utile de manière motivée auprès du Juge du contrôle ;

Disons que, dans le but de favoriser l’instauration d’échanges dématérialisés et de limiter la durée et le coût de l’expertise, le technicien devra privilégier l’usage de la plateforme OPALEXE et qu’il proposera en ce cas à chacune des parties, au plus tard lors de la première réunion d’expertise, de recourir à ce procédé pour communiquer tous documents et notes par la voie dématérialisée dans les conditions de l’article 748-1 du code de procédure civile et de l’arrêté du 14 juin 2017 validant de tels échanges ;

Enjoignons la société ETIMMO à communiquer aux époux [X] et [L] les polices d’assurance souscrites postérieurement à la liquidation de la société CBL INSURANCE et toujours en cours, garantissant notamment la responsabilité des constructeurs et la responsabilité civile contractuelle dans un délai de quinze jours à compter de la signification e la présente décision ;

Disons que passé ce délai, la société ETIMMO sera redevable d’une astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard, pendant un délai de trois mois ;

Rejetons le surplus des demandes ;

Condamnons la partie demanderesse aux dépens ;

Rappelons que l'exécution provisoire est de droit.

Fait à Paris le 03 avril 2024

Le Greffier,Le Président,

Daouia BOUTLELISAnne-Charlotte MEIGNAN

Service de la régie :
[Adresse 15]
☎ [XXXXXXXX03]
Fax [XXXXXXXX02]
✉ [Courriel 14]

Sont acceptées les modalités de paiements suivantes :

➢ virement bancaire aux coordonnées suivantes :
IBAN : [XXXXXXXXXX013]
BIC : [XXXXXXXXXX016]
en indiquant impérativement le libellé suivant :
C7 "Prénom et Nom de la personne qui paye" pour prénom et nom du consignataire indiqué dans la décision + Numéro de RG initial

➢ chèque établi à l'ordre du régisseur du Tribunal judiciaire de Paris (en cas de paiement par le biais de l'avocat uniquement chèque CARPA ou chèque tiré sur compte professionnel)

Le règlement doit impérativement être accompagné d'une copie de la présente décision. En cas de virement bancaire, cette décision doit être envoyée au préalable à la régie (par courrier, courriel ou fax).

Expert : Monsieur [W] [C]

Consignation : 8000 € par Madame [O] [L]
Madame [T] [X]
Monsieur [E] [L]
Monsieur [A] [X]

le 03 Juin 2024

Rapport à déposer le : 03 Février 2025

Juge chargé du contrôle de l’expertise :
Service du contrôle des expertises
[Adresse 15].


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Service des référés
Numéro d'arrêt : 24/51303
Date de la décision : 03/04/2024
Sens de l'arrêt : Désigne un expert ou un autre technicien

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-03;24.51303 ?
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