TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS
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N° RG 23/59257 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3KTU
N° : 6
Assignation du :
08 Décembre 2023
[1]
[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le:
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 27 mars 2024
par Anne-Charlotte MEIGNAN, Vice-Président au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal, assistée de Daouia BOUTLELIS, Greffier
DEMANDEURS
Monsieur [F] [V]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Madame [X] [N] épouse [M]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représentés par Maître Frédéric WIZMANE de la SELEURL W Avocats, avocats au barreau de PARIS - #E0223
DEFENDEURS
Monsieur [W] [E]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Société SPFPLARL PMT
[Adresse 2]
[Adresse 2]
S.E.L.A.R.L. [...]
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Adresse 6]
représentés par Maître Jacques MONTA de la SELEURL Jacques MONTA Avocat à la Cour, avocats au barreau de PARIS - #D0546, Me Bertrand CHARLET, avocat au barreau de LILLE
DÉBATS
A l’audience du 27 Février 2024, tenue publiquement, présidée par Anne-Charlotte MEIGNAN, Vice-Président, assistée de Daouia BOUTLELIS, Greffier,
Nous, Président,
Après avoir entendu les conseils des parties,
La SELARL DE PHARMACIENS D'OFFICINE [V] exploitait une officine de pharmacie, au sein du local n°328 d'une surface de 200m² environ, située dans le centre commercial [4] suivant bail commercial consenti le 14 novembre 1995 par la Société Civile du [5] de [Localité 7].
En raison des travaux de restructuration du [5] initiés à compter de l'année 2009 et achevés en 2016, impactant les conditions d'exploitation de la pharmacie, celle-ci a été placée en redressement judiciaire le 5 mai 2015 par le tribunal de commerce de Paris, un plan de redressement par voie de continuation de la société ayant été adopté le 28 décembre 2016, prévoyant sur neuf ans l'apurement des dettes, notamment la dette locative.
Aux termes d'un acte sous seing privé signé le 24 avril 2019, Monsieur [F] [V], propriétaire de 14.999 parts et Madame [X] [N], propriétaire de 10 parts, ont cédé à Monsieur [W] [E] d'une part, et Monsieur [E] ainsi que les sociétés TRIANON et PRADO MERMOZ, en qualité d'associés fondateurs de la SPFPLARL PMT en cours d'immatriculation, l'ensemble de leurs parts sociales détenues au sein de la SELARL DE PHARMACIENS D'OFFICINE [V], sous condition suspensive légale.
L'acte prévoyait que le prix provisoire de cession des titres était établi sur la base d'une situation arrêtée au 30 juin 2018 et selon la méthode de calcul suivante : (Valeur conventionnelle de l'actif immobilisé + immobilisations financières + actif circulant au 30/06/2018) - ( Dettes au 30/06/2018 + montant de la perte estimée à la date de réalisation), les immobilisations corporelles et incorporelles étant conventionnellement évaluées à 4.350.000€ et les dettes étant fixées au 30 juin 2018 à la somme de 3.932.744€, soit un prix provisoire de 723.903€, arrondi à 724.000€.
En vertu de l'article II.C de l'acte de cession sous condition suspensive, le prix définitif de cession des titres sociaux devait être calculé selon la formule ci-dessus " à partir d'une situation comptable en forme de bilan arrêtée par le cabinet choisi par le Cessionnaire, la veille de la date de transfert de propriété des titres sociaux, le stock devant être inventorié selon la dernière norme ANIP ".
Suivant acte de cession de titres constatant la réalisation des conditions suspensives légales relatives à l'exploitation d'une pharmacie signée le 2 juillet 2019, les cessionnaires ont remis aux cédants un chèque de 324.000€ à valoir sur le paiement du prix provisoire, les cessionnaires s'obligeant à leur remettre au plus tard le 20 juillet 2019 une garantie à première demande d'un montant de 400.000€ en garantie du paiement du solde du prix provisoire.
Monsieur [E] et la SPFLARL PMT ont adressé le 3 novembre 2020 à Monsieur [V] et Madame [N] une notification de désaccord sur la détermination du prix définitif de cession des titres.
C'est dans ces conditions que le président de ce tribunal, statuant selon la procédure accélérée au fond, a, par jugement du 12 novembre 2021 et en application de l'article II.C de l'acte de cession du 24 avril 2019, désigné Monsieur [G] en qualité d'expert judiciaire aux fins de résoudre les éléments de désaccord énoncés par Monsieur [E] et la SPFLART PMT dans la Notification de Désaccord et de fixer l'ajustement du prix.
Au cours des opérations d'expertise, les cessionnaires ont été enjoints de communiquer à l'expert le protocole d'accord transactionnel signé le 2 avril 2019 par Monsieur [E], avec faculté de substitution, avec la Société Civile du [5] de [Localité 7], aux termes duquel il est apparu que le bailleur renonçait à l'intégralité des loyers impayés par la société DE PHARMACIENS D'OFFICINE [V] jusqu'à la veille de la prise d'effet de la cession de parts, sous réserve notamment que les cessionnaires effectuent les démarches nécessaires au déplacement de la Licence de Pharmacie dans le local initial afin que l'activité puisse être exercée dans un nouveau local n°238 de 2047 m².
Aux termes de son pré-rapport d'expertise, Monsieur [G], tenant compte des termes de ce protocole d'accord et de l'abandon subséquent de la dette locative, a fixé l'ajustement du prix à la somme de 896.566,34€.
L'expert judiciaire étant décédé en cours de mission, il a été procédé à son remplacement le 21 mars 2023 par Monsieur [O] [H], lequel a déposé son rapport d'expertise le 30 octobre 2023 et conclu à un ajustement du prix fixé à la somme de 863.829€.
Par courrier recommandé du 31 octobre 2023, Monsieur [V] et Madame [N] ont mis Monsieur [E] et la SPFLARL PMT en demeure de leur verser le solde du prix définitif, soit la somme de 1.263.879€, correspondant à la somme de 1.587.879€ (prix provisoire + ajustement de prix fixé par l'expert) - 324.000€ (prix versé aux cédants le 2 juillet 2019).
Se prévalant d'un dépassement de sa mission par l'Expert, Monsieur [E] et les sociétés PMT et [...] ont assigné, le 13 novembre 2023, Monsieur [V] et Madame [N] devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins d'annulation du rapport d'expertise déposé par Monsieur [H] le 30 octobre 2023.
Par exploit délivré le 8 décembre 2023, Monsieur [V] et Madame [N] ont fait citer Monsieur [E], la SPFPLARL PMT et la SELARL [...] devant le président de ce tribunal, statuant en référé.
Appelée à l'audience du 9 janvier 2024, l'affaire a fait l'objet d'un renvoi à la demande des défendeurs et les parties ont été enjointes de rencontrer un médiateur.
La tentative de médiation ayant échoué, les parties ont été entendues en leur plaidoirie à l'audience du 27 février 2024.
A cette audience, les requérants concluent au rejet des prétentions adverses et sollicitent du président de ce tribunal, statuant en référé, de :
-condamner la SPFPLARL PMT à verser à Monsieur [V] la somme de 1.103.245,52€,
-condamner Monsieur [E] à lui verser la somme de 57,58€,
-condamner la société PMT à verser à Madame [X] [N] la somme de 575,90€,
à titre de provisions à valoir sur le solde du prix de vente des parts sociales, avec intérêts au taux de 1% par mois à compter du 14 novembre 2023 jusqu'au 16 décembre 2023 sur la somme de 1.263.245,52€ et sur la somme de 1.103.245,52€ à compter du 16 décembre 2023,
-condamner la SPFPLARL PMT à verser à Monsieur [V] la somme de 126.324,55€,
-condamner Monsieur [E] à lui verser la somme de 5,75€,
-condamner la société PMT à verser à Madame [X] [N] la somme de 57,59€,
à titre de provision à valoir sur l'indemnité prévue à l'article II-D du contrat de cession,
-condamner solidairement Monsieur [E] et la société PMT à verser à Monsieur [V] la somme de 44.800€ TTC à titre de provision sur les frais d'expertise,
-condamner solidairement la société PMT et la société [...] à rembourser à titre provisionnel la somme de 107.204,03€ avec intérêts au taux légal à compter du 2 juillet 2019 ainsi que les intérêts au taux légal sur la somme de 744.000€ à compter du 2 juillet 2019 jusqu'au remboursement intervenu le 11 mai 2023,
-condamner solidairement la société PMT et Monsieur [E] à verser à Monsieur [V] la somme de 10.000€ à titre de provision à valoir sur le remboursement intégral de tous les frais de procédure, des honoraires d'avocat et des frais d'huissier de justice qu'il devra acquitter pour procéder au recouvrement du prix de la cession dans le cadre de la procédure au fond diligentée par les défendeurs,
-assortir les condamnations d'une astreinte de 1000€ par jour de retard à compter du 5ème jour suivant la signification de l'ordonnance pour une durée de cinq mois,
-condamner in solidum les défendeurs à lui verser la somme de 12.000€ au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens.
En réponse, les défendeurs sollicitent la mise hors de cause de la SELARL [...] et concluent au débouté des requérants. Ils sollicitent en tout état de cause la condamnation des requérants à leur verser la somme de 8000€ au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens.
Conformément aux dispositions des articles 446-1 et 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures déposées à l'audience et aux notes d'audience pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions qui y sont contenus.
SUR CE,
Sur les demandes provisionnelles au titre de l'ajustement du prix
Aux termes de l'article 835, alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal peut accorder, en référé, une provision au créancier.
L'octroi d'une provision suppose le constat préalable par le juge de l'existence d'une obligation non sérieusement contestable au titre de laquelle la provision est demandée. Cette condition intervient à un double titre : elle ne peut être ordonnée que si l'obligation sur laquelle elle repose n'est pas sérieusement contestable et ne peut l'être qu'à hauteur du montant non sérieusement contestable de cette obligation, qui peut d'ailleurs correspondre à la totalité de l'obligation.
Une contestation sérieuse est caractérisée lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.
Si aucune contestation n'apparaît sérieusement opposable, la provision peut être octroyée, quelle que soit l'obligation en cause. La nature de l'obligation sur laquelle est fondée la demande de provision est indifférente, qui peut être contractuelle, quasi-délictuelle ou délictuelle.
En vertu de l'article 1103 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
L'article II.C de l'acte de cession de titres signé par les parties le 24 avril 2019 stipule qu'à défaut d'accord, un expert indépendant sera désigné par ordonnance du Président du tribunal de grande instance de Paris statuant en la forme des référés sur requête de la partie la plus diligente.
" En cas de contestation par l'une des parties, les points contestés seront soumis à un expert désigné par les parties ou par une ordonnance de référés en cas de désaccord. Le solde du prix restant dû, ou le trop perçu, pourra être exigé par son bénéficiaire dans les quinze (15) jours de la remise du rapport de l'expert ".
Les requérants en tirent la conclusion que le paiement du prix doit être versé par les cessionnaires, sans que ce droit ne soit remis en cause par une contestation au fond du rapport d'expertise.
Toutefois, dans la mesure où la convention des parties prévoit que les conclusions du rapport d'expertise ont autorité de la chose jugée sauf en cas d'erreur matérielle ou grossière de l'expert, la stipulation relative à l'exigibilité du solde du prix ne peut, avec l'évidence requise en référé, être comprise comme permettant un versement de ce prix malgré une contestation du rapport d'expertise sur le fondement de l'erreur matérielle ou grossière de l'Expert, ce qui est le cas en l'espèce.
Dès lors, cette stipulation ne saurait s'opposer à l'examen des contestations opposées par les défendeurs à la présente instance.
La convention stipule que " La seule mission de l'Expert sera la résolution des éléments de désaccord énoncés par le Cessionnaire dans la Notification de Désaccord et la fixation de l'Ajustement du prix, ledit Expert agissant en qualité de tiers expert au sens de l'article 1592 du Code civil, et ce en respectant les principes comptables applicables de façon constante à la Société et les stipulations du présent article ".
Il est prévu que " Les conclusions de l'Expert (…) revêtiront pour les Parties concernées l'autorité de la chose jugée, sauf en cas d'erreur matérielle ou grossière de l'Expert. "
Les parties ont expressément fait référence aux dispositions de l'article 1592 du code civil, de sorte que l'expert désigné par le président de ce tribunal est un tiers-estimateur, qui est le mandataire commun des parties.
Dès lors, son rôle n'est pas de trancher un différend, tel que le ferait un arbitre, mais de compléter un contrat, en l'espèce, sur le prix, qui autrement n'existerait pas.
Le tiers-estimateur reçoit ainsi mandat des parties de traiter les points de désaccord sur des éléments de fait ou des éléments techniques sur la fixation du prix, n'appelant aucune interprétation de la règle de droit. Un mandataire, au contraire d'un arbitre, ne peut dire, en droit, qui des parties a tort et a raison.
La question est donc de déterminer si les parties ont entendu investir le tiers d'un pouvoir juridictionnel, c'est-à-dire lui permettant de régler un différend en le tranchant en faveur d'une des deux parties, ou d'un pouvoir limité à la fixation d'un prix sans avoir à en tirer des conséquences juridiques.
Il est constant que le prix fixé par le tiers désigné sur le fondement des dispositions de l'article 1592 du code civil s'impose aux parties, sauf erreur grossière commise par celui-ci, qui est donc une condition de la remise en cause de la détermination du prix. La modification du sens de la mission qui lui a été confiée caractérise l'erreur grossière.
Les requérants estiment, d'une part, que dans la mesure où la convention donnait mission à l'expert de fixer l'ajustement du prix, il entrait bien dans sa mission de tenir compte du protocole transactionnel signé avec le bailleur conduisant à l'annulation de la dette de loyers au titre des dettes de la société.
Les défendeurs soutiennent au contraire que l'ajustement du prix est évalué par l'expert au regard de la notification de désaccord, de sorte que l'expert a excédé sa mission en tenant compte du protocole transactionnel signé avec le bailleur, et qu'en tout état de cause, il a commis une erreur grossière en tenant compte de ce protocole auquel les cédants n'étaient pas partie.
L'article II.C de la convention de cession stipule que la Situation Comptable de Cession, permettant de fixer le prix définitif de la cession, devra être établie dans un délai de 90 jours suivant la date de réalisation par l'expert-comptable Quercy, qui disposera de 45 jours pour la vérifier et faire valoir d'éventuelles observations.
" En cas de désaccord du cabinet d'expertise-comptable du Cessionnaire sur la Situation Comptable de Cession, le Cessionnaire devra notifier au Cédant et à leur conseil, leurs observations, les raisons de leur désaccords et les détails de leurs calcul. (...)
La convention ne prévoit pas que les Cédants puissent notifier un désaccord.
Et il est bien stipulé que la seule mission de l'expert porte sur la résolution des éléments de désaccord énoncés par le Cessionnaire dans la Notification de Désaccord et la fixation de l'Ajustement du prix.
Il en résulte qu'une fois traités les points de désaccords notifiés par le Cessionnaire uniquement, l'expert a bien pour mission de fixer l'ajustement du prix. Pour ce faire, il doit établir la Situation Comptable de Cession, en tenant compte de la résolution des désaccords, ce qui doit le conduire à établir l'Actif et le Passif.
Il n'est pas contestable que l'expert a intégré dans son évaluation du Passif les termes du Protocole Transactionnel.
Il ne résulte pas avec l'évidence requise en référé que la lettre de Notification de Désaccord porte implicitement sur la question de l'abandon des loyers, la notification ne mentionnant pas l'existence du protocole. En outre, la volonté des cessionnaires de confier mission à l'expert sur ce point est contredite par leur position tout au long des opérations d'expertise, ces derniers ayant soutenu que le prix définitif de cession devait être fixé sans tenir compte du protocole transactionnel dans la mesure où cet abandon de loyers n'aurait pu être obtenu par les cédants, qui n'étaient pas en position de négocier la location d'une surface plus élevée supposant un loyer contractuel sans commune mesure avec le loyer actuel qui n'était pas acquitté.
Dès lors, la contestation opposée par les défendeurs nécessite de déterminer si l'intégration de l'abandon de loyers dans la fixation du passif était une simple question de fait ou élément technique que l'expert était en mesure de trancher ou, au contraire, s'il caractérisait un véritable différend, qui supposait une appréciation juridique des conventions en cause et de la volonté des parties, échappant à l'appréciation du tiers-estimateur.
Sur ce point, les questions posées par la prise en compte de ce protocole portaient sur sa portée, les cédants n’étant pas partie à l’acte, et sur son entrée en vigueur. Et ces questions semblent davantage relever de l’appréciation juridique que de l’appréciation d’éléments de fait.
En effet, sur la portée du protocole, il convient de rappeler qu’une transaction suppose des concessions réciproques de part et d’autre.Or, l'abandon d’une dette de loyer supérieure à un million d’euros a nécessairement impacté les possibilités de négociation des défendeurs, de sorte que la contestation relative au bien fondé de l’intégration de ce protocole dans la fixation du Passif apparaît suffisamment sérieuse pour s'opposer à la demande provisionnelle.
Il découle de ces éléments que le périmètre de la mission de l'expert relative à la fixation de l'ajustement du prix implique une appréciation de la convention des parties permettant de déterminer si l'expert était fondé à apprécier la portée économique et juridique du protocole transactionnel négocié entre les Cessionnaires et le Bailleur, appréciation dont il résultera l'existence ou non d'une erreur grossière commise dans l'évaluation des titres, et qui échappe aux pouvoirs du juge des référés.
En conséquence, les moyens opposés par les défendeurs suffisent à constituer une contestation sérieuse au caractère d'autorité de la chose jugée du rapport d'expertise.
Et il n'y a pas lieu à référé sur les demandes provisionnelles relatives à l'ajustement du prix et à la clause pénale subséquente.
Sur le remboursement des frais d'expertise et des frais de recouvrement à venir
Compte tenu de la contestation sérieuse opposée au caractère d'autorité de chose jugée du rapport, contestation qui n'apparaît pas immédiatement vaine, la question de la charge des frais d'expertise ainsi que du coût de recouvrement sur les défendeurs du prix de cession se heurte à une contestation sérieuse. Il n'y a pas lieu à référé.
Sur le remboursement du solde du compte courant d'associé
Il résulte des termes de l'acte de cession du 24 avril 2019 ainsi que l'acte du 2 juillet 2019 que le Cessionnaire s'oblige à acquérir la valeur nominale du compte courant de Monsieur [V], cette cession devant intervenir à la date de signature de l'acte constatant le prix définitif de cession des Titres Sociaux.
S'il n'est pas contestable que l'acte constatant le prix définitif de cession des titres sociaux n'est pas intervenu, comme cela est opposé par les défendeurs, il n'est pas non plus contestable qu'un tel acte n'interviendra pas, sauf accord entre les parties ou rejet de la demande de nullité du rapport d'expertise, puisque les tribunaux sont saisis de la question de ce prix définitif.
Le juge statuant avec les éléments dont il dispose le jour où il prend sa décision, force est de constater qu'aucun élément ne permet de laisser penser qu'une signature interviendra sur le prix définitif.
La partie défenderesse n'émettant aucune contestation sur le montant des sommes dues au titre du remboursement du compte courant d'associé, il sera alloué à Monsieur [V] la somme de 107.204,03€ à titre de provision.
Si la convention prévoit que les seuls les cessionnaires s'engagent à acquérir la valeur nominale du compte courant, il n'en demeure pas moins que la société [...] est débitrice de la somme prêtée au titre du compte-courant par Monsieur [V] qui n'est plus associé de la structure depuis la cession de ses parts sociales.
Dès lors, la société [...] et la société PMT seront solidairement condamnées au remboursement à titre provisoire de cette somme.
L'article 835 alinéa 1 du code de procédure civile dispose que le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Toutefois, dans la mesure où le compte-courant d'associé a la qualité, lors du départ de l'associé, d'un prêt, le caractère illicite de la clause de différé du remboursement du compte-courant n'apparaît pas manifeste, de sorte que la question du départ des intérêts se heurte à une contestation sérieuse.
Le refus opposé par les défendeurs du paiement du solde du prix de cession reposant sur une contestation qui apparaît sérieuse, il n'est pas justifié de la nécessité d'assortir la présente condamnation d'une astreinte.
Sur les demandes accessoires
Succombant partiellement à l'instance, les défendeurs, y compris Monsieur [E] qui faisait partie des Cessionnaires, seront condamnés in solidum aux dépens, en vertu de l'article 696 du code de procédure civile.
Il n'apparaît pas inéquitable de condamner in solidum les défendeurs à verser à Monsieur [V] la somme de 5000 euros au titre de ses frais non compris dans les dépens en vertu de l'article 700 du même code.
PAR CES MOTIFS
Nous, juge des référés, par ordonnance prononcée publiquement, contradictoirement et en premier ressort,
Condamnons solidairement la SPFPLARL PMT et la SELARL [...] à verser à Monsieur [F] [V] la somme de 107.204,03 euros à titre de provision à valoir sur le solde du remboursement de son compte-courant d'associé ;
Rejetons la demande d'astreinte ;
Disons n'y avoir lieu à référé sur le surplus des demandes, dont le cours des intérêts ;
Condamnons in solidum Monsieur [W] [E], la SPFPLARL PMT et la SELARL [...] à verser à Monsieur [F] [V] la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles ;
Condamnons in solidum Monsieur [W] [E], la SPFPLARL PMT et la SELARL [...] au paiement des dépens,
Rappelons que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de droit.
Fait à Paris le 27 mars 2024
Le Greffier,Le Président,
Daouia BOUTLELISAnne-Charlotte MEIGNAN