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26/03/2024 | FRANCE | N°23/09839

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp fond, 26 mars 2024, 23/09839


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Madame [O] [L] [E] épouse [T],
Monsieur [K] [B] [T]

Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Isabelle CLAVERIE-DREYFUSS

Pôle civil de proximité


PCP JCP fond

N° RG 23/09839 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3SRJ

N° MINUTE :







JUGEMENT
rendu le mardi 26 mars 2024


DEMANDERESSE
Madame [W] [F] épouse [I]
demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Isabelle CLAVERIE-DREYFUSS, avocat au barreau de

PARIS, vestiaire : #C1881


DÉFENDEURS
Madame [O] [L] [E] épouse [T],
demeurant [Adresse 1]
non comparante, ni représentée

Monsieur [K] [B] [T]
demeurant [Adresse 1]
non comp...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Madame [O] [L] [E] épouse [T],
Monsieur [K] [B] [T]

Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Isabelle CLAVERIE-DREYFUSS

Pôle civil de proximité

PCP JCP fond

N° RG 23/09839 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3SRJ

N° MINUTE :

JUGEMENT
rendu le mardi 26 mars 2024

DEMANDERESSE
Madame [W] [F] épouse [I]
demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Isabelle CLAVERIE-DREYFUSS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #C1881

DÉFENDEURS
Madame [O] [L] [E] épouse [T],
demeurant [Adresse 1]
non comparante, ni représentée

Monsieur [K] [B] [T]
demeurant [Adresse 1]
non comparant, ni représenté

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Anne TOULEMONT, Juge des contentieux de la protection
assistée de Coraline LEMARQUIS, Greffière,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 17 janvier 2024

JUGEMENT
réputé contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 26 mars 2024 par Anne TOULEMONT, juge des contentieux de la protection, assistée de Coraline LEMARQUIS, Greffière

Décision du 26 mars 2024
PCP JCP fond - N° RG 23/09839 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3SRJ

Suivant acte sous seing privé en date du 17 août 2009, Madame [X] [F] a consenti à Madame [O] [L] [E] épouse [T] et Monsieur [K] [B] [T] un bail meublé portant sur un logement situé [Adresse 1].

Madame [X] [F] est décédée le 15 novembre 2021. Madame [W] [F] épouse [I] est devenue propriétaire du logement.

Par actes d'huissier en date du 14 juin 2022, Madame [W] [F] épouse [I] a fait assigner Madame [O] [L] [E] épouse [T] et Monsieur [K] [B] [T] devant le juge des contentieux du tribunal judiciaire de Paris aux fins de, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
-validation du congé pour reprise à effet du 16 août 2023,
-expulsion de Madame [O] [L] [E] épouse [T] et Monsieur [K] [B] [T] et de tous occupants de leur chef avec au besoin l'assistance de la force publique et d'un serrurier, et transport et séquestration du mobilier,
-condamnation solidaire de Madame [O] [L] [E] épouse [T] et Monsieur [K] [B] [T] à lui verser au titre des indemnités d'occupation mensuelle la somme de 1056, 93 euros, charges comprises, composées du loyer de 796, 93 euros et de la somme de 260 euros au titre des charges, et subsidiairement fixer une astreinte journalière de 77, 12 euros par jour au titre de la clause pénale, 10 000 euros au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral et de jouissance, 3000 euros au titre des frais irrépétibles, et les dépens y compris le coût du congé et de l'assignation.

A l'audience du 17 janvier 2024, Madame [W] [F] épouse [I], représentée par son conseil, a déposé des conclusions, qui n'ont pas été notifiées aux défendeurs absents. Au soutien de ses prétentions, Madame [W] [F] épouse [I] soutient que le congé est régulier, que sa volonté de reprise est pleinement justifiée, ses frères souhaitant récupérer son appartement. Elle précise que les locataires ont cessé de payer les loyers après réception du congé.

Madame [O] [L] [E] épouse [T] et Monsieur [K] [B] [T] ne sont ni présents ni représentés.

La décision a été mise en délibéré au 26 mars 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

Force est de relever qu'une pièce communiquée tardivement peut être écartée des débats en application des articles 15 et 135 du code de procédure civile qui disposent que les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les éléments de preuve qu'elles produisent afin que chacune soit à même d'organiser sa défense et que le juge peut écarter du débat les pièces qui n'ont pas été communiquées en temps utile. Il convient d'en conclure que les conclusions déposées à l'audience, sans avoir été préalablement notifiées aux défendeurs, seront rejetées.

La qualification du bail n'a, en revanche, pas fait l'objet de contestation.
Sur le congé pour reprise délivré par le bailleur

En application des dispositions de l'article 15-I de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 applicable aux baux vacants, le bailleur peut délivrer un congé pour motif légitime et sérieux, notamment l'inexécution par le locataire de l'une des obligations lui incombant, six mois au moins avant l'échéance du bail. A l'expiration du délai de préavis, le locataire est déchu de tout titre d'occupation.

S'agissant d'un bail meublé, c'est l'article 25-8 de ladite loi qui prévoit que le bailleur qui ne souhaite pas renouveler le contrat doit informer le locataire avec un préavis de trois mois et motiver son refus de renouvellement du bail soit par sa décision de reprendre ou de vendre le logement, soit par un motif légitime et sérieux, notamment l'inexécution par le locataire de l'une des obligations lui incombant.

Le délai applicable au congé court à compter du jour, de la remise en main propre au locataire, de la réception de la lettre recommandée ou de la signification de l'acte d'huissier de justice. La date de réception d'une notification par lettre recommandée avec demande d'avis de réception est celle qui est apposée par l'administration des postes lors de la remise de la lettre à son destinataire. Le congé doit être délivré par le bailleur à la personne du locataire. La date de notification du congé, celle de la signature par le locataire de l'avis de réception de la lettre recommandée, fait courir le délai de préavis imposé au bailleur, quel que soit le motif du congé. Dans le cas contraire, le congé délivré par le locataire sera dans ce cas dépourvu de tout effet. De plus, considérant que lorsque les époux sont locataires, en raison de la cotitularité du bail édicté par l'article 1751 du code civil, le congé doit être délivré à chacun d'entre eux.

A peine de nullité, le congé donné par le bailleur doit indiquer le motif allégué et les nom et adresse du bénéficiaire de la reprise ainsi que la nature du lien existant entre le bailleur et le bénéficiaire de la reprise qui ne peut être que le bailleur, son conjoint, le partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité enregistré à la date du congé, son concubin notoire depuis au moins un an à la date du congé, ses ascendants, ses descendants ou ceux de son conjoint, de son partenaire ou de son concubin notoire. L'article 114 du code de procédure civile précise qu'aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public. La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.

Deux lettres transmises par LRAR sont versées, l'une des deux comportant un ajout du nom de Madame [E], sans qu'il soit possible d'identifier quelles sont les lettres réceptionnées et à quelle date, les documents de la poste versés étant effacés, la date de réception ainsi que le nom porté par les deux courriers étant illisibles.

En revanche, une première lettre a été signée le 10 août 2022, par la bailleresse et les deux locataires, donnée en mains propres, demandant une restitution de l'appartement, pour le 1er avril 2023. Il est rappelé que le congé délivré même prématurément et même pour une date également prématurée n'est pas nul. Les effets en sont, toutefois, reportés à la date effective du congé, soit, en l'espèce, le 17 août 2023.

Le congé est, ainsi, régulier dans la forme.

Quant au motif du congé, il sera rappelé que depuis la loi ALLUR lorsqu'il donne congé à son locataire pour reprendre le logement, le bailleur justifie du caractère réel et sérieux de sa décision de reprise. Cette loi a ainsi opéré un renversement de la charge de la preuve puisqu'il appartient désormais au bailleur d'apporter des justifications au soutien de son congé pour reprise alors qu'auparavant il appartenait au locataire de rapporter la preuve d'une fraude manifeste. En cas de contestation, le juge peut, même d'office, vérifier la réalité du motif du congé et le respect des obligations prévues audit article. Il peut notamment déclarer non valide le congé si la non-reconduction du bail n'apparaît pas justifié par des éléments sérieux et légitimes.

Aucune contestation n'est soulevée, en l'absence des défendeurs, le courrier remis étant suffisamment explicite sur le bien et la personne souhaitant le récupérer.

Le congé est ainsi régulier au fond, et le bail s'est donc trouvé résilié par l'effet du congé le 17 août 2023.

Madame [O] [L] [E] épouse [T] et Monsieur [K] [B] [T] se trouvent ainsi occupants sans droit ni titre du local litigieux depuis le 18 août 2023 et il convient d'ordonner leur expulsion ainsi que l'expulsion de tous occupants de leur chef dans les conditions prévues par l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution et selon les modalités fixées au dispositif du présent jugement.

Il sera rappelé que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution dont l'application relève, en cas de difficulté -laquelle n'est à ce stade que purement hypothétique-, de la compétence du juge de l'exécution et non de la présente juridiction.

Sur la demande au titre de l'indemnité d'occupation

Le maintien dans les lieux postérieurement à la date d'expiration du bail constitue une faute civile ouvrant droit à réparation en ce qu'elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l'occupation indue de son bien l'a privé de sa jouissance. Au-delà de cet aspect indemnitaire, l'indemnité d'occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des locaux.

En l'espèce, Madame [O] [L] [E] épouse [T] et Monsieur [K] [B] [T] seront ainsi condamnés, in solidum, au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation pour la période courant à compter du 18 août 2023 à la date de la libération effective et définitive des lieux, égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus si le bail s'était poursuivi, en ce qu'aucun élément ne justifie de dépasser la valeur locative du bien loué.

Il est rappelé également que la clause du bail majorant l'indemnité s'analyse en une clause pénale, laquelle peut être réduite d'office par le juge si elle est manifestement excessive en application de l'article 1231-5 du code civil et est au surplus illicite au regard de l'article 4 i) de la loi du 6 juillet 1989.

Sur les dommages et intérêts

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

L'article 1231-6 du code civil dispose que le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts, distincts des intérêts moratoires de la créance.

Par ailleurs, en application de l'article 1240 du même code, il est de jurisprudence constante que la faute, même non grossière ou dolosive suffit, lorsqu'un préjudice en résulte, à justifier une condamnation à des dommages-intérêts pour abus du droit d'agir en justice ou de résistance abusive à une action judiciaire.

La demande de dommages et intérêts, qu'elle soit présentée sur un fondement contractuel (rapports bailleur-locataire) ou délictuel (rapports bailleur-tiers occupant des lieux) nécessite que soit rapportée la preuve d'une faute mais également d'un préjudice, en lien avec la faute.

Or en l'espèce, la bailleresse ne justifie pas de cette demande. Elle en sera déboutée.

Sur les demandes accessoires

Les défendeurs, qui succombent, supporteront in solidum les dépens, en application de l'article 696 du code de procédure civile, y compris le coût de l'assignation mais à l'exclusion des lettres avec accusé de réception ne fondant pas le congé.

Il sera fait droit à la demande au visa de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de 800 euros.

La décision est assortie de l'exécution provisoire, en application de l'article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection statuant publiquement, après débats en audience publique, par jugement mis à disposition au greffe en premier ressort et réputé contradictoire,

REJETTE les écritures déposées à l'audience.

CONSTATE que les conditions de délivrance à Madame [O] [L] [E] épouse [T] et Monsieur [K] [B] [T] d'un congé pour reprise concernant l'appartement à usage d'habitation situé au [Adresse 1] sont réunies et que le bail a ainsi expiré le 17 août 2023 ;

ORDONNE en conséquence à Madame [O] [L] [E] épouse [T] et Monsieur [K] [B] [T] de libérer les lieux et de restituer les clés dans le délai de quinze jours à compter de la signification du présent jugement

DIT qu'à défaut pour Madame [O] [L] [E] épouse [T] et Monsieur [K] [B] [T] d'avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, Madame [W] [F] épouse [I] pourra, deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux, faire procéder à leur expulsion ainsi celle de tous occupants de leur chef, y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique ;

DIT n'y avoir lieu à ordonner l'enlèvement, le transport et la séquestration des meubles éventuellement laissés sur place et rappelle que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

CONDAMNE in solidum Madame [O] [L] [E] épouse [T] et Monsieur [K] [B] [T] à verser à Madame [W] [F] épouse [I] une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant équivalent à celui du loyer et des charges, tel qu'il aurait été si le contrat s'était poursuivi, soit 1056, 93 euros charges comprises, ce jour, à compter de la date du 18 août 2023 et jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux, caractérisée par la restitution des clés ;

DEBOUTE Madame [W] [F] épouse [I] de sa demande de condamnation au titre de la clause pénale et de sa demande au titre des dommages et intérêts.

CONDAMNE in solidum Madame [O] [L] [E] épouse [T] et Monsieur [K] [B] [T] à verser la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE in solidum Madame [O] [L] [E] épouse [T] et Monsieur [K] [B] [T] aux dépens, y compris le coût de l'assignation ;

RAPPELLE que la décision est assortie de l'exécution provisoire.

Le greffier Le juge des contentieux de la protection


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp fond
Numéro d'arrêt : 23/09839
Date de la décision : 26/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-26;23.09839 ?
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