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26/03/2024 | FRANCE | N°23/09825

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp fond, 26 mars 2024, 23/09825


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Maître Jean FOIRIEN


Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Valérie GONDARD

Pôle civil de proximité


PCP JCP fond

N° RG 23/09825 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3SPQ

N° MINUTE :







JUGEMENT
rendu le mardi 26 mars 2024


DEMANDEUR
Monsieur [Z] [U]
demeurant [Adresse 1]
représenté par Maître Jean FOIRIEN de l’AARPI LGJF GABIZON-FOIRIEN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #U0008



DÉFENDEUR
Monsieur [O] [R]
demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Valérie GONDARD (SELARL VALERIE GONDARD), avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P125


COMPOSITION DU TRIBUNAL
...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Maître Jean FOIRIEN

Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Valérie GONDARD

Pôle civil de proximité

PCP JCP fond

N° RG 23/09825 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3SPQ

N° MINUTE :

JUGEMENT
rendu le mardi 26 mars 2024

DEMANDEUR
Monsieur [Z] [U]
demeurant [Adresse 1]
représenté par Maître Jean FOIRIEN de l’AARPI LGJF GABIZON-FOIRIEN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #U0008

DÉFENDEUR
Monsieur [O] [R]
demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Valérie GONDARD (SELARL VALERIE GONDARD), avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P125

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Anne TOULEMONT, Juge des contentieux de la protection
assistée de Coraline LEMARQUIS, Greffière,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 17 janvier 2024

JUGEMENT
contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 26 mars 2024 par Anne TOULEMONT, juge des contentieux de la protection, assistée de Coraline LEMARQUIS, Greffière

Décision du 26 mars 2024
PCP JCP fond - N° RG 23/09825 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3SPQ

Suivant acte sous seing privé en date du 17 mai 2014, Monsieur [O] [R] a loué un appartement meublé situé [Adresse 2], avec effet le 1er juin 2014. Le bail a été renouvelé tacitement chaque année.

Par acte d'huissier en date du 16 février 2023, Monsieur [Z] [U] a fait délivrer congé pour reprise du logement pour y loger sa petite fille, [D] [U], à effet du 31 mai 2023.

Par actes d'huissier en date du 8 septembre 2023, Monsieur [Z] [U] a fait assigner Monsieur [O] [R] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris aux fins de, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
-validation du congé pour reprise,
-expulsion de Monsieur [O] [R] et de tous occupants de son chef avec au besoin l'assistance de la force publique et d'un serrurier, et séquestration des biens meubles trouvés sur place,
-suppression du délai visé à l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution, voir le réduire
-condamnation de Monsieur [O] [R] à lui verser une indemnité d'occupation correspondant au montant du loyer mensuel augmenté des charges soit 1434 euros, jusqu'à la libération des lieux,
-condamnation de Monsieur [O] [R] aux dépens et à la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A l'audience du 17 janvier 2024, Monsieur [Z] [U], représenté par son conseil, a sollicité le bénéfice des termes de son assignation, soutenant que le congé délivré n'est pas entaché de nullité contrairement aux affirmations du défendeur. Il se prévaut des dispositions de l'article 1421 du code civil et en déduit qu'il pouvait délivrer le congé seul, le bien occupé étant un bien commun aux deux époux, mariés sous le régime de la communauté des biens, chaque époux pouvant effectuer seul les actes de gestion. Il ajoute qu'il n'y a pas d'objection à loger sa petite fille, même mineure, et qu'il importe peu qu'il dispose d'autres biens dans le même immeuble. Il rappelle que la régularité du congé s'apprécie au jour de sa délivrance, sa petite fille devant suivre un cursus à [Localité 4].

Monsieur [O] [R], représenté à l'audience, explique que le congé aurait dû être signé par Monsieur et Madame [U] pour être valable, ce qui n'est pas le cas, seul Monsieur [U] a signé le congé. Il en déduit que le congé est nul. Il énonce également que la petite fille de Monsieur [U] était âgée de 16 ans à la date de délivrance du congé, et qu'il ne verse aucun élément permettant de démontrer le projet d'étude parisienne, ajoutant que le propriétaire dispose d'autres appartements. Il sollicite le rejet des demandes de Monsieur [U] et réclame une somme de 3000 euros au titre des dommages et intérêts et une somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles, outre les dépens.

La décision a été mise en délibéré au 26 mars 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le congé délivré par le bailleur et ses conséquences

En application des dispositions de l'article 15-I de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 applicable aux baux vacants, le bailleur peut délivrer un congé pour motif légitime et sérieux, notamment l'inexécution par le locataire de l'une des obligations lui incombant, six mois au moins avant l'échéance du bail. A l'expiration du délai de préavis, le locataire est déchu de tout titre d'occupation.

S'agissant d'un bail meublé, c'est l'article 25-8 de ladite loi qui prévoit que le bailleur qui ne souhaite pas renouveler le contrat doit informer le locataire avec un préavis de trois mois et motiver son refus de renouvellement du bail soit par sa décision de reprendre ou de vendre le logement, soit par un motif légitime et sérieux, notamment l'inexécution par le locataire de l'une des obligations lui incombant.

Lorsqu'il donne congé à son locataire pour reprendre le logement, le bailleur justifie du caractère réel et sérieux de sa décision de reprise. Il doit ainsi indiquer les raisons concrètes pour lesquelles il souhaite récupérer le logement loué et en cas de contestation il doit apporter les justificatifs nécessaires à en justifier.

A peine de nullité, le congé donné par le bailleur doit indiquer le motif allégué et les nom et adresse du bénéficiaire de la reprise ainsi que la nature du lien existant entre le bailleur et le bénéficiaire de la reprise qui ne peut être que le bailleur, son conjoint, le partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité enregistré à la date du congé, son concubin notoire depuis au moins un an à la date du congé, ses ascendants, ses descendants ou ceux de son conjoint, de son partenaire ou de son concubin notoire.

L'article 114 du code de procédure civile précise qu'aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public. La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.

Le motif légitime d'un congé doit s'apprécier à la date où il est donné. Le contrôle du sérieux du motif ne saurait être un contrôle d'opportunité de la décision de reprise, le bailleur étant libre de reprendre son bien s'il compte réellement s'y installer sans que l'on puisse lui opposer l'existence d'un autre logement disponible.

Le défendeur soulève la nullité du congé car Monsieur [U] a envoyé le congé seul, ce qui n'est pas contesté, alors que les deux époux sont usufruitiers du bien. Il est néanmoins rappelé que, d'une part, l'action en nullité d'un acte passé par un époux relativement à un bien commun n'est ouverte qu'au conjoint de cet époux, tel que cela résulte des dispositions de l'article 1427 du code civil, que, d'autre part, l'un des deux époux peut délivrer un congé au visa de l'article 1421 du code civil, et qu'enfin, le défendeur ne démontre aucun grief tiré de cet argument;

En l'espèce, le bail consenti à Monsieur [O] [R] a été tacitement reconduit pour expirer le 31 mai 2023.

Le congé du bailleur du 16 février 2023 a donc été régulièrement délivré plus de trois mois avant l'échéance précitée. Il sera relevé en outre que le congé rappelle le motif du congé, délivré pour la reprise du bien, et mentionne l'identité du repreneur, à savoir la petite fille du propriétaire.

Dès lors, le congé est délivré dans les formes et délais légaux requis.

Est en revanche allégué un motif de fond de non validité tenant à l'absence de justification du caractère sérieux de la reprise par le bailleur au profit de sa petite fille. Il sera rappelé que depuis la loi ALLUR lorsqu'il donne congé à son locataire pour reprendre le logement, le bailleur justifie du caractère réel et sérieux de sa décision de reprise. Cette loi a ainsi opéré un renversement de la charge de la preuve puisqu'il appartient désormais au bailleur d'apporter des justifications au soutien de son congé pour reprise alors qu'auparavant il appartenait au locataire de rapporter la preuve d'une fraude manifeste. En cas de contestation, le juge peut, même d'office, vérifier la réalité du motif du congé et le respect des obligations prévues audit article. Il peut notamment déclarer non valide le congé si la non-reconduction du bail n'apparaît pas justifiée par des éléments sérieux et légitimes.

En l'espèce, force est de constater qu'effectivement le bailleur n'apporte aucun élément de nature à justifier du sérieux de la reprise du bien, aucun document n'étant fourni, justifiant le fait que sa petite fille avait l'intention de suivre des études à [Localité 4], seule, alors âgée de 16 ans, et suivant alors une scolarité en Bretagne. Il présente un contrat d'apprentissage dans la commune [Localité 3], non daté, qui n'apporte aucune information, la copie de la CNI de Madame [U] [D] n'étant pas non plus versée.

Il en résulte que le bailleur n'a pas suffisamment justifié du caractère réel et sérieux de sa décision de reprise et il sera débouté de sa demande de validation de son congé pour reprise et des demandes subséquentes en expulsion et paiement d'indemnité d'occupation.

Il sera ainsi constaté que le bail a été tacitement reconduit le 1er juin 2023.

Le défendeur ne justifie pas le préjudice moral qu'il subit, il sera débouté de la demande de dommages et intérêts qu'il réclame.

Sur les demandes accessoires

Le demandeur, qui succombe, supportera les dépens, en application de l'article 696 du code de procédure civile. Sa demande au titre des frais irrépétibles sera rejetée.

Il y a lieu d'accorder la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles à Monsieur [O] [R].

La décision est assortie de l'exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection statuant publiquement, après débats en audience publique, par jugement mis à disposition au greffe contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE que Monsieur [Z] [U] n'a pas suffisamment justifié du caractère réel et sérieux de sa décision de reprise

REJETTE en conséquence la demande de validation du congé du 16 février 2023 de Monsieur [Z] [U] et leurs demandes subséquentes lesquelles deviennent sans objet ;

CONSTATE la reconduction du bail à compter du 1er juin 2023 d'une durée d'une année ;

DEBOUTE Monsieur [O] [R] de sa demande de dommages et intérêts

CONDAMNE Monsieur [Z] [U] aux dépens ;

CONDAMNE Monsieur [Z] [U] à payer à Monsieur [O] [R] la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles

RAPPELLE que la décision est assortie de l'exécution provisoire.

Le greffier Le juge des contentieux de la protection


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp fond
Numéro d'arrêt : 23/09825
Date de la décision : 26/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-26;23.09825 ?
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