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25/03/2024 | FRANCE | N°23/10157

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr fond, 25 mars 2024, 23/10157


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Monsieur [A] [B],


Copie exécutoire délivrée
le :

à : Maître Fatiha BOUGHLAM

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR fond

N° RG 23/10157 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3UK6

N° MINUTE : 4







JUGEMENT
rendu le 25 mars 2024


DEMANDEUR

Association [Adresse 4],
[Adresse 1]

représenté par Maître Fatiha BOUGHLAM de la SELEURL AFHB Avocats, avocats au barreau de PARIS,

DÉFENDE

UR

Monsieur [A] [B],
[Adresse 5]
[Adresse 2]

comparant en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Yasmine WALDMANN, Juge, juge des contentieux de la protection
assistée de Aurélia DENIS, Gref...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Monsieur [A] [B],

Copie exécutoire délivrée
le :

à : Maître Fatiha BOUGHLAM

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR fond

N° RG 23/10157 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3UK6

N° MINUTE : 4

JUGEMENT
rendu le 25 mars 2024

DEMANDEUR

Association [Adresse 4],
[Adresse 1]

représenté par Maître Fatiha BOUGHLAM de la SELEURL AFHB Avocats, avocats au barreau de PARIS,

DÉFENDEUR

Monsieur [A] [B],
[Adresse 5]
[Adresse 2]

comparant en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Yasmine WALDMANN, Juge, juge des contentieux de la protection
assistée de Aurélia DENIS, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 16 janvier 2024

JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort prononcé par mise à disposition le 25 mars 2024 par Yasmine WALDMANN, juge des contentieux de la protection assistée de Aurélia DENIS, Greffier

Décision du 25 mars 2024
PCP JCP ACR fond - N° RG 23/10157 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3UK6

EXPOSE DU LITIGE

L’ASSOCIATION CASP a donné en location à [A] [B], le logement 405 sis [Adresse 3], 4ème étage, à compter du 21 octobre 2014 par contrat d’occupation en maison relais du même jour.

La redevance initiale mensuelle était de 442 euros, charges et prestations annexes incluses.

Suite à plusieurs plaintes des autres occupants et des intervenants sociaux, une lettre de résiliation du titre d’occupation était signifiée à [A] [B] le 07 novembre 2023.

Par acte de commissaire de justice délivré le 20 décembre 2023 à étude, l’ASSOCIATION CASP a fait assigner [A] [B] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris statuant, aux fins de voir :
déclarer le CASP recevable et bien fondé ;constater l’acquisition de la clause résolutoire et que [A] [B] est occupant sans droit ni titre du logement depuis le 07 décembre 2023 ;à titre subsidiaire, prononcer la résiliation de la convention d’hébergement de [A] [B] pour manquements à la convention d’occupation et au règlement intérieur ;En conséquence :
prononcer l’expulsion sans délai de [A] [B], et de toute personne présente de son chef, et au besoin avec l’assistance de la force publique ; supprimer le délai de deux mois pour l’exécution de l’expulsion ;dire que cette libération devra intervenir sous astreinte journalière de 50 euros à compter du délai prescrit et se réserver la liquidation de l’astreinte ;ordonner la séquestration des meubles et objets mobiliers se trouvant dans les lieux dans tout garde meuble de son choix aux frais, risques et péril de [A] [B] ;le condamner à lui payer, pour la période postérieure à la résiliation et jusqu'au départ effectif des lieux, une indemnité mensuelle d'occupation égale à la redevance mensuelle, soit de 500 euros ;le condamner au paiement d'une somme de 1000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont coût de l’assignation et des états et frais d’exécution.
A l’audience du 16 janvier 2024, l’ASSOCIATION CASP, représentée par son conseil, soutient ses demandes telles qu'exposées dans l'assignation.

[A] [B], comparant en personne, sollicite le rejet des demandes.
Il ne conteste pas les faits invoqués par sa bailleresse, indiquant avoir des relations conflictuelles avec ses voisins mais ne pas être à l’origine de l’ensemble des violences. Il dit avoir jeté des objets deux fois en raison des insultes et menaces qu’il recevait. Il dit avoir menacé un voisin de le tuer avec une « kalaschnikov » car il était énervé. Il explique avoir été condamné à une peine d’un an d’emprisonnement avec sursis en raison de ces faits. Il explique être suivi psychiatriquement mais ne pas avoir de suivi social. Il affirme être mis à l’écart par sa structure d’accueil, qui lui refuse l’accès au sport et aux activités, et ne pas comprendre pourquoi.

La décision était mise en délibéré au 25 mars 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire sur le statut juridique applicable au titre d'occupation litigieux, il convient de rappeler que le logement occupé par [A] [B] est soumis à la législation des logements-foyer résultant des articles L.633-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation.

Sur la demande principale d'acquisition de la clause résolutoire et l'absence de renouvellement de la convention d’occupation

Aux termes de l'article 1103 du code civil, le contrat est la loi des parties.

L'article 1728 du code civil dispose que le preneur est tenu de payer le prix du bail aux termes convenus.

Aux termes de l'article 1224 du code civil, la résolution d'un contrat résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice.

L'article 1225 précise qu'en présence d'une clause résolutoire, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution. La mise en demeure doit viser expressément la clause résolutoire pour produire effet.

En application de l'article L.633-2 du code de la construction et de l'habitation, le contrat est conclu pour une durée d'un mois et tacitement reconduit à la seule volonté de la personne logée. La résiliation du contrat par le gestionnaire ou le propriétaire ne peut intervenir que dans les cas suivants :
- inexécution par la personne logée d'une obligation lui incombant au titre de son contrat ou d'un manquement grave ou répété au règlement intérieur ;
- cessation totale d'activité de l'établissement ;
- cas où la personne logée cesse de remplir les conditions d'admission dans l'établissement considéré.

Aux termes de l'article 651 du code de procédure civile, la notification peut toujours être faite par voie de signification alors même que la loi l'aurait prévue sous une autre forme.

En l’espèce, le contrat d’occupation stipule qu'il est conclu à compter du 21 octobre 2014 pour une durée d'un mois renouvelable tacitement. L’ASSOCIATION CASP a fait délivrer à [A] [B] le 07 novembre 2023, une lettre de résiliation de la convention en vertu de la clause résolutoire pour non-respect réitéré du règlement intérieur, visant les faits de violences et menaces lui étant reprochés et les articles violés.

Pour corroborer ses dires, l’ASSOCIATION CASP produit cinq mains courantes et dépôts de plainte d’occupants au sein de l’association au cours de l’année 2023, déclarant avoir été victimes de menaces verbales de la part de [A] [B] et de menaces de violences alors qu’il tenait un couteau. Ces occupants évoquent des jets de projectiles et de couteaux suisses sur eux et également sur les riverains ou les voitures dans la rue. Deux salariés de l’ASSOCIATION CASP, [E] [C] et [D] [F] ont également déposé plainte pour ces mêmes faits et ont invoqué leur droit de retrait, ne se sentant pas en sécurité en présence de [A] [B].
Une plainte a également été déposé pour menaces de violence avec arme, [A] [B] menaçant un occupant de le tuer par balle.
Selon l’ensemble des déclarations, ces faits se passent de jour comme de nuit.
Près de quatre rendez-vous ont été proposé à [A] [B] avec la direction de l’ASSOCIATION CASP entre août et octobre 2023 mais il ne s’est pas présenté.

A l’audience, [A] [B] ne conteste pas ces faits mais les explique par des menaces et insultes qu’il aurait lui-même subi. Il minimise la gravité de son comportement à l’égard des autres occupants et du personnel malgré sa condamnation pénale à une peine d’emprisonnement avec sursis pour ces faits.

Or, la convention d’occupation et le règlement intérieur de l’ASSOCIATION CASP, maison relais pour des personnes en situation de grande précarité sociale et liée au logement, prévoit la résiliation du bail du fait de la clause résolutoire en cas de violences et de non-respect du règlement intérieur imposant une occupation paisible.

[A] [B] a signé le titre d’occupation et le règlement intérieur, et ne pouvait ignorer que son comportement menaçant et violent était en violation de ces textes. Par ailleurs, un tel comportement ne peut que mettre en insécurité les travailleurs sociaux et les autres occupants des lieux, particulièrement fragiles et en reconstruction sociale et psychologique.

Ainsi, l’ASSOCIATION CASP était bien fondée en sa délivrance de la lettre de résiliation le 07 novembre 2023.

La résiliation de plein droit du contrat de séjour sera donc constatée à la date du 07 décembre 2023 à minuit, soit au 08 décembre 2023.

En conséquence, l’expulsion de [A] [B] et de tous les occupants de son chef sera ordonnée.

Il n’y a pas lieu d’ordonner une astreinte, la fixation d’une indemnité d’occupation venant répondre à l’objectif poursuivi.

Il sera rappelé que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1, L431-2 et R431-1 à R431-7 du code des procédures civiles d'exécution dont l’application relève, en cas de difficulté -laquelle n'est à ce stade que purement hypothétique-, de la compétence du juge de l’exécution et non de la présente juridiction.

Sur la demande de suppression du délai de deux mois prévu par l’article L412-1 du code des procédures civiles d’exécution et du bénéfice de la trêve hivernale de l’article L412-6 du même code

L'article L412-1 du code des procédures civiles d’exécution, tel que modifié par la loi du 27 juillet 2023, dispose que si l'expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu'à l'expiration d'un délai de deux mois qui suit le commandement, sans préjudice des dispositions des articles L412-3 à L412-7 du même code. Toutefois, le juge peut, notamment lorsque la procédure de relogement effectuée en application de l'article L442-4-1 du code de la construction et de l'habitation n'a pas été suivie d'effet du fait du locataire, réduire ou supprimer ce délai. Le délai prévu au premier alinéa du présent article ne s'applique pas lorsque le juge qui ordonne l'expulsion constate que les personnes dont l'expulsion a été ordonnée sont entrées dans les locaux par voie de fait.

L’article L412-6 du code des procédures civiles d’exécution dispose que, nonobstant toute décision d'expulsion passée en force de chose jugée et malgré l'expiration des délais accordés en vertu de l'article L. 412-3 du même code, il est sursis à toute mesure d'expulsion non exécutée à la date du 1er novembre de chaque année jusqu'au 31 mars de l'année suivante, à moins que le relogement des intéressés soit assuré dans des conditions suffisantes respectant l'unité et les besoins de la famille.

Par dérogation au premier alinéa du présent article, ce sursis ne s'applique pas lorsque la mesure d'expulsion a été prononcée en raison d'une introduction sans droit ni titre dans le domicile d'autrui à l'aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte.

En l’espèce, [A] [B] n’est pas entré dans les lieux par voie de fait mais en vertu d’une convention d’occupation régulièrement signée. Les conditions légales prévues pour la suppression du délai de deux mois n’étant pas établies, la demande sera rejetée.

Sur l'indemnité d'occupation

Le maintien dans les lieux postérieurement à la date de résiliation du contrat d’occupation constitue une faute civile ouvrant droit à réparation en ce qu'il cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l'occupation indue de son bien l'a privé de sa jouissance. Au delà de cet aspect indemnitaire, l'indemnité d'occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des locaux.

[A] [B] sera ainsi condamné au paiement d'une indemnité mensuelle d’occupation jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux. Le montant de cette indemnité mensuelle d'occupation sera fixé à la somme correspondant à la dernière redevance outre ses accessoires, soit la somme de 442 euros selon les pièces produites (titre d’occupation).

Sur les demandes accessoires

[A] [B] sera condamné au paiement des entiers dépens de la procédure, dont coût de l’assignation.

[A] [B] sera condamné à verser à l’ASSOCIATION CASP la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L'exécution provisoire est de droit.

PAR CES MOTIFS,

La juge des contentieux de la protection, statuant après débats en audience publique par jugement contradictoire mis à disposition au greffe, et en premier ressort,

DECLARE recevable l’action de l’ASSOCIATION CASP ;

CONSTATE que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire figurant au contrat de séjour conclu le 21 octobre 2014 entre l’ASSOCIATION CASP et [A] [B] concernant le logement 405 sis [Adresse 3], 4ème étage, sont réunies à la date du 08 décembre 2023 ;

ORDONNE en conséquence à [A] [B] de libérer les lieux deux jours à compter de la signification de la présente décision avec établissement d'un état des lieux de sortie ;

DIT qu'à défaut pour [A] [B] d’avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans le délai précité, l’ASSOCIATION CASP pourra, deux mois après la signification d’un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu’à celle de tous occupants de son chef, y compris le cas échéant avec le concours d’un serrurier et de la force publique ;

REJETTE la demande d’astreinte ;

REJETTE la demande de suppression du délai deux mois pour l’exécution de l’expulsion ;

AUTORISE l’ASSOCIATION CASP à faire procéder à la séquestration des meubles se trouvant dans les lieux dans tout garde meuble de son choix aux frais, risques et péril de [A] [B] à défaut de local désigné ;

RAPPELLE que le sort des meubles est régi conformément aux dispositions des articles L.433-1 et L.433-2, R431-1 à R431-7 du code des procédures civiles d'exécution ;

CONDAMNE [A] [B] à payer à l’ASSOCIATION CASP une indemnité mensuelle d’occupation, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à la date de la libération effective et définitive des lieux, en compris la remise des clefs, de 442 euros ;

CONDAMNE [A] [B] à payer à l’ASSOCIATION CASP la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE [A] [B] au paiement des dépens, en ce compris le coût de l’assignation ;

REJETTE le surplus des demandes ;

RAPPELLE que l'exécution provisoire est de droit.

La greffière La juge


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr fond
Numéro d'arrêt : 23/10157
Date de la décision : 25/03/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "conditionnelle" ordonnée au fond avec suspension des effets de la clause résolutoire

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-25;23.10157 ?
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