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22/03/2024 | FRANCE | N°23/07964

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr fond, 22 mars 2024, 23/07964


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Monsieur [U] [S]


Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître Karim BOUANANE

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR fond

N° RG 23/07964 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3AOE

N° MINUTE :







JUGEMENT
rendu le 22 mars 2024


DEMANDERESSE
S.A.S. HENEO,
dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Maître Karim BOUANANE de l’ASSOCIATION LEGITIA, avocats au barreau de PARIS, vestiaire :

#E1971

DÉFENDEUR
Monsieur [U] [S],
demeurant [Adresse 1]
comparant en personne


COMPOSITION DU TRIBUNAL
Caroline THAUNAT, Vice-présidente, juge des contentieux de la prot...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Monsieur [U] [S]

Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître Karim BOUANANE

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR fond

N° RG 23/07964 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3AOE

N° MINUTE :

JUGEMENT
rendu le 22 mars 2024

DEMANDERESSE
S.A.S. HENEO,
dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Maître Karim BOUANANE de l’ASSOCIATION LEGITIA, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #E1971

DÉFENDEUR
Monsieur [U] [S],
demeurant [Adresse 1]
comparant en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Caroline THAUNAT, Vice-présidente, juge des contentieux de la protection, assistée de Lisa BOUCHEMMA, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 15 décembre 2023

JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort prononcé par mise à disposition le 22 mars 2024 par Caroline THAUNAT, juge des contentieux de la protection assistée de Lisa BOUCHEMMA, Greffier

Décision du 22 mars 2024
PCP JCP ACR fond - N° RG 23/07964 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3AOE

EXPOSE DU LITIGE

Par convention d’occupation précaire sous seing privé en date du 12 février 2021, la SAS HENEO a donné en location un appartement en résidence sociale à M [U] [S] situé [Adresse 1], pour une redevance mensuelle de 624, 63 euros, incluant les prestations obligatoires.

Des redevances étant demeurées impayées, la SAS HENEO a fait signifier par acte d'huissier un commandement de payer la somme de 2196, 44 euros, en principal, correspondant à l’arriéré locatif, terme de juin 2023 inclus et visant la clause résolutoire contractuelle, le 5 juillet 2023

Par acte d'huissier en date du 10 octobre 2023, la SAS HENEO a fait assigner M [U] [S] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
constater le jeu de la clause résolutoire insérée au contrat de résidence liant les parties, et à titre subsidiaire en prononcer la résiliation judiciaire,ordonner l'expulsion du preneur et de tout occupant de son chef avec le concours de la force publique si besoin est,ordonner la séquestration des meubles en tel lieu qu'il lui plaira, aux frais et aux risques du défendeur,condamner M [U] [S] à lui payer les redevances impayées, soit la somme de 2196, 44 euros, ainsi qu'une indemnité d'occupation jusqu'à libération effective des lieux d'un montant mensuel égal au montant de la redevance si le contrat de résidence s'était poursuivi,condamne le défendeur à lui payer la somme de 480 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens.
Au soutien de ses prétentions, la SAS HENEO expose que plusieurs échéances de loyers sont demeurées impayées malgré la délivrance d’un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au contrat de contrat de résidence délivré le 5 juillet 2023.

A l'audience du 15 décembre 2023, la SAS HENEO, représenté par son conseil, a sollicité le bénéfice de son acte introductif d'instance, et a actualisé sa créance à la somme de 1346, 82 euros, selon décompte en date du 28 novembre 2021.

M [U] [S] comparaît en personne et reconnaît le montant de la dette locative, mais demande à pouvoir se maintenir dans les lieux en reprenant le paiement du loyer courant, outre la somme de 200 euros par mois en règlement de l'arriéré.

La décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 22 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire sur le statut juridique applicable au titre d'occupation litigieux, il convient de rappeler que le logement occupé par M [U] [S] est soumis à la législation des logements-foyers résultant des articles L.633-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation. Ainsi, il est soumis à une réglementation spécifique qui exclut le droit au maintien dans les lieux de l’occupant et il échappe aux dispositions protectrices de l’article L.632-1 du code de la construction et de l’habitation en vertu de l’article L.632-3 du même code ainsi qu'au titre Ier bis précité de la loi du 6 juillet 1989 en vertu de l’article 25-3 de la loi du 6 juillet 1989.

Sur l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation du contrat de résidence

Aux termes de l'article 1224 du code civil, la résolution d'un contrat résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice. L'article 1229 du même code précise que lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l'exécution réciproque du contrat, il n'y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n'ayant pas reçu sa contrepartie et que, dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation. L'article 1225 précise qu'en présence d'une clause résolutoire, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution. La mise en demeure doit viser expressément la clause résolutoire pour produire effet.

En matière de logement Foyer plus précisément, en application de l'article L.633-2 du code de la construction et de l'habitation, le contrat est conclu pour une durée d'un mois et tacitement reconduit à la seule volonté de la personne logée. La résiliation du contrat par le gestionnaire ou le propriétaire ne peut intervenir que dans les cas suivants :
- inexécution par la personne logée d'une obligation lui incombant au titre de son contrat ou d'un manquement grave ou répété au règlement intérieur ;
- cessation totale d'activité de l'établissement ;
- cas où la personne logée cesse de remplir les conditions d'admission dans l'établissement considéré.

L'article R.633-3 du même code précise que le gestionnaire ou le propriétaire peut résilier le contrat dans l'un des cas prévus à l'article L. 633-2 sous réserve d'un délai de préavis :
a) d'un mois en cas d'inexécution par la ou les personnes titulaires du contrat d'une obligation leur incombant au titre de ce contrat ou en cas de manquement grave ou répété au règlement intérieur. La résiliation peut être décidée pour impayé, lorsque trois termes mensuels consécutifs, correspondant au montant total à acquitter pour le logement, les charges et les prestations obligatoires et facultatives, sont impayés ou bien, en cas de paiement partiel, lorsqu'une somme au moins égale à deux fois le montant mensuel à acquitter pour le logement et les charges reste due au gestionnaire.
b) de trois mois lorsque la personne logée cesse de remplir les conditions d'admission dans l'établissement telles qu'elles sont précisées dans le contrat ou lorsque l'établissement cesse son activité.

Cet article précise les conditions de forme de la résiliation en indiquant que la résiliation du contrat est signifiée par huissier de justice ou notifiée par courrier écrit remis contre décharge ou par lettre recommandée avec avis de réception. Il est jugé au visa de ce texte que la mise en œuvre de la clause résolutoire du contrat de résidence d'un logement-foyer est subordonnée à la remise effective de la lettre de mise en demeure à son destinataire (Ccass Civ 3ème 1 décembre 2016, n° 15-27.795).

En l'espèce, le contrat de résidence conclu le 12 février 2021 contient une clause résolutoire (article 7) et un commandement de payer visant cette clause a été signifié le 5 juillet 2023, pour la somme en principal de 2196, 44 euros. Ce commandement, régulièrement délivré à étude, correspond bien à une dette justifiée à hauteur du montant des loyers échus et impayés (voir ci-après au titre de la demande en paiement) et est ainsi valable.

Il ressort du décompte produit que la somme visée au commandement correspondait bien à un montant équivalent à au moins trois termes consécutifs de redevances et que M [U] [S] n'a pas réglé l'intégralité de la dette dans le délai d'un mois, de sorte qu’il y a lieu de constater que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire contenue dans le contrat de résidence étaient réunies à la date du 5 août 2023.

M [U] [S] étant sans droit ni titre depuis 6 août 2023 il convient d'ordonner son expulsion ainsi que l'expulsion de tous occupants de son chef, selon les modalités fixées au dispositif de la présente décision.

Il sera rappelé enfin que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution dont l’application relève, en cas de difficulté -laquelle n'est à ce stade que purement hypothétique-, de la compétence du juge de l’exécution et non de la présente juridiction.

Sur la demande en paiement au titre de l'arriéré locatif et de l'indemnité d'occupation

M [U] [S] est redevable des loyers impayés jusqu'à la date de résiliation du contrat de résidence en application des articles 1103 et 1217 du code civil. Par ailleurs, le maintien dans les lieux postérieurement à la date d’expiration du contrat de résidence constitue une faute civile ouvrant droit à réparation en ce qu'elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l'occupation indue de son bien l'a privé de sa jouissance. Au delà de cet aspect indemnitaire, l'indemnité d'occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des locaux.

En l'espèce, la SAS HENEO produit un décompte démontrant que M [U] [S] reste lui devoir la somme de 1346, 82 euros à la date du 28 novembre 2023, cette somme correspondant à l'arriéré des loyers impayés et aux indemnités d'occupation échues à cette date.

Pour la somme au principal, M [U] [S] n’apporte aucun élément de nature à contester le principe ni le montant de la dette, qu’il reconnaît d’ailleurs à l’audience étant précisé qu’il a effectué deux versements de 200 euros qui n’apparaissent pas au décompte versé à l’audience mais qui viendront, le cas échéant en déduction de la dette. Il sera donc condamné à titre de provision au paiement de la somme de1346, 82 euros, avec les intérêts au taux légal à compter de la délivrance du commandement de payer.

M [U] [S] sera aussi condamné au paiement d'une indemnité mensuelle d’occupation provisionnelle pour la période courant du 29 novembre 2023 à la date de la libération effective et définitive des lieux, égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus si le contrat de résidence s'était poursuivi.

Sur les délais de paiement au titre de l'arriéré locatif

L'article 2 de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989 excluant l'application des dispositions de cette loi aux logements-foyers, le mécanisme de suspension des effets de la clause résolutoire prévue à l'article 24 de cette loi n°89-462 du 06 juillet 1989 n'est donc pas applicable au cas d'espèce.

Seuls peuvent donc être envisagés des délais de paiement, maximum de 24 mois, sur le fondement de l'article 1343–5 du code civil, lesquels sont non suspensifs de la clause résolutoire.

En l'espèce, le décompte locatif produit aux débats démontre que M [U] [S] a repris le paiement des loyers. Par ailleurs, il indique avoir repris un emploi et propose le versement de 200 euros par mois.

Compte tenu de ces éléments et des propositions de règlements formulées à l’audience, M [U] [S] sera autorisé à se libérer du montant de sa dette selon les modalités qui seront rappelées au dispositif.

Il convient néanmoins de prévoir que tout défaut de paiement de mensualité, justifiera l'exigibilité immédiate de la somme due.

Sur les demandes accessoires

M [U] [S], partie perdante, supportera la charge des dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile, qui comprendront notamment le coût du commandement de payer et de l’assignation.

L’équité justifie de ne pas faire droit à la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'exécution provisoire, compatible avec la nature de l'affaire et apparaissant nécessaire compte tenu de la résiliation du contrat de résidence, sera constatée en application de l'article 515 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection, statuant publiquement, après débats en audience publique, par jugement mis à disposition au greffe contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire figurant au contrat de résidence conclu le 12 février 2021 entre la SAS HENEO et M [U] [S] concernant l’appartement situé au [Adresse 1] sont réunies à la date du 5 août 2023 ;

DEBOUTE M [U] [S] de suspension de la clause résolutoire ;

ORDONNE en conséquence à M [U] [S] de libérer les lieux et de restituer les clés dans le délai de quinze jours à compter de la signification du présent jugement ;

DIT qu’à défaut pour M [U] [S] d’avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, la SAS HENEO pourra, deux mois après la signification d’un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu’à celle de tous occupants de son chef, y compris le cas échéant avec le concours d’un serrurier et de la force publique ;

DIT n'y avoir lieu à ordonner l'enlèvement, le transport et la séquestration des meubles éventuellement laissés sur place et rappelle que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

CONDAMNE M [U] [S] à verser à la SAS HENEO la somme de 1346, 82 euros (décompte arrêté au 28 novembre 2023, incluant la mensualité d’octobre 2023), correspondant à l'arriéré de loyers, charges et indemnités d’occupation, avec les intérêts au taux légal à compter du 5 juillet 2023 ;

AUTORISE M [U] [S] à se libérer de cette somme, en plus des échéances courantes, en 6 mensualités de 200 euros chacune, outre une 7ème mensualité qui soldera la dette en principal et intérêts;

DIT que chaque mensualité devra être réglée avant le 10 de chaque mois et pour la première fois le 10 du mois suivant la signification du présent jugement ;

DIT que toute mensualité restée impayée plus de sept jours après la date d'envoi par la SAS HENEO à M [U] [S] d'une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception entraînera l'exigibilité immédiate des sommes restant dues ;

CONDAMNE M [U] [S] à verser à la SAS HENEO une indemnité mensuelle d’occupation d'un montant équivalent à celui du loyer et des charges, tel qu'il aurait été si le contrat s'était poursuivi, à compter du 29 novembre 2023 et jusqu’à la date de la libération effective et définitive des lieux (volontaire ou en suite de l'expulsion);

DIT n'y avoir lieu au paiement d'une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M [U] [S] aux dépens, qui comprendront notamment le coût du commandement de payer et de l’assignation ;

RAPPELLE l’exécution provisoire .

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition les jour, mois et an susdits par le Président et le Greffier susnommés.

Le greffier,Le président.


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr fond
Numéro d'arrêt : 23/07964
Date de la décision : 22/03/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "ferme" ordonnée au fond (sans suspension des effets de la clause résolutoire)

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-22;23.07964 ?
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