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19/03/2024 | FRANCE | N°23/02169

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 19ème chambre civile, 19 mars 2024, 23/02169


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :


19ème chambre civile


N° RG 23/02169

N° MINUTE :


Assignation du :
18 Janvier 2023
07 Février 2023

CONDAMNE

LG









JUGEMENT
rendu le 19 Mars 2024
DEMANDEUR

Madame [B] [W]
[Adresse 3]
[Localité 1]

représentée par Maître Sophie MÜH, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1256


DÉFENDEURS

CPAM DES HAUTS DE SEINE
[Adresse 2]
[Localité 8]>
non représenté

LE FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES D E DOMMAGES
[Adresse 6]
[Localité 9]

représentée par Maître Van VU NGOC, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1217

AGENT JUDICIAIRE DE ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

19ème chambre civile


N° RG 23/02169

N° MINUTE :

Assignation du :
18 Janvier 2023
07 Février 2023

CONDAMNE

LG

JUGEMENT
rendu le 19 Mars 2024
DEMANDEUR

Madame [B] [W]
[Adresse 3]
[Localité 1]

représentée par Maître Sophie MÜH, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1256

DÉFENDEURS

CPAM DES HAUTS DE SEINE
[Adresse 2]
[Localité 8]

non représenté

LE FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES D E DOMMAGES
[Adresse 6]
[Localité 9]

représentée par Maître Van VU NGOC, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1217

AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 7]

représentée par Maître Cyril FERGON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #J0135
Décision du 19 Mars 2024
19ème chambre civile
N°RG 23/02169

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Laurence GIROUX, Vice-Présidente
Présidente de la formation

Madame Emmanuelle GENDRE, Vice-Présidente
Madame Mabé LE CHATELIER, Magistrate à titre temporaire
Assesseurs

Assistées de Madame Célestine BLIEZ, greffière, lors des débats et au jour de la mise à disposition.

DEBATS

A l’audience du 06 Février 2024 présidée par Laurence GIROUX, tenue en audience publique avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 19 Mars 2024.

JUGEMENT

- Réputé contradictoire
- En premier ressort
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Le 25 octobre 2019 vers midi, Madame [B] [W] était victime d'un accident de la circulation à [Localité 10] (75). Piétonne, elle était percutée par un scooter, alors qu’elle traversait la chaussée sur le passage piéton.

Le scooter, qui n’était pas assuré, était conduit par Monsieur [X] [Y] [N], qu’une voiture police avait tenté de contrôler juste avant.

Madame [W] était prise en charge aux urgences, notamment pour des douleurs au genou, aux hanches, au dos et aux cervicales. Il était diagnostiqué une fracture-enfoncement du plateau tibial externe du genou droit sans indication chirurgicale. Il lui était prescrit une attelle et des béquilles, puis elle suivait une rééducation active après consolidation.

Par jugement correctionnel du 19 mai 2020 rendu par le tribunal judiciaire de Bordeaux, Monsieur [N] était déclaré coupable des faits de refus d’obtempérer par le conducteur d’un véhicule d’obtempérer, blessures involontaires avec incapacité n’excédant pas trois mois commises avec au moins deux circonstances aggravantes et circulation avec un véhicule terrestre à moteur sans assurance. Les constitutions de partie civiles de Madame [W], de la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) des Hauts de Seine et de l’agent judiciaire de l’Etat (AJE) étaient déclarées recevables, en tant qu’organismes lui ayant réglé des prestations. Une expertise médicale de Madame [W] était ordonnée. Monsieur [N] était condamné à lui verser la somme de 3 000 euros à titre de provision à valoir sur son préjudice corporel, ainsi que la somme de 800 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale. Les demandes de la CPAM et de l’AJE étaient réservées et il était donné acte au fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) de son intervention volontaire.

L’expert, le docteur [M], transmettait son rapport définitif le 23 juin 2021. Les conclusions en sont les suivantes :
DEFICIT FONCTIONNEL TEMPORAIRE TOTAL : 100 % du 25 octobre 2019 au 29 octobre 2019 DEFICIT FONCTIONNEL TEMPORAIRE PARTIEL : 50 % du 30 octobre 2019 au 4 décembre 2019
25 % du 5 décembre 2019 au 27 février 2020
15 % du 28 février 2020 au 15 octobre 2020
CONSOLIDATION : 16 octobre 2020 DEFICIT FONCTIONNEL PERMANENT : 6% TIERCE PERSONNE TEMPORAIRE : 5 heures/ semaine du 30 octobre 2019 au 4 décembre 2019 (période de DFTP à 50%)
3 heures/ semaine du 5 décembre 2019 au 27 février 2020 (période de DFTP à 25%)
DEPENSES DE SANTE FUTURES : Néant FRAIS DE LOGEMENT/VEHICULES ADAPTES : Néant PERTE DE GAINS PROFESSIONNELS ACTUELS : Arrêt de travail du 25 octobre 2019 au 24 novembre 2019 PERTE DE GAINS PROFESSIONNELS FUTURS : Néant INCIDENCE PROFESSIONNELLE : Néant PREJUDICE SCOLAIRE : Néant SOUFFRANCES ENDUREES : 3,5/7 PREJUDICE ESTHETIQUE TEMPORAIRE : 1,5/7 régressif jusqu’à la date de consolidation (durée maximum pendant la période d’immobilisation en béquilles) PREJUDICE ESTHETIQUE DEFINITIF : 0,5/7 PREJUDICE SEXUEL : Néant PREJUDICE D’ETABLISSEMENT : Néant PREJUDICE D’AGREMENT : Quelques limitations et fatigabilité sur le membre inférieur droit à l’hyper-sollicitation
Par jugement correctionnel sur intérêts civils du 2 septembre 2022, le tribunal judiciaire de Bordeaux déclarait Monsieur [N] entièrement responsable des préjudices subis par Madame [W] et le condamnait, notamment, à lui régler la somme totale de 27 046,60 euros en indemnisation de son préjudice corporel. Monsieur [N] était également condamné à verser des sommes à la CPAM des Hauts de Seine et à l’AJE au titre des prestations versées. La décision était déclarée opposable au FGAO, mais la mise en cause de l’AJE, au titre du véhicule de police impliqué dans l’accident, était déclarée irrecevable devant la juridiction pénale.

C’est ainsi que, par assignations régulièrement signifiées du 18 janvier et 7 février 2023, Madame [W] a assigné l’AJE, le FGAO et la CPAM des Hauts de Seine en indemnisation de son préjudice.
Par dernières conclusions signifiées par la voie électronique le 26 septembre 2023, Madame [W] formait les demandes suivantes :
Déclarer recevables et bien fondées les demandes de Madame [B] [W] En conséquence, condamner l’agent judiciaire de l’Etat à verser à Madame [B] [W] les sommes suivantes : Préjudice patrimonial :
Assistance tierce personne temporaire pendant l’arrêt maladie : 1.220,00 Euros
Préjudice scolaire universitaire ou de formation : :800,00 Euros
Frais divers : 218,30 Euros
Préjudice extra patrimonial temporaire (avant consolidation) :
Déficit fonctionnel temporaire : 2.191,05 Euros
Préjudice esthétique temporaire : 3.000,00 Euros
Préjudice extra patrimonial permanent :
Souffrances endurées : 15.000,00 Euros
Déficit fonctionnel permanent : 13.530,00 Euros
Préjudice esthétique permanent : 1.500,00 Euros
Le préjudice d’agrément : 2.000,00 Euros
Somme totale : 39.459,35 Euros
Condamner l’agent judiciaire de l’Etat à verser à Madame [B] [W] la somme de 3.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile (CPC) ; Déclarer le jugement à intervenir opposable au fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) ; Déclarer le jugement à intervenir opposable à la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) des Hauts de Seine ; Dire qu’il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire de droit ; Condamner l’agent judiciaire de l’Etat aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Sophie MÜH, avocat aux offres de droit.
Par dernières conclusions signifiées par la voie électronique le 28 mars 2023, l’AJE a demandé de :
A titre principal :
Débouter la requérante de toutes ses demandes à l’encontre de l’agent judiciaire de l’État. A titre subsidiaire :
Réduire l’indemnisation de la requérante à de plus justes proportions, à savoir 21 335,80 euros après déduction des 3000 euros versés par Monsieur [N], en retenant l’évaluation suivante : 1 133,30 € au titre des frais divers
Rejeter la demande au titre du préjudice scolaire
1972,50 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire
6000 euros au titre des souffrances endurées (3,5/7)
1000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire (1,5/7)
13 530 euros au titre du déficit fonctionnel permanent (6 %)
500 euros au titre du préjudice esthétique permanent (0,5/7)
200 euros au titre du préjudice d’agrément
Réduire à de plus juste proportions les demandes au titre des frais irrépétibles
Par dernières conclusions signifiées par la voie électronique le 14 juin 2023, le FGAO a demandé de :
Condamner l’agent judiciaire de l’État à prendre en charge les conséquences dommageables de l’accident, sans recours contre le FGAO, compte tenu du caractère subsidiaire de ses obligations. Ordonner la mise hors de cause du FGAO. En tout état de cause, déclarer irrecevable la demande formée par Madame [W] tendant à voir déclarer le jugement à intervenir opposable au FGAO, tant que Monsieur [N] n’est pas attrait à la cause, seul ce dernier pouvant être condamné. Condamner l’agent judiciaire de l’État en tous les dépens, dont distraction au profit de Maître Van VU NGOC, Avocate qui pourra les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC. Rappeler à toutes fins que le FGAO ne peut être condamné à quelque titre que ce soit, conformément aux dispositions de l’article R 421-15 du code des assurances, le jugement ne pouvant que lui être déclaré opposable.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties, quant à l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens.

La CPAM des Hauts de Seine n'ayant pas constitué avocat, le présent jugement susceptible d'appel, sera réputé contradictoire à l'égard de toutes les parties.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 janvier 2024. A l’issue des débats fixés à l’audience du 6 février 2024, le dossier était mis en délibéré au 19 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR LE DROIT À INDEMNISATION
La loi du 5 juillet 1985 dispose que les victimes d’un accident de la circulation, non conducteurs d’un véhicule terrestre à moteur, ont droit à l'indemnisation des dommages résultant des atteintes à leur personne qu'elles ont subies, sauf lorsqu’elles ont commis une faute inexcusable qui a été la cause exclusive de l’accident ou qu’elles ont volontairement recherché le dommage qu’elles subissent.

Est impliqué dans un accident, au sens des dispositions précitées tout véhicule intervenu, à quelque titre que ce soit, dans la survenance de cet accident. Le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur ne peut se dégager de son obligation d'indemnisation que s'il établit que cet accident est sans relation avec le dommage.

Par ailleurs, en vertu des articles L 421-1 et R 421-13 du code des assurances, le FGAO est uniquement tenu de payer les indemnités qui ne peuvent être prises en charge à aucun autre titre.

En l’espèce, Madame [W] fait valoir que les circonstances de l’accident établissent un lien de causalité entre le contrôle de police, la course-poursuite et l’accident causé par Monsieur [N]. Le véhicule de police étant impliqué dans l’accident et l’intervention du FGAO étant subsidiaire, elle demande donc la condamnation de l’AJE à prendre en charge ses dommages.

L’AJE demande sa mise hors de cause en contestant l’implication du véhicule de police dans l’accident. Il relève, en effet, que le conducteur du scooter s’est enfui au vu d’un premier véhicule de police, qu’il a semé ce dernier, d’ailleurs absent lors de l’accident, et que le second véhicule de police, qui l’a interpellé après l’accident, n’a pas participé à la poursuite.

Enfin, le FGAO considère qu’il appartient à l’AJE de prendre en charge les conséquences dommageables de l’accident sans recours contre le FGAO compte tenu du caractère subsidiaire de ses obligations. Il demande donc principalement sa mise hors de cause.

Or, il est constant qu’aucune faute n’est reprochée à Madame [W].

De plus, il résulte de la lecture de la procédure de police qu’un véhicule de patrouille passant [Adresse 12] à [Localité 10] (33) remarquait Monsieur [N] circulant sur son scooter et lui faisait signe de s’arrêter pour un contrôle. Celui-ci refusait et accélérait en direction de la[Adresse 14]e, puis tournait à gauche à grande vitesse et en partie sur le trottoir dans la [Adresse 15] en direction du [Adresse 11]. Le véhicule de police actionnait ses moyens sonores et lumineux et suivait le scooter. Ne pouvant emprunter la [Adresse 15] en raison d’une circulation dense, il le perdait alors de vue, mais tournait pour le retrouver dans la rue suivante sur la gauche vers la [Adresse 13], qui rejoint le [Adresse 11]. Durant ce cours laps de temps, l’équipage du véhicule était prévenu de l’accident intervenu entre le scooter et Madame [W] au croisement de la [Adresse 13] et du [Adresse 11]. Un second véhicule de police était arrivé avant eux et avait interpellé Monsieur [N]. Lors de son audition, Monsieur [N] reconnaissait avoir accéléré pour échapper au contrôle de police, n’étant pas assuré, avoir entendu la sirène des policiers et avoir percuté Madame [W] en raison de sa vitesse élevée.

Au regard de ces éléments, l’accident litigieux s’est produit, alors que Monsieur [N] fuyait à grande vitesse un contrôle de police et ce, dans un laps de temps très court après le premier contact avec le véhicule de police et également peu après le moment où celui-ci perdait de vue le conducteur du scooter. De plus, le véhicule de police était toujours à la recherche de Monsieur [N] lors de l’accident. Il avait pris la même direction que le scooter, ayant uniquement dû emprunter une autre rue compte tenu de la circulation, et arrivait d’ailleurs immédiatement sur les lieux de l’accident. Le véhicule de police ayant ainsi eu un rôle causal déterminant dans l’accident, peu importe qu’il n’ait pas été présent au moment-même de sa survenance.

L’implication d’un véhicule de police dans l’accident au cours duquel Monsieur [N] a renversé Madame [W] est, dès lors, établie. L’AJE sera, par conséquent, tenu à indemnisation intégrale du préjudice de Madame [W]. A défaut de toute preuve, il n’y a lieu, comme le demande l’AJE, de déduire la provision mise à la charge de Monsieur [N] par le jugement correctionnel.

La responsabilité de l’AJE étant retenue et l’intervention du FGAO du fait de l’absence d’assurance de Monsieur [N] étant subsidiaire, le FGAO sera mis hors de cause. Dès lors, il n’y a lieu à examiner les autres demandes présentées à son égard.

SUR L'ÉVALUATION DU PRÉJUDICE
Au vu de l'ensemble des éléments produits aux débats, notamment de l’accord des parties sur les conclusions de l’expertise, le préjudice subi par Madame [W], née le [Date naissance 4] 1994 et exerçant la profession d’auditrice de justice lors de l’accident, sera réparé ainsi que suit, étant observé qu'en application de l'article 25 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, d'application immédiate, le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge.

– PREJUDICES PATRIMONIAUX

- Dépenses de santé actuelles

Aux termes du relevé de créance définitive daté du 17 mars 2023, les prestations en nature versées par la CPAM des Hauts de Seine se sont élevées à la somme totale de 1 748,32 euros (frais hospitaliers, frais médicaux, frais pharmaceutiques, frais d’appareillage et de transport).

Aucune demande n’étant formée par Madame [W] au titre de sommes restées à charge, il n’y a lieu à statuer.

- Frais divers

Les demandes formées au titre de ce poste de préjudice visent à couvrir différents types de frais.

L'assistance de la victime lors des opérations d'expertise par un, ou des, médecin conseil en fonction de la complexité du dossier, en ce qu'elle permet l'égalité des armes entre les parties à un moment crucial du processus d'indemnisation, doit, notamment, être prise en charge dans sa totalité. De même, ces données peuvent justifier d'indemniser les réunions et entretiens préparatoires. Les frais d'expertise font partie des dépens.

En l’espèce, Madame [W] sollicite la somme de 218,30 euros au titre de frais de transport pour elle-même et sa mère. Subsidiairement, l’AJE ne s’oppose pas à cette demande.

Il sera donc entériné leur accord pour un montant de 218,30 euros.

- Assistance tierce personne avant consolidation

Il convient d'indemniser les dépenses destinées à compenser les activités non professionnelles particulières qui ne peuvent être assumées par la victime directe durant sa maladie traumatique, comme l'assistance temporaire d'une tierce personne pour les besoins de la vie courante, étant rappelé que l’indemnisation s'entend en fonction des besoins et non en fonction de la dépense justifiée. Le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne saurait être subordonné à la production de justificatifs des dépenses effectives.

En l’espèce, Madame [W] sollicite la somme de 1220 euros sur la base d’un taux horaire de 20 euros, tandis que l’AJE offre la somme de 915 euros sur la base d’un tarif horaire de 15 euros.

Or, l’expert a fixé le besoin d’assistance par une tierce personne de la manière suivante :
5 heures/ semaine du 30 octobre 2019 au 4 décembre 2019 (période de DFTP à 50%)
3 heures/ semaine du 5 décembre 2019 au 27 février 2020 (période de DFTP à 25%),
soit cinq semaines pour la première période et douze semaines pour la seconde sur lesquelles s’accordent les parties.

Sur la base d’un taux horaire de 18 euros, adapté à la situation de la victime, il convient de lui allouer la somme de 1098 euros soit : (18eurosx5heuresx5semaines)+(18 eurosx3heuresx12 semaines).

- Perte de gains professionnels avant consolidation

Il s'agit de compenser les répercussions de l'invalidité sur la sphère professionnelle de la victime jusqu'à la consolidation de son état de santé. L'évaluation de ces pertes de gains doit être effectuée in concerto au regard de la preuve d'une perte de revenus établie par la victime jusqu'au jour de sa consolidation.

Il n’y a lieu à statuer, Madame [W] n’ayant eu de perte de gains en raison du maintien de son salaire.

- Préjudice scolaire et/ou universitaire

Ce poste de préjudice s’apprécie in concreto, en fonction de la durée de l’incapacité temporaire et de sa situation dans le temps (limitée à la période des vacances ou au contraire pendant la période des examens), des résultats scolaires antérieurs à l’accident (tout redoublement n’est pas imputable à un accident), du niveau des études poursuivies, de la chance de terminer la formation entreprise...

En l’espèce, Madame [W] sollicite la somme de 800 euros, l’AJE s’y opposant.

Or, si l’expert n’a pas retenu de préjudice et qu’il n’est pas contesté que l’absence de la requérante à certains modules de sa formation à l’Ecole nationale de la magistrature n’a pas eu d’impact sur son entrée en fonction, il n’en reste pas moins que plusieurs semaines d’arrêts de travail sont établies et qu’elle justifie avoir manqué des modules, qu’elle n’a pu rattraper par la suite.

Un préjudice est donc établi. Il sera alloué à ce titre la somme de 500 euros.

– PRÉJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

A - Préjudices extra-patrimoniaux temporaires

- Déficit fonctionnel temporaire

Ce poste de préjudice indemnise l'invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant la maladie traumatique. Le déficit fonctionnel temporaire inclut pour la période antérieure à la date de consolidation, l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique.

L’expert retient des périodes de déficit partiel :
DEFICIT FONCTIONNEL TEMPORAIRE TOTAL : 100 % du 25 octobre 2019 au 29 octobre 2019 DEFICIT FONCTIONNEL TEMPORAIRE PARTIEL : 50 % du 30 octobre 2019 au 4 décembre 2019
25 % du 5 décembre 2019 au 27 février 2020
15 % du 28 février 2020 au 15 octobre 2020

Madame [W] sollicite une indemnisation de 2191,50 euros sur la base d’une somme de 27 euros par jour pour le déficit total et l’AJE offre la somme de 1972,50 euros sur la base d’une somme de 25 euros.

S’agissant du nombre de jours d’indemnisation, il convient de retenir les conclusions d’expertise non sérieusement remises en cause par le certificat médical imprécis produit par la requérante.

Sur la base d’une indemnisation de 27 euros par jour pour un déficit total, les troubles dans les conditions d'existence subis par Madame [W] jusqu'à la consolidation, justifient l'octroi d'une somme de 2130,30 euros (5x27+36x27x50%+85x27x25%+231x27x15%).

- Souffrances endurées

Il s'agit de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c'est-à-dire du jour de l'accident à celui de sa consolidation. A compter de la consolidation, les souffrances endurées vont relever du déficit fonctionnel permanent et seront donc indemnisées à ce titre.

Madame [W] sollicite la somme de 15 000 euros, tandis que l’AJE offre 6 000 euros.

En l'espèce, elles sont caractérisées par le traumatisme initial et les traitements subis, ainsi que par le retentissement psychique des faits et de leurs suites. Madame [W] produit diverses pièces sur le suivi médical important, qu’elle a dû mettre en place après les faits.

Cotées à 3,5 sur une échelle de 7 par l’expert par une évaluation complète non sérieusement remise en cause par les autres éléments produits, elles seront réparées par l'allocation de la somme de 8 000 euros.

- Préjudice esthétique temporaire

Ce préjudice est lié à la nécessité de se présenter dans un état physique altéré au regard des tiers.

En l’espèce, la requérante sollicite la somme de 3 000 euros et il est offert 1 000 euros.

L’expert a retenu un préjudice évalué à 1,5/7 et lié aux bas de contention, à l’attelle et à la marche avec les cannes anglaises.

Au regard de ces éléments, il sera alloué la somme de 1 000 euros.

B - Préjudices extra-patrimoniaux permanents

- Déficit fonctionnel permanent

Ce poste tend à indemniser la réduction définitive (après consolidation) du potentiel physique, psychosensoriel, ou intellectuel résultant de l'atteinte à l'intégrité anatomo-physiologique, à laquelle s'ajoute les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques, et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence (personnelles, familiales et sociales).

En l’espèce, Madame [W] sollicite une somme 13 530 euros, à laquelle l’AJE ne s’oppose pas.

La victime souffrant d’un déficit fonctionnel permanent évalué à 6% par l’expert (séquelles orthopédiques légères, ainsi que retentissement psychique durable) et étant âgée de 26 ans lors de la consolidation de son état, il sera entériné l’accord à hauteur de 13 530 euros, somme calculée sur la base d’un point d’incapacité de 2255 euros.

- Préjudice esthétique permanent

Madame [W] sollicite la somme de 1 500 euros, tandis que l’AJE offre 500 euros.

Fixé à 0,5/7 (cicatrice sur la cuisse) et étayé par les photographies produites, il justifie l'octroi de la somme de 1 000 euros.

- Préjudice d'agrément

Ce préjudice vise à réparer le préjudice spécifique lié à l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique, sportive ou de loisirs ainsi que les limitations ou difficultés à poursuivre ces activités.

Ce préjudice particulier peut être réparé, en sus du déficit fonctionnel permanent, sous réserve de la production de pièces justifiant de la pratique antérieure de sports ou d’activités de loisirs particuliers.

En l’espèce, Madame [W] sollicite la somme de 2 000 euros et l’AJE propose 200 euros.

Il est fait valoir l’impossibilité de se livrer à la même intensité de sa pratique antérieure sportive. Au regard des justificatifs versés (inscriptions en salle de sport et à des courses sportives), des gênes relevées par l’expert (quelques limitations et fatigabilité) et de l’âge de la requérante, il sera alloué la somme de 1 000 euros.

SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES
L’AJE, succombant, sera condamné aux dépens et à verser à Madame [W] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il est rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL,

Statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, réputé contradictoire et en premier ressort,

DIT que le droit à indemnisation de Madame [B] [W] des suites de l’accident de la circulation survenu le 25 octobre 2019 est entier ;

CONDAMNE l’AJE à payer à Madame [B] [W], avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, les sommes suivantes au titre de l’indemnisation de son préjudice corporel :
- frais divers : 218,30 euros,
- assistance par tierce personne avant consolidation : 1 098 euros,
- préjudice de formation : 500 euros,
- déficit fonctionnel temporaire : 2 130,30 euros,
- souffrances endurées : 8 000 euros,
- préjudice esthétique temporaire : 1 000 euros,
- déficit fonctionnel permanent : 13 530 euros,
- préjudice esthétique permanent : 1 000 euros,
- préjudice d’agrément : 1 000 euros,

DÉCLARE le présent jugement commun à la CPAM des Hauts de Seine ;

MET HORS DE CAUSE le FGAO ;

CONDAMNE l’AJE à payer à Madame [B] [W] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens comprenant les frais d’expertise et pouvant être recouvrés directement par Maître Sophie MÜH, avocate, pour ceux dont elle a fait l’avance sans avoir obtenu provision conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile

RAPPELLE que le présent jugement est assorti de l'exécution provisoire ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Fait et jugé à Paris le 19 Mars 2024

Le GreffierLa Présidente
Célestine BLIEZLaurence GIROUX


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 19ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/02169
Date de la décision : 19/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-19;23.02169 ?
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