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18/03/2024 | FRANCE | N°19/08651

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 9ème chambre 1ère section, 18 mars 2024, 19/08651


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:




9ème chambre 1ère section

N° RG :
N° RG 19/08651 - N° Portalis 352J-W-B7D-CQLRO

N° MINUTE : 1




Assignation du :
17 Juillet 2019









JUGEMENT
rendu le 18 Mars 2024
DEMANDEURS

Monsieur [X] [R]
[Adresse 3]
[Localité 7]

Madame [M] [S] épouse [R]
[Adresse 3]
[Localité 7]

représentés par Me Pierre PRADIE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0315r>


DÉFENDERESSE

DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES
[Adresse 1]
[Localité 5]

représentée par son Inspecteur


Décision du 18 Mars 2024
9ème chambre 1ère section
N° RG 19/08651 - N° Portalis 3...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:

9ème chambre 1ère section

N° RG :
N° RG 19/08651 - N° Portalis 352J-W-B7D-CQLRO

N° MINUTE : 1

Assignation du :
17 Juillet 2019

JUGEMENT
rendu le 18 Mars 2024
DEMANDEURS

Monsieur [X] [R]
[Adresse 3]
[Localité 7]

Madame [M] [S] épouse [R]
[Adresse 3]
[Localité 7]

représentés par Me Pierre PRADIE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0315

DÉFENDERESSE

DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES
[Adresse 1]
[Localité 5]

représentée par son Inspecteur

Décision du 18 Mars 2024
9ème chambre 1ère section
N° RG 19/08651 - N° Portalis 352J-W-B7D-CQLRO

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Anne-Cécile SOULARD, Vice-présidente
Madame Marine PARNAUDEAU, Vice-présidente
Monsieur Patrick NAVARRI, Vice-président

assistée de Pierre-Louis MICHALAK, Greffier,

DÉBATS

A l’audience du 22 Janvier 2024 tenue en audience publique devant Madame Marine PARNAUDEAU, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 18 Mars 2024.

JUGEMENT

Prononcé en audience publique
Contradictoire
en premier ressort

FAITS ET PROCEDURE

Par jugement du 22 novembre 2021, le tribunal judiciaire de Paris a :
- débouté M. [X] [R] et Mme [M] [S] épouse [R] de leur réclamation au titre du rehaussement de la valeur vénale de l'immeuble constituant leur résidence principale,
- débouté M. [X] [R] et Mme [M] [S] épouse [R] de leur réclamation au titre du rehaussement de la valeur vénale des parts sociales de la société civile FINANCIERE [S] et de la part sociale détenue dans le capital de SCI [Adresse 4],
- ordonné, avant dire droit, une expertise de visiter les locaux litigieux situés [Adresse 2] [Localité 7], de les décrire et de déterminer la surface utile et la surface utile pondérée de chaque local commercial de l'immeuble sis [Adresse 2] [Localité 7],
- sursis à statuer sur le surplus des demandes,
- réservé les dépens.

Le rapport d'expertise judiciaire déposé le 22 août 2022, a fait l'objet d'un débat contradictoire entre les parties.

Aux termes des dernières conclusions signifiées le 17 mai 2023, M. [X] [R] et Mme [M] [S] épouse [R] demandent au tribunal, au visa de l'article 17 du livre des procédures fiscales, de :

“- DECLARER recevables et bien fondés les requérants en leur action,
- DIRE ET JUGER que la méthode de détermination de la valeur vénale des parts de la SCI 12/14 Avenue Victor Hugo au titre de l'ISF de l'année 2011 est viciée,
- ORDONNER la restitution de l'ISF pour un montant de 48.443 € au titre de l'année 2011, outre les pénalités et intérêts de retard,

Pour le cas où la méthode retenue par l'administration ne serait pas reconnue comme viciée :
- ORDONNER la restitution de l'ISF pour un montant de 36.943 € au titre de l'année 2011, outre les pénalités et intérêts de retard,

A titre subsidiaire,
- ORDONNER la restitution de l'ISF pour un montant de 34.080 € au titre de l'année 2011, outre les pénalités et intérêts de retard,
A titre infiniment subsidiaire,
- ORDONNER la restitution de l'ISF pour un montant de 22.804 € au titre de l'année 2011, outre les pénalités et intérêts de retard,

En tout état de cause,
- CONDAMNER la Direction Régionale des Finances publiques d'Ile-de-France et de [Localité 6], ès qualité, à verser à Monsieur et Madame [X] [R] la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- CONDAMNER la Direction Régionale des Finances Publiques d'Ile-de-France et de [Localité 6], ès qualité, aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise, qui seront recouvrés par Maître Pierre PRADIE, Avocat à la Cour, en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.”

Concernant le rehaussement de la valeur vénale des titres non côtés de la SCI [Adresse 2], les demandeurs soutiennent, à titre principal, qu'il convient de déduire de l'absence de l'administration fiscale aux réunions d'expertise et de la non-présentation de dires, son acceptation de la surface utile pondérée déterminée par l'expert judiciaire.

Les demandeurs soutiennent que l'administration fiscale n'a pas justifié être dans l'impossibilité de recourir à la méthode par comparaison portant sur les titres de la société ou sur des titres de sociétés similaires, que la pertinence de l'application d'un taux de capitalisation des loyers de 6,25 % - qu'elle a retenu pour fixer la valeur de productivité - n'est pas prouvée, ce d'autant que ce taux a été fixé en référence à des publications postérieures au fait générateur de l'impôt alors que la charge de la preuve lui incombe.

Ils soulignent à titre subsidiaire que la correction de la surface utile pondérée estimée par l'expert judiciaire conduit à une valeur vénale de la construction de 2.172.538 € et de 1.883.187 € après application d'un abattement pour occupation.

Ils ajoutent que dans la mesure où l'administration fiscale persiste à maintenir une surface utile pondérée en contradiction avec les pièces versées aux débats, il serait inéquitable de mettre à leur charge une quote-part des frais d'expertise.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 28 février 2023, l'administration fiscale demande au tribunal de :

- se prononcer sur le rapport d'expertise judiciaire,
-ordonner la répartition des frais d'expertise en proportion de la valeur rejetée,
- débouter M. et Mme [R] de toutes leurs demandes,
- confirmer la décision de rejet du 12 juin 2019,
- les condamner aux dépens,
- dire qu'en toute hypothèse, les frais entraînés par la constitution de Maître [L] [H] resteront à leur charge,
- dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'administration fiscale fait valoir qu'elle n'a pas eu le temps d'émettre des dires avant l'établissement du rapport d'expertise judiciaire définitif, qu'il ne faut cependant pas inférer de son silence, une absence de contestation de la surface utile pondérée estimée par l'expert judiciaire.

Concernant le rehaussement de la valeur vénale des titres non côtés de la SCI [Adresse 2], la défenderesse observe que cette société détient des créances et des immobilisations financières (locaux commerciaux), qu'elle déclare des résultats, que les surfaces des boutiques respectivement occupées par deux locataires n'ont pas été justifiées, que la surface de 385 m2 ne peut donc qu'être maintenue. Elle souligne que la non-liquidité des actifs sociaux commande la combinaison de méthodes et non l'application de la seule méthode mathématique, que les termes de comparaison remplissant toutes les caractéristiques des boutiques sont impossibles à trouver si bien que la méthode selon les revenus, et non le recours à la seule valeur par comparaison, est à utiliser.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 septembre 2023.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures susvisées pour l'exposé complet des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.

MOTIFS

Sur la valeur au 1er janvier 2011 des titres non côtés de la SCI [Adresse 2]

En matière d'impôt de solidarité sur la fortune, en vertu des dispositions des articles 885 D et 885S du code général des impôts, la valeur des biens est déterminée suivant les règles en vigueur en matière de droits de mutation par décès.

Aux termes de l'article 666 du code général des impôts, la valeur d'un bien doit être déterminée de manière concrète et objective.

Il est de règle que la valorisation des titres non cotés en bourse s'apprécie de manière à faire apparaître une valeur de l'entreprise aussi proche que possible de celle qui aurait résulté du jeu normal de l'offre et de la demande dans un marché réel au jour du fait générateur.

La valeur vénale des titres non cotés peut être établie par comparaison avec les valeurs retenues lors de transactions antérieures portant sur des titres de la même société ou des titres exactement comparables.

L'article 17 du livre des procédures fiscales dispose que l'administration des impôts peut rectifier le prix ou l'évaluation d'un bien ayant servi de base à la perception d'une imposition lorsque ce prix ou cette évaluation paraît inférieur à la valeur vénale réelle des biens transmis ou désignés dans les actes ou déclarations, et que l'administration est alors tenue d'apporter la preuve de l'insuffisance des prix exprimés et des évaluations fournies dans les actes ou déclarations.

En matière d'ISF, le fait générateur est le 1er janvier de l'année d'imposition en application de l'article 885 E du code général des impôts.

En l'espèce, si le prix moyen déterminé par comparaison (9.613 € du m2) n'est pas contesté par les contribuables, les parties demeurent en désaccord quant à la détermination de la surface utile pondérée des locaux commerciaux détenus par la SCI [Adresse 2].

Contrairement à ce que soutiennent les demandeurs, le fait pour l'administration fiscale de ne pas s'être faite représenter lors des opérations d'expertise et de ne pas avoir présenté de dires ne saurait caractériser un accord, même implicite, avec les conclusions du rapport d'expertise. La teneur des dernières conclusions de l'administration fiscale témoigne de son désaccord avec la surface utile pondérée des lots commerciaux détenus par la SCI [Adresse 2], évaluée par l'expert judiciaire.

Il ressort du rapport d'expertise judiciaire que " sous réserve de ce que les plans de géomètre-experts produits sont postérieurs à l'échéance du 1er janvier 2011 à laquelle est recherchée la valorisation des biens litigieux " (à savoir ceux des Cabinets DANIEL LEGRAND du 9 mai 2012 et de BARRERE DUFAU du 25 janvier 2019), la surface totale utile des lots de commerce litigieux s'élève à 397,30 m2 et leur surface utile pondérée à 226 m2. L'expert judiciaire a précisé que les surfaces utiles des boutiques qui faisaient l'objet au 1er janvier 2011 de baux consentis aux sociétés EPISODE, MIROGLIO (deux baux commerciaux), REVANTIC, LANTY DECORATEUR et LVH, n'ont pu être évaluées selon un plan ancien non daté qui contient des anomalies de reproduction et certaines incohérences entre les cotes.

Les demandeurs se prévalaient d'une surface utile pondérée totale de 297,65 m2 aux termes de leur déclaration d'imposition tandis que l'administration fiscale estimait à 385 m2 la surface utile pondérée totale de ces lots de commerce.

Bien que l'expert ait effectué des recherches minutieuses pour remplir sa mission, le fait de s'être fondé pour répondre à la question qui lui était posée sur des plans de géomètres-experts postérieurs au 1er janvier 2011, date du fait générateur de l'impôt, ne permet pas à la présente juridiction de se fonder sur ce rapport d'expertise judiciaire pour statuer sur le présent litige.

Il résulte des pièces produites aux débats que la SCI [Adresse 2] détient huit locaux et que des modifications cadastrales afférentes à ces biens ont eu lieu postérieurement au 1er janvier 2011.

L'administration fiscale affirme que la surface utile des boutiques louées à MIRIGLIO (98m2) et LANTY (16m2) n'est pas établie contrairement à celle des autres commerces qu'elle estime justifiée à hauteur de 293 m2. Elle produit aux débats des données cadastrales postérieures à la date du fait générateur de l'impôt, qui ne peuvent donc établir la surface de 385 m2 dont elle se prévaut.

L'administration fiscale est tenue en application de l'article 17 du livre des procédures fiscales, de démontrer l'insuffisance de la surface utile et de la surface utile pondérée des boutiques données à bail commercial par la SCI [Adresse 2], dont se prévalent les demandeurs.

L'administration fiscale fait valoir à tort qu'il incombe aux demandeurs de rapporter la preuve de la surface utile des locaux litigieux.

Faute pour l'administration fiscale de démontrer la pertinence de la surface utile pondérée des boutiques querellées, qu'elle a pris en compte dans sa méthode de valorisation des titres non côtés de la SCI [Adresse 2], les impositions litigieuses découlant du rehaussement de la valeur vénale des parts sociales détenues par les époux [R] dans la SCI [Adresse 2] au titre de l'ISF de l'année 2011 ne sont donc pas justifiées.

Ainsi, il convient de faire droit à la réclamation formée par M. [X] [R] et Mme [M] [S] épouse [R] sur ce point.

Par suite, il convient d'infirmer partiellement la décision de rejet de la réclamation contentieuse de M. [X] [R] et Mme [M] [S] épouse [R] du 12 juin 2019 et de dire que ces derniers devront être déchargés des droits d'enregistrement mis en recouvrement suivant avis en date du 15 novembre 2017, en ce qui concerne le rehaussement de la valeur vénale de leurs parts sociales détenues dans la SCI [Adresse 2] au titre de l'ISF de l'année 2011.

Les sommes consignées par ou pour le compte de M. [X] [R] et Mme [M] [S] épouse [R] en exécution de cet avis de mise en recouvrement seront restituées par l'administration fiscale avec intérêts, tel que prévu à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, en ce qui concerne le rehaussement de la valeur vénale de leurs parts sociales détenues dans la SCI [Adresse 2] au titre de l'ISF de l'année 2011.

Sur les demandes accessoires

Succombant partiellement, il y a lieu de juger que chaque partie conservera les dépens qu'elle a exposés. L'administration fiscale sera condamnée aux dépens de l'expertise judiciaire.

L'équité commande de rejeter la demande formée par M. [X] [R] et Mme [M] [S] épouse [R] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,

FAIT DROIT à la réclamation de M. [X] [R] et Mme [M] [S] épouse [R] au titre du rehaussement de la valeur vénale de leurs parts sociales détenues dans la SCI [Adresse 2] au titre de l'ISF de l'année 2011,

INFIRME partiellement la décision de rejet du directeur général des finances publiques de la réclamation contentieuse de M. [X] [R] et Mme [M] [S] épouse [R] du 12 juin 2019 portant sur la proposition de rectification du 22 décembre 2014, en ce qui concerne le rehaussement de la valeur vénale de leurs parts sociales détenues dans la SCI [Adresse 2] au titre de l'ISF de l'année 2011,

DIT qu'il appartiendra au directeur général des finances publiques, agissant en la personne du directeur régional des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris, de notifier la décharge des droits de mutation à titre gratuit mis en recouvrement suivant avis du 15 novembre 2017, en ce qui concerne le rehaussement de la valeur vénale de leurs parts sociales détenues dans la SCI [Adresse 2] au titre de l'ISF de l'année 2011,

ORDONNE la restitution de toutes sommes consignées à titre de garantie de paiement des droits d'enregistrement mis en recouvrement le 15 novembre 2017, augmentée des intérêts prévus par l'article L.208 du Livre des procédures fiscales, en ce qui concerne le rehaussement de la valeur vénale de leurs parts sociales détenues dans la SCI [Adresse 2] au titre de l'ISF de l'année 2011,

DEBOUTE M. [X] [R] et Mme [M] [S] épouse [R] de leur demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que chaque partie conservera la charge des dépens mentionnés à l'article R.* 207-1 du livre des procédures fiscales, qu'elle a exposés,

CONDAMNE l'administration fiscale aux dépens de l'expertise judiciaire.

Fait et jugé à Paris le 18 Mars 2024

Le GreffierLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 9ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 19/08651
Date de la décision : 18/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-18;19.08651 ?
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