La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/03/2024 | FRANCE | N°23/08946

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp référé, 15 mars 2024, 23/08946


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le : 15/03/2024
à : Maitre Benoît CHABERT

Copie exécutoire délivrée
le : 15/03/2024
à : Maitre Stéphane BONIFASSI

Pôle civil de proximité

PCP JCP référé

N° RG 23/08946
N° Portalis 352J-W-B7H-C3KNX

N° MINUTE : 1/2024


ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 15 mars 2024
DEMANDERESSE

La Société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY immatriculée au RCS de PARIS sous le N° 445 343 528, dont le siège social est sis [Adresse 12]
représen

tée par Maitre Stéphane BONIFASSI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #A0619

DÉFENDEURS

Madame [B] [S] épouse [H]- [X], demeurant [Adresse 15](E...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le : 15/03/2024
à : Maitre Benoît CHABERT

Copie exécutoire délivrée
le : 15/03/2024
à : Maitre Stéphane BONIFASSI

Pôle civil de proximité

PCP JCP référé

N° RG 23/08946
N° Portalis 352J-W-B7H-C3KNX

N° MINUTE : 1/2024

ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 15 mars 2024
DEMANDERESSE

La Société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY immatriculée au RCS de PARIS sous le N° 445 343 528, dont le siège social est sis [Adresse 12]
représentée par Maitre Stéphane BONIFASSI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #A0619

DÉFENDEURS

Madame [B] [S] épouse [H]- [X], demeurant [Adresse 15](EMIRATS ARABES UNIS)
Monsieur [M] [O] [E] [H]- [X], demeurant [Adresse 13](EMIRATS ARABES UNIS)

représentés par Maitre Benoît CHABERT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #A0039

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Clara SPITZ, Juge, juge des contentieux de la protection
assistée de Véronique FRADIN, greffière, lors des débats, de Delphine VANHOVE, Greffière, lors du délibéré,

DATE DES DÉBATS

Audience publique du 11 janvier 2024

ORDONNANCE

contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition le 15 mars 2024 par Clara SPITZ, Juge, juge des contentieux de la protection assistée de Véronique FRADIN, greffière, lors des débats, de Delphine VANHOVE, Greffière, lors du délibéré,
Décision du 15 mars 2024
PCP JCP référé - N° RG 23/08946 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3KNX

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 15 novembre 2023, la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY a assigné Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris, statuant en référé, afin de :
leur ordonner de quitter les lieux et restituer les clés après établissement d'un état des lieux de sortie des biens détenus par la Société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY situés [Adresse 10] dont les références cadastrales sont : section [Cadastre 14],[Cadastre 9]pour 7a48ca, lieu-dit « [Adresse 16] », comprenant les parcelles suivantes : [Cadastre 9], [Cadastre 1], [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 11],voir ordonner leur expulsion de l'ensemble immobilier susmentionné dans un délai d'un mois suivant la signification du commandement de quitter les lieux avec au besoin l’assistance de la force publique et d'un serrurier, le tout sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard à compter de l'expiration du délai susmentionné,voir ordonner l'enlèvement et le dépôt des meubles et objets mobiliers appartenant à Madame [B] [V], épouse [X] garnissant les biens appartenant à la Société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY en un lieu approprié aux frais, risques et périls de Madame [B] [V], épouse [X],condamner solidairement Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X] au paiement d'une indemnité d'occupation de 12 500 euros par mois à compter du 18 octobre 2022,ordonner à Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X] de laisser l'accès aux biens détenus par la Société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANYles condamner solidairement au paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Lors de l'audience du 11 janvier 2024, la Société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY, représentée par son conseil, a déposé des conclusions qu'elle a soutenues oralement et aux termes desquelles elle demande :
in limine litis, de débouter Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X] de leur demande de surseoir à statuer,de débouter Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X] de l'intégralité de leurs demandes,de leur ordonner de quitter les lieux et de restituer les clés après établissement d'un état des lieux de sortie des biens détenus par la Société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY situés [Adresse 10] dont les références cadastrales sont : section [Cadastre 14],[Cadastre 9]pour 7a48ca, lieu-dit « [Adresse 16] », comprenant les parcelles suivantes : [Cadastre 9], [Cadastre 1], [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 11],d'ordonner leur expulsion de l'ensemble immobilier susmentionné ainsi que celle de tout occupant de leur chef dans un délai d'un mois suivant la signification du commandement de quitter les lieux avec au besoin l’assistance de la force publique et d'un serrurier, le tout sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard à compter de l'expiration du délai susmentionné,d'ordonner l'enlèvement et le dépôt des meubles et objets mobiliers appartenant à Madame [B] [V], épouse [X] en un lieu approprié aux frais, risques et périls de cette dernière,de condamner solidairement Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X] au paiement d'une indemnité d'occupation de 12 500 euros par mois à compter du 20 juillet 2023,de les condamner solidairement au paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Au soutien de ses prétentions, la demanderesse expose que ses parts étaient détenues à hauteur de 99 ,99% par Monsieur [M] [X] [H] et à hauteur de 0,01% par Madame [B] [V], épouse [X] jusqu'à ce qu'une sentence arbitrale du 16 juillet 2015, définitive depuis le 02 décembre 2020, ait reconnu Monsieur [M] [X] [H] débiteur de la société CERNER MIDDLE EAST et que cette dernière ait acquis, le 02 juin 2022, la totalité de ses parts et qu'elle les ait revendues aux enchères publiques à la société CERNER FRANCE. Elle fait valoir, en outre que Monsieur [M] [X] [H] a été révoqué de ses fonctions de gérant et remplacé par Monsieur [C] [D] lors d'une assemblée générale qui s'est tenue le 20 juillet 2023 à l'initiative du mandataire ad hoc désigné par le président tribunal judiciaire de Paris le 22 juin 2023. Par suite, le nouveau gérant a été autorisé, lors de l'assemblée générale du 04 septembre 2023, à procéder à la vente de l'ensemble immobilier dont la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY indique qu'il ne constitue pas la résidence des époux.
Ainsi, elle soutient que l'associé majoritaire est en droit de demander l'expulsion de l'associé minoritaire et qu'en tout état de cause, l'associé qui refuse de quitter le bien immobilier, alors même qu'il l'utilise à titre de résidence secondaire, qu'il réside à l'étranger et que les statuts ne prévoient aucune mise à disposition du bien à ses associés, doit être considéré comme occupant sans droit ni titre. C'est ainsi, qu'elle se dit bien-fondée à solliciter, sur le fondement de l'article 835 du code de procédure civile, l'expulsion des époux [X] et leur condamnation solidaire à lui payer une indemnité d'occupation de 12 000 euros par mois. Elle vise, en outre, l'article 834 du code de procédure civile invoquant l'urgence à récupérer le bien pour procéder à la vente de celui-ci et régler la créance de la société CERNER MIDDLE EAST fixée par la sentence arbitrale du 16 juillet 2015, à la somme de 65 487 757,27 euros en principal et intérêts.

Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X], représentés par leur conseil, ont déposé des conclusions en défense aux termes desquelles ils sollicitent,
à titre principal et in limine litis, qu'un sursis à statuer soit ordonné,à titre subsidiaire,de débouter la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY de l'ensemble de ses demandes,de la condamner à la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,à titre très subsidiaire,de débouter la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY de sa demande de condamnation à quitter les lieux sous astreinte,de débouter la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY de sa demande de condamnation à une indemnité d'occupation,de débouter la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,à titre infiniment subsidiaire,de réduire à de plus juste proportions les sommes allouées à la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY,de leur accorder un délai de paiement de deux ans pour le paiement de ces sommes.
En premier lieu, les défendeurs demandent qu'il soit sursis à statuer, exposant avoir fait appel de la décision du tribunal judiciaire de PARIS du 22 juin 2023 qui a désigné le mandataire ad hoc ayant convoqué l'assemblée générale du 23 juillet 2023, laquelle a procédé à la désignation de Monsieur [C] [D] comme nouveau gérant. Ils expliquent ainsi que si ce jugement est infirmé, le mandat du nouveau gérant qui a autorisé la vente du bien immobilier lors de l'assemblée générale du 04 septembre 2023 sera anéanti. Ils indiquent en outre avoir assigné la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY le 09 octobre 2023 aux fins de suspension de l'effet des délibérations prises lors de cette même assemblée générale du 04 septembre 2023 et que si elle était prononcée, cette suspension priverait d'objet la saisine du juge des référés du pôle de proximité du tribunal judiciaire de PARIS puisque la remise des clés sollicitée auprès des défendeurs dérive exclusivement du mandat de vente.
A titre subsidiaire, les époux [X] soutiennent que la demande de la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY ne revêt aucun caractère d'urgence particulier et qu'en outre, elle se heurte à une contestation sérieuse en ce qu'elle est contraire aux dispositions de la Convention Européenne des droits de l'Homme prise en son article 8 qui impose le respect de la vie privée et familiale de toute personne, y compris de son domicile et de sa correspondance auquel seul peut être opposé la poursuite d'un but légitime assortie de garanties procédurales suffisantes. Or ils exposent que le bien immobilier dont il est demandé leur expulsion constitue le domicile de Madame [B] [V], épouse [X] et que son éviction ne saurait être décidée par le juge des référé, juge de l'évidence.
Enfin, à titre infiniment subsidiaire, ils sollicitent que le montant de l'astreinte qui pourrait être fixée soit rapporté à de plus justes proportions et font valoir qu'ils ne saurait être redevables d'une indemnité d'occupation à compter du 18 octobre 2022 soutenant également que l'évaluation du montant de cette indemnité n'est pas étayée.

A l'issue des débats, l'affaire a été mise en délibéré. Le présent jugement a été mis à disposition des parties au greffe du tribunal le 15 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande in limine litis de surseoir à statuer

Selon les articles 378 et suivants du code de procédure civile, la décision de sursis à statuer suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine. Le sursis à statuer ne dessaisit pas le juge. A l'expiration du sursis, l'instance est poursuivie à l'initiative des parties ou à la diligence du juge, sauf la faculté d'ordonner, s'il y a lieu, un nouveau sursis (…).

Le sursis à statuer peut être ordonné, en vertu du pouvoir discrétionnaire du juge, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice.

En l'espèce, les défendeurs demandent, in limine litis, qu'il soit sursis à statuer sur les demandes formées par la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY au motif que deux procédures sont actuellement pendantes devant deux juridictions distinctes à savoir :
l'appel de la décision du tribunal judiciaire de PARIS du 22 juin 2023 ayant désigné la SELARL BPV en qualité de mandataire chargé de provoquer la délibération des associés de la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY notamment concernant la révocation de Monsieur [M] [X] [H] en tant que gérant et la nomination de Monsieur [C] [D] en qualité de nouveau gérant,l'assignation délivrée le 09 octobre 2023 par Madame [B] [V], épouse [X] à la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY devant le juge des référé du tribunal judiciaire de PARIS aux fins de suspension des effets des décisions prises lors de l'assemblée générale extraordinaire du 04 septembre 2023 dans l'attente qu'il soit statué sur la gérance de la société, en ce notamment qu'elle a autorisé, par la voie de son nouveau gérant, la vente de l'ensemble immobilier.
Il ressort de ces deux procédures que les défendeurs contestent la qualité de nouveau gérant de Monsieur [C] [D] et, par voie de conséquence, la décision qui a été prise lors de l’assemblée générale du 04 septembre 2023 de vendre l'ensemble immobilier.

Or la vente éventuelle et future du bien n'a de lien avec la demande d'expulsion qu'en ce qu'elle attesterait de l'urgence à la voir ordonner, cette expulsion n'étant poursuivie en elle-même par la demanderesse qu'au regard du trouble manifestement illicite qui résulte, selon elle, de l'occupation sans droit ni titre des défendeurs d'un bien dont elle est propriétaire.
Décision du 15 mars 2024
PCP JCP référé - N° RG 23/08946 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3KNX

Par conséquent, il ne sera pas fait droit à la demande de surseoir à statuer formée in limine litis par les époux [X] puisque la solution du présent litige, à avoir l'éventuelle expulsion des défendeurs, ne dépend aucunement des procédures en cours relative à la contestation de la vente du bien immobilier.

Sur la demande d'expulsion et de condamnation à une indemnité provisionnelle d'occupation

Il résulte des articles 834 et 835 alinéa I du code de procédure civile que le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend. Ils peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite est la perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit.

En vertu de l'article 544 du code civil, la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements. L'occupation sans droit ni titre du bien d'autrui constitue un tel trouble manifestement illicite auquel il appartient au juge des référés de mettre fin.

En l'espèce, il n'est pas contesté que Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X] possèdent toujours les clés de l'appartement litigieux, propriété de la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY détenue à hauteur de 99,99% de ses parts par la société CERNER FRANCE et de 0,01% par Madame [B] [V], épouse [X].

En outre, Madame [B] [V], épouse [X] indique y demeurer.

Or force est de constater que les statuts de la société ne prévoient pas la mise à disposition du bien dont elle est propriétaire au profit de l'un de ses associés pour y habiter. En effet, l'article 2 des statuts dispose que la société a pour objet « l’acquisition, l'administration et l'exploitation par bail, location ou autrement des biens immobiliers... ».

Ainsi, les époux [X] ne disposent d'aucun droit ou titre d'occupation à des fins personnelles de ce logement, ce qu'ils ne revendiquent d'ailleurs pas.

Par ailleurs, Madame [B] [V], épouse [X] ne saurait invoquer que l’expulsion poursuivie constituerait une atteinte à son droit fondamental au respect de sa vie privé et familiale pour faire échec à la demande d'expulsion en ce qu'elle échoue à démontrer qu'elle occupe actuellement le logement litigieux à titre de sa résidence principale. L'avis d'imposition produit par les défendeurs date en effet de 2014 et les factures de biens mobiliers ou afférentes à la réalisation de travaux au sein du logement ne témoignent que de l'entretien d'un appartement dont à l'époque les époux étaient pleinement propriétaires sans rapporter al preuve d'une occupation effective et actuelle.

A l'inverse, les pièces produites par la requérante témoignent d'une adresse de Madame [B] [V], épouse [X] aux Émirats Arabes-Unis, étant précisé qu'il n'est pas contesté que Monsieur [M] [X] [H] n'y demeure pas.

Par conséquent, il apparaît que Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X], qui détiennent toujours les clés de l'appartement, l'occupent, de ce fait, sans droit ni titre et que cette occupation caractérise un trouble manifestement illicite.
Décision du 15 mars 2024
PCP JCP référé - N° RG 23/08946 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3KNX

Il convient donc d'ordonner la libératoin volontaire des lieux par les occupants dans un délai de trois semaines à compter de la signification de la présente décision et à défaut de libération dans ce délai, leur expulsion ainsi que l'expulsion de tous occupants de leur chef dans les conditions prévues par l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution et selon les modalités fixées au dispositif du présent jugement étant précisé que rien ne justifie qu'il soit dérogé au délai de 2 mois suivant la signification du commandement de quitter les lieux.

S’agissant des meubles, il y a seulement lieu de prévoir qu’en cas d’expulsion, les meubles trouvés dans les lieux seront traités conformément aux dispositions des articles L 433-1 et L 433-2 du code des procédures civiles d'exécution qui permettent d’en régler le sort et il n’y a pas lieu de prévoir d’autres dispositions lesquelles ne sont pas à ce jour nécessaires et ne sont justifiées par aucun litige actuel.

Sur la demande d'astreinte

Selon l'article L131-2 du code des procédures civiles d'exécution, l'astreinte est indépendante des dommages-intérêts. Elle peut être provisoire ou définitive.

Il résulte de l'article L 421-2 du même code que, par exception au premier alinéa de l'article L. 131-2, le montant de l'astreinte une fois liquidée ne peut excéder la somme compensatrice du préjudice effectivement causé. Il est tenu compte, lors de sa fixation, des difficultés que le débiteur a rencontrées pour satisfaire à l'exécution de la décision.
L'astreinte n'est pas maintenue lorsque l'occupant a établi l'existence d'une cause étrangère qui ne lui est pas imputable et qui a retardé ou empêché l'exécution de la décision.

En l'espèce, compte-tenu de l'ancienneté du litige et de la nécessité de s'assurer de l'effectivité de la décision, il apparaît nécessaire d'assortir l'obligation de quitter les lieux d'une astreinte dont le juge des référés se réservera la liquidation.

Au regard de la particularité du litige, elle sera fixée à la somme de 400 euros par jour de retard, à compter du délai de deux mois suivant la signification du commandement de quitter les lieux en cas de défaut de libération volontaire du bien et ce pendant six mois.

Sur la demande d'indemnité d'occupation mensuelle

Selon l'article 835 aliéna 2 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le maintien dans des lieux sans droit ni titre constitue une faute civile de nature quasi-délictuelle ouvrant droit à réparation en ce qu'elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l'occupation indue de son bien l'a privé de sa jouissance. Au delà de cet aspect indemnitaire, l'indemnité d'occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des locaux.

En l'espèce, il convient de requalifier la demande de la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY de condamner solidairement Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X] au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle de 12 500 euros en une demande de paiement d'une indemnité d'occupation provisionnelle au regard de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile.

La société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY ne fournit cependant aucun justificatif sur les caractéristiques des lieux occupés ni de simulation de location dans le quartier. Il ressort toutefois des statuts de la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY que l’ensemble immobilier, situé dans le [Localité 2], représente une superficie totale de 748 m² et qu'il est composé d'un appartement principal de 8 pièces ainsi que de cinq chambres de services et de deux caves.
Décision du 15 mars 2024
PCP JCP référé - N° RG 23/08946 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3KNX

Ainsi, au regard de la nature des lieux, de leur emplacement, de leur surface et de leur standing, ainsi que de la nécessité de rendre dissuasive l'occupation tout en compensant le préjudice subi par le propriétaire des lieux, l'indemnité d'occupation peut être fixée à 12 000 euros par mois.

Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X] seront ainsi condamnés in solidum au paiement de cette somme à titre provisionnel. Celle-ci sera due à compter du 20 juillet 2023, correspondant à la date à laquelle Monsieur [M] [X] [H] a été révoqué de ses fonctions de gérant et conformément à la demande de la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY jusqu'à la libération effective des lieux matérialisée par la remise des clés.

Sur la demande de délai formée par les époux [X],

L’article 1343-5 du code civil prévoit que le juge peut, compte-tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues (…).

En l'espèce, Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X] sont condamnés au paiement d'une indemnité mensuelle d’occupation provisionnelle à hauteur de 12 000 euros à compter du 23 juillet 2023 jusqu'à la libération effective des lieux. Cette dette est constituée pour partie d'une somme déterminée correspondant aux mensualités déjà échues et pour une autre partie, d'un montant inconnu qui ne dépend que de la date à laquelle les époux [X] consentiront à quitter les lieux. De même, le montant final de l'astreinte est, par nature, indéterminé.

En outre, les époux [X] n'apportent aucun élément justificatif de leur situation financière au soutien de leur demande de délai.

Compte-tenu de ce qui précède, ils seront déboutés de leur demande de délais de paiement.

Sur les demandes accessoires

Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X], parties perdantes, seront condamnés aux entiers dépens de l'instance.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, ils seront condamnés à verser à la Société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY une somme de 3 000 euros et déboutés de leur demande formée à ce titre.

Il sera rappelé que conformément à l'article 514-1 du code de procédure civile, les décisions en référé sont de droit assortie de l’exécution provisoire, laquelle ne peut être écartée.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge des contentieux de la protection, statuant en référé après débats publics, par ordonnance mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

Au principal, RENVOYONS les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront mais dès à présent et par provision, vu l'absence de contestation sérieuse,

DÉBOUTONS Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X] de leur demande in limine litis de sursis à statuer,

ORDONNONS à Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X] de libérer volontairement, dans un délai de trois semaines à compter de la signification de la présente décision, les lieux situés au sein de l'ensemble immobilier sis [Adresse 10] dont les références cadastrales sont : section [Cadastre 14],[Cadastre 9]pour 7a48ca, lieu-dit « [Adresse 16] », comprenant les parcelles suivantes : [Cadastre 9], [Cadastre 1], [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 11],

ORDONNONS, à défaut de libération volontaire dans ce délai, leur expulsion des lieux susmentionnés, ainsi que celle de tout occupant de leur chef avec si besoin le concours de la Force Publique et celui d'un serrurier, deux mois après la délivrance d’un commandement de quitter les lieux et sous astreinte provisoire de 400 euros par jour de retard passé ce délai pendant une durée de six mois,

RAPPELONS que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

CONDAMNONS Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X] in solidum à verser à la Société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY une indemnité provisionnelle mensuelle d’occupation pour le logement d'un montant de 12 000 euros (douze mille euros) à compter du 23 juillet 2023 et jusqu’à la date de la libération effective et définitive des lieux (volontaire ou en suite de l'expulsion) ;

DÉBOUTONS Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X] de l'ensemble de leurs demandes,

CONDAMNONS Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X] in solidum à verser à la société CONSEILLER COLLIGNON LAND COMPANY une somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;
 
CONDAMNONS Monsieur [M] [X] [H] et Madame [B] [V], épouse [X] in solidum aux dépens ;
 
RAPPELONS que la présente ordonnance est de plein droit exécutoire à titre provisoire ;
 
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition les jour, mois et an susdits par la juge et la greffière susnommées.
 
La greffière,                                                              La juge des contentieux de la protection


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp référé
Numéro d'arrêt : 23/08946
Date de la décision : 15/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs en accordant des délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-15;23.08946 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award