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14/03/2024 | FRANCE | N°23/09325

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp fond, 14 mars 2024, 23/09325


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Madame [D] [K]

Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Emmanuelle GUICHETEAU

Pôle civil de proximité


PCP JCP fond

N° RG 23/09325 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3OEL

N° MINUTE :







JUGEMENT
rendu le jeudi 14 mars 2024


DEMANDERESSE
L’Association HABITAT ET HUMANISME ILE DE FRANCE, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Emmanuelle GUICHETEAU, avocat au barreau de PARIS, v

estiaire : #C1904


DÉFENDERESSE
Madame [D] [K]
demeurant [Adresse 2]
comparante en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Imen GRAA, Juge des contentieux de la protection
assi...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Madame [D] [K]

Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Emmanuelle GUICHETEAU

Pôle civil de proximité

PCP JCP fond

N° RG 23/09325 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3OEL

N° MINUTE :

JUGEMENT
rendu le jeudi 14 mars 2024

DEMANDERESSE
L’Association HABITAT ET HUMANISME ILE DE FRANCE, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Emmanuelle GUICHETEAU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #C1904

DÉFENDERESSE
Madame [D] [K]
demeurant [Adresse 2]
comparante en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Imen GRAA, Juge des contentieux de la protection
assistée de Coraline LEMARQUIS, Greffière,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 19 décembre 2023

JUGEMENT
contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 14 mars 2024 par Imen GRAA, juge des contentieux de la protection; assistée de Coraline LEMARQUIS, Greffière

Décision du 14 mars 2024
PCP JCP fond - N° RG 23/09325 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3OEL

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat sous seing privé daté du 12 octobre 2020, l'association HABITAT ET HUMANISME Ile-de-France a donné à bail à Madame [D] [K], un appartement à usage d'habitation (foyer-logement) situé [Adresse 2] pour une contribution mensuelle de 570 euros outre 105 euros de charges, soit la somme totale de 675 euros.

Par avenant du 10 mai 2023 à effet du 1er avril 2023, il a été convenu de modifier le montant de la contribution mensuelle à la somme de 295 euros outre des charges de 105 euros soit la somme totale de 400 euros.

A l'article 03 de cette convention d'occupation, il est précisé que la durée maximale de la convention est de 18 mois.

Se prévalant du dépassement de la durée maximale de séjour, et du refus de la solution de relogement proposée, l'association HABITAT ET HUMANISME IDF a fait signifier à la locataire par courrier recommandé daté du 08 juin 2023 et reçue le 12 juin 2023, la résiliation de la convention d'occupation et la nécessité de libérer les lieux au 12 juillet 2023.

Par acte d'huissier en date du 11 octobre 2023, l'association HABITAT ET HUMANISME ILE DE FRANCE a fait assigner Madame [D] [K] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
-Juger valable la résiliation de contrat notifiée à Madame [D] [K] par LRAR du 08 juin 2023 ;
-Prononcer la résiliation judiciaire du titre d'occupation temporaire à la date du 08 juillet 2023
-Ordonner l'expulsion de Madame [D] [K] et de tout occupant de son chef avec le concours de la force publique si besoin est,
-Ordonner la séquestration des meubles en tel lieu qu'il lui plaira, aux frais et aux risques du défendeur,
-Condamner Madame [D] [K] à lui payer une indemnité d'occupation jusqu'à libération effective des lieux d'un montant mensuel égal au montant de la contribution contractuelle si le bail s'était poursuivi,
-Condamner Madame [D] [K] à lui payer la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens comprenant les frais d'assignation et du congé.

Au soutien de ses prétentions, l'association HABITAT ET HUMANISME ILE DE FRANCE expose que la défenderesse a dépassé la durée maximale de séjour de 18 mois, si bien que la convention d'occupation s'est trouvée valablement résiliée à l'expiration d'un délai d'un mois après l'envoie par LRAR de ladite résiliation. En outre, Madame [D] [K] ayant refusé un relogement, la Direction du Logement et de l'Habitat (DLH) de la Ville de [Localité 3] a demandé à l'association HABITAT ET HUMANISME ILE DE FRANCE de procéder à l'expulsion de Madame [D] [K] au motif de ce refus et du dépassement de la durée maximale autorisée.

A l'audience du 19 décembre 2023, l'association HABITAT ET HUMANISME ILE DE FRANCE, représentée par son conseil, a sollicité le bénéfice de son acte introductif d'instance.

Madame [D] [K] a expliqué avoir été contrainte de refuser la solution de relogement proposé car elle se trouvait trop éloigné de son lieu de travail. Or, elle travaille avec des horaires très atypiques et a en charge un enfant en bas âge, qu'elle doit pouvoir déposer avant d 'aller au travail. En acceptant le logement proposé dans le 15ème arrondissement, elle aurait dû démissionner et se trouver sans ressources. Elle est depuis 6 ans agent de soins faisant fonction d 'aide-soignant, et a intégré l'école des aides-soignants. Elle a renouvelé sa demande de logement sociale et sollicité de la mairie du 14ème arrondissement de [Localité 3] un logement.

Bien qu'informée par la présidente d'audience de son droit à solliciter des délais pour quitter les lieux, et bien que le conseil de la société bailleresse ait indiqué s'en remettre sur ce point à l'appréciation du tribunal, Madame [D] [K] n'a pas formulé de demande en ce sens ; souhaitant avant tout une solution de relogement pérenne et craignant de se retrouver avec son enfant de 6 ans à la rue.

La décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 14 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

A titre liminaire sur le statut juridique applicable au titre d'occupation litigieux, il convient de rappeler que le logement occupé par Madame [D] [K] est soumis à la législation des logements-foyers résultant des articles L.633-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation. Ainsi, il est soumis à une réglementation spécifique qui exclut le droit au maintien dans les lieux de l'occupant et il échappe aux dispositions protectrices de l'article L.632-1 du code de la construction et de l'habitation en vertu de l'article L.632-3 du même code ainsi qu'au titre Ier bis précité de la loi du 6 juillet 1989 en vertu de l'article 25-3 de la loi du 6 juillet 1989.

Sur la résiliation du titre d'occupation

Aux termes de l'article 1224 du code civil, la résolution d'un contrat résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice. L'article 1229 du même code précise que lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l'exécution réciproque du contrat, il n'y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n'ayant pas reçu sa contrepartie et que, dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation. L'article 1225 précise qu'en présence d'une clause résolutoire, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution. La mise en demeure doit viser expressément la clause résolutoire pour produire effet.

En matière de logement foyer plus précisément, en application de l'article L.633-2 du code de la construction et de l'habitation, le contrat est conclu pour une durée d'un mois et tacitement reconduit à la seule volonté de la personne logée. La résiliation du contrat par le gestionnaire ou le propriétaire ne peut intervenir que dans les cas suivants :
- inexécution par la personne logée d'une obligation lui incombant au titre de son contrat ou d'un manquement grave ou répété au règlement intérieur ;
- cessation totale d'activité de l'établissement ;
- cas où la personne logée cesse de remplir les conditions d'admission dans l'établissement considéré.

L'article R.633-3 du même code précise que le gestionnaire ou le propriétaire peut résilier le contrat dans l'un des cas prévus à l'article L. 633-2 sous réserve d'un délai de préavis :
a) d'un mois en cas d'inexécution par la ou les personnes titulaires du contrat d'une obligation leur incombant au titre de ce contrat ou en cas de manquement grave ou répété au règlement intérieur. La résiliation peut être décidée pour impayé, lorsque trois termes mensuels consécutifs, correspondant au montant total à acquitter pour le logement, les charges et les prestations obligatoires et facultatives, sont impayés ou bien, en cas de paiement partiel, lorsqu'une somme au moins égale à deux fois le montant mensuel à acquitter pour le logement et les charges reste due au gestionnaire.
b) de trois mois lorsque la personne logée cesse de remplir les conditions d'admission dans l'établissement telles qu'elles sont précisées dans le contrat ou lorsque l'établissement cesse son activité.

Cet article précise les conditions de forme de la résiliation en indiquant que la résiliation du contrat est signifiée par huissier de justice ou notifiée par courrier écrit remis contre décharge ou par lettre recommandée avec avis de réception. Il est jugé au visa de ce texte que la mise en œuvre de la clause résolutoire du contrat de résidence d'un logement-foyer est subordonnée à la remise effective de la lettre de mise en demeure à son destinataire (Ccass. Civ 3ème 1 décembre 2016, n° 15-27.795).

En l'espèce, le titre d'occupation daté et à effet au 12 octobre 2020 a été conclu pour une durée de trois mois, renouvelable par tacite reconduction pour des périodes de même durée à partir de la date d'entrée à la résidence, soit le 12 octobre 2020 dans la limite de 18 mois (Article 3).

En outre, l'article 4 prévoit qu'il peut être mis un terme à ladite convention par l'envoi d'une LRAR et le respecté d'un préavis d 'un mois.

Par courrier adressée en LRAR le 08 juin 2023, l'association HABITAT ET HUMANISME ILE DE FRANCE a indiqué à Madame [D] [K] résilier le contrat pour dépassement de la durée maximale de séjour tout en respectant un délai de préavis d'un mois en fixant l'état des lieux de sortie au 12 juillet 2023.

Il sera ainsi constaté de la résiliation du bail au 12 juillet 2023 et non au 8 juillet 2023 comme sollicité par la bailleresse dans la mesure où le courrier portant résiliation du bail peut laisser penser que le maintien dans les lieux pouvait se poursuivre jusqu'au 12 juillet 2023.

Madame [D] [K] étant sans droit ni titre depuis 13 juillet 2023, il convient d'ordonner son expulsion ainsi que l'expulsion de tous occupants de son chef, selon les modalités fixées au dispositif de la présente décision.

Aucune circonstance particulière de l'espèce ne justifiant que le délai de deux mois prévu par les dispositions des articles L. 412-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution soit réduit ou supprimé, il convient d'indiquer que passé le délai de deux mois suivant la signification du commandement d'avoir à libérer les lieux, il pourra être procédé à cette expulsion, avec le concours de la force publique.

Il sera rappelé enfin que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution dont l'application relève, en cas de difficulté -laquelle n'est à ce stade que purement hypothétique-, de la compétence du juge de l'exécution et non de la présente juridiction.
Par conséquent, l'association HABITAT ET HUMANISME ILE DE FRANCE sera déboutée de sa demande de séquestration des meubles.

Sur l’indemnité d'occupation

Le maintien dans les lieux postérieurement à la date d'expiration du bail constitue une faute civile ouvrant droit à réparation en ce qu'elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l'occupation indue de son bien l'a privé de sa jouissance.

Au-delà de cet aspect indemnitaire, l'indemnité d'occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des locaux.

Madame [D] [K] sera condamnée à payer à l'association HABITAT ET HUMANISME ILE DE FRANCE une indemnité mensuelle d'occupation pour la période courant du 13 juillet 2023 à la date de la libération effective et définitive des lieux, égale au montant de la redevance qui aurait été due si le bail s'était poursuivi.

Il convient de constater l'absence au jour de l'audience de dette locative ; les loyers comme l'indemnité d'occupation dues ont été payés.

Sur les demandes accessoires

Madame [D] [K], partie perdante, supportera la charge des dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile, qui comprendront notamment le coût de l'assignation.

En équité, il convient de débouter l'association HABITAT ET HUMANISME ILE DE FRANCE de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l'article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection, statuant publiquement, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort, et mis à disposition au greffe,


CONSTATE la validité du congé délivré le 08 juin 2023 à effet du 12 juillet 2023 ;

CONSTATE que le titre d'occupation à effet du 12 octobre 2020 conclu entre d'une part, l'association HABITAT ET HUMANISME ILE DE FRANCE; et d'autre part, Madame [D] [K], relatif à l'appartement à usage d'habitation situé [Adresse 2], est résilié depuis le 12 juillet 2023 ;

ORDONNE en conséquence à Madame [D] [K], de libérer les lieux et de restituer les clés dans le délai de quinze jours à compter de la signification du présent jugement ;

DIT qu'à défaut pour Madame [D] [K] d'avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, l'association HABITAT ET HUMANISME ILE DE FRANCE pourra, deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu'à celle de tous occupants de son chef, y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique ;

DIT n'y avoir lieu à ordonner l'enlèvement, le transport et la séquestration des meubles éventuellement laissés sur place et rappelle que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

CONDAMNE Madame [D] [K] à verser à l'association HABITAT ET HUMANISME ILE DE FRANCE une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant équivalent à celui de la contribution, telle qu'elle aurait été si le contrat s'était poursuivi jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux (volontaire ou en suite de l'expulsion) ;

DEBOUTE l'association HABITAT ET HUMANISME ILE DE FRANCE de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE Madame [D] [K] aux dépens, qui comprendront notamment le coût de l'assignation ;

RAPPELLE que le présent jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition, le 14 mars 2024, par le juge des contentieux de la protection et le Greffier susnommés.

Le greffier Le juge des contentieux de la protection


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp fond
Numéro d'arrêt : 23/09325
Date de la décision : 14/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-14;23.09325 ?
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