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14/03/2024 | FRANCE | N°23/05803

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp fond, 14 mars 2024, 23/05803


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Maître BERNARD


Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître PALMA

Pôle civil de proximité


PCP JCP fond

N° RG 23/05803 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2KQ6

N° MINUTE :
2 JCP






JUGEMENT
rendu le jeudi 14 mars 2024

DEMANDERESSE
Madame [Z] [U],
demeurant [Adresse 1]

représentée par Maître JACQUIER, avocat au barreau de Paris, vestiaire #A628 ( aide juridictionnelle totale 2022/007207)

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Monsieur [I] [H],
Madame [X] [V],
demeurant [Adresse 2]

représentés par Maître BERNARD, avocat au barreau de Paris, vestiaire #R090


COMPOSITION DU TRIBUNAL
Sandr...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Maître BERNARD

Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître PALMA

Pôle civil de proximité

PCP JCP fond

N° RG 23/05803 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2KQ6

N° MINUTE :
2 JCP

JUGEMENT
rendu le jeudi 14 mars 2024

DEMANDERESSE
Madame [Z] [U],
demeurant [Adresse 1]

représentée par Maître JACQUIER, avocat au barreau de Paris, vestiaire #A628 ( aide juridictionnelle totale 2022/007207)

DÉFENDEURS
Monsieur [I] [H],
Madame [X] [V],
demeurant [Adresse 2]

représentés par Maître BERNARD, avocat au barreau de Paris, vestiaire #R090

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Sandra MONTELS, Vice-Présidente, juge des contentieux de la protection assistée d’Inès CELMA-BERNUZ, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 17 janvier 2024

JUGEMENT
contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 14 mars 2024 par Sandra MONTELS, Vice-Présidente assistée de Laura JOBERT, Greffier

Décision du 14 mars 2024
PCP JCP fond - N° RG 23/05803 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2KQ6

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 2 avril 2021, Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] ont consenti un bail d’habitation à Madame [Z] [U] sur des locaux situés au [Adresse 3] à [Localité 5], moyennant le paiement d’un loyer mensuel de 790 euros et d’une provision pour charges de 60 euros.

Par lettre du 5 janvier 2022 Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] ont donné congé à Mme [Z] [U] à effet au 2 avril 2022.

Mme [Z] [U] a quitté les lieux le 28 janvier 2022.

Par acte de commissaire de justice du 12 juin 2023, Mme [Z] [U] a assigné Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris aux fins d’obtenir :
leur condamnation solidaire à lui remettre un exemplaire de l’état des lieux de sortie dans le délai de 15 jours courant du prononcé du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard, la nullité du congé, leur condamnation solidaire au paiement des sommes suivantes :1000 euros à titre de dommages-intérêts pour la fixation d’un loyer supérieur à celui autorisé, 120 euros au titre des charges indument perçues, 3000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice de privation de droits d’APL, 1000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice de jouissance,2000 euros en réparation des préjudices matériels et moraux résultant de la délivrance du congé frauduleuxAinsi qu’aux entiers dépens.
Initialement appelée à l’audience du 29 août 2023 l’affaire a été retenue à l’audience du 17 janvier 2024.

A l’audience, Mme [Z] [U], assistée de son conseil qui a déposé des conclusions, demande :
Le rejet des demandes de Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] , Leur condamnation solidaire à lui régler la somme de 666,25 euros correspondant au trop-perçu au titre des loyers réglés sur la période du 2 avril 2021 au 28 janvier 2022, La requalification du contrat en contrat de location sur des locaux vides à usage d’habitation, Leur condamnation solidaire à lui régler la somme de 808,34 euros au titre des sommes indument perçues dans le cadre de l’exécution du contrat de location,leur condamnation solidaire à lui remettre un exemplaire de l’état des lieux de sortie sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé du jugement, leur condamnation solidaire au paiement des sommes suivantes : 3000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice de privation de droits d’APL, 1000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice de jouissance,Prononcer la nullité du congé, leur condamnation solidaire au paiement des sommes suivantes : 2000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices matériels et moraux résultant de la délivrance du congé frauduleux1000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice de jouissance,Ainsi qu’aux entiers dépens.
Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] , représentés par leur conseil qui a déposé des conclusions écrites demandent :

Le rejet des demandes de Mme [Z] [U], A titre reconventionnel sa condamnation à leur payer les sommes suivantes, avec compensation des créances réciproques :1000 euros à titre de dommages-intérêts pour leur dénigrement auprès de la CAF, 700 euros à titre de dommages-intérêts pour l’exécution de mauvaise foi du contrat de bail, 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
À l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré jusqu’à ce jour, où elle a été mise à disposition des parties au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Aux termes de l'article 9 du code procédure civile il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En application de l'article 1353 du code civil celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Sur la qualification du contrat de bail

Aux termes des articles 25-4 et 25-5 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs un logement meublé est un logement décent équipé d'un mobilier en nombre et en qualité suffisants pour permettre au locataire d'y dormir, manger et vivre convenablement au regard des exigences de la vie courante. Un inventaire et un état détaillé du mobilier sont établis dans les mêmes formes et en autant d'exemplaires que de parties lors de la remise et de la restitution des clés. Ces documents, établis contradictoirement et amiablement, sont signés par les parties ou par un tiers mandaté par elles et joints au contrat de location.
Le décret n° 2015-981 du 31 juillet 2015 fixant la liste des éléments de mobilier d'un logement meublé dispose que chaque pièce d'un logement meublé est équipée d'éléments de mobilier conformes à sa destination qui comportent au minimum : literie comprenant couette ou couverture, dispositif d'occultation des fenêtres dans les pièces destinées à être utilisées comme chambre à coucher, plaques de cuisson, four ou four à micro-ondes, réfrigérateur et congélateur, vaisselle nécessaire à la prise des repas, ustensiles de cuisine, table et sièges, étagères de rangement, luminaires, matériel d'entretien ménager adapté aux caractéristiques du logement.

En l’espèce, Mme [Z] [U] au visa des dispositions susvisées, sollicite la requalification du contrat de location meublée en location non meublée eu égard au mobilier manquant ou défectueux et de l’absence d’inventaire du mobilier.

Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] contestent cette qualification, faisant valoir que Mme [Z] [U] n’a jamais réclamé de mobilier, qu’un inventaire contradictoire a été établi (piècen°1), que les meubles garnissant le logement lui ont permis de vivre convenablement et qu’elle a signé le contrat en toute connaissance de cause.

Les parties ont signé un contrat intitulé « contrat de location meublée résidence principale du locataire - Titre I bis de la loi du 6 juillet 1989 » portant sur un logement d’une pièce.

Néanmoins, il est versé aux débats ce qui s’apparente à un état des lieux, incomplet, mentionnant uniquement que le séjour est équipé d’une table avec deux rallonges, d’un canapé lit, de deux luminaires, d’une télévision et d’une table basse.

Les autres éléments de mobilier listés au décret susvisé ne sont pas mentionnés, s’agissant notamment de la cuisine.

L’inventaire du mobilier, pourtant remis aux parties aux termes du contrat, n’est pas produit.

Bien qu’évoqués dans leurs écritures, le bordereau de pièces des défendeurs ne mentionne ni l’état des lieux d’entrée ni l’inventaire du mobilier.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que le mobilier équipant le logement est insuffisant pour permettre à la locataire d’y dormir, vivre et manger. Sont ainsi manquants les chaises, la vaisselle, une partie de l’électroménager (Mme [Z] [U] ayant admis la présence dans ses écritures d’un réfrigérateur), le linge de lit, éléments indispensables afin de permettre à la locataire de vivre convenablement dans le logement au sens des dispositions précitées.

En conséquence le contrat de bail doit être requalifié en contrat de location portant sur un logement vide soumis aux dispositions du titre 1 de la loi du 6 juillet 1989.

Sur les demandes au titre de la surévaluation des loyers et le préjudice financier résultant de la mauvaise qualification du bail

Aux termes de l’article 18 de la loi du 6 juillet 1989 pour chacune des zones d'urbanisation continue de plus de 50 000 habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d'accès au logement sur l'ensemble du parc résidentiel existant qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d'acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d'emménagements annuels dans le parc locatif social, un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de concertation, fixe annuellement le montant maximum d'évolution des loyers des logements vacants et des contrats renouvelés. (…). En cas de litige entre les parties résultant de l'application de ce décret, la commission départementale de conciliation est compétente et sa saisine constitue un préalable obligatoire à la saisine du juge par l'une ou l'autre des parties.
A l’appui de ses demandes Mme [Z] [U] fait valoir au visa de l’article 1302 du code civil que la commission de conciliation de [Localité 4] a par avis du 25 février 2022 constaté que le loyer quittancé à la somme de 790 euros hors charges était supérieur au loyer de référence majoré d’un montant de 720,30 euros, que Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] ont ainsi perçu un surplus de loyer d’un montant de 666,25 euros pendant la période d’occupation, que par ailleurs la qualification erronée du bail lui a causé un préjudice financier en ce que les bailleurs ont sollicité un loyer plus élevé que celui qu’ils étaient en droit de solliciter pour un logement vide, le loyer de référence majoré pour les logements non meublés étant de 30,40 euros/m2 et de 34.30 euros/m2 pour les logements meublés.

Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] ont accepté de régler la somme de 666,25 euros mais contestent devoir la somme de 808,34 euros.

Il ne ressort pas des pièces de Mme [Z] [U] que le loyer de référence majoré pour un logement non meublé soit de 30,40 euros/m2 mais au contraire de 34,30 euros /m2 (pièce 17) donc égale à celui d’un logement meublé.

Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] seront en conséquence condamnés in solidum à verser à Mme [Z] [U] la somme de 666,25 euros en réparation de son préjudice financier.

Sur la remise de l’état des lieux de sortie

Aux termes de l’article 3-2 de la loi du 6 juillet 1989 un état des lieux est établi dans les mêmes formes et en autant d'exemplaires que de parties lors de la remise et de la restitution des clés. Il est établi contradictoirement et amiablement par les parties ou par un tiers mandaté par elles et joint au contrat de location.

En l’espèce, au visa de cet article Mme [Z] [U] expose ne pas avoir reçu d’exemplaire de l’état des lieux de sortie pourtant effectué le 28 janvier 2022 et demande la condamnation de Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] à le lui remettre sous astreinte.

Ceux-ci exposent l’avoir égaré et précisent qu’un exemplaire a été remis Mme [Z] [U].

Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] étant dans l’impossibilité de produire ce document, une telle condamnation même sous astreinte ne permettrait pas à Mme [Z] [U] d’en obtenir la délivrance. Mme [Z] [U] sera en conséquence déboutée de sa demande.

Sur la demande en réparation du préjudice de privation de droits à l’APL

Mme [Z] [U] soutient que les bailleurs ne lui ont pas communiqué les documents qui lui auraient permis de percevoir l’APL et notamment la mention de la superficie sur le contrat de location.

Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] soutiennent que Mme [Z] [U] ne rapporte pas la preuve de son préjudice.
A l’appui de sa demande Mme [Z] [U] produit une attestation de paiement de la CAF du 7 février 2023 établie au nom d’[D] [U], ainsi que des courriers adressés à la CAF postérieurement à la libération des lieux.

Elle ne justifie néanmoins aucunement de ses demandes lors du bail auprès de la CAF, de demandes de justificatifs par cet organisme ni d’une carence des bailleurs qui l’aurait empêchée de prétendre à des aides sociales et notamment l’APL.

Elle sera en conséquence déboutée de sa demande.

Sur la demande en réparation du préjudice de jouissance

Aux termes de l’article 6 de la loi du 6 juillet 1989, le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, exempt de toute infestation d'espèces nuisibles et parasites, répondant à un critère de performance énergétique minimale, défini par un seuil maximal de consommation d'énergie finale par mètre carré et par an, et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation. Le bailleur est obligé : a) De délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement (…); b) D'assurer au locataire la jouissance paisible du logement et, sans préjudice des dispositions de l'article 1721 du code civil, de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle (…), c) D'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués (…).
Le bailleur est obligé d’assurer au preneur une jouissance paisible de la chose louée pendant la durée du bail et cette obligation ne cesse qu’en cas de force majeure.
En l’espèce, Mme [Z] [U] expose que des désordres ont affecté l’appartement et le mobilier sans que les bailleurs n’agissent en conséquence ; canapé-lit cassé, prises électriques défectueuses, instabilité des toilettes, fenêtre ne fermant pas, chaise noire cassée, tiroir du freezer du réfrigérateur ne fermant pas, ce dont elle les a informés dès le 4 avril 2021 soit deux jours après son entrée dans les lieux.

Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] soutiennent que Mme [Z] [U] n’a jamais fait état de désordres dans le délai de 10 jours après l’entrée dans les lieux, qu’elle est elle-même à l’origine des dégradations, qu’ils lui ont déjà versé 700 euros pour l’usage du canapé-lit défectueux qu’ils ont accepté de changer.

Madame [Z] [U] produit un courrier du 21 avril 2021, que Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] reconnaissent dans leurs écritures avoir reçu, par lequel elle les informe de difficultés dans l’appartement qui n’ont pas été relevées lors de l’état des lieux d’entrée : toilettes instables, ciment rattachant la conduite d’évacuation endommagée, prise électrique du miroir de la salle de bains cassée, une chaise noire cassée, tiroir du compartiment freezer cassée, canapé-lit ne se dépliant plus automatiquement. Elle produit un échange de SMS avec M. [H] dont il ressort qu’elle l’avait alerté le 19 avril 2021 sur les problèmes de prise de salle de bains, des toilettes et du canapé lit. Elle produit également des photographies non datées.

Le fait que Mme [Z] [U] n’ait pas fait état de désordres dans le délai de 10 jours après l’entrée dans les lieux importe peu dans la mesure où elle ne demande pas une modification de l’état des lieux mais réparation de son préjudice lequel peut naître durant toute la durée du bail.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que Mme [Z] [U], 15 jours après son entrée dans les lieux, a fait état de désordres auprès des bailleurs, lesquels au demeurant ne les contestent pas bien qu’ils en attribuent l’origine à la locataire ce qui n’est pas compatible avec le très court délai d’occupation et ne ressort aucunement des SMS de M. [H].

Il y a donc lieu à réparation du préjudice de jouissance. Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] seront condamnés in solidum à verser à Mme [Z] [U] la somme de 700 euros en réparation à titre de dommages-intérêts.

Sur la nullité du congé

Mme [Z] [U] soutient que le congé est nul quelque que soit la qualification du bail en ce qu’il a été délivré tardivement et n’est pas motivé, sans qu’elle n’ait à justifier d’un quelconque grief, ce qui lui a causé un préjudice matériel et moral.

Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V], s’ils admettent le caractère tardif du congé, font valoir que Mme [Z] [U] ne justifie d’aucun grief alors qu’il s’agit d’une nullité relative et que le congé mentionne l’existence d’un doute sur sa solvabilité ce qui constitue un motif légitime et sérieux, qu’en tout état de cause si la nullité du congé devait être prononcée, Mme [Z] [U] ne justifie d’aucun préjudice.

Sur le motif du congé

Aux termes de l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 lorsque le bailleur donne congé à son locataire, ce congé doit être justifié soit par sa décision de reprendre ou de vendre le logement, soit par un motif légitime et sérieux, notamment l'inexécution par le locataire de l'une des obligations lui incombant. A peine de nullité, le congé donné par le bailleur doit indiquer le motif allégué et, en cas de reprise, les nom et adresse du bénéficiaire de la reprise ainsi que la nature du lien existant entre le bailleur et le bénéficiaire. Lorsqu'il donne congé à son locataire pour reprendre le logement, le bailleur justifie du caractère réel et sérieux de sa décision de reprise.

Il convient de préciser que l’article 25-8 de ladite loi applicable aux logements meublés pose des conditions similaires à la délivrance du congé.

En l’espèce, le congé précise « je dois vous délivrer congé à la date du 2 avril 2022, date jusqu’à laquelle vous avez versé d’avance vos loyers étant donné qu’à la signature du contrat vous n’étiez pas en mesure de nous fournir des garants ni des justificatifs de revenus ».

Or, ces seuls éléments ne permettent pas de connaitre le fondement même du congé (reprise ou motif légitime et sérieux) ni a fortiori d’en apprécier la validité.

Il en résulte que le congé tel que délivré est nul, sans qu’il ne soit besoin d’examiner son caractère tardif, ce qui a nécessairement causé un grief à Mme [Z] [U] qui a dû rapidement trouver un autre logement dans un contexte locatif tendu sur la commune de [Localité 4].

Sur la demande indemnitaire, il y a lieu de relever que Mme [Z] [U] forme une demande unique de réparation de son préjudice matériel et moral. Or, il n’appartient pas au tribunal de ventiler les demandes par postes de préjudice. La demande indemnitaire sera en conséquence rejetée.

Sur la demande indemnitaire de Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V]

A l’appui de leur demande, Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] font valoir sur le fondement de l’article 1240 du code civil que Mme [Z] [U] les a dénigrés auprès de la CAF en faisant état dans un courrier d’un contexte d’intimidation et d’humiliation constant de leur part ce qui a porté atteinte à leur réputation, ce que Mme [Z] [U] conteste tout en soulignant avoir elle-même été victime de dénigrement tant aux termes du congé que de leurs écritures.

Si le contexte d’intimidation et d’humiliation évoqué par Mme [Z] [U] n’est pas fondé matériellement, Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] ne rapportent pas la preuve de leur préjudice auprès de la CAF, d’autant que le courrier de Mme [Z] [U] a été versé à une procédure individuelle et non publique.

La demande sera en conséquence rejetée.

Sur l’inexécution de mauvaise foi du contrat de bail

Aux termes de l’article 1104 du code civil, les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

A l’appui de leur demande indemnitaire Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] font valoir au visa de l’article 1104 du code civil que Mme [Z] [U] n’a jamais voulu exécuter son contrat de bonne foi en mentant sur les objets qu’elle a cassés et accusant ses « bailleurs de tout et n’importe quoi ».

Mme [Z] [U] sollicite le rejet de cette demande en soutenant que les bailleurs ne rapportent pas la preuve d’un manquement contractuel de sa part.

Il convient de relever d’une part que le préjudice de jouissance a été établi et que d’autre part Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] ne rapportent aucunement la preuve d’une quelconque mauvaise foi de la locataire, étant rappelé qu’ils ont eux-mêmes conclu un contrat inadapté à la situation réelle de l’appartement, qu’ils ont causé un préjudice de jouissance et ont délivré un congé atteint de nullité.

Ils seront en conséquence déboutés de leur demande.

Sur les autres demandes

Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V], qui succombent à la cause, seront condamnés aux dépens conformément à l’article 696 du code de procédure civile. Ils seront en conséquence déboutés de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’exécution provisoire est de plein droit en application de l'article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

REQUALIFIE le contrat de bail d’habitation meublée conclu le 2 avril 2021 entre Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V], d’une part, et Madame [Z] [U], d’autre part, concernant les locaux situés au [Adresse 3] à [Localité 5] en contrat de bail d’habitation non meublée ;

CONDAMNE in solidum Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] à payer à Mme [Z] [U] les sommes suivantes :
666,25 euros en réparation de son préjudice financier lié à la mauvaise qualification du bail, 700 euros en réparation de son préjudice de jouissance,
PRONONCE la nullité du congé délivré le 5 janvier 2022 par Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] à Mme [Z] [U],

DEBOUTE Mme [Z] [U] de ses autres demandes,

DEBOUTE Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] de l’ensemble de leurs demandes,

CONDAMNE Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] aux dépens ;

DÉBOUTE Monsieur [I] [H] et Madame [X] [V] de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.


Ainsi jugé par mise à disposition au greffe le 14 mars 2024, et signé par la juge et la greffière susnommées.

La Greffière La Juge


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp fond
Numéro d'arrêt : 23/05803
Date de la décision : 14/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-14;23.05803 ?
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