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12/03/2024 | FRANCE | N°23/03404

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr fond, 12 mars 2024, 23/03404


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Monsieur [J] [Z]
Monsieur [V] [D]
Monsieur [R] [M]


Copie exécutoire délivrée
le :

à : Me Dominique JOLY

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR fond

N° RG 23/03404 - N° Portalis 352J-W-B7H-CZUIW

N° MINUTE : 3







JUGEMENT
rendu le 12 mars 2024

DEMANDERESSE

S.C.I. RAFFAELLI,
[Adresse 1]
représentée par Me Dominique JOLY, avocat au barreau de PARIS,

DÉFENDEURS

Monsieur [J] [Z],
[Adresse 2]
comparant en personne

Monsieur [V] [D],
[Adresse 3]
non comparant, ni représenté

Monsieur [R] [M],
[Adresse 3]
non comparant, ni représenté

COMPOSITION DU TRI...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Monsieur [J] [Z]
Monsieur [V] [D]
Monsieur [R] [M]

Copie exécutoire délivrée
le :

à : Me Dominique JOLY

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR fond

N° RG 23/03404 - N° Portalis 352J-W-B7H-CZUIW

N° MINUTE : 3

JUGEMENT
rendu le 12 mars 2024

DEMANDERESSE

S.C.I. RAFFAELLI,
[Adresse 1]
représentée par Me Dominique JOLY, avocat au barreau de PARIS,

DÉFENDEURS

Monsieur [J] [Z],
[Adresse 2]
comparant en personne

Monsieur [V] [D],
[Adresse 3]
non comparant, ni représenté

Monsieur [R] [M],
[Adresse 3]
non comparant, ni représenté

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Romain BRIEC, Juge, juge des contentieux de la protection assisté de Aurélia DENIS, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 11 janvier 2024

JUGEMENT
réputé contradictoire et en premier ressort prononcé par mise à disposition le 12 mars 2024 par Romain BRIEC, juge des contentieux de la protection assisté de Aurélia DENIS, Greffier
Décision du 12 mars 2024
PCP JCP ACR fond - N° RG 23/03404 - N° Portalis 352J-W-B7H-CZUIW

EXPOSE DU LITIGE

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat sous seing privé en date du 4 février 2014 à effet le 11 février suivant, la SCI RAFFAELLI a donné à bail à Monsieur [J] [Z] un appartement à usage d’habitation situé au [Adresse 2], pour un loyer mensuel de 1410 euros outre une provision sur charges.

Monsieur [V] [D], Monsieur [R] [M] et Madame [B] [D] se sont portés caution solidaires par actes d’engagement séparés, pour la durée du bail, ceci compris les tacites reconductions, dans la limite de 61200 euros. Madame [B] [D] est décédée le 24 octobre 2022.

Des loyers étant demeurés impayés, la SCI RAFFAELLI a fait signifier par acte d'huissier un commandement de payer la somme de 10882,35 euros, à titre principal, correspondant à l’arriéré locatif, terme de décembre 2022 inclus, et visant la clause résolutoire contractuelle, le 15 décembre 2022. Les commandements ont été signifiés aux cautions Monsieur [V] [D] et Monsieur [R] [M] les 27 et 29 décembre suivant.

Par acte de commissaire de justice en date du 21 mars 2023, la SCI RAFFAELLI a fait assigner Monsieur [J] [Z], Monsieur [V] [D] et Monsieur [R] [M], devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- constater le jeu de la clause résolutoire insérée au contrat de bail liant les parties sur le fondement de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 et subsidiairement prononcer la résiliation judiciaire du bail aux torts du preneur,
- ordonner l'expulsion du preneur et de tout occupant de son chef avec le concours de la force publique et d'un serrurier si besoin est, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision,
- autoriser son expulsion immédiate par exception au délai légal de deux mois,
- ordonner le transport et la séquestration des meubles en tel lieu qu'il lui plaira, aux frais et aux risques du défendeur,
- dire que le preneur devenu occupant sans droit ni titre restera soumis à toutes les obligations et charges du bail résilié notamment en matière d'assurance,
- condamner les défendeurs à lui payer les loyers et charges impayés, soit la somme de 11439,37 euros, sous réserve des loyers à échoir, avec intérêts légaux à compter du commandement de payer, une indemnité d'occupation jusqu'à libération effective des lieux d'un montant mensuel égal au montant du loyer et des charges si le bail s'était poursuivi, ainsi que la somme de 1439 euros au titre de la clause pénale,
- condamner les défendeurs à lui payer la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens en ce compris le coût du commandement de payer.

Au soutien de ses prétentions, la SCI RAFFAELLI expose que plusieurs échéances de loyers sont demeurées impayées malgré un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au contrat de bail délivré le 15 décembre 2022, et ce pendant plus de deux mois.

Après plusieurs renvois, l’affaire a été appelée et retenue à l'audience du 11 janvier 2024.

A l’audience, la SCI RAFFAELLI, représentée par son conseil, a sollicité le bénéfice de son acte introductif d'instance, et a actualisé sa créance à la somme de 3967,96 euros, selon décompte en date du 10 janvier 2024. Elle a indiqué que les loyers courants sont payés depuis plusieurs mois et que le locataire apure progressivement sa dette mpar des versements supplémentaires. Elle s’est opposée à l’octroi de délais de paiement que pourrait accorder le juge.

[J] [Z] a comparu en personne à l’audience. Il a fait état de ressources tirés de deux activités professionnelles, pour un total mensuel de 5100 euros, tout en précisant que ses revenus pouvaient être fluctuants d’un mois sur l’autre. Il a déclaré avoir un revenu fiscal de 35000 euros environ. Il a aussi fait état qu’il héberge un enfant. Il a proposé d’effectuer un versement pour apurer sa dette début février 2024.

Bien que régulièrement assignés à personne, Monsieur [V] [D] et Monsieur [R] [M] n'ont pas comparu et ne se sont pas faits représenter. Conformément à l'article 473 du code de procédure civile, il sera statué par jugement réputé contradictoire.

Monsieur [J] [Z] a été autorisé à communiquer ses pièces financières (fiche d’imposition, facture du 15 décembre 2023) par note en délibéré, au plus tard le 16 janvier 2024.

La décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 12 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il sera relevé que Monsieur [J] [Z] a communiqué des pièces financières par note en délibéré comme il y avait été autorisé (mais au-delà de l’échéance qui lui avait été laissée). Ses pièces sont : un avis d’impôts de 2022 sur les revneus de 2021, un tableau de type excel faisant état de ses factures clients au 28 janvier 2024.

Aux termes de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la recevabilité de l'action

Une copie de l’assignation a été notifiée à la préfecture de Paris par la voie électronique le 21 mars 2023, soit plus de deux mois avant l’audience du 11 janvier 2024, conformément aux dispositions de l’article 24 III de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989. Etant une SCI familiale, la SCI RAFFAELLI n’était pas tenue de saisir la CCAPEX.

L’action est donc recevable.

Sur le bien-fondé de la résiliation du bail

L'une des obligations essentielles du preneur d'un contrat de bail est celle du paiement des loyers aux termes convenus en application de l'article 7 de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989.

Aux termes de l'article 1224 du code civil, la résolution d'un contrat résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice. L'article 1229 du même code précise que lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l'exécution réciproque du contrat, il n'y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n'ayant pas reçu sa contrepartie et que, dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

En matière de bail, l'article 24 I de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 dispose que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l'espèce, le bail conclu le 4 février 2014 contient une clause résolutoire et un commandement de payer visant cette clause a été signifié le 15 décembre 2022, pour la somme en principal de 10882,35 euros. Ce commandement rappelle la mention que le locataire dispose d'un délai de deux mois pour payer sa dette, comporte le décompte de la dette et l'avertissement qu'à défaut de paiement ou d'avoir sollicité des délais de paiement, le locataire s'expose à une procédure judiciaire de résiliation de son bail et d'expulsion, outre la mention de la possibilité pour le locataire de saisir le fonds de solidarité pour le logement de son département aux fins de solliciter une aide financière et de saisir, à tout moment, la juridiction compétente aux fins de demander un délai de grâce sur le fondement de l'article 1343-5 du code civil. Il est ainsi régulier en sa forme.

Il correspond par ailleurs bien à une dette justifiée à hauteur du montant des loyers échus et impayés (voir ci-après au titre de la demande en paiement) et est ainsi valable.

Ce commandement est enfin demeuré infructueux pendant plus de deux mois, de sorte qu’il y a lieu de constater que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire contenue dans le bail étaient réunies à la date du 15 février 2023.

Sur la demande en paiement au titre de l'arriéré locatif

Monsieur [J] [Z] est redevable des loyers impayés en application des articles 1103 du code civil et 7 de la loi du 6 juillet 1989.

En l’espèce la SCI RAFFAELLI produit un décompte démontrant que Monsieur [J] [Z] reste lui devoir la somme de 3967,96 euros à la date du 10 janvier 2024. Il n’y a pas frais de poursuite au décompte.

Pour la somme au principal, Monsieur [J] [Z], n’apporte aucun élément de nature à contester le principe ni le montant de la dette. Monsieur [J] [Z] et ses deux cautions seront donc condamnés solidairement au paiement de la somme de 3967,96 euros, avec les intérêts au taux légal à compter de la délivrance du commandement de payer.

Sur les délais de paiement

Les articles 24 V et VII de la loi du 6 juillet 1989 disposent que le juge peut, même d'office, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, au locataire en situation de régler sa dette locative et qui aurait repris le paiement du loyer courant. Cette dernière condition peut cependant être écartée si le bailleur y consent. Pendant le cours des délais ainsi accordés, les effets de la clause de résiliation de plein droit sont suspendus. Si le locataire se libère dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué ; dans le cas contraire, elle reprend son plein effet.

En l'espèce, le décompte locatif produit aux débats par la SCI RAFFAELLI démontre que Monsieur [J] [Z] a repris le paiement des loyers et apure progressivement sa dette locative qui a nettement diminué depuis l’assignation. Il a fait état d’une capacité financière lui permettant de solder l’arriéré locatif en un seul versement. Bien que les pièces justificatives produites par Monsieur [J] [Z] ne sont pas probantes pour étayer de sa capacité financière réelle actuelle (l’avis d’impôts n’est pas le dernier et l’état des factures est un document de type excel établi par lui-même), mais compte tenu du montant réduit de la dette et de sa proposition d’échéancier de très courte durée, il convient de lui accorder des délais de paiement dans les termes du dispositif, et de suspendre les effets de la clause résolutoire.

Il convient néanmoins de prévoir que tout défaut de paiement des loyers et charges courants d’une part, des délais de paiement d’autre part, justifiera la condamnation de Monsieur [J] [Z] au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation égale au montant du loyer et charges si le bail s'était poursuivi. La clause résolutoire retrouverait alors son plein effet, sans qu’il soit pour autant nécessaire d’écarter les dispositions de l’article L 412-1 du code des procédures civiles d’exécution ni d’accorder une astreinte, compte tenu qu’une indemnité d’occupation a été fixée.

Par ailleurs, la demande au titre de la clause pénale sera rejetée, celle-ci étant illicite au regard de l'article 4 i) de la loi du 6 juillet 1989 et peut en tout état de cause être réduite d'office par le juge si elle est manifestement excessive en application de l'article 1231-5 du code civil.

Sur les demandes accessoires

Monsieur [J] [Z] et ses deux cautions, parties perdantes, supporteront la charge des dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile, qui comprendront notamment le coût du commandement de payer.

Il serait inéquitable de laisser à la charge du bailleur les frais exposés par lui dans la présente instance et non compris dans les dépens. La somme de 1000 euros lui sera donc allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l'article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection statuant publiquement, après débats en audience publique, par jugement mis à disposition au greffe réputé contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire figurant au bail conclu le 4 février 2014 entre la SCI RAFFAELLI et Monsieur [J] [Z] concernant l’appartement à usage d’habitation situé au [Adresse 2] sont réunies à la date du 15 février 2023 ;

CONDAMNE solidairement Monsieur [J] [Z], Monsieur [V] [D] et Monsieur [R] [M], à verser à la SCI RAFFAELLI la somme de 3967,96 euros (décompte arrêté au 10 janvier 2024, incluant la mensualité de janvier 2024), avec les intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2022 sur la somme de 10882,35 euros et à compter de la signification de la présente décision pour le surplus ;

RAPPELLE que les paiements intervenus postérieurement au 10 janvier 2024 viennent s'imputer sur les sommes dues conformément à l'article 1342-10 du code civil et viennent ainsi en déduction des condamnations ci-dessus prononcées ;

AUTORISE les défendeurs à s’acquitter de cette somme, outre le loyer et les charges courants, en une mensualité de 2000 euros et une seconde mensualité qui soldera la dette en principal et intérêts ;

PRECISE que chaque mensualité devra intervenir avant le 10 de chaque mois jusqu'à extinction de la dette et pour la première fois le 10 du mois suivant la signification du présent jugement ;

SUSPEND les effets de la clause résolutoire pendant l’exécution des délais accordés ;

DIT que si les délais accordés sont entièrement respectés, la clause résolutoire sera réputée n’avoir jamais été acquise ;

RAPPELLE qu’en revanche, toute mensualité, qu'elle soit due au titre du loyer et des charges courants ou de l’arriéré, restée impayée sept jours après l'envoi d'une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception justifiera :
* que la clause résolutoire retrouve son plein effet ;
* que le solde de la dette devienne immédiatement exigible ;
* qu'à défaut pour Monsieur [J] [Z] d’avoir volontairement libéré les lieux dans les deux mois de la délivrance d’un commandement de quitter les lieux, la SCI RAFFAELLI puisse faire procéder à son expulsion ainsi qu’à celle de tous les occupants de son chef, conformément à l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution, avec le concours d’un serrurier et de la force publique si besoin est, étant rappelé que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;
* que Monsieur [J] [Z] soit condamné, seul, à verser à la SCI RAFFAELLI une indemnité mensuelle d’occupation égale au montant du loyer et des charges qui auraient été dus en l’absence de résiliation du bail à compter du 11 janvier 2024, jusqu’à la date de la libération effective et définitive des lieux caractérisée par la remise des clés à la SCI RAFFAELLI ou à son mandataire ;

CONDAMNE in solidum Monsieur [J] [Z], Monsieur [V] [D] et Monsieur [R] [M], à verser à la SCI RAFFAELLI une somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE le surplus des demandes ;

CONDAMNE in solidum Monsieur [J] [Z], Monsieur [V] [D] et Monsieur [R] [M], aux dépens qui comprendront notamment le coût du commandement de payer ;

RAPPELLE que le présent jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition les jour, mois et an susdits par le juge des contentieux de la protection et le greffier susnommés.

Le greffier, Le juge des contentieux de la protection


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr fond
Numéro d'arrêt : 23/03404
Date de la décision : 12/03/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "conditionnelle" ordonnée au fond avec suspension des effets de la clause résolutoire

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-12;23.03404 ?
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