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11/03/2024 | FRANCE | N°24/50428

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Service des référés, 11 mars 2024, 24/50428


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS








N° RG 24/50428 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3SZP

AS M N° : 3

Assignation du :
10 Janvier 2024

[1]

[1] 1 Copie exécutoire
délivrée le:


ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 11 mars 2024



par Marie-Hélène PENOT, Juge au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal, assistée de Anne-Sophie MOREL, Greffier.
DEMANDEURS

Monsieur [V] [R] [M]
[Adresse 1]
[Localité 2]

Madame [H] [I] épouse [M]
[Adr

esse 1]
[Localité 2]

représentés par Me Olivier ELBAZ, avocat au barreau de PARIS - #C0183


DEFENDERESSE

S.A.R.L. GOOD TIME
[Adresse 4]
[Localité 3]

non représentée



DÉBAT...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS


N° RG 24/50428 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3SZP

AS M N° : 3

Assignation du :
10 Janvier 2024

[1]

[1] 1 Copie exécutoire
délivrée le:

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 11 mars 2024

par Marie-Hélène PENOT, Juge au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal, assistée de Anne-Sophie MOREL, Greffier.
DEMANDEURS

Monsieur [V] [R] [M]
[Adresse 1]
[Localité 2]

Madame [H] [I] épouse [M]
[Adresse 1]
[Localité 2]

représentés par Me Olivier ELBAZ, avocat au barreau de PARIS - #C0183

DEFENDERESSE

S.A.R.L. GOOD TIME
[Adresse 4]
[Localité 3]

non représentée

DÉBATS

A l’audience du 07 Février 2024, tenue publiquement, présidée par Marie-Hélène PENOT, Juge, assistée de Anne-Sophie MOREL, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

Par acte du 2 mai 1997, Monsieur [V] [M] et Madame [H] [I] épouse [M] (ci-après : les époux [M]) ont donné à bail commercial à la société à responsabilité limitée GOOD TIME des locaux situés [Adresse 4], moyennant un loyer annuel en principal de 72000 francs, hors charges et hors taxes, payable à terme échu à une fréquence trimestrielle. Par acte du 23 mars 2006, les parties ont renouvelé le bail les liant et prévu le paiement du loyer par trimestre et d'avance. Par jugement du 17 mai 2019, le juge des loyers commerciaux a fixé à 27 300 euros le montant du loyer annuel exigible au 1er mai 2015. Par avenant du 29 novembre 2021, le loyer a été porté à 29 285,45 euros à compter du 1er mai 2021.

Par acte extrajudiciaire délivré le 28 juin 2023, les bailleurs ont fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire pour une somme de 7629,04 euros au titre de l'arriéré locatif arrêté au 20 juin 2023, augmentée du coût de l'acte.

Par assignation délivrée le 10 janvier 2024, les époux [M] ont attrait la société GOOD TIME devant le Président du tribunal judiciaire de Paris statuant en référé, aux fins de voir :
-constater l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail ;
-ordonner l'expulsion de la société GOOD TIME et celle de tous occupants de son chef des lieux loués avec le concours de la force publique si besoin,
-assortir l'expulsion d'une astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du seizième jour suivant la signification de l'ordonnance à intervenir ;
-enjoindre à la société GOOD TIME de procéder à l'enlèvement des encombrants et au nettoyage complet du site, à ses frais exclusifs, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de 15 jours après la signification de l'ordonnance à intervenir ;
-ordonner le transport et la séquestration du mobilier trouvé dans les lieux dans tel garde-meubles qu'il plaira au bailleur aux frais, risques et péril de la partie expulsée ;
-condamner la société GOOD TIME à payer aux époux [M] la somme provisionnelle de 7431,72 euros au titre de l'arriéré locatif arrêté au 22 décembre 2023, avec intérêts au taux légal à compter de la délivrance du commandement de payer ;
-condamner la société GOOD TIME au paiement d'une indemnité d'occupation provisionnelle égale au montant du loyer augmenté des charges, jusqu'à la libération des locaux qui se matérialisera par la remise des clés ou l'expulsion du défendeur ;
-débouter la société GOOD TIME de toutes ses prétentions ;
-subsidiairement, dans l'hypothèse de délais de paiement, dire que faute de paiement à bonne date d'une seule des échéances prévues à l'ordonnance à intervenir ou d'un terme de loyer et accessoires, la déchéance du terme sera encourue, la totalité de la dette deviendra exigible, la clause résolutoire sera acquise et la société bailleresse autorisée à poursuivre l'expulsion de la société locataire dans les conditions ci-dessus mentionnées ;

-condamner la société GOOD TIME au paiement d'une somme de 3000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, en ce compris le coût du commandement.

Bien que régulièrement assignée selon les formes prévues à l'article 654 du code de procédure civile, la société GOOD TIME n'a pas constitué avocat, de sorte qu'il doit être statué par décision réputée contradictoire.

A l'audience du 7 février 2024, les époux [M] a, par l'intermédiaire de son conseil, maintenu les prétentions de son exploit introductif d'instance et les moyens qui y sont contenus.

L'état des privilèges et publications ne mentionne aucun créancier inscrit sur le fonds de commerce.

Conformément aux articles 446-1 et 455 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l'exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l'assignation introductive d'instance.

MOTIFS

Conformément à l'article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparait pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la demande relative à l'acquisition de la clause résolutoire et sur les demandes subséquentes

L'article 834 du code de procédure civile dispose que, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

La juridiction des référés n'est toutefois pas tenue de caractériser l'urgence, au sens de l'article 834 du code de procédure civile, pour constater l'acquisition de la clause résolutoire stipulée dans un bail et la résiliation de droit d'un bail.

L'article L. 145-41 du code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Le bailleur, au titre d'un bail commercial, demandant la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire stipulée dans le bail doit rapporter la preuve de sa créance.

Le juge des référés peut constater la résiliation de plein droit du bail au titre d'une clause contenue à l'acte à cet effet, à condition que :
- le défaut de paiement de la somme réclamée dans le commandement de payer visant la clause résolutoire soit manifestement fautif,
- le bailleur soit, de toute évidence, en situation d'invoquer de bonne foi la mise en jeu de cette clause,

- la clause résolutoire soit dénuée d'ambiguïté et ne nécessite pas interprétation.

Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses résolutoires, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

Cependant, la juridiction des référés ne peut, sans excéder ses pouvoirs, accorder d'office un délai de grâce et suspendre les effets de la clause résolutoire dès lors que ce délai ne lui a pas été demandé par le preneur.

En l'espèce, la soumission du bail au statut des baux commerciaux ne donne lieu à aucune discussion.

Le bail initial et l'acte de renouvellement du 23 mars 2006 comprennent une clause résolutoire prévoyant la résiliation de plein droit du contrat à défaut de paiement d'un seul terme de loyer ou d'inexécution d'une clause quelconque du contrat et un mois après la délivrance d'un commandement de payer demeuré infructueux.

Le commandement de payer signifié le 28 juin 2023 à la société GOOD TIME vise cette clause. Il porte sur un arriéré locatif de 7629,04, selon décompte annexé à l'acte.

Il ressort du décompte produit par les époux [M] que les causes de ce commandement n'ont pas été acquittées dans le mois de sa délivrance.

Dès lors, la clause résolutoire est acquise et le bail se trouve résilié de plein droit avec toutes conséquences de droit.

Aux termes de l'article 835 alinéa 1er du code de procédure civile, le président peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le maintien dans un immeuble, sans droit ni titre du fait de la résiliation du bail, constitue un trouble manifestement illicite.

L'expulsion de la société GOOD TIME et de tout occupant de son chef doit donc être ordonnée en cas de non restitution volontaire des lieux dans les 15 jours de la signification de la présente ordonnance, sans qu'il soit justifié de la nécessité de prononcer une astreinte.

Le sort des meubles trouvés dans les lieux sera régi en cas d'expulsion conformément aux dispositions du code des procédures civiles d'exécution et selon les modalités précisées au dispositif de l'ordonnance, aucun moyen n'étant au demeurant soutenu au soutien des demandes d'enlèvement du mobilier sous astreinte.

Sur les demandes de provision

L'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier.

Aux termes de l'article 1353 du code civil, c'est à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver et à celui qui se prétend libéré de justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'espèce, au vu du décompte produit par les époux [M], l'obligation de la société GOOD TIME au titre des loyers, charges, taxes, accessoires et indemnités d'occupation au 22 décembre 2023 n'est pas sérieusement contestable à hauteur de 7431,72 euros (quatrième trimestre 2023 inclus), somme au paiement de laquelle il convient de condamner la société GOOD TIME à titre de provision. Les causes du commandement ayant été apurées, la condamnation emportera intérêts à compter de la date de délivrance de l'assignation.

Il est rappelé qu'à compter de la résiliation du bail par l'effet de la clause résolutoire, le preneur n'est plus débiteur de loyers mais d'une indemnité d'occupation.

L'indemnité d'occupation due par la société GOOD TIME depuis l'acquisition de la clause résolutoire et jusqu'à la libération effective des lieux par la remise des clés, sera fixée à titre provisionnel au montant du loyer contractuel, outre les charges, taxes et accessoires.

Sur les mesures accessoires

L'article 491 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que le juge statuant en référé statue sur les dépens. L'article 696 dudit code précise que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Le défendeur, qui succombe, doit supporter la charge des dépens, incluant le coût du commandement de payer qui entretient un lien étroit et nécessaire avec la présente instance.

L'article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer : 1° A l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, 2° et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations. Néanmoins, s'il alloue une somme au titre du 2° du présent article, celle-ci ne peut être inférieure à la part contributive de l'Etat.

Il est rappelé que la juridiction des référés a le pouvoir de prononcer une condamnation en application de ces dispositions.

Condamnée aux dépens, la société GOOD TIME sera condamnée au paiement de la somme de 1000 euros en application des dispositions sus-visées.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort ,

Constatons l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 28 juillet 2023 à minuit ;

Ordonnons, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les quinze jours de la signification de la présente ordonnance, l'expulsion de la société GOOD TIME et de tout occupant de son chef des lieux situés à [Adresse 4] avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d'un serrurier ;

Disons n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte ;

Disons, en cas de besoin, que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désigné par elle et qu'à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par le commissaire de justice chargé de l'exécution, avec sommation à la personne expulsée d'avoir à les retirer dans un délai de quatre semaines à l'expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l'exécution, ce conformément à ce que prévoient les dispositions du code des procédures civiles d'exécution sur ce point ;

Condamnons à titre provisionnel la société GOOD TIME à payer, à titre d'indemnité d'occupation due à compter de la résiliation du bail du 29 juillet 2023 et jusqu'à la libération effective des lieux par la remise des clés, une somme égale au montant du loyer contractuel, outre les taxes, charges et accessoires ;

Condamnons par provision la société GOOD TIME à payer à Monsieur [V] [M] et Madame [H] [I] épouse [M] la somme de sept mille quatre cent trente-et-un euros et soixante-douze centimes (7431,72 euros) à valoir sur les loyers, charges, accessoires et indemnités d'occupation arriérés arrêtés au 22 décembre 2023 (quatrième trimestre 2023 inclus), avec intérêts au taux légal à compter du 10 janvier 2024 ;

Condamnons la société GOOD TIME aux entiers dépens, en ce compris le coût du commandement de payer délivré le 28 juin 2023 ;

Condamnons la société GOOD TIME à payer à Monsieur [V] [M] et Madame [H] [I] épouse [M] la somme de mille euros (1000 euros) par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejetons le surplus des demandes ;

Rappelons que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.

Fait à Paris le 11 mars 2024

Le Greffier,Le Président,

Anne-Sophie MORELMarie-Hélène PENOT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Service des référés
Numéro d'arrêt : 24/50428
Date de la décision : 11/03/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "conditionnelle" ordonnée en référé avec suspension des effets de la clause résolutoire

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-11;24.50428 ?
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