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11/03/2024 | FRANCE | N°24/50191

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Service des référés, 11 mars 2024, 24/50191


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS








N° RG 24/50191 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3TQ6

AS M N° : 4

Assignation du :
03 Janvier 2024

[1]

[1] 1 Copie exécutoire
délivrée le:


ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 11 mars 2024



par Marie-Hélène PENOT, Juge au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal, assistée de Anne-Sophie MOREL, Greffier.
DEMANDERESSE

S.C.I. DU [Adresse 1]
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Maître Nora

DOSQUET de la SELAS B.C.D.AVOCATS, avocats au barreau de MEAUX - #47


DEFENDERESSE

S.C.M. PI
[Adresse 1]
[Localité 3]

non représentée



DÉBATS

A l’audience du 07 Février 2...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS


N° RG 24/50191 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3TQ6

AS M N° : 4

Assignation du :
03 Janvier 2024

[1]

[1] 1 Copie exécutoire
délivrée le:

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 11 mars 2024

par Marie-Hélène PENOT, Juge au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal, assistée de Anne-Sophie MOREL, Greffier.
DEMANDERESSE

S.C.I. DU [Adresse 1]
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Maître Nora DOSQUET de la SELAS B.C.D.AVOCATS, avocats au barreau de MEAUX - #47

DEFENDERESSE

S.C.M. PI
[Adresse 1]
[Localité 3]

non représentée

DÉBATS

A l’audience du 07 Février 2024, tenue publiquement, présidée par Marie-Hélène PENOT, Juge, assistée de Anne-Sophie MOREL, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

Par acte du 6 juillet 2006, la société DU [Adresse 1] a donné à bail commercial à Monsieur [B] [V], agissant au nom et pour le compte de la société civile de moyens PI en cours de constitution, des locaux consistant en un atelier situé en fond de cour au deuxième étage droite de l'immeuble sis [Adresse 1], moyennant un loyer annuel en principal de 18000 euros, hors charges et hors taxes, payable d'avance à une fréquence trimestrielle. Par avenant du 25 mai 2018, la société DU [Adresse 1] et la société civile de moyens PI ont convenu du renouvellement du bail du 1er juillet 2018 au 30 juin 2021, en précisant que le montant du loyer s'élevait à la somme de 20 006,80 euros hors taxe par an.

Par acte extrajudiciaire délivré le 3 novembre 2023, le bailleur a fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire pour une somme de 64 130,73 euros au titre de l'arriéré locatif arrêté au 6 octobre 2023, augmentée du coût de l'acte.

Par acte du 9 juillet 2007, la société DU [Adresse 1] a donné à bail commercial à la société PI, des locaux consistant en un local situé au premier étage sur cour et un local situé au deuxième étage sur cour, d'une superficie respective de 22 et 25m², dans l'immeuble sis [Adresse 1], moyennant un loyer annuel en principal de 11400 euros, hors charges et hors taxes, payable d'avance à une fréquence trimestrielle. Par avenant du 25 mai 2018, la société DU [Adresse 1] et la société civile de moyens PI ont convenu du renouvellement du bail portant uniquement sur les locaux situés au deuxième étage et constituant le lot n°25 de l'immeuble, du 1er juillet 2018 au 30 juin 2021, en précisant que le montant du loyer s'élevait à la somme de 6103,26 euros hors taxe par an.

Par acte extrajudiciaire délivré le 3 novembre 2023, le bailleur a fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire pour une somme de 13509,34 euros au titre de l'arriéré locatif arrêté au 6 octobre 2023, augmentée du coût de l'acte.

Par assignation délivrée le 3 janvier 2024, la société DU [Adresse 1] a attrait la société PI devant le Président du tribunal judiciaire de Paris statuant en référé, aux fins de voir :
-constater l'acquisition de la clause résolutoire insérée dans chacun des deux contrats de bail à compter du 4 décembre 2023 ;
-ordonner l'expulsion de la société PI et celle de tous occupants de son chef des lieux loués avec le concours de la force publique si besoin,
-ordonner le transport et la séquestration du mobilier trouvé dans les lieux dans tel garde-meubles qu'il plaira au bailleur aux frais, risques et péril de la partie expulsée ;
-condamner la société PI à payer à la société DU [Adresse 1] les sommes provisionnelles de 64 130,73 euros et 13509,34 euros au titre de l'arriéré locatif dû au titre de chacun des contrats, avec intérêts au taux légal à compter de la délivrance des commandements de payer ;
-condamner la société PI au paiement d'une indemnité d'occupation provisionnelle mensuelle égale au montant du loyer trimestriel augmenté des charges, jusqu'à la libération des locaux qui se matérialisera par la remise des clés ou l'expulsion du défendeur ;
-condamner la société PI au paiement d'une somme de 3000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, en ce compris le coût des commandements de payer délivrés les 4 novembre 2020, 13 septembre 2021 et 3 novembre 2023.

Bien que régulièrement assignée selon les formes prévues à l'article 656 du code de procédure civile, la société PI n'a pas constitué avocat, de sorte qu'il doit être statué par décision réputée contradictoire.

A l'audience du 7 février 2024, la société DU [Adresse 1] a, par l'intermédiaire de son conseil, maintenu les prétentions de son exploit introductif d'instance et les moyens qui y sont contenus.

Conformément aux articles 446-1 et 455 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l'exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l'assignation introductive d'instance.

MOTIFS

Conformément à l'article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparait pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la demande relative à l'acquisition de la clause résolutoire et sur les demandes subséquentes

L'article 834 du code de procédure civile dispose que, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

La juridiction des référés n'est toutefois pas tenue de caractériser l'urgence, au sens de l'article 834 du code de procédure civile, pour constater l'acquisition de la clause résolutoire stipulée dans un bail et la résiliation de droit d'un bail.

Le juge des référés peut constater la résiliation de plein droit du bail au titre d'une clause contenue à l'acte à cet effet, à condition que :
-le défaut de paiement de la somme réclamée dans le commandement de payer visant la clause résolutoire soit manifestement fautif,
-le bailleur soit, de toute évidence, en situation d'invoquer de bonne foi la mise en jeu de cette clause,
-la clause résolutoire soit dénuée d'ambiguïté et ne nécessite pas interprétation.

En l'espèce, la société DU [Adresse 1] a fait délivrer à la société PI deux commandements de payer par actes extrajudiciaires du 3 novembre 2023, visant les clauses résolutoires contenues dans les baux des 6 juillet 2006 et 9 juillet 2007, modifiés par avenants du 25 mai 2018.

La soumission des baux des 6 juillet 2006 et 9 juillet 2007 au statut des baux commerciaux résulte manifestement de leur intitulé, de leur soumission explicite aux articles L145-1 et suivants du code de commerce, de leur durée ou encore des modalités de résiliation des baux. Chacun d'eux comprend une clause résolutoire en son article 22, prévoyant la résiliation de plein droit du contrat à défaut de paiement d'un seul terme de loyer ou d'inexécution d'une clause quelconque du contrat et un mois après la délivrance d'un commandement de payer demeuré infructueux.

Par avenants conclus sous seing privé le 25 mai 2018, les parties ont convenu de renouveler les baux des 6 juillet 2006 et 9 juillet 2007 à compter du 1er juillet 2018 et jusqu'au 30 juin 2021, soit pour une durée de trois années. L'avenant au second bail inclut l'acceptation par le bailleur du congé de la société PI portant sur les locaux situés au premier étage (constituant le lot n°14) et précise en conséquence ne plus porter que sur les locaux situés au deuxième étage et constituant le lot n°25.

Ainsi, si ces avenants prévoient la reconduction des baux existants, les locaux qu'ils concernent diffèrent partiellement des locaux originellement pris à bail et leur durée déroge expressément à la durée minimale des baux commerciaux que les dispositions d'ordre public de l'article L145-4 du code de commerce fixent à neuf années.

Dans ces conditions, il n'est pas établi avec l'évidence requise en référé qu'à compter du 1er juillet 2018, les parties aient entendu soumettre leurs relations au statut des baux commerciaux selon les mêmes clauses que celles précédemment stipulées. Les avenants du 25 mai 2018 ne contiennent pas de clause résolutoire, ni ne se réfèrent explicitement à la clause résolutoire stipulée dans les baux des 6 juillet 2006 et 9 juillet 2007.

En conséquence, l'applicabilité à leur relation actuelle de la clause résolutoire stipulée dans les baux commerciaux des 6 juillet 2006 et 9 juillet 2007 est sérieusement contestable, de sorte qu'il n'y a pas lieu à référé sur les demandes de constat de l'acquisition des clauses résolutoires et sur les prétentions subséquentes tendant à l'expulsion et à la fixation d'une indemnité d'occupation.

Sur les demandes de provision

L'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier.

Aux termes de l'article 1353 du code civil, c'est à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver et à celui qui se prétend libéré de justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'espèce, nonobstant l'incertitude pesant sur la nature des avenants du 25 mai 2018, il est établi qu'en application de ceux-ci, la société PI s'est engagée à compter du 1er juillet 2018 au paiement d'un loyer annuel en principal, hors taxes et hors charges, payable trimestriellement et d'avance, de 20 006,80 euros pour l'atelier et de 6103,26 euros pour le lot n°25, avec indexation par référence aux stipulations des baux des 6 juillet 2006 et 9 juillet 2007.

En application de l'article L. 145-5 de code de commerce, les parties peuvent, lors de l'entrée dans les lieux du locataire, conclure un bail dérogeant aux dispositions du statut des baux commerciaux à la condition que la durée totale du bail ou des baux successifs ne soit pas supérieure à trois ans. Le bail dérogatoire cesse en principe à l'arrivée de son terme sans qu'il soit besoin de délivrer congé mais si à l'issue du terme du bail, le locataire reste dans les lieux sans opposition du bailleur dans le mois suivant l'échéance du contrat de bail, il s'opère un nouveau bail soumis au statut des baux commerciaux.

En l'espèce, les décomptes versés aux débats établissent le maintien dans les lieux de la société PI après le 30 juin 2021 soit à l'issue de la durée du contrat du 25 mai 2018, sans que soit alléguée la moindre opposition du bailleur. Il s'ensuit que la soumission de la relation contractuelle des parties au statut des baux commerciaux à compter du 1er juillet 2021 est certaine, soit par application du statut des baux commerciaux aux avenants du 25 mai 2018, soit par application des dispositions de l'article L145-5 du code de commerce à compter du 1er juillet 2021.

S'agissant de l'atelier sis [Adresse 1], le décompte produit par la société DU [Adresse 1] mentionne un solde débiteur de 64 130,73 euros, dont il convient de déduire des frais d'huissier à hauteur de 281,14 et 254,63 euros facturés le 1er avril 2023 et 1er octobre 2021. En conséquence, l'obligation de la société PI au titre des loyers, charges, taxes et accessoires au 8 décembre 2023 n'est pas sérieusement contestable à hauteur de 63 594,96 euros (échéance du quatrième trimestre 2023 incluse), somme au paiement de laquelle il convient de condamner la société PI à titre de provision, avec intérêts au taux légal depuis la date de délivrance du commandement de payer.

S'agissant du local constituant le lot n°25 de l'immeuble sis [Adresse 1], le décompte produit par la société DU [Adresse 1] mentionne un solde débiteur de13509,34 euros, dont il convient de déduire des frais d'huissier à hauteur de 160,97 euros facturés le 1er avril 2023. En conséquence, l'obligation de la société PI au titre des loyers, charges, taxes et accessoires au 8 décembre 2023 n'est pas sérieusement contestable à hauteur de 13 348,37 euros (échéance du quatrième trimestre 2023 incluse), somme au paiement de laquelle il convient de condamner la société PI à titre de provision, avec intérêts au taux légal depuis la date de délivrance du commandement de payer.

Sur les mesures accessoires

L'article 491 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que le juge statuant en référé statue sur les dépens. L'article 696 dudit code précise que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Le défendeur, qui succombe, doit supporter la charge des dépens, incluant le coût des commandements du 3 novembre 2023 mais non celui des précédents commandements, qui n'entretiennent pas de lien étroit et nécessaire avec la présente instance.

L'article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer : 1° A l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, 2° et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations. Néanmoins, s'il alloue une somme au titre du 2° du présent article, celle-ci ne peut être inférieure à la part contributive de l'Etat.

Il est rappelé que la juridiction des référés a le pouvoir de prononcer une condamnation en application de ces dispositions.

Aucun élément tiré de l'équité ou de la situation économique de la société PI ne permet d'écarter la demande de la société DU [Adresse 1] formée sur le fondement des dispositions sus-visées. Celle-ci sera cependant évaluée à la somme de 2000 euros en l'absence d'éléments de calcul plus explicites versés aux débats.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort ,

Disons n'y avoir lieu à référé sur les demandes tendant au constat de l'acquisition de la clause résolutoire et sur les demandes subséquentes relatives à l'expulsion et à l'indemnité d'occupation ;

Condamnons par provision la société PI à payer à la société DU [Adresse 1] la somme de soixante-trois mille cinq cent quatre-vingt-quatorze euros et quatre-vingt-seize centimes (63 594,96 euros) à valoir sur les loyers, charges et accessoires arriérés arrêtés au quatrième trimestre 2023 inclus, avec intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2023 ;

Condamnons par provision la société PI à payer à la société DU [Adresse 1] la somme de treize mille trois cent quarante-huit euros et trente-sept centimes (13 348,37 euros) à valoir sur les loyers, charges et accessoires arriérés arrêtés au quatrième trimestre 2023 inclus, avec intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2023 ;

Condamnons la société PI aux entiers dépens, en ce compris le coût des commandements de payer délivrés le 3 novembre 2023 ;

Condamnons la société PI à payer à la société DU [Adresse 1] la somme de deux mille euros (2000 euros) par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejetons toutes les autres demandes des parties ;

Rappelons que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.

Fait à Paris le 11 mars 2024

Le Greffier,Le Président,

Anne-Sophie MORELMarie-Hélène PENOT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Service des référés
Numéro d'arrêt : 24/50191
Date de la décision : 11/03/2024
Sens de l'arrêt : Accorde une provision

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-11;24.50191 ?
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