TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS
3ème chambre
1ère section
No RG 21/14909
No Portalis 352J-W-B7F-CVSRE
No MINUTE :
Assignation du :
26 novembre 2021
JUGEMENT
rendu le 25 mai 2023
DEMANDEUR
Monsieur [Y] [V]
[Adresse 3]
[Localité 6]
représenté par Me Stéphane LOISY, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A0723
DÉFENDEURS
Monsieur [Y] [P] DIT "[H]" - Intervenant volontaire
[Adresse 1]
[Localité 7]
S.A.S.U ANOUCHE PRODUCTIONS
[Adresse 4]
[Localité 8]
représentés par Me Sébastien HAAS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C2251
S.A.S. UNIVERSAL MUSIC FRANCE
[Adresse 2]
[Localité 5]
représentée par Me Nicolas BOESPFLUG, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0329
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Nathalie SABOTIER, 1ère vice-présidente adjointe
Madame Elodie GUENNEC, Vice-présidente
Monsieur Malik CHAPUIS, Juge,
assistés de Madame Caroline REBOUL, Greffière
en présence de Madame Anne BOUTRON, magistrat en stage de pré affectation.
DEBATS
A l'audience du 21 mars 2023 tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats que la décision serait rendue le 25 mai 2023.
JUGEMENT
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE :
1. M. [Y] [V] se présente comme auteur et journaliste spécialisé dans la chanson française.
M. [Y] [P], connu sous le pseudonyme de [H], est un auteur, compositeur et interprète dont les titres et albums sont édités et produits par la société Anouche Productions. La société Universal Music France est le distributeur exclusif des phonogrammes et vidéogrammes produits par la société Anouche Productions.
2. Le 7 avril 2021, M. [V] a donné une interview sur la webradio Arts-Mada au cours de laquelle il s'est exprimé sur le physique des auteurs-compositeurs pour conclure en substance que leurs chansons gagneraient à être interprétées par "de beaux mecs ou des filles sublimes", précisant que "pour revendre du disque, vendre du magazine, refaire de la presse, il faut des gens beaux" et a qualifié dans ce contexte la chanteuse Hoshi d'"effrayante", faisant naître de vives réations du public dans les médias et sur les réseaux sociaux.
3. M. [P] est le co-auteur et artiste-interprète du titre intitulé "Des gens beaux", produit par la société Anouche Productions et exploité par la société Universal Music France. Ce titre, diffusé en juillet 2021 et intégré à la réédition 2021 de l'album "Mesdames", reprend des extraits de l'interview donnée par M. [V], sans y avoir été autorisé par celui-ci. La chanson a été illustrée par un vidéo-clip au sein duquel la voix de M. [V] est mise en synchronisation avec l'image d'un comédien incarnant un photographe ainsi que par le chanteur [H] lors de la dernière séquence de clôture du vidéo-clip.
4. Estimant que l'utilisation de sa voix sans son autorisation constituait une atteinte à son droit à la voix et à ses droits d'auteur et droits voisins, M. [V] a fait assigner, par actes d'huissier des 25 et 26 novembre 2021, les sociétés Anouche Productions et Universal Music France devant le tribunal judiciaire de Paris, après un courrier du 27 juillet 2021 de mise en demeure de cesser l'exploitation du titre resté vain.
5. M. [P] est intervenu volontairement à l'instance par conclusions notifiées par la voie électronique le 14 mars 2022.
6. Aux termes de son assignation, Monsieur [Y] [V] demande en substance au tribunal de :
- Condamner solidairement les sociétés Anouche Productions et Universal Music France au paiement de 40 000 euros au titre de son préjudice patrimonial et 35 000 euros au titre de son préjudice moral en réparation de l'atteinte à son droit à la voix et à ses droits voisins,
- Ordonner le retrait des extraits litigieux reproduisant sa voix de la chanson « Les gens beaux » sous astreinte de 500 euros par jour,
- Condamner solidairement la société Anouche Productions et la société Universal Music France au règlement d'une somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner solidairement la société Anouche Productions et la société Universal Music France aux entiers dépens.
A titre subsidiaire
- Condamner les sociétés Anouche Productions et Universal Music France au paiement de la somme de 40 000 euros au titre du préjudice subi par ce dernier par la violation de son droit à la voix
- Faire application des dispositions de l'article 699 au profit de Maître Stéphane Loisy.
7. Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 18 avril 2022, la société Anouche Productions et M. [Y] [P] demandent au tribunal de :
- Débouter Monsieur [Y] [V] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;
- Ordonner la publication de la décision à intervenir aux frais de Monsieur [Y] [V] dans 5 quotidiens et 5 hebdomadaires, pour un coût maximal par publication de 6.000 EurosHors Taxes, dans un délai d'un mois suivant signification de la décision ;
- Condamner Monsieur [Y] [V] à payer la somme de 10.000 euros à Monsieur[Y] [P] dit [H] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner Monsieur [Y] [V] à payer la somme de 10.000 euros à la société Anouche Production au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Rappeler que l'exécution provisoire est de plein droit ;
- Condamner Monsieur [Y] [V] aux dépens de l'instance dont distraction au profit de Me Sébastien Haas.
8. Aux termes de ses conclusions notifiées par la voie électronique le 25 juillet 2022, la société Universal Music France demande au tribunal de :
- Dire et juger Monsieur [Y] [V] mal fondé en ses demandes et l'en débouter.
- Condamner Monsieur [Y] [V] à payer à la société Universal Music France une indemnité de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
9. L'instruction de l'affaire a été close par une ordonnance du 6 septembre 2022 et renvoyée à l'audience du 21 mars 2023.
MOTIFS
1) Sur la violation du droit à la voix
Moyen des parties
10. M. [Y] [V] fait valoir au visa de l'article 9 du code civil que la reproduction de sa voix sans son autorisation dans la chanson "Des gens beaux" du chanteur [H] pour une durée totale cumulée de 33 secondes alors que la chanson ne dure que 2 minutes et 41 secondes constitue un détournement de la finalité de ses propos et une atteinte à son droit à la voix lui causant un préjudice moral.
11. La société Anouche Productions et M. [Y] [P] concluent au rejet des demandes de M. [V] au motif que l'interview donnée par celui-ci revêt un caractère public et que les propos tenus à cette occasion ne portent aucunement sur sa vie privée, de sorte que la reprise de sa voix et de ses propos ne sont pas constitutifs d'une atteinte au droit au respect de la vie privée tel que protégé par l'article 9 du code civil. Ils ajoutent que la voix de M. [V] ne peut être reconnue spontanément, M. [Y] [V] étant volontairement non identifié, et qu'elle ne fait l'objet d'aucun usage commercial. Ils soutiennent à titre subsidiaire que M. [P] a apporté une réponse artistique sur un sujet d'intérêt général majeur et actuel qu'est la lutte contre le sexisme de sorte que dans le cadre du contrôle de proportionnalité, la liberté d'expression dont ils bénéficient prévaut sur le respect de la vie privée de M. [V].
12. La société Universal Music France indique reprendre à son compte les moyens de défense de M. [P] et de la société Anouche Productions.
Appréciation du tribunal
13. Toute personne peut s'opposer sur le fondement des articles 9 du code civil et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, lesquels garantissent le droit au respect de la vie privée, à l'exploitation de sa voix, attribut de sa personnalité, dès lors que la reproduction incriminée constitue une atteinte à sa vie privée. Tel est le cas lorsque la voix permet d'identifier son auteur et que sa vie privée est en cause.
14. La protection de la voix permet aussi à toute personne de s'opposer à son exploitation commerciale.
15. Le droit de toute personne à la protection de sa voix peut trouver une limite dans la liberté d'expression protégée par l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, laquelle comprend l'expression artistique, à savoir la liberté de recevoir et communiquer des informations et des idées - qui permet de participer à l'échange public des informations et idées culturelles, politiques et sociales de toute sorte (CEDH 24 mai 1988, Müller et a. c/ Suisse, no 10737/84 § 27 et 33; CEDH 5 mars 2009, Hachette Filipacchi Presse Automobile et Dupuy c/ France, no 13353/05 § 30).
16. La Cour de cassation a rappelé que (Civ. 1ère 10 octobre 2019 pourvoi no18.21-871): "Le droit au respect de la vie privée et le droit à la liberté d'expression ayant la même valeur normative, il appartient au juge saisi de rechercher un équilibre entre ces droits et, le cas échéant, de privilégier la solution la plus protectrice de l'intérêt le plus légitime ;pour effectuer cette mise en balance des droits en présence, il y a lieu de prendre en considération la contribution de la publication incriminée à un débat d'intérêt général, la notoriété de la personne visée, l'objet du reportage, le comportement antérieur de la personne concernée, le contenu, la forme et les répercussions de ladite publication, ainsi que, le cas échéant, les circonstances de la prise des photographies (CEDH, arrêt du 10 novembre 2015, Couderc et Hachette Filipacchi associés c. France [GC], no 40454/07, § 93) ; il incombe au juge de procéder, de façon concrète, à l'examen de chacun de ces critères (1re Civ., 21 mars 2018, pourvoi no 16-28.741, publié)".
17. En l'espèce est en cause l'exploitation non autorisée de la voix de M. [V] dans la chanson "Des gens beaux" co-composée et interprétée par M. [Y] [P] connu sous le nom de [H], prononçant certains propos qu'il a tenus lors d'une interview donnée sur la webradio Arts-Mada.
18. Si M. [V] n'est pas nommément désigné dans la chanson "Des gens beaux", sa voix est nécessairement identifiable compte tenu du contexte de médiatisation de la polémique née des propos repris en partie dans cette chanson, du caractère public de son activité de chroniqueur d'émissions radiophoniques sur des chaînes de radio nationale lui conférant une certaine notoriété et de la médiatisation de l'objet de la chanson litigieuse. En outre, le livret accompagnant le disque précise que la chanson comporte des extraits de l'interview de M. [V] donnée sur Arts-Mada.
19. Toutefois, la vie privée de M. [V] n'est pas en cause en l'espèce. D'une part, les propos repris dans la chanson "Des gens beaux" ont un caractère public, puisqu'ils sont tirés d'un entretien accordé par M. [V] sur une webradio et ont trait à un sujet sans lien avec sa vie privée, s'agissant de propos généraux relatifs au physique des auteurs-compositeurs. D'autre part, la chanson reprenant la voix de M. [V], qui se présente comme une réponse auxdits propos polémiques, ne porte pas sur des éléments de la vie privée de celui-ci. Par ailleurs, il n'est pas contestable ni d'ailleurs soutenu que la reprise de la voix de M. [V] dans la chanson "des gens beaux" sans son autorisation ne constitue pas une exploitation commerciale illicite de la voix. Il n'est en effet pas établi que la voix de M. [V] aurait en soi une valeur économique ni qu'elle ait apporté une plus value commerciale à la chanson litigieuse en sus de la notoriété de son interprète [H], étant relevé par ailleurs que la reprise de la voix de M. [V] dans la chanson ressort en premier lieu d'une démarche artistique. Aussi M. [V] est-il mal fondé à se prévaloir d'une atteinte à l'article 9 du code civil.
20. En outre, les propos tenus par M. [V] lors de son interview sur la radio Arts-Mada, énonçant notamment que "pour revendre du disque, vendre du magazine, refaire de la presse, il faut des gens beaux" et qualifiant dans ce contexte la chanteuse Hoshi d'"effrayante", estimant qu'elle devrait donner ses chansons à "des filles sublimes (...) Comme il y a eu des Vartan ou des Sheila à vingt ans" sont des propos discriminants et sexistes et ont suscité de ce fait dans la presse et sur les réseaux sociaux des réactions d'indignation, la radio Arts-Mada ayant expressément indiqué se désolidariser de ces propos et les condamner.
21. La chanson "Des gens beaux" est composée en deux parties. Dans une première partie est reprise en substance l'opinion de M. [V] selon laquelle les artistes laids ne devraient pas chanter et devraient donner leurs chansons aux artistes beaux. La deuxième partie se présente en opposition à ces considérations. L'ensemble de la chanson se présente comme un dialogue fictif entre le chroniqueur, dont la voix est reproduite en début, en milieu et en fin de chanson, et le chanteur qui l'interpelle par endroits par un "Eh Monsieur" signifiant qu'il s'adresse directement à lui. Ainsi la chanson "Des gens beaux" est représentative dans sa forme artistique du mouvement d'indignation soulevé par les propos de M. [V] et contribue, par le dialogue qu'elle a cherché à instaurer avec l'auteur des propos polémiques, à la question d'intérêt général relative à la lutte contre toute forme de discrimination.
22. Aussi, la reprise de la voix et des propos de M. [V] sans son autorisation dans la chanson "Des gens beaux" ne portant pas atteinte à sa vie privée et se justifiant par la liberté d'expression, en ce compris l'expression artistique, nécessaire dans une société démocratique à garantir le droit à l'information sur un débat d'intérêt général, M. [V] sera débouté de sa demande sur ce fondement.
2) Sur la contrefaçon de droit d'auteur et de droits voisins
Moyen des parties
23. M. [V] fait valoir qu'il a été porté atteinte à ses droits moraux et patrimoniaux au visa des articles L122-3 du code de la propriété intellectuelle et suivants par la reproduction sans son autorisation d'extraits de son interview sur Arts-Mada pour une durée de 31 secondes dans la chanson "des gens beaux". Il fait valoir que l'exception de courte citation ne s'applique pas. Il soutient également qu'il a été porté atteinte à la paternité de ses propos car ils sont mis dans la bouche de M. [P] et d'un tiers dans le vidéo-clip de la chanson. Il ajoute au visa de l'article L212-3 du code de la propriété intellectuelle que la reproduction de sa voix lui donne la qualité d'interprète et qu'il a été porté atteinte à ses droits voisins faute de les avoir cédés par écrit.
24. La société Anouche Productions et M. [P] soutiennent que les propos de M. [V] sont dépourvus d'originalité, qu'ils ont été prononcés sans réflexion ni création artistique, l'enchaînement des phrases, la banalité des termes employés, la simplicité de la syntaxe, des verbes et substantifs employés démontrant l'absence de recherche créative et d'empreinte de la personnalité de l'auteur. Ils ajoutent que si les propos de M. [V] ont inspiré la chanson "des gens beaux", il ne s'agit ni d'une oeuvre dérivée ni d'une oeuvre de collaboration en l'absence de travail collaboratif et artistique de M. [V]. La société Anouche Productions et M. [P] font également valoir qu'aucun travail d'artiste-interprète ne peut être accordé en l'absence de droits d'auteurs et de toute prestation physique artistique. La société Anouche Productions et M. [P] soutiennent à titre subsidiaire que dans le cadre du contrôle de proportionnalité entre droit d'auteur et liberté d'expression, cette dernière doit prévaloir.
25. La société Universal Music France indique reprendre à son compte les moyens de défense de M. [P] et de la société Anouche Productions.
Appréciation du tribunal
26. Conformément à l'article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle, l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous comportant des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d'ordre patrimonial. Selon l'article L.112-1 du même code, ce droit appartient à l'auteur de toute oeuvre de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination.
27. Il se déduit de ces dispositions le principe de la protection d'une oeuvre sans formalité et du seul fait de la création d'une forme originale en ce sens qu'elle porte l'empreinte de la personnalité de son auteur et n'est pas la banale reprise d'un fonds commun non appropriable. Lorsque l'originalité d'une oeuvre de l'esprit est contestée, il appartient à celui qui se prévaut d'un droit d'auteur de définir et d'expliciter les contours de l‘originalité qu'il allègue. Seul l'auteur, dont le juge ne peut suppléer la carence, est en mesure d'identifier les éléments traduisant sa personnalité et qui justifient son monopole.
28. Si les entretiens originaux sont protégés par le droit d'auteur, le créateur pouvant être le journaliste seul, la personne interrogée ou les deux, la personne interviewée n'acquiert pas, du seul fait de sa participation, la qualité d'auteur et il lui revient de démontrer sa contribution à la création intellectuelle de l'oeuvre.
29. Par ailleurs, selon l'article L. 212-1 du code de la propriété intellectuelle, l'artiste-interprète ou exécutant est la personne qui représente, chante, récite, déclame, joue ou exécute de toute autre manière une oeuvre littéraire ou artistique, un numéro de variétés, de cirque ou de marionnettes.
30. En l'espèce, le tribunal relève que M. [V] revendique une protection par le droit d'auteur d'une interview sans en avoir produit de transcription ni même décrit les extraits de cette interview repris dans la chanson "Des gens beaux". En outre et surtout, M. [V] se contente d'affirmations générales sans décrire en quoi les propos tenus lors de son interview sur Arts-Mada auraient le caractère original exigé pour la protection revendiquée. Il se contente ainsi d'invoquer le monopole de la reproduction sans même aborder la question préalable du droit à protection fondé sur la caractérisation de l'originalité. Il n'explique notamment nullement ce qui selon lui reflèterait dans ces propos l'empreinte de sa personnalité, ce que le tribunal ne peut faire à sa place. Dès lors il est mal fondé à invoquer la protection du droit d'auteur.
31. Il est tout aussi mal fondé à invoquer un statut d'interprète du seul fait de l'utilisation d'extraits de cette interview dans la chanson "Des gens beaux", alors que sa prestation lors de l'interview, qui a été reproduite, est celle d'un journaliste et ne saurait s'apparenter à une prestation d'artiste au sens du code de la propriété intellectuelle.
32. M. [V] sera par conséquent débouté de ses demandes de ce chef.
3) Sur la demande subsidiaire de M. [Y] [V] fondée sur la responsabilité délictuelle
Moyen des parties
33. M. [V] fait valoir à titre subsidiaire au visa de l'article 1240 du code civil que l'utilisation d'extraits de son interview dans la chanson "Des gens beaux" engage la responsabilité des sociétés Anouche et Universal Music.
34. La société Universal Music conclut au mal fondé de cette demande en raison de sa demande principale fondée sur l'article 9 du code civil.
Appréciation du tribunal
35. Selon l'article 1240 du code civil, « Tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Il revient au demandeur d'établir une faute, un préjudice et un lien de causalité entre la faute et le préjudice.
36. En l'espèce, il ressort des développements précédents que la reproduction d'extraits de l'interview de M. [V] donné sur la radio Arts-Mada sans son autorisation n'est pas fautive, de sorte qu'il sera également débouté de ce moyen subsidiaire.
4) Sur la demande reconventionnelle de la société Anouche et de M. [P]
Moyen des parties
37. La société Anouche et M. [W] sollicitent la condamnation de M. [V] à la publication du jugement à intervenir soulignant l'importance du litige pour la liberté d'expression, publication d'autant plus nécessaire selon eux que M. [V] a informé la presse de son action en justice.
Appréciation du tribunal
38. La demande de la société Anouche et de M. [W] ne peut prospérer en l'absence de justification par ceux-ci d'une faute commise par M. [V] leur ayant causé un dommage direct et certain (autre pour la société Anouche que la nécessité de se défendre indemnisée par ailleurs), par application des dispositions de l'article 1240 du code civil précité.
5) Sur les demandes accessoires
39. Partie perdante, M. [V] supportera la charge des dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et sera condamné à verser à la société Anouche et à M. [P] la somme de 2.500 euros chacun et à la société Universal Music France la somme de 500 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et mis à la disposition au greffe,
REJETTE les demandes de M. [Y] [V],
REJETTE les demandes de la société Anouche Productions et de M. [Y] [P],
CONDAMNE M. [Y] [V] aux dépens dont distraction au profit de maître Sébastien Haas,
CONDAMNE M. [Y] [V] à payer à la société Anouche Productions et à M. [Y] [P] la somme de 2 500 euros chacun et à la société Universal Music France la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
RAPPELLE que la présente décision est de plein droit assortie de l'exécution provisoire.Fait et jugé à Paris le 25 mai 2023.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE