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07/11/2022 | FRANCE | N°22/56579

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Ct0087, 07 novembre 2022, 22/56579


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

No RG 22/56579 - No Portalis 352J-W-B7G-CXCTI

FMNo : 1

Assignation du :
07 Juin 2022

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 07 novembre 2022

par Nathalie SABOTIER, 1ère vice-présidente adjointe au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Flore MARIGNY, Faisant fonction de Greffier.
DEMANDERESSE

Association QUALIFELEC
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Maître Charlotte ABATI de la SELARL AYRTON AVOCATS, avocats au barreau de

PARIS - #C1289

DEFENDERESSE

S.A.S. MD FIBRE
[Adresse 4]
[Localité 2]

non comparante

DÉBATS

A l'audience du 03 Octobre 2022, ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

No RG 22/56579 - No Portalis 352J-W-B7G-CXCTI

FMNo : 1

Assignation du :
07 Juin 2022

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 07 novembre 2022

par Nathalie SABOTIER, 1ère vice-présidente adjointe au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Flore MARIGNY, Faisant fonction de Greffier.
DEMANDERESSE

Association QUALIFELEC
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Maître Charlotte ABATI de la SELARL AYRTON AVOCATS, avocats au barreau de PARIS - #C1289

DEFENDERESSE

S.A.S. MD FIBRE
[Adresse 4]
[Localité 2]

non comparante

DÉBATS

A l'audience du 03 Octobre 2022, tenue publiquement, présidée par Nathalie SABOTIER, 1ère vice-présidente adjointe, assistée de Flore MARIGNY, Faisant fonction de Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

Vu l'assignation en référé introductive d'instance, délivrée le 07 juin 2022, et les motifs y énoncés,

EXPOSÉ DU LITIGE :

1. L'association QUALIFELEC (Association Professionnelle et Technique de Qualification des Entreprises du Génie Electrique, Energétique et Numérique), créée en 1955 sous l'impulsion des pouvoirs publics et de représentants de la filière électrique, a pour mission, notamment, la promotion de la qualité des prestations des professionnels de l'électricité par l'attribution, à la demande des entreprises de ce secteur, de qualifications "QUALIFELEC". L'association est accréditée par le COFRAC en tant qu'organisme de qualification et expose que sa mission est de permettre aux particuliers, aux maîtres d'oeuvre et aux bureaux d'études, de choisir en toute confiance le professionnel électricien compétent et adapté à leurs besoins pour sécuriser l'exécution de leurs travaux.

2. L'association est titulaire de la marque semi-figurative collective française "QE Qualifelec" no1609713, déposée le 13 février 1990 et régulièrement renouvelée pour désigner les produits et services des classes 9,11, 35, 37, 38 et 42 :

3. La société MD Fibre, dont le siège est situé, selon son extrait de récépissé [Adresse 4]) a pour activité déclarée l'installation, la réparation et la maintenance de fibre optique et de réseau informatique.

4. L'association QUALIFELEC fait valoir que cette société, qui n'a jamais été qualifiée par elle, a reproduit sa marque sur des documents supposés attester de sa qualification (certificat et facture) adressés le 20 avril 2022 à l'association Avere France, et qu'une plainte pénale a d'ailleurs été déposée contre cette société MD Fibre.

5. Par acte d'huissier du 7 juin 2022, l'association QUALIFELEC a fait assigner la société MD Fibre devant le délégataire du président du tribunal judiciaire de Paris, statuant en référé en contrefaçon vraisemblable de marque. Aux termes de son assignation, l'association QUALIFELEC demande au juge des référés de :
- Constater que le logo et la marque QUALIFELEC figurent sur les documents transmis par la société MD Fibre auprès de tiers à une date où cette société ne dispose pas de droit sur cette marque,

- Constater que la société MD Fibre porte une atteinte vraisemblable aux droits de l'association QUALIFELEC sur sa marque nationale collective semi-figurative no1609713,
En conséquence :
- Interdire à la société MD Fibre la poursuite des actes de contrefaçon sous astreinte de 10.000 euros par infraction constatée et sur tout support, après un délai de trois jours à compter de la signification de l'ordonnance à intervenir,
- Condamner la société MD Fibre aux dépens ainsi qu'au paiement de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

6. A l'audience du 3 octobre 2022, le conseil de l'association QUALIFELEC a réitèré oralement les termes de son assignation. Bien que régulièrement citée par dépôt de l'acte à l'étude (l'adresse étant confirmée par la société de domiciliation Idom You qui refuse de recevoir l'acte), personne n'a comparu pour la société MD Fibre. La présente ordonnance est réputée contradictoire.

MOTIFS DE l'ORDONNANCE

7. En application de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

8. Aux termes de l'article L.716-4-6 du code de la propriété intellectuelle, "Toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l'encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d'actes argués de contrefaçon. (...) Saisie en référé ou sur requête, la juridiction ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve, raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu'il est porté atteinte à ses droits ou qu'une telle atteinte est imminente.
La juridiction peut interdire la poursuite des actes argués de contrefaçon, la subordonner à la constitution de garanties destinées à assurer l'indemnisation éventuelle du demandeur ou ordonner la saisie ou la remise entre les mains d'un tiers des produits soupçonnés de porter atteinte aux droits conférés par le titre, pour empêcher leur introduction ou leur circulation dans les circuits commerciaux. (...)
Lorsque les mesures prises pour faire cesser une atteinte aux droits sont ordonnées avant l'engagement d'une action au fond, le demandeur doit, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit se pourvoir par la voie civile ou pénale, soit déposer une plainte auprès du procureur de la République. A défaut, sur demande du défendeur et sans que celui-ci ait à motiver sa demande, les mesures ordonnées sont annulées, sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent être réclamés."

9. Le caractère vraisemblable de l'atteinte alléguée dépend, d'une part, de l'apparente validité du titre sur lequel se fonde l'action et, d'autre part, de la vraisemblance de la contrefaçon alléguée.

10. Selon l'article L. 715-6 (auparavant L. 715-1) du code de la propriété intellectuelle, "Une marque collective est une marque ainsi désignée lors de son dépôt et propre à distinguer les produits ou les services des personnes autorisées à l'utiliser en vertu de son règlement d'usage." L'article L. 715-7 du même code prévoit que "Peut déposer une marque collective toute association ou tout groupement doté de la personnalité morale représentant des fabricants, des producteurs, des prestataires de services ou des commerçants, ainsi que toute personne morale de droit public.
Le dépôt d'une demande d'enregistrement de marque collective est accompagné d'un règlement d'usage. Toute modification ultérieure du règlement d'usage est portée à la connaissance de l'Institut national de la propriété industrielle."

11. Aux termes de l'article L.716-4 du code de la propriété intellectuelle, l'atteinte portée au droit du titulaire de la marque constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur. Constitue une atteinte aux droits attachés à la marque la violation des interdictions prévues aux articles L. 713-2 à L. 713-3-3 et au deuxième alinéa de l'article L. 713-4. L'article L.713-2 du code de la propriété intellectuelle dispose qu'est interdit, sauf autorisation du titulaire de la marque, l'usage dans la vie des affaires pour des produits ou des services:
1o D'un signe identique à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée;
2o D'un signe identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, s'il existe, dans l'esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d'association du signe avec la marque.

12. L'expression « usage dans la vie des affaires », qui figure dans la disposition précitée, implique que les droits exclusifs conférés par une marque ne peuvent en principe être invoqués par le titulaire de cette marque que vis-à-vis des opérateurs économiques et, en conséquence, que dans le contexte d'une activité commerciale (CJUE, 12 juillet 2011, C-324/09, L'Oréal e.a., point 54 ; CJUE, 30 avril 2020, C-772/18, A c/ B, point 23). Toutefois, si les opérations effectuées dépassent, en raison de leur volume, de leur fréquence ou d'autres caractéristiques, la sphère d'une activité privée, celui qui les accomplit se place dans le cadre de la vie des affaires (CJUE, 12 juillet 2011, L'Oréal e.a., C-324/09, point 55 ; CJUE, 30 avril 2020, C-772/18, A c/ B, point 23).

13. L'association QUALIFELEC justifie ici de ses droits sur la marque collective française no1609713, par la production du certificat d'enregistrement de la marque délivré par l'INPI et ses déclarations de renouvellement effectuées les 8 octobre 2009 et 13 février 2020. Cette marque désigne de nombreux produits et services en rapport avec les travaux électriques du bâtiment et en particulier ceux relatifs aux conduits et raccordements électriques. Sont également produites les "Règles de fonctionnement" relatives à la marque collective "QE Qualifelec".

14. Aucun moyen n'est opposé en défense de nature à caractériser que la marque opposée, qui est en vigueur, ne serait manifestement pas valable.

15. Il est en outre constaté que la société MD Fibre a transmis à l'association Avere France, aux fins de remboursement à ses clients d'une part des travaux qu'elle réalise au moyen du versement d'une prime, un courriel, un certificat de qualification ainsi qu'une facture (pièces Qualifelec no3, 4, 6 et 7), reproduisant tous à l'identique la marque "QE Qualifelec" et ce, pour désigner les services d'installations électriques (en particulier les services d'infrasctructures de recharge des véhicules électriques IRVE), alors que cette société ne bénéficie d'aucune certification.

16. Cette reproduction de la marque à l'identique pour désigner, dans la vie des affaires (cet usage visant pour elle à obtenir des marchés), des services identiques à ceux figurant à l'enregistrement, caractérise la contrefaçon vraisemblable par imitation de la marque no1609713. Il sera donc fait interdiction à la société MD Fibre, dans les termes du dispositif de la présente ordonnance, de faire usage, de quelque manière que ce soit, pour désigner son activité, de tout signe reproduisant ou imitant cette marque.

17. Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, la société MD Fibre sera condamnée aux dépens ainsi qu'à payer à l'association QUALIFELEC la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge des référés, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort,

Dit que la société MD Fibre a commis des actes de contrefaçon vraisemblable de la marque semi-figurative collective française "QE Qualfelec" no1609713 ;

Fait interdiction à la société MD Fibre de faire usage dans la vie des affaires, de quelque manière que ce soit, pour identifier les services qu'elle propose d'installations électriques et en particulier les services de pose d'infrasctructures de recharge des véhicules électriques, de tout signe reproduisant ou imitant la marque semi-figurative collective française no1609713, et ce, sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée (c'est à dire par usage du signe "QE Qualifelec"), courant à l'expiration d'un délai de 10 jours suivant la signification de la présente décision et pendant 180 jours ;

Condamne la société MD Fibre aux dépens,

Condamne la société MD Fibre à payer à l'association QUALIFELEC la somme de 2.500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rappelle que la présente ordonnance est exécutoire de plein droit par provision.

Fait à Paris le 07 novembre 2022.

Le Greffier, Le Président,

Flore MARIGNY Nathalie SABOTIER


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Ct0087
Numéro d'arrêt : 22/56579
Date de la décision : 07/11/2022

Analyses

x


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire.paris;arret;2022-11-07;22.56579 ?
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