TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE NICE
4ème Chambre civile
Date : 14 Août 2024 -
MINUTE N°
N° RG 19/03824 - N° Portalis DBWR-W-B7D-MM3T
Affaire : COTE D’AZUR HABITAT pris en la personne de son représentant légal en domicilié en cette qualité audit siège
S.A. SURAVENIR ASSURANCES agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
Société SMABTP prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
C/ MUTUELLE DES MOTARDS
S.A. PACIFICA, pris en la personne de son représentant légal en exercice, domiciliée en cette qualité audit siège
ORDONNANCE DE MISE EN ETAT
Nous, Madame VALAT, Juge de la Mise en Etat,
assistée de Madame BOTELLA, Greffier.
DEMANDERESSES AU PRINCIPAL / DEFENDERESSES A L’INCIDENT
COTE D’AZUR HABITAT prise en la personne de son représentant légal en domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 1]
représentée par Maître Françoise BOULAN de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocats au barreau D’AIX-EN-PROVENCE
S.A. SURAVENIR ASSURANCES agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 5]
représentée par Maître Françoise BOULAN de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocats au barreau D’AIX-EN-PROVENCE
Société SMABTP prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 8]
[Localité 7]
représentée par Maître Françoise BOULAN de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocats au barreau D’AIX-EN-PROVENCE
DEFENDERESSE AU PRINCIPAL ET A L’INCIDENT
MUTUELLE DES MOTARDS (AMDM) prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié audit siège
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Martine VIDEAU -GILLI, avocat au barreau de NICE
DEFENDERESSE AU PRINCIPAL / DEMANDERESSE A L’INCIDENT
S.A. PACIFICA, pris en la personne de son représentant légal en exercice, domiciliée en cette qualité audit siège
[Adresse 9]
[Localité 7]
représentée par Maître Lionel CARLES de la SELARL CARLES-FOURNIAL & ASSOCIES, avocats au barreau de NICE
Vu les articles 780 et suivants du Code de Procédure Civile,
Ouï les parties à notre audience du 22 mars 2024
La décision ayant fait l’objet d’un délibéré au 27 juin 2024 a été rendue le 14 Août 2024, après prorogation du délibéré, par Madame VALAT Juge de la Mise en état,
assistée de Madame BOTELLA, Greffier.
Grosse
- Me Françoise BOULAN
Expédition
- Me Lionel CARLES
- Me Martine VIDEAU-GILLI
Le 14/08/2024
Mentions diverses :
Dans la nuit du 21 au 22 mars 2017, un incendie s'est déclaré dans la commune de [Localité 10] ayant pour origine deux cyclomoteurs assurés auprès de la Mutuelle des motards et un véhicule léger assuré auprès de la société Pacifica. Un logement appartenant à l'OPAC Côte d'Azur Habitat, assuré auprès de la SMABTP, et un autre logement appartenant à M. [C], assuré auprès de la société Suravenir, ont également été endommagés.
Après avoir indemnisé l'OPAC Côte d'Azur Habitat, la société SMABTP a par actes d'huissier en date des 19 et 21 août 2019 fait assigner la société Pacifica et la Mutuelle des Motards aux fins d'obtenir leur condamnation à lui payer les sommes versées à titre d'indemnité. L'affaire a été inscrite sous le numéro de RG 19/03824.
Après avoir indemnisé M. [X] [C], la société Suravenir Assurances a fait assigner la société Pacifica et la Mutuelle des motards par actes d'huissier en date du 2 août 2021aux fins d'obtenir leur condamnation à lui payer les sommes versées à titre d'indemnité. L'affaire a été inscrite au rôle sous le numéro de RG 21/03451.
La jonction des deux instances a été ordonnée par ordonnance du juge de la mise en état en date du 23 novembre 2022.
La société Pacifica a saisi le juge de la mise en état d'un incident aux fins de voir déclarer irrecevables comme prescrites les demandes formulées à son encontre.
Par conclusions d'incident n°2 notifiées le 17 janvier 2024, la société Pacifica conclut à titre principal au débouté de l'ensemble des demandes formées à son encontre par la société Suravenir Assurances et la SMABTP pour défaut de qualité à agir. A titre subsidiaire, elle conclut au débouté de leur demandes comme étant prescrites. En tout état de cause, elle sollicite leur condamnation à lui verser la somme de 1.500 euros chacune au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle fait valoir que la société Suravenir Assurances a introduit sa demande par acte du 2 août 2021, que les fins de non-recevoir relèvent de la compétence exclusive du juge de la mise en état et qu'elle est bien fondée à faire valoir la prescription de l'action diligentée par voie d'incident. Elle affirme que la date du 21 mars 2017, date de survenance du sinistre, a marqué le point de départ de la prescription et que le délai de deux ans prévu par l'article L 114-1 du code des assurances a expiré le 21 mars 2019, soit avant l'assignation qui lui a été délivrée le 2 août 2021.
Elle fait valoir que les sociétés Suravenir Assurances et SMABTP ne produisent pas de justificatifs quant aux règlements d'indemnités allégués et qu'elles ne sont donc pas fondées à exercer des recours subrogatoires.
Par conclusions d'incident n°4 notifiées le 13 juin 2023, la Mutuelle des motards conclut au débouté de la société Suravenir Assurances de l'ensemble de ses demandes comme étant prescrites et sa condamnation aux dépens.
Elle fait valoir que le sinistre est survenu le 21 mars 2017 et que l'action introduite à son encontre le 2 août 2022 l'a été après expiration du délai de deux ans prévu par l'article L 114-1 du code des assurances.
Par conclusions d'incident n°4 notifiées le 14 mars 2024, la SMABTP, la société Suravenir Assurances et l'OPAC Côte d'Azur Habitat concluent au rejet de la fin de non-recevoir tirée de la prescription et au débouté de la société Pacifica et de la Mutuelle des motards de l'ensemble de leurs prétentions. Ils sollicitent en outre leur condamnation à leur payer la somme de 1.500 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Ils font valoir que le versement des indemnités est dûment justifié, que la société SMABTP et la société Suravenir Assurances ayant indemnisé l'OPAC Côte d'Azur Habitat et M. [C] sont subrogées dans leurs droits d'action directe contre la société Pacifica et la Mutuelle des motards, que la prescription encourue est la prescription quinquennale prévue par l'article 2224 du code civil et que les actions initiées par actes introductifs d'instance du 19 août 2019 et du 26 juillet 2021 ne sont pas prescrites.
L'incident a été retenu à l'audience du 22 mars 2024 et la décision a été mise en délibéré au 27 juin 2024
prorogé au 14 août 2024 par mise à disposition au greffe.
MOTIFS
Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
L'article L 124-3 du code des assurances dispose que le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.
En application de l'article L 121-12 du même code, l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur.
Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir
L'article 31 du code de procédure civile prévoit que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
En l'espèce, la société Pacifica fait valoir que la société SMABTP et la société Suravenir Assurances ne disposent pas de qualité à agir à son encontre dès lors qu’elles ne produisent pas les documents justifiant le règlement d’indemnités à leur assurés respectifs.
Il convient toutefois de constater que la société SMABTP verse aux débats une lettre du 8 août 2017 confirmant à l'OPAC Côte d'Azur Habitat le règlement d'une indemnité d'un montant de 51.077,97 euros, une quittance subrogative signé par l'OPAC Côte d'Azur Habitat le 24 août 2017 pour un montant de 72.843,58 euros et un extrait d'écritures comptables relatives au règlement d'une indemnité au même établissement. Elle justifie par conséquent avoir indemnisé son assuré l'OPAC Côte d'Azur Habitat. Elle est donc subrogée dans ses droits et actions jusqu'à concurrence de l'indemnité versée et dispose d'un intérêt à agir à l'encontre de la société Pacifica et de la Mutuelle des motards.
De même, la société Suravenir Assurances verse aux débats un courrier électronique adressé à M. [C] le 9 août 2017 l'informant qu'un virement d'un montant de 7.548,75 euros a été effectué le même jour sur son compte, des factures de la société Phenix correspondant à des prestations effectuées suite au sinistre survenu dans l'appartement de M. [C], des actes de délégation signés par M. [C] et des attestations de fin de chantier signées par M. [C] les 30 mars 2017 et 13 avril 2017. Elle justifie par conséquent avoir indemnisé son assuré M. [C]. Elle est donc subrogée dans ses droits et actions jusqu'à concurrence de l'indemnité versée et dispose d'un intérêt à agir à l'encontre de la société Pacifica et de la Mutuelle des motards.
La fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la société SMABTP et de la société Suravenir Assurances sera par conséquent rejetée.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription
En application de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
En application de cet article, l'assureur de la victime qui, après avoir indemnisé cette dernière, exerce un recours subrogatoire contre l'assureur du responsable aux fins de remboursement des sommes qu'il a versées doit respecter, non pas le délai de prescription biennale de l'article L. 114-1 du code des assurances, mais le délai de prescription de l'action en responsabilité que la victime aurait pu engager contre l'auteur des dommages.
En l'espèce, comme examiné ci-dessous, la société SMABTP et la société Suravenir Assurances
démontrent avoir indemnisé leurs assurés respectifs, à savoir l'OPAC Côte d'Azur Habitat et M. [C]. Elles sont donc subrogées dans leurs droits et actions de leurs clients respectifs contre les tiers qui ont causé le dommage ayant donné lieu à l'indemnisation, et la prescription quinquennale prévue par l'article 2224 précité est applicable.
Les actions initiées par actes introductifs d'instance des 19 août 2019, 26 juillet 2021 et 2 août 2021 l'ont dont été dans le délai de cinq ans suivant le sinistre survenu dans la nuit du 21 au 22 mars 2017.
La fin de non-recevoir tirée de la prescription sera par conséquent rejetée et les actions de la société SMABTP et de la société Suravenir Assurances seront déclarées recevables.
Sur les autres demandes
La société Pacifica et la Mutuelle des motards, parties perdantes à l'incident seront condamnées in solidum aux dépens de l'incident ainsi qu'à verser à la SMABTP et à la société Suravenir Assurances la somme de 1.500 euros chacune sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dès lors que les pièces justificatives réclamées par la société Pacifica et la Mutuelles des motards étaient déjà versées aux débats et que la société SMABTP et la société Suravenir Assurances ont dû engager des frais irrépétibles dans le cadre du présent incident afin de démontrer l'absence manifeste de bien-fondé des demandes adverses.
PAR CES MOTIFS
Nous, juge de la mise en état, statuant après débats, par ordonnance contradictoire, en premier ressort, prononcée par mise à disposition au greffe,
REJETONS les fins de non-recevoir tirées du défaut de qualité à agir et de la prescription et DECLARONS recevables les demandes formulées par la société SMABTP, la SA Suravenir Assurances et l'OPAC Côte d'Azur Habitat ;
CONDAMNONS in solidum la SA Pacifica et la Mutuelle des motards à payer à la société SMABTP la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNONS in solidum la SA Pacifica et la Mutuelle des motards à payer à la SA Suravenir Assurances la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNONS in solidum la SA Pacifica et la Mutuelle des motards aux dépens de l'incident ;
REJETONS les autres demandes ;
RENVOYONS l’affaire à l’audience de mise en état du 04 décembre 2024 à 9 heures ;
Et le juge de la mise en état a signé avec le greffier.
LE GREFFIER LE JUGE DE LA MISE EN ETAT