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08/07/2024 | FRANCE | N°21/04438

France | France, Tribunal judiciaire de Nice, 4ème chambre civile, 08 juillet 2024, 21/04438


COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NICE

GREFFE
M I N U T E
(Décision Civile)


JUGEMENT : [J] [N] c/ Syndicat de copropriétaires de l’ensemble immobilier [Adresse 7]


Du 08 Juillet 2024

4ème Chambre civile
N° RG 21/04438 - N° Portalis DBWR-W-B7F-N35U























Grosse délivrée à
Me Jean-marc SZEPETOWSKI-POLIRSZTOK
, Me Florent ELLIA

expédition délivrée à


le 08 Juillet 2024

mentions divers

es
Par jugement de la 4ème Chambre civile en date du huit Juillet deux mil vingt quatre


COMPOSITION DU TRIBUNAL

Conformément à l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 Avril ...

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NICE

GREFFE
M I N U T E
(Décision Civile)

JUGEMENT : [J] [N] c/ Syndicat de copropriétaires de l’ensemble immobilier [Adresse 7]


Du 08 Juillet 2024

4ème Chambre civile
N° RG 21/04438 - N° Portalis DBWR-W-B7F-N35U

Grosse délivrée à
Me Jean-marc SZEPETOWSKI-POLIRSZTOK
, Me Florent ELLIA

expédition délivrée à

le 08 Juillet 2024

mentions diverses
Par jugement de la 4ème Chambre civile en date du huit Juillet deux mil vingt quatre

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Conformément à l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 Avril 2024 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :

Président : Madame SANJUAN-PUCHOL ( Juge rédacteur)
Assesseur : Madame VALAT
Greffier : Madame HAUSTANT

DÉBATS

A l'audience publique du 15 Avril 2024 le prononcé du jugement étant fixé au 03 Juillet 2024 par mise à disposition au greffe la juridiction, les parties en ayant été préalablement avisées.

PRONONCÉ

Par mise à disposition au Greffe le 08 Juillet 2024 après prorogation du délibéré, signé par Madame SANJUAN-PUCHOL Présidente, assistée de Madame PROVENZANO, Greffier, auquel la minute de la décision été remise par le magistrat signataire.

NATURE DU JUGEMENT :
contradictoire, en premier ressort, au fond.

DEMANDERESSE:

Mme [J] [N]
[Adresse 2]
[Localité 1]
représentée par Me Jean-marc SZEPETOWSKI-POLIRSZTOK, avocat au barreau de NICE, avocat plaidant

DEFENDEUR:

Syndicat de copropriétaires de l’ensemble immobilier [Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 1]
représenté par son syndic en exercice le Cabinet LVS dont le siège social est sis [Adresse 3] pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
représenté par Me Florent ELLIA, avocat au barreau de NICE, avocat plaidant

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [R] [N], M. [Y] [N] et M. [U] [N] étaient propriétaires de la parcelle cadastrée AS [Cadastre 4] sur laquelle a été construite la villa [Adresse 7] située[Adresse 7]t à [Localité 1].

Le 10 juillet 1986, cette parcelle a été divisée en deux parcelles cadastrées AS [Cadastre 5] et [Cadastre 6].

La copropriété [Adresse 7], qui est composée de la villa et d'un jardin, se situe sur la parcelle AS [Cadastre 6] tandis que le reste de la propriété, qui est un jardin privé aménagé, se trouve sur celle cadastrée AS [Cadastre 5].

Afin de permettre l'accès au jardin privé se trouvant sur la parcelle AS [Cadastre 5], le règlement de copropriété prévoit deux servitudes de passage grevant le fonds de la copropriété situé sur la parcelle AS [Cadastre 6].

Les deux parcelles ne sont pas séparées par un aménagement matériel et l'accès aux deux jardins se fait par une allée commune.

Depuis le mois de janvier 2021, la parcelle cadastrée AS [Cadastre 5] appartient à Mme [J] [N], veuve de [Y] [N], laquelle est également propriétaire des lots n° 4, 5, 10, 11, 12, 13, 14, 19 et 20 au sein de la copropriété [Adresse 7].

Une assemblée générale des copropriétaires s'est réunie le 8 octobre 2021.

Par acte du 30 novembre 2021, Mme [J] [N] a fait assigner le syndicat des copropriétaires [Adresse 7], ensemble immobilier situé [Adresse 7] à [Localité 1], représenté par son syndic en exercice le cabinet LVS, aux fins d'obtenir notamment l'annulation des résolutions n° 14 et 15 de l'assemblée générale du 8 octobre 2021.

Par ordonnance du 31 mars 2022, le juge des référés a estimé que l'entrave à l'exercice de la servitude constituait un trouble manifestement illicite et a condamné le syndicat des copropriétaires [Adresse 7] à cesser toute entrave à la servitude de passage grevant la parcelle AS [Cadastre 6] et permettant d'accéder à la parcelle AS [Cadastre 5] sous astreinte provisoire de 5.000 euros par infraction constatée.

La Cour d'appel d'Aix-en-Provence a infirmé cette ordonnance de référé par arrêt du 8 juin 2023.

Dans ses dernières conclusions communiquées le 18 mars 2024, Mme [J] [N] sollicite :

- le prononcé de l'annulation des résolutions n° 14 et 15 de l'assemblée générale du 8 octobre 2021,
- la condamnation du syndicat des copropriétaires [Adresse 7] à lui verser 5.000 euros de dommages et intérêts,
- la condamnation du syndicat des copropriétaires [Adresse 7] à cesser sans délai toute entrave à la servitude de passage grevant la parcelle AS189 et permettant d'accéder à la parcelle AS188 lui appartenant, sous astreinte provisoire de 5.000 euros par infraction constatée à compter de la décision à intervenir,
- la condamnation du syndicat des copropriétaires [Adresse 7] au paiement de la somme de 6.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,
- la dispense de toute participation aux charges générées par la présente procédure.

Elle expose qu'alors même qu'elle bénéficie, aux termes du règlement de copropriété, de servitudes de passage grevant le fonds du syndicat des copropriétaires cadastré AS [Cadastre 6] afin de lui permettre d'accéder à sa propriété privée cadastrée AS [Cadastre 5], l'assemblée générale des copropriétaires lui a fait interdiction, le 8 octobre 2021, d'utiliser son droit de passage et a entendu installer une clôture pour séparer le jardin privatif de celui de la copropriété. Elle indique que l'intégralité du jardin [Adresse 7] étant classé en raison de son caractère exceptionnel, son défunt époux organisait des visites de leur jardin privé depuis plus de quinze ans pour des groupes sélectionnés d'amateurs de jardins afin de pouvoir en assurer son entretien et la préservation du site classé. Elle expose avoir entendu poursuivre ces visites exceptionnelles mais que les copropriétaires lui ont indiqué, par courriel du 7 mars 2022, qu'ils interdisaient l'accès à son jardin privé par la copropriété, et ce, en violation de la servitude conventionnelle de passage dont elle bénéficie.

Elle précise ne pas en faire un usage abusif, ni troubler la vie de la copropriété, et réfute toute aggravation de la servitude, en se fondant notamment sur les deux constats d'huissier produits par la partie adverse qui n'ont constaté aucune visite et dont l'un produit uniquement deux photographies qui auraient été prises par un copropriétaire au mois de septembre 2022 qui ne démontrent pas de " divagations intensives ", et alors que le nombre de visiteurs n'est pas précisé et que rien n'indique qu'ils ne soient pas sur le tracé de la servitude de passage.

Elle soutient n'avoir aucune volonté d'enrichissement, que les coûts d'entretien de la parcelle AS [Cadastre 5] sont supérieurs aux sommes versées par les visiteurs et que des attestations démontrent que son époux organisait déjà de telles visites.

Elle conteste en outre la résolution prévoyant la mise en place d'une clôture séparant les parcelles AS [Cadastre 5] et AS [Cadastre 6] alors que l'intégralité du jardin, comprenant tant la parcelle du syndicat des copropriétaires que la parcelle dont elle a la propriété exclusive, a été inscrite à l'inventaire des monuments historiques, de sorte qu'aucun travaux ou aménagement ne peut être réalisé sans l'accord du ministère de la Culture. Elle estime qu'il s'agit d'un abus de majorité portant atteinte à ses droits.

Elle sollicite enfin la réparation des préjudices subis à cause du vote des résolutions litigieuses qui sont attentatoires à ses droits et qui contreviennent à la protection dont le jardin bénéficie.

Dans ses dernières écritures notifiées le 26 mars 2024, le syndicat des copropriétaires [Adresse 7] conclut au débouté et sollicite à titre reconventionnel que les pièces adverses n° 19 à 23 soient écartées des débats ainsi que la condamnation de Mme [N] à lui payer la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l'instance.

Il soutient qu'afin de réglementer la circulation de personnes étrangères à la copropriété sur le tènement de celle-ci et la visite d'espaces constitutifs de parties communes, l'assemblée générale, qui s'est réunie le 8 octobre 2021, a adopté les résolutions n° 14 et 15 aux termes desquelles il a été décidé, d'une part, que l'accès pour les visiteurs du jardin privé de Mme [N] serait effectué par l'entrée se trouvant sur le sentier Bellochio ou le sentier du Peyronnet et, en aucun cas, par les parties communes de la copropriété et, d'autre part, qu'une clôture sera mise en place pour séparer la copropriété du jardin privé de Mme [N] dans le cas où les limites séparatives ne seraient pas respectées.

Il affirme ne pas remettre en cause l'existence d'une servitude conventionnelle qui est de deux ordres, à savoir d'une part le droit de circuler depuis la parcelle [Cadastre 6] vers la parcelle [Cadastre 5] afin que M. [N] puisse se rendre à son jardin, et, d'autre part, le droit de créer un accès carrossable afin d'édifier une construction sur la parcelle [Cadastre 5], ce qui n'a pas été réalisé et ne peut plus l'être en raison du classement du site. Il considère toutefois que le droit de circulation piétonnier avait pour but de permettre à M. [N] d'accéder à la parcelle [Cadastre 5] en cheminant sur la parcelle [Cadastre 6] mais non d'organiser un accès public sur le tènement de la copropriété.

Il considère que Mme [N] entend faire évoluer la gestion de son jardin vers une promotion intensive du site comprenant également la partie du jardin appartenant à la copropriété ainsi que la villa, ce qui est démontré par le courrier du 5 mars 2022 qu'elle a adressé aux copropriétaires et dont il résulte que les visites envisagées sont différentes de celles organisées par son époux, ainsi que par des articles qui ne font plus état de la nécessité de prendre rendez-vous pour les visites et les constats d'huissiers de justice.

Il estime que la demanderesse a ainsi aggravé la servitude de passage grevant le fonds servant et s'octroie l'usage des parties communes de la copropriété et du nom du lieu, alors que la portée effective de son droit doit être analysée à l'aune de l'usage revendiqué qui dépasse celui du bon père de famille.

Il sollicite que les attestations produites par Mme [N] soient écartées des débats en ce qu'elles ne respectent pas les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile. Dans le cas où elles seraient prises en compte, il ajoute qu'elles font état de visites organisées par M. [N] sur les deux parcelles, ce dont les copropriétaires n'ont jamais été informés ni, a fortiori, donné leur accord ou perçu les recettes afférentes.

Il précise ne pas s'opposer à la circulation de la demanderesse sur l'assiette de la servitude mais distingue ses visiteurs à titre privé des visiteurs du jardin privé et fait observer que l'absence de délimitation de la servitude conduit les visiteurs à divaguer en dehors de son assiette alors que le jardin concerné par les visites n'est pas implanté uniquement sur la parcelle de Mme [N], mais également sur le tènement de la copropriété. Il souligne que Mme [N] dispose d'une entrée privée et directe située sur le [Adresse 7] par laquelle elle pourrait faire entrer les groupes de visiteurs.

Il considère enfin que la servitude permettant le déplacement dans le jardin n'est pas un droit délégué à des tiers de visiter les parties communes de la copropriété, ce dont il résulte que la copropriété doit pouvoir poser une clôture sur sa parcelle afin de limiter l'accès aux parties communes, dès lors qu'elle obtient au préalable l'accord du syndicat des copropriétaires puis de l'autorité administrative compétente.

La clôture de l'affaire est intervenue le 2 avril 2024. L'affaire a été retenue à l'audience du 15 avril 2024. La décision a été mise en délibéré au 3 juillet 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande du syndicat des copropriétaires [Adresse 7] tendant à ce que les pièces 19 à 23 communiquées par Mme [J] [N] soient écartées des débats

L'article 202 du code de procédure civile dispose que l'attestation contient la relation des faits auxquels son auteur a assisté ou qu'il a personnellement constatés. Elle mentionne les nom, prénoms, date et lieu de naissance, demeure et profession de son auteur ainsi que, s'il y a lieu, son lien de parenté ou d'alliance avec les parties, de subordination à leur égard, de collaboration ou de communauté d'intérêts avec elles.

Elle indique en outre qu'elle est établie en vue de sa production en justice et que son auteur a connaissance qu'une fausse attestation de sa part l'expose à des sanctions pénales.

L'attestation est écrite, datée et signée de la main de son auteur. Celui-ci doit lui annexer, en original ou en photocopie, tout document officiel justifiant de son identité et comportant sa signature.

Ces dispositions ne sont pas prescrites à peine de nullité et il appartient au juge d'apprécier souverainement si l'attestation non conforme à l'article 202 présente des garanties suffisantes pour emporter sa conviction.

En l'espèce, le syndicat des copropriétaires entend voir écarter des débats les pièces 19 à 23 produites par la partie adverse au motif que les attestations litigieuses ne respectent pas les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile.

Le fait que des attestations de témoignage ne respectent pas les règles de forme prévues par l'article 202 susvisé n'a d'incidence que sur la force probante de ces éléments de preuve.

Les pièces incriminées ne peuvent donc être écartées des débats et la demande sera rejetée.

Sur la demande de prononcé de la nullité de la résolution n° 14 adoptée par l'assemblée générale des copropriétaires [Adresse 7] du 8 octobre 2021

En vertu de l'article 686 du code civil, il est permis aux propriétaires d'établir sur leurs propriétés, ou en faveur de leurs propriétés, telles servitudes que bon leur semble, pourvu néanmoins que les services établis ne soient imposés ni à la personne, ni en faveur de la personne, mais seulement à un fonds et pour un fonds, et pourvu que ces services n'aient d'ailleurs rien de contraire à l'ordre public.

L'usage et l'étendue des servitudes ainsi établies se règlent par le titre qui les constitue et à défaut de titre, par les règles ci-après.

Il résulte de l'article 701 du code civil que le propriétaire du fonds débiteur de la servitude ne peut rien faire qui tende à en diminuer l'usage ou à le rendre plus incommode.

L'article 8 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que le règlement de copropriété détermine la destination des parties tant privatives que communes, ainsi que les conditions de leur jouissance. Il fixe également, sous réserve des dispositions de la présente loi, les règles relatives à l'administration des parties communes et énumère, s'il y a lieu, les parties communes spéciales et celles à jouissance privative.

En l'espèce, selon les termes de la résolution n° 14 de l'assemblée générale du 8 octobre 2021, les copropriétaires ont décidé, à la majorité des voix, que " toutes les visites à son jardin privé organisées par Mme [N]-[G] ou sa Fondation seront limitées audit jardin privé et seront interdites sur la partie de la copropriété du [Adresse 7]. L'accès pour les visiteurs au jardin privé [N] sera donc effectué par l'entrée se trouvant soit sur le sentier de Bellocchio ou le sentier du Peyronnet, et par aucune partie de la copropriété ".

Ainsi, la décision prise par l'assemblée générale ne lui fait pas interdiction, pas plus qu'aux personnes venant lui rendre visite à titre privé, d'accéder à sa parcelle en passant par la copropriété, mais tend à interdire l'ouverture de la copropriété à des groupes de personnes venant visiter les lieux dans le cadre des visites de son jardin privé organisées par ses soins ou sa fondation moyennant le paiement d'un droit d'entrée.

Le syndicat des copropriétaires reproche à Mme [N] d'organiser des visites, non pas de son jardin privé, par lequel elle peut accéder par le sentier Bellochio ou celui du Peyronnet ainsi que l'ont constaté les huissiers de justice, mais des jardins et façades de la villa se trouvant sur le tènement de la copropriété, soutenant que les visiteurs " divaguent " sur sa parcelle lorsqu'ils empruntent la servitude de passage.

L'interdiction votée par les copropriétaires, à l'exception de Mme [N], vise donc à interdire les visites du jardin et de la façade de la villa de la copropriété par les personnes qui viennent visiter le jardin privé de Mme [N] et pour ce faire, à leur interdire d'accéder au jardin privé par la servitude de passage qui leur permet de visiter également le jardin situé sur son fonds.

Mme [N] ne conteste pas organiser des visites de son jardin privé mais soutient avoir le droit de faire passer les visiteurs par la servitude de passage dont elle bénéficie sur le fonds servant.

Si une servitude de passage piétonnier n'emporte pas nécessairement le droit pour le propriétaire du fonds dominant d'en permettre l'accès à toute personne en y faisant passer des groupes de visiteurs dans le cadre de visites organisées, il convient de se référer aux termes de l'acte qui l'a constituée afin de déterminer l'étendue du droit de passage Mme [N].

Le règlement de copropriété, dressé par acte notarié le 10 juillet 1986, prévoit dans un paragraphe 13 (page 21) deux servitudes de passage grevant le fonds servant appartenant à la copropriété cadastré AS n° [Cadastre 6], à savoir :

" Sur le terrain appartenant à la copropriété - cadastré section AS n° [Cadastre 6] pour 2.406 m2, fonds servant, deux droits de passage au profit du terrain cadastré section AS n° [Cadastre 5] pour 2.544 m2 - appartenant aux consorts [N] ci-dessus nommés - fonds dominant.

L'un de ses droits sera piétonnier et s'exercera le long de la limite Est du portail actuel, jusqu'au terrain ci-dessus désigné.

L'autre droit de passage aura une largeur de trois mètres cinquante centimètres (3,50 m) pour véhicules automobiles, et s'exercera depuis le portail d'entrée, sur l'allée menant à la maison et à l'endroit indiqué sur le plan, sous une teinte marron. Ce droit permettant aux véhicules de monter sur le terrain AS [Cadastre 5].

La copropriété cadastrée section AS n° [Cadastre 6], autorise les propriétaires du terrain cadastré section AS n° [Cadastre 5] ci-dessus désigné, à faire passer en sous-terrain des canalisations d'égout d'eau et de téléphone ".

La résolution n° 14 litigieuse porte ainsi sur la servitude de passage piétonnier, dont la majorité des copropriétaires a entendu restreindre l'usage en décidant que les visiteurs du jardin privé de Mme [N] ne pourraient plus l'emprunter, seuls ses visiteurs à titre privé étant autorisés à le faire.

Or, aucune restriction quant à la destination, l'usage ou les modalités d'exercice de la servitude de passage n'est prévue par l'acte constitutif, dont les termes clairs et précis ne nécessitent aucune interprétation.

Mme [N] doit donc pouvoir user de la servitude de passage conformément au titre constitutif qui n'établit aucune restriction d'usage, c'est-à-dire sans distinction portant sur la qualité de ses visiteurs, qu'il s'agisse de visiteurs privés ou du public venu visiter son jardin privé.

La délibération contestée, qui restreint le droit de passage piétonnier du propriétaire du fonds dominant en interdisant aux visiteurs de son jardin privé d'utiliser la servitude de passage et en leur imposant d'accéder par d'autres entrées, est dès lors illicite.

Il convient en conséquence de prononcer la nullité de la résolution n° 14 adoptée par l'assemblée générale du 8 octobre 2021 qui porte atteinte à la servitude de passage du fonds dominant et de condamner le syndicat des copropriétaires [Adresse 7] à cesser sans délai toute entrave à la servitude de passage grevant la parcelle n° [Cadastre 6] et permettant d'accéder à la parcelle n° [Cadastre 5], sous astreinte provisoire de 500 euros par infraction constatée passé un délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision.

Sur la demande de prononcé de la nullité de la résolution n° 15 adoptée par l'assemblée générale des copropriétaires [Adresse 7] du 8 octobre 2021

En application de l'article L. 621-27 du code du patrimoine, l'inscription au titre des monuments historiques est notifiée aux propriétaires et entraînera pour eux l'obligation de ne procéder à aucune modification de l'immeuble ou partie de l'immeuble inscrit, sans avoir, quatre mois auparavant, avisé l'autorité administrative de leur intention et indiqué les travaux qu'ils se proposent de réaliser.

Lorsque les constructions ou les travaux envisagés sur les immeubles inscrits au titre des monuments historiques sont soumis à permis de construire, à permis de démolir, à permis d'aménager ou à déclaration préalable, la décision accordant le permis ou la décision de non-opposition ne peut intervenir sans l'accord de l'autorité administrative chargée des monuments historiques.

En l'espèce, par arrêté préfectoral du 14 mars 2017, ont été inscrits au titre des monuments historiques le jardin du [Adresse 7] en totalité avec ses murs de clôture et l'ensemble de ses aménagements ainsi que les façades et les toitures de la villa, parties prenantes de la composition.

Suivant délibération de l'assemblée générale du 8 octobre 2021, le syndicat des copropriétaires [Adresse 7] a adopté la résolution n° 15 intitulée " à la demande de plusieurs copropriétaires, mise en place d'une clôture pour séparer le SDC de copropriété le [Adresse 7] du jardin privé de Mme [N]-[G] " en ces termes :

" Suite à la demande de plusieurs copropriétaires, l'assemblée générale décide que si les visites organisées par Mme [N]-[G] ou sa Fondation à son jardin privatif ne respectent pas les limites séparatives de son jardin privé (parcelle cadastrale [Cadastre 5]) et la copropriété du [Adresse 7] (parcelle cadastrale [Cadastre 6]), elle mettra en place une clôture afin de séparer physiquement les deux parcelles ".

Alors que Mme [N] fait valoir qu'aucun aménagement ni travaux ne peut être réalisé sans l'accord du ministère de la Culture, le syndicat des copropriétaires soutient qu'avant de soumettre une telle demande à l'autorité administrative compétente, celle-ci devait d'abord être acceptée par la majorité des copropriétaires.

Il convient d'une part de relever que la résolution n° 15 est rédigée au conditionnel, la conjonction employée soulignant l'existence d'une condition, à savoir l'hypothèse où les visites organisées par Mme [N] ou la fondation du jardin privatif ne respecteraient pas les limites de la copropriété, les deux parcelles n'étant pas matérialisées.

Il s'agit d'autre part de constater que le syndicat des copropriétaires doit en effet être d'accord sur le principe de la mise en place d'une clôture avant de saisir l'autorité administrative, seule compétente pour autoriser ou refuser son installation.

La résolution litigieuse ne permet nullement de considérer que le syndicat des copropriétaires n'entendait pas respecter les dispositions du code du patrimoine.

En conséquence, il y a lieu de débouter Mme [N] de sa demande tendant à voir prononcer l'annulation de la résolution n° 15 adoptée par l'assemblée générale du 8 octobre 2021, celle-ci n'étant pas entachée d'irrégularité ou d'illicéité.

Sur la demande de dommages-intérêts formée par Mme [N]

En vertu de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.

L'article 1241 du même code précise que chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais également par sa négligence ou son imprudence.

Pour solliciter la réparation d'un préjudice, le demandeur doit rapporter la preuve de l'existence de son préjudice, d'une faute du syndicat des copropriétaires, et d'un lien de causalité entre les deux, au-delà d'une simple affirmation.

En l'espèce, Mme [N] demande l'allocation de la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi qu'elle caractérise par l'atteinte à ses droits et à la protection dont le jardin de la copropriété bénéficie.

Il résulte de ce qui précède que le syndicat, par l'intermédiaire de l'assemblée générale des copropriétaires du [Adresse 7], a commis une faute en adoptant la résolution n° 14 soumise à l'assemblée générale du 8 octobre 2021 puisqu'il s'agit d'une décision illicite ayant porté atteinte aux intérêts légitimes de Mme [N] et particulièrement au droit dont le fonds dominant dispose d'user de la servitude de passage piétonnière résultant du règlement de copropriété.

Le préjudice de Mme [N] est caractérisé dès lors qu'elle n'a pu user de la servitude dans les termes fixés par l'acte constitutif du 10 juillet 1986.

Toutefois, en l'état des éléments d'appréciation, ce préjudice sera indemnisé par l'allocation de la somme de 1.000 euros.

Sur les demandes accessoires

Partie perdante au procès, le syndicat des copropriétaires [Adresse 7] sera condamné aux dépens ainsi qu'à verser à Mme [N] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Conformément à l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965, Mme [N] sera dispensée de toute participation à la dépense commune des frais de procédure.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant après débats publics, par jugement contradictoire rendu en premier ressort, par mise à disposition au greffe :

PRONONCE la nullité de la résolution n° 14 du procès-verbal d'assemblée générale des copropriétaires [Adresse 7], situé [Adresse 7] à [Localité 1], du 8 octobre 2021;

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires [Adresse 7] à faire cesser sans délai toute entrave à la servitude de passage grevant la parcelle n° [Cadastre 6] et permettant d'accéder à la parcelle n° [Cadastre 5], sous astreinte provisoire de 500 euros par infraction constatée passé un délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision ;

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires [Adresse 7] à payer à Mme [J] [N] la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires [Adresse 7] à payer à Mme [J] [N] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE Mme [J] [N] de sa demande d'annulation de la résolution n° 15 du procès-verbal d'assemblée générale des copropriétaires [Adresse 7] du 8 octobre 2021;

DEBOUTE le syndicat des copropriétaires [Adresse 7] de ses demandes ;

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires [Adresse 7] aux dépens ;

RAPPELLE que Mme [J] [N] sera dispensée de toute participation à la dépense commune des frais de procédure ;

Le présent jugement a été signé par le Président et le Greffier.
LE GREFFIER                                                    LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Nice
Formation : 4ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/04438
Date de la décision : 08/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-08;21.04438 ?
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