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03/07/2024 | FRANCE | N°19/04639

France | France, Tribunal judiciaire de Nice, 4ème chambre civile, 03 juillet 2024, 19/04639


COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NICE

GREFFE
M I N U T E
(Décision Civile)


JUGEMENT : [M] [Y], [P] [Y], [Z] [Y], [A] [G], [V] [G], [C] [G] c/ S.N.C. ARENAS FINANCE PARTICIPATIONS


Du 03 Juillet 2024

4ème Chambre civile
N° RG 19/04639 - N° Portalis DBWR-W-B7D-MPSQ

























Grosse délivrée à
la SELARL MOULET MARTY AVOCATS
la SELAS ROBIN LAWYERS
la SELAS STIFANI - FENOUD - BECHTOLD



le 03 J

uillet 2024


mentions diverses
Par jugement de la 4ème Chambre civile en date du trois Juillet deux mil vingt quatre

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame SANJUAN PUCHOL Présidente, assistée de Madame PROVE...

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NICE

GREFFE
M I N U T E
(Décision Civile)

JUGEMENT : [M] [Y], [P] [Y], [Z] [Y], [A] [G], [V] [G], [C] [G] c/ S.N.C. ARENAS FINANCE PARTICIPATIONS


Du 03 Juillet 2024

4ème Chambre civile
N° RG 19/04639 - N° Portalis DBWR-W-B7D-MPSQ

Grosse délivrée à
la SELARL MOULET MARTY AVOCATS
la SELAS ROBIN LAWYERS
la SELAS STIFANI - FENOUD - BECHTOLD

le 03 Juillet 2024

mentions diverses
Par jugement de la 4ème Chambre civile en date du trois Juillet deux mil vingt quatre

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame SANJUAN PUCHOL Présidente, assistée de Madame PROVENZANO, Greffier.

Vu les Articles 812 à 816 du Code de Procédure Civile sans demande de renvoi à la formation collégiale ;

DÉBATS

A l'audience publique du 05 Mars 2024 le prononcé du jugement étant fixé au 17 mai 2024 par mise à disposition au greffe de la juridiction, les parties en ayant été préalablement avisées.

PRONONCÉ

Par mise à disposition au Greffe le 03 Juillet 2024, après prorogation du délibéré le 17 mai et 11 juin 2024, signé par Madame SANJUAN PUCHOL Présidente, assistée de Madame BOTELLA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DE LA DÉCISION :
contradictoire, en premier ressort, au fond.

DEMANDEURS:

Monsieur [M] [Y], agissant en qualité d’ayant-droit de Madame [B] [G] décédée le 17 janvier 2008
[Adresse 6]
[Localité 4]
représenté par Maître Jérôme MOULET de la SELARL MOULET MARTY AVOCATS, avocats au barreau de MARSEILLE, avocats plaidant

Monsieur [P] [Y], agissant en qualité d’ayant-droit de Mme [B] [G] décédée le 17 janvier 2008
[Adresse 10]
[Localité 4]
représenté par Maître Jérôme MOULET de la SELARL MOULET MARTY AVOCATS, avocats au barreau de MARSEILLE, avocats plaidant

Madame [Z] [Y], agissant en qualité d’ayant-droit de Madame [B] [G] décédée le 17 janvier 2008
[Adresse 5]
[Localité 13]
représentée par Maître Jérôme MOULET de la SELARL MOULET MARTY AVOCATS, avocats au barreau de MARSEILLE, avocats plaidant

Madame [A] [G], agissant en qualité d’ayant-droit de Monsieur [L]-[O] [G] décédé le 17 décembre 2018
[Adresse 11]
[Localité 3]
représentée par Maître Anaïs GARAY de la SELAS ROBIN LAWYERS, avocats au barreau de DRAGUIGNAN, avocats plaidant

Monsieur [V] [G], agissant en qualité d’ayant-droit de Monsieur [L]-[O] [G] décédé le 17 décembre 2018
[Adresse 7]
[Localité 12]
représenté par Maître Anaïs GARAY de la SELAS ROBIN LAWYERS, avocats au barreau de DRAGUIGNAN, avocats plaidant

Madame [C] [G], agissant en qualité d’ayant droit de Monsieur [L]-[O] [G] décédé le 17 décembre 2018
[Adresse 8]
[Adresse 8]
[Localité 2]
représentée par Maître Anaïs GARAY de la SELAS ROBIN LAWYERS, avocats au barreau de DRAGUIGNAN, avocats plaidant

DÉFENDERESSE:

S.N.C. ARENAS FINANCE PARTICIPATIONS agissant par son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 9]
[Localité 1]
représentée par Maître François STIFANI de la SELAS STIFANI - FENOUD - BECHTOLD, avocats au barreau de GRASSE, avocats plaidant

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Arenas Finance Participation a été constituée le 2 janvier 1995, à parts égales, entre M. [L] [G], M. [F] [G] et Mme [B] [G], frères et sœur.

Mme [B] [G] est décédée le 17 janvier 2008 en laissant pour lui succéder ses trois enfants, M. [M] [Y], M. [P] [Y] et Mme [Z] [Y]. M. [L] [G] est décédé le 17 décembre 2018 en laissant également pour lui succéder ses trois enfants, Mme [A] [G], M. [V] [G] et Mme [C] [G].

Par acte d'huissier du 15 octobre 2019, M. [M] [Y], M. [P] [Y], Mme [Z] [Y], Mme [A] [G], M. [V] [G] et Mme [C] [G] ont fait assigner la société Arenas Finance Participation devant le tribunal de grande instance de Nice aux fins d'obtenir le remboursement de la créance en compte courant d'associé de Mme [B] [G] et M. [L] [G].

M. [M] [Y], M. [P] [Y] et Mme [Z] [Y] ont indiqué à leur oncle, M. [F] [G], par lettres et message électronique, qu'ils renonçaient à agir à l'encontre de la société Arenas Finance Participation dont il demeurait le seul associé.

Le 8 septembre 2022, la société Arenas Finance Participation a communiqué des conclusions d'incident aux fins de communication de pièces et de sursis à statuer.

Par ordonnance du 29 mars 2023, le juge de la mise en état a rejeté la demande de constat du désistement d'instance de M. [M] [Y], M. [P] [Y] et Mme [Z] [Y] qui n'a pas été formée par voie de conclusions et a débouté la société Arenas Finance Participation de sa demande de communication de la déclaration de succession de M. [L] [G] et de sursis à statuer jusqu'à ce qu'elle soit produite.

Par conclusions notifiées le 31 janvier 2024, M. [M] [Y], M. [P] [Y] et Mme [Z] [Y] sollicitent du tribunal de :

-constater leur désistement d'instance et d'action,
-dire que chaque partie conservera à sa charge les honoraires, frais, droits, dépens et autres par elle exposés à l'occasion de l'instance éteinte.

Dans leurs conclusions notifiées le 25 juillet 2023, M. [V] [G], Mme [C] [G] et Mme [A] [G] sollicitent la condamnation de la société Arenas Finance Participation à :

-leur payer la somme de 208.468 euros correspondant au remboursement de la créance de compte courant d'associé détenue dans ses livres par M. [L]-[O] [G],
-payer à M. [M] [Y], M. [P] [Y] et Mme [Z] [Y] la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils indiquent que la société Arenas Finance Participation a été créée en 1995 afin d'acquérir des titres de participation détenus par la société [G] et Fils.
Ils expliquent que feu M. [L]-[O] [G] et Mme [B] [G] apportaient des fonds en compte courant d'associé en vue de financer l'acquisition des titres destinés à être inscrits dans l'actif de la société Arenas Finance Participation.
Ils précisent que les sommes étaient inscrites dans la comptabilité de la société Arenas Finance Participation au passif du bilan en créance de compte courant d'associé.
Ils affirment qu'il ressort du bilan de l'exercice clos le 31 décembre 2010 que le montant des créances de compte courant d'associé de la société Arenas Finance Participation se décomposait comme suit : 208.468 euros pour M. [L]-[O] [G] et 361.287 euros pour Mme [B] [G].
Ils précisent que l'existence de ces créances en compte courant d'associé a été retranscrite dans la comptabilité de la société Arenas Finance Participation jusqu'en 2010 mais qu'à l'issue de cet exercice, la comptabilité a cessé d'être tenue et que les comptes courants n'ont jamais été remboursés, créance dont ils ont hérités sur le fondement de l'article 724 du code civil, ajoutant qu'ils produisent l'acte de notoriété dressé à la suite du décès de leur père de sorte qu'ils ont qualité à agir.
Ils exposent qu'en vertu d'une jurisprudence constante et en l'absence de convention contraire, les comptes courants d'associés sont remboursables à tout moment quelle que soit la situation financière de la société, peu important que la somme réclamée excède la trésorerie disponible.
Ils indiquent que les créances de comptes courants d'associés, qui figuraient dans la comptabilité de la société jusqu'en 2010, n'ont pas été remboursées de sorte qu'ils détiennent désormais une créance d'un montant de 208.468 euros à l'encontre de la société Arenas Finance Participation.
Ils ajoutent qu'il appartient au gérant de la société d'établir les comptes de la société et relèvent qu'aucune déclaration rectificative de la comptabilité n'a été réalisée par rapport aux comptes courants d'associés inscrits dans les derniers bilans déposés au greffe du tribunal de commerce.
Ils considèrent que c'est à la société Arenas Finance Participation de rapporter la preuve que la créance en compte courant d'associé est éteinte.

Dans ses dernières écritures notifiées le 23 janvier 2024, la société Arenas Finance Participation conclut au débouté et sollicite à titre reconventionnel du tribunal de :

-déclarer irrecevable l'action des demandeurs faute d'intérêt et de qualité à agir,
-condamner solidairement Mme [A] [G], Mme [C] [G] et M. [V] [G] à lui verser la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l'instance.

Elle affirme avoir été créée à des fins fiscales dans le but de racheter les titres de participation que détenait la société [G] et Fils dans d'autres sociétés à un prix surévalué afin d'enregistrer un déficit que les associés imputeraient sur leurs revenus, comme le démontre le bilan de l'exercice 2003 qui enregistre un déficit et aucun actif.
Elle explique qu'en conséquence, son expert-comptable a informé le notaire chargé de la succession de Mme [B] [G] que l'actif de la société était nul et qu'il était possible de considérer que le compte courant crédité de Mme [B] [G] est une créance non-récupérable qui ne doit pas être prise en compte dans la succession.
Elle relève en outre qu'à défaut d'activité, son gérant, M. [L]-[O] [G], n'a plus tenu de comptabilité après l'exercice de 2010.
Elle affirme que le désistement de M. [M] [Y], M. [P] [Y] et Mme [Z] [Y] les prive de tout intérêt à agir.
Elle souhaite que Mme [A] [G], Mme [C] [G] et M. [V] [G] établissent leur droit de propriété sur la prétendue créance de leur auteur et ainsi leur qualité à agir, estimant que les actes de notoriété sont insuffisants pour ce faire.
Elle ajoute que Mme [A] [G], Mme [C] [G] et M. [V] [G] ne démontrent pas que leur auteur était encore créancier de la société, raison pour laquelle elle estime que la déclaration de succession serait utile aux débats en ce qu'elle permettrait de le vérifier.
Elle estime qu'à défaut, Mme [A] [G], Mme [C] [G] et M. [V] [G] doivent être déclarés irrecevables en leur action faute de qualité à agir.
Elle indique que la jurisprudence impose que le bilan établi par un expert-comptable soit approuvé par les associés pour être opposable à la société et que les mentions portées au passif d'un bilan ne valent pas reconnaissance de dette.
Elle considère que les demandeurs ne démontrent pas que la créance est certaine et qu'elle existait encore à la date de l'action engagée le 15 octobre 2019.
Elle estime que les pièces versées aux débats concernant les exercices 2003 et 2007 ne permettent pas de vérifier si le bilan de l'exercice a été établi, présenté au vote des associés et approuvé, que celles produites au titre de l'exercice 2009 ou 2010 ne démontrent pas que M. [L]-[O] [G] était alors créancier de la société, de sorte que rien ne prouve l'existence d'une créance à son profit au jour de son décès.
Elle souligne en outre que M. [L]-[O] [G] était le gérant de la société jusqu'à son décès en 2018 et estime étonnant qu'il n'ait pas préservé ses propres intérêts en établissant des comptes sociaux complets et en les soumettant au vote des associés s'il détenait une telle créance.

La clôture de la procédure est intervenue le 20 février 2024. L'affaire a été retenue à l'audience du 5 mars 2024. La décision a été mise en délibéré au 17 mai 2024 prorogé au 3 juillet 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le désistement d'instance et d'action de M. [M] [Y], de M. [P] [Y] et de Mme [Z] [Y]

En vertu de l'article 384 du code de procédure civile, en dehors des cas où cet effet résulte du jugement, l'instance s'éteint accessoirement à l'action par l'effet de la transaction, de l'acquiescement, du désistement d'action ou, dans les actions non transmissibles, par le décès d'une partie. L'extinction de l'instance est constatée par une décision de dessaisissement.

Ainsi, le désistement d'action emporte extinction du droit d'agir, ce qui rend irrecevable toute demande ultérieure fondée sur ce droit. Il emporte aussi, accessoirement à l'action, extinction de l'instance qui doit être constatée par une décision de dessaisissement.

En application des articles 394 et suivants du code de procédure civile, le demandeur peut, en toute matière, se désister de sa demande en vue de mettre fin à l'instance et ce désistement est parfait par l'acceptation du défendeur, si le défendeur n'a présenté aucune défense au fond ou fin de non-recevoir ou si son refus n'est fondé sur aucun motif légitime.

L'article 397 du même code précise que le désistement comme son acceptation est exprès ou implicite.

En cas de pluralité de parties, le désistement de certains d'entre eux est valable, et n'empêche pas les autres de poursuivre l'instance, puisque chacun des liens juridiques d'instance conserve sa propre autonomie.

En l'espèce, M. [M] [Y], M. [P] [Y] et Mme [Z] [Y] ont communiqué des conclusions de désistement d'instance et d'action, désistement qui n'est pas expressément accepté par la société Arenas Finance Participation, laquelle n'a toutefois aucun motif légitime à s'y opposer puisqu'elle considère que l'instance a été éteinte du fait de ce désistement.

La société Arenas Finance Participation en tire pour conséquence qu'ils sont privés d'intérêt à agir, alors qu'il convient de constater que le désistement d'instance et d'action de M. [M] [Y], M. [P] [Y] et Mme [Z] [Y] est parfait et qu'il emporte l'extinction partielle de l'instance enrôlée sous le numéro de RG 19/04639 qui, n'étant pas indivisible, se poursuit entre les autres parties.

Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir

1. Sur la recevabilité du moyen de défense.

En vertu de l'article 789-6° du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les fins de non-recevoir.

Il ressort de l'article 55 II du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 que les dispositions de l'article 789-6° sont applicables aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020.

L'assignation a été délivrée par M. [M] [Y], M. [P] [Y], Mme [Z] [Y], Mme [A] [G], M. [V] [G] et Mme [C] [G] le 15 octobre 2019.

Il s'ensuit que les dispositions de l'article 789-6° du code de procédure civile conférant compétence exclusive au juge de la mise en état pour statuer sur les fins de non-recevoir ne sont pas applicables à l'instance introduite avant l'entrée en vigueur du décret du 11 décembre 2019.

La fin de non-recevoir élevée devant le tribunal par la société Arenas Finance Participation est donc recevable et doit être examinée.

2. Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir

L'article 122 du code civil dispose que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

L'article 724 du code civil énonce que les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt.

En vertu des articles 730 et 730-1 du même code, la preuve de la qualité d'héritier s'établit par tous moyens et peut notamment résulter d'un acte de notoriété dressé par un notaire, à la demande d'un ou plusieurs ayants droit.

En l'espèce, Mme [A] [G], Mme [C] [G] et M. [V] [G] versent aux débats l'acte de notoriété dressé après le décès de leur père par Maître [U] [J] [K], notaire à [Localité 13], établissant qu'ils sont les héritiers de M. [L] [G], associé et gérant de la société Arenas Finance Participation jusqu'à son décès le 17 décembre 2018.

Cet acte de notoriété est suffisant à rapporter la preuve qu'ils ont été saisis de plein droit des biens, droits et actions de M. [L] [G].

Il s'ensuit que Mme [A] [G], Mme [C] [G] et M. [V] [G] ont qualité à agir à l'encontre de la société Arenas Finance Participation.

La fin de non-recevoir tirée de leur défaut de qualité à agir sera par conséquent rejetée.

Sur la demande en remboursement de la créance de compte courant d'associé

En vertu de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'absence de dispositions légales définissant le compte courant d'associé, il convient de se rapporter à la réponse ministérielle qui a défini l'apport en compte courant comme consistant, pour l'associé, à consentir à la société des avances ou des prêts en versant directement des fonds ou en laissant à sa disposition des sommes qu'il renonce provisoirement à percevoir (Rép. min. n° 34969 : JO Sénat, 22 oct. 1980, p. 4001, Ch. De Cuttoli).

Si l'associé ou ses ayants droit doivent apporter la preuve de leur droit, la somme figurant au compte courant d'après les documents comptables de la société est présumée correspondre à la réalité.

En effet, le solde d'un compte courant tel qu'établi dans les comptes d'une société est présumé exact et c'est à celui qui conteste cette écriture qu'il revient d'établir qu'elle est inexacte.

Cependant, puisque le compte-courant est soumis au droit commun des obligations, la société a la faculté d'invoquer une compensation ou de contester la réalité ou la cause de la créance.

En l'espèce, la société Arenas Finance Participation ne produit aucun document comptable.

M. [V] [G], Mme [C] [G] et Mme [A] [G] versent aux débats :

- la liasse fiscale de la société pour l'exercice 2003 qui mentionne au titre des emprunts et dettes financières divers la somme de 568.535 euros,

- le détail du bilan passif de l'exercice 2003, celui de l'exercice 2004 et le détail du bilan actif de 2007 qui mentionnent au titre des emprunts et dettes financières la somme de 208.468 euros pour M. [L]-[O] [G] et la somme de 361.287 euros pour Mme [B] [G],

- le grand livre de clôture des comptes généraux pour l'exercice 2007 qui mentionnent ces mêmes emprunts et dettes financières au bénéfice de M. [L]-[O] [G] et de Mme [B] [G],

- le bilan passif avant répartition de 2010 qui mentionne au titre des emprunts et dettes financières divers la somme de 569.755, dont le tribunal constate que ce total correspond à l'addition des deux sommes susvisées (208.468+361.287),

Ainsi, ces documents visent la créance de leur père, peu important qu'aucun autre document comptable pour les années postérieures à 2010 et antérieures au décès de [L]-[O] [G] ne soit produit, de sorte que les ayants droit font la preuve de ce que le solde du compte courant correspond à une écriture comptable exacte qu'aucun élément produit par la société défenderesse ne vient contredire.

Tous les documents comptables mentionnent bien qu'il s'agit d'un apport en compte courant de [L] [G], le courrier de l'expert-comptable adressé le 10 mars 2008 au notaire chargé de la succession d'[B] [G] confirmant ce fait en indiquant :

" Pour financer l'acquisition de ces titres, M. [L] [G] et Mme [B] [G] ont apporté des fonds en compte-courant à hauteur de 208.468 € ([L]-[O] [G]) et de 361.287 € ([B] [G]). Aujourd'hui, l'actif de la SNC est nul et donc on peut considérer le compte-courant comme étant une créance non récupérable qui ne devrait pas être notée dans la succession. "

Si la société Arenas Finance Participation se fonde sur cette lettre, il convient de souligner que le remboursement est la règle même lorsque la société débitrice traverse une conjoncture financière difficile, la seule limite susceptible d'être posée à la demande de remboursement étant l'abus de droit.

En effet, l'avance en compte courant est exigible à tout moment en l'absence de terme fixé par celui-ci, quand bien même la société ferait face à des difficultés d'ordre économique.

Si l'appréciation du solde du compte courant dont un associé se prévaut doit être réalisée en prenant en compte l'ensemble des écritures pertinentes des comptes de la société à la date de l'appréciation du bien-fondé de la demande, il convient de relever qu'aucune pièce ne permet d'accréditer l'extinction de la créance ou l'inexactitude des documents comptables et bilans produits par les demandeurs.

La société Arenas Finance Participation ne conteste pas la réalité des comptes courants d'associés mais seulement leur existence au jour de la demande de remboursement alors qu'elle ne rapporte pas la preuve de l'extinction ultérieure de la créance par une renonciation de l'associé à en demander le remboursement, acté au cours d'une assemblée générale, ou par un remboursement déjà intervenu.

Le moyen tiré de ce que les pièces produites par les demandeurs ne permettraient pas de démontrer que les bilans ont été approuvés par un vote des associés est inopérant à remettre en cause l'existence de la créance et, à supposer qu'une telle omission soit démontrée, cela permettrait d'engager la responsabilité civile du dirigeant sur le fondement de la faute de gestion et non de remettre en cause les comptes courants litigieux.

En conséquence, la société Arenas Finance Participation sera condamnée à rembourser à M. [V] [G], Mme [C] [G] et Mme [A] [G], héritiers de feu M. [L]-[O] [G], la somme de 208.468 euros, correspondant à la créance en compte courant d'associés détenu par leur père lors de son décès.

Sur les demandes accessoires

Partie perdante au procès, la société Arenas Finance Participation sera condamnée aux dépens. L'équité commande en revanche de ne pas prononcer de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de débouter toutes les parties de leurs demandes formées de ce chef.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant après débats publics, par jugement contradictoire rendu en premier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe,

CONSTATE que le désistement d'instance et d'action de M. [M] [Y], M. [P] [Y] et Mme [Z] [Y] est parfait et entraîne l'extinction partielle de l'instance à leur égard ;

CONSTATE la poursuite de l'instance entre les autres parties ;

DECLARE l'action de Mme [A] [G], Mme [C] [G] et M. [V] [G] recevable ;

CONDAMNE la société Arenas Finance Participation à payer à M. [V] [G], Mme [C] [G] et Mme [A] [G] venant aux droits de leur père décédé, [L]- [O] [G], la somme de 208.468 euros en remboursement de son compte courant d'associé,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et rejette les demandes formées de ce chef ;

CONDAMNE la société Arenas Finance Participation aux dépens ;

Et le Président a signé avec le Greffier.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Nice
Formation : 4ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/04639
Date de la décision : 03/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-03;19.04639 ?
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