Minute n° 2024 /
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTES - PALAIS DE JUSTICE
AUDIENCE DES EXPULSIONS LOCATIVES
============
JUGEMENT du 11 Juillet 2024
__________________________________________
DEMANDEURS :
Association FAC HABITAT
5, rue Charles Duchesne Immeuble Tertia II
BP 60
13792 AIX-EN-PROVENCE CEDEX 3
S.A. SEYNA
20 Bis rue Louis-Philippe
92200 NEUILLY SUR SEINE
représentés par Maître Marion LACOME D’ESTALENX, avocate au barreau de PARIS,
substituée par Maître Julien MONNIER, avocat au barreau de NANTES
D'une part,
DÉFENDEUR :
Monsieur [N] [L] [B] [I]
Appartement 316
27 Boulevard Henri Orrion
44300 NANTES
non comparant D'autre part,
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
PRÉSIDENTE : Constance GALY
GREFFIER : Michel HORTAIS
PROCEDURE :
date de la première évocation : 21 décembre 2023
date des débats : 22 février 2024
délibéré au : 13 juin 2024
prorogé au : 11 juillet 2024
RG N° N° RG 23/03477 - N° Portalis DBYS-W-B7H-MS26
COPIES AUX PARTIES LE :
CCC à Maître Marion LACOME D’ESTALENX
CCC à Monsieur [N] [L] [B] [I] + préfecture
Copie dossier
EXPOSE DU LITIGE
Selon acte sous seing privé en date du 16 juin 2021 à effet au 1er juillet 2021, l’association FAC HABITAT, locataire de la SA D’HLM GROUPE GAMBETTA, a conclu un contrat de sous-location pour une durée d'un an avec [N] [L] [B] [I], concernant un logement meublé sis 27 boulevard Henri Orrion, 3ème étage, appartement 316 - 44300 NANTES, moyennant un loyer mensuel initial de 258,38 €, outre un forfait de charges à hauteur de 82,96 €.
En annexe au contrat de bail figure le cautionnement de la SA SEYNA en date du 1er juillet 2021.
Par acte d’huissier de justice du 13 juillet 2022, FAC HABITAT a fait commandement à [N] [L] [B] [I] de payer un arriéré de loyer et charges d’un montant de 3.385,26 € arrêté au 23 juin 2022, outre coût de l’acte, ce commandement visant la clause résolutoire insérée au bail.
Par acte d’huissier de justice en date du 24 octobre 2023, dont copie a été régulièrement adressée au représentant de l’État dans le département, FAC HABITAT et la SA SEYNA ont fait assigner [N] [L] [B] [I] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nantes aux fins de :
· Constater l'acquisition de la clause résolutoire et subsidiairement, prononcer la résiliation du bail ;
· Condamner [N] [L] [B] [I] à laisser libre de tout occupant de son chef le logement qu'il occupe et remettre à l’association FAC HABITAT les clés du logement à compter de la date du jugement à intervenir ;
· Ordonner, à défaut d'avoir libéré les lieux dans les temps impartis, l’expulsion du locataire et de tout occupant de son chef du logement, avec l'assistance de la force publique si besoin est ;
· Dire que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L433-1 et L433-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
· Condamner le locataire au paiement de la somme de 3.558,15 € arrêtée au terme de juillet 2023, montant à parfaire au jour du jugement, avec intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation, selon la répartition suivante :
567,26 € à l’association FAC HABITAT,2.990,89 € à la SA SEYNA, subrogée dans les droits de FAC HABITAT à hauteur de ce montant ;· Condamner [N] [L] [B] [I] à payer à FAC HABITAT une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant des loyers et charges locatives depuis la résiliation du bail et jusqu'à la libération effective des lieux matérialisée par la remise des clés ;
· Condamner le locataire au paiement d’une somme de 1.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de l’instance, comprenant notamment le coût du commandement de payer du 13 juillet 2022.
Le diagnostic social et financier a été transmis au tribunal par les services sociaux du département le 12 décembre 2023. L'intéressé n'a pas répondu aux courriers de ces services.
Après un renvoi lors de l’audience du 21 décembre 2023, l’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 22 février 2024.
A ladite audience, FAC HABITAT et la SA SEYNA se réfèrent à l’acte introductif d’instance, sauf à préciser que la dette de loyer s’élève désormais à la somme de 5.003,74 € au titre des loyers et charges échus à la date du 15 janvier 2024. Elles ajoutent qu’aucun paiement n’est intervenu depuis octobre 2023.
Régulièrement assigné à personne, [N] [L] [B] [I] comparaît et indique qu’il souhaite quitter le logement le 31 mars 2024. Il propose de régler la somme de 150 € sur 24 mois au titre de l’article 1343-5 du Code civil.
Les deux parties étant présentes, il y a lieu de statuer par jugement contradictoire en application de l'article 467 du code de procédure civile.
L’affaire a été mise en délibéré au 13 juin 2024. Suite à des difficultés de service, le délibéré a été prorogé au 11 juillet 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l’action
Aux termes de l'article 24-II de la loi n° 89-642 du 6 juillet 1989 modifiée par la loi du 27 juillet 2023, applicable au litige, les bailleurs personnes morales ne peuvent faire délivrer, sous peine d'irrecevabilité de la demande, une assignation aux fins de constat de résiliation du bail avant l'expiration d'un délai de deux mois suivant la saisine de la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX). Cette saisine est réputée constituée lorsque persiste une situation d'impayés, préalablement signalée dans les conditions réglementaires aux organismes payeurs des aides au logement en vue d'assurer le maintien du versement de ces aides (Caisse d'allocations familiales - CAF).
En l’espèce, la bailleresse justifie de la signification de la situation à la CCAPEX, dont celle-ci a accusé réception le 13 juillet 2022, soit au moins deux mois avant l’assignation du 24 octobre 2023.
L’article 24-III de la même loi énonce qu’à peine d'irrecevabilité de la demande, l'assignation aux fins de constat de la résiliation est notifiée à la diligence du commissaire de justice au représentant de l’État dans le département au moins six semaines avant l'audience (précédente rédaction : deux mois). Les II et III sont applicables aux assignations tendant au prononcé de la résiliation du bail lorsqu'elles sont motivées par l'existence d'une dette locative du preneur. Ils sont également applicables aux demandes additionnelles et reconventionnelles aux fins de constat ou de prononcé de la résiliation, motivées par l'existence d'une dette locative, la notification au représentant de l’État dans le département incombant au bailleur.
En l'espèce, l'assignation du 24 octobre 2023 a été régulièrement dénoncée par le bailleur au représentant de l’État dans le département, dont celui-ci a accusé réception le 25 octobre 2023, soit au moins six semaines avant l'audience du 21 décembre 2023 (six semaines au 5 décembre 2023).
Dans ces conditions, la demande aux fins de voir constater la résiliation du bail est recevable.
Sur l'acquisition de la clause résolutoire
L’article 24 I de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, modifié par la loi du 27 juillet 2023 prévoit que « toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que six semaines après un commandement de payer demeuré infructueux » (précédente rédaction : deux mois).
En l’espèce, le contrat de bail contient une clause résolutoire (page 4 du contrat de sous-location).
Par exploit d’huissier en date du 13 juillet 2022, FAC HABITAT a fait commandement à [N] [L] [B] [I] de payer un arriéré de loyer et charges d’un montant de 3.385,26 € arrêté au 23 juin 2022, outre coût de l’acte, ce commandement visant la clause résolutoire insérée au bail.
Les relevés de comptes produits par la société FAC HABITAT ne sont pas exploitables par le juge en ce que d'une part ils ne mentionnent ni l'identité du locataire ni celle du bailleur et que d'autre part ils ne sont ni attestés, ni signés ni justifiés, mais constituent un simple tableau non vérifiable.
Le juge ne peut donc pas constater l'acquisition de la clause résolutoire, ne pouvant s'assurer que le commandement de payer est demeuré infructueux pendant plus de deux mois. La demande est donc rejetée.
Sur le prononcé de la résiliation du bail
FAC HABITAT et la SA SEYNA sollicitent à titre subsidiaire le prononcé de la résiliation du bail pour non-paiement des loyers et charges locatives. Or, les deux décomptes locatifs produits (pièce n°8 et décompte actualisé) ne constituent pas en l'espèce des éléments de preuve, comme mentionné supra.
Aucun autre élément n'étant produit à l'appui de la demande de résiliation du bail, la demande de prononcé de la résiliation sera rejetée.
Sur la dette locative
L’article 7-a de la loi 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, rappelle que le locataire est obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.
En l'espèce, l'existence et le montant de la dette locative ne sont pas démontrés puisque les relevés de comptes produits par les requérantes (pièce n°8 et décompte actualisé) ne sont pas exploitables, comme déjà indiqué.
La demande en paiement est ainsi rejetée.
Sur les autres demandes
En application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, l’Association FAC HABITAT et la SA SEYNA, succombant à l’instance, garderont la charge de leurs entiers dépens.
Leur demande présentée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile est également rejetée.
PAR CES MOTIFS
Le juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,
DECLARE recevable la demande aux fins de voir constater la résiliation du contrat de sous-location d’habitation meublée conclu le 16 juin 2021 entre l’Association FAC HABITAT et [N] [L] [B] [I], concernant le logement sis 27 Boulevard Henri Orrion, 3ème étage, Appartement 316 - 44300 NANTES ;
CONSTATE que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire figurant au bail ne sont pas réunies ;
REJETTE la demande de résiliation du bail ;
REJETTE la demande en paiement de la dette locative de [N] [L] [B] [I] ;
DÉBOUTE FAC HABITAT et la SA SEYNA de leur demande présentée au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et laisse à leur charge leurs entiers dépens ;
DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
ORDONNE la notification de la présente décision par le greffe au représentant de l’État dans le département ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de plein droit.
Ainsi prononcé par mise à disposition au greffe le 11 juillet 2024.
Le greffier La vice-présidente chargée des contentieux de la protection
Michel HORTAIS Constance GALY