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20/08/2024 | FRANCE | N°24/00621

France | France, Tribunal judiciaire de Nanterre, Ctx protection sociale, 20 août 2024, 24/00621


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTERRE



PÔLE SOCIAL

Affaires de sécurité sociale et aide sociale

JUGEMENT RENDU LE
20 Août 2024


N° RG 24/00621 - N° Portalis DB3R-W-B7I-ZKWI

N° Minute : 24/01217


AFFAIRE

[U] [K]

C/

MDPH DES HAUTS-DE-SEINE


Copies délivrées le :



DEMANDERESSE

Madame [U] [K]
[Adresse 1]
[Localité 2]

Représentée par Maître Anguerrand COLOMBET de l’AARPI RICHER & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : P0553,

DEFENDERESSE
r>MDPH DES HAUTS-DE-SEINE
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]

Représentée par M. [Z], muni d’un pouvoir régulier,




***

L’affaire a été débattue le 02 Juillet 2024 en audience publi...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTERRE

PÔLE SOCIAL

Affaires de sécurité sociale et aide sociale

JUGEMENT RENDU LE
20 Août 2024

N° RG 24/00621 - N° Portalis DB3R-W-B7I-ZKWI

N° Minute : 24/01217

AFFAIRE

[U] [K]

C/

MDPH DES HAUTS-DE-SEINE

Copies délivrées le :

DEMANDERESSE

Madame [U] [K]
[Adresse 1]
[Localité 2]

Représentée par Maître Anguerrand COLOMBET de l’AARPI RICHER & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : P0553,

DEFENDERESSE

MDPH DES HAUTS-DE-SEINE
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]

Représentée par M. [Z], muni d’un pouvoir régulier,

***

L’affaire a été débattue le 02 Juillet 2024 en audience publique devant le tribunal composé de :

Matthieu DANGLA, Vice-Président
Gérard BEHAR, Assesseur, représentant les travailleurs salariés
Isabelle BASSINI, Assesseur, représentant les travailleurs non-salariés

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats et du prononcé : Gaëlle PUTHIER, Greffière.

JUGEMENT

Prononcé en premier ressort, par décision contradictoire et mise à disposition au greffe du tribunal conformément à l’avis donné à l’issue des débats.

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 16 mai 2023, Monsieur [O] [K] et Madame [L] [K] ont formé auprès de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) siégeant au sein de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) des Hauts-de-Seine, une demande d'accompagnant d'élève en situation de handicap (AESH) pour leur fille mineure, [U] [K], née le 24 septembre 2006.

Par décision du 25 septembre 2023, la commission a renouvelé l'accord sur l'aide humaine individuelle en se fondant sur le fait que la scolarisation de l'enfant nécessite l'aide d'une personne lui apportant une attention soutenue et continue durant le temps d'aide attribué de 12 heures d'accompagnement dans toutes les activités, conformément aux éléments visés par le GEVA-SCO, en application des articles L351-3 et D351-16-1 du code de l'éducation.

Monsieur et Madame [K] ont initié le 12 décembre 2023 un recours administratif préalable obligatoire aux fins de contester le nombre d'heures alloué.

En l'absence de réponse dans le délai de deux mois suivant l'introduction du recours, Monsieur et Madame [K] ont saisi de leur contestation le tribunal judiciaire de Nanterre par requête du 12 mars 2024.

L'affaire a été appelée à l'audience du 2 juillet 2024, à laquelle les parties ont comparu et ont été entendues en leurs observations.

Monsieur [O] [K] et Madame [L] [K], représentés par leur conseil, sollicitent l'attribution d'un AESH individualisé à hauteur de 20 heures par semaine. Ils estiment que les troubles complexes dont souffre leur enfant, qui se rapprochent de l'autisme, justifient une telle demande et mentionnent que, alors que la durée de prise en charge de leur fille par un accompagnement est passé de 15 heures à 12 heures par semaine, ils ont été contraints de payer une aide personnalisée, ce qui n'a pas été pris en compte par la MDPH des Hauts-de-Seine. Ils se prévalent des difficultés mises en évidence dans ses bulletins scolaires et s'appuient sur l'avis de leur psychiatre.

La MDPH des Hauts-de-Seine sollicite le rejet des demandes des parents et la condamnation de ce derniers aux entiers dépens, estimant que le GEVA-SCO met en évidence des progrès et que les pièces postérieures, dont le GEVA-SCO de l'année 2024, ne peuvent être utilisées. Elle évoque par ailleurs le fait qu'[U] [K] bénéficie d'une orientation en ULIS

Il sera renvoyé aux dernières écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens, en application de l'article 455 du code de procédure civile.

A l'issue des débats, l'affaire a été mise en délibéré au 20 août 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'octroi d'une aide humaine à la scolarisation

L'article L114 du code de l'action sociale et des familles donne une définition du handicap, dans les termes suivants : « toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant ».

L'article L112-2 alinéa 2 du code de l'éducation pose le principe selon lequel, « en fonction des résultats de l'évaluation, il est proposé à chaque enfant, adolescent ou adulte en situation de handicap, ainsi qu'à sa famille, un parcours de formation qui fait l'objet d'un projet personnalisé de scolarisation assorti des ajustements nécessaires en favorisant, chaque fois que possible, la formation en milieu scolaire ordinaire ».

Il résulte de ce texte que le plan personnalisé de scolarisation fixe les adaptations propres à assurer que le parcours de formation des élèves en situation de handicap se déroule prioritairement en milieu scolaire ordinaire.

L'article D351-5 du code de l'éducation prévoit ainsi que le projet personnalisé de scolarisation définit les modalités de déroulement de la scolarité et les actions pédagogiques, psychologiques, éducatives, sociales, médicales et paramédicales répondant aux besoins particuliers des élèves en situation de handicap.

Aux termes du troisième alinéa de l'article L351-1 du code de l'éducation et de l'article L351-3 du même code, l'aide humaine apportée par un accompagnant est accordée par la CDAPH lorsqu'elle permet la scolarisation en classe ordinaire, dans un établissement public ou privé sous contrat, d'un élève présentant un handicap ou un un trouble de santé invalidant.

L'article D351-16-1 précise : "l'aide individuelle et l'aide mutualisée mentionnées à l'article L351-3 constituent deux modalités de l'aide humaine susceptible d'être accordée aux élèves handicapés. Un même élève ne peut se voir attribuer simultanément une aide mutualisée et une aide individuelle. Ces aides sont attribuées par la commission mentionnée à l'article L146-9 du code de l'action sociale et des familles et intégrées dans le plan personnalisé de compensation du handicap mentionné à l'article L146-8 du même code. La commission se prononce sur la base d'une évaluation de la situation scolaire de l'élève handicapé, en prenant en compte notamment son environnement scolaire, la durée du temps de scolarisation, la nature des activités à accomplir par l'accompagnant, la nécessité que l'accompagnement soit effectué par une même personne identifiée, les besoins de modulation et d'adaptation de l'aide et sa durée".

Monsieur et Madame [K] sollicitent pour leur fille l'attribution d'un AESH individualisé à hauteur de 20 heures par semaine pour la poursuite de sa scolarité.

Le certificat médical du docteur [F], psychiatre, en date du 14 novembre 2023 fait apparaître qu'[U] [K] est porteuse d'un trouble du neurodéveloppement complexe associant :
– un trouble du spectre de l'autisme ;
– un trouble du déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité, de type attentionnel prédominant;
– une dysrégulation sensorielle ;
– un trouble des fonctions exécutives ;
– un trouble du développement de la coordination motrice ;
– un trouble de la régulation émotionnelle.

Le docteur [F] souligne la présence de difficultés pour gérer le quotidien et une absence d'autonomie, ainsi qu'une lenteur importante et des troubles des fonctions exécutives entraînant une fatigabilité cognitive massive en milieu scolaire. Il estime en conséquence indispensable un accompagnement à temps plein par un AESH.

Cet avis est corroboré par le compte rendu psychologique du 1er septembre 2022 établi par Madame [H], qui détaille les troubles dont est atteint [U] [K] ainsi que les prises en charge dont elle bénéficie, et qui précise que « le maintien de son AESH dans le cadre scolaire reste à mon sens, une aide nécessaire pour soutenir ses processus métacognitifs ainsi que consolider et développer les stratégies visant à mieux réguler comportement et ses émotions ».

La MDPH considère que l'attribution d'un accompagnement à hauteur de 12 heures par semaine est justifiée au regard de l'orientation en ULIS dont [U] [K] bénéficie. Elle verse aux débats la circulaire n°2015-129 du 21 août 2015 relative à ces ULIS, mentionnant que l'orientation en ULIS « ne répond pas aux besoins des élèves qui nécessitent, sur tous les temps de scolarisation, y compris sur les temps de regroupement, l'accompagnement par une personne chargée d'une aide humaine individuelle ou mutualisée ». Elle se prévaut également du GEVASCO pour l'année 2022/2023 pour soutenir qu'une aide humaine à hauteur de 20 heures ne concourrait pas à accompagner l'enfant vers l'autonomisation et contreviendrait aux dispositions de la circulaire.

Il ressort de ce GEVASCO qu'[U] [K] présente des troubles ayant un effet sur l'acquisition des apprentissages, qu'elle devient de plus en plus autonome mais qu'elle a encore besoin d'une aide à la concentration et un accompagnement à la compréhension des consignes et des situations.

Il y est notamment énoncé que « l'AESH doit intervenir régulièrement pour aider [U] à fixer son attention. Comme [U] a une attitude très scolaire, il n'est pas toujours visible pour le professeur qu'elle « décroche » » (cf page 4). Ainsi, contrairement à ce que soutient la MDPH, ce document ne permet pas de justifier une diminution de la durée de l'accompagnement à hauteur de 12 heures par semaine et ne permet donc pas d'écarter les avis concordant du docteur [F] et de Madame [H].

Par ailleurs, il sera rappelé que la circulaire dont se prévaut la défenderesse est dépourvue d'effet normatif et ne peut donc être utilement invoquée pour faire obstacle à la demande d'accompagnement à hauteur de 20 heures par semaine, qui s'avère médicalement justifiée.

De l'analyse de ce qui précède, le tribunal retiendra qu'[U] [K] nécessite de manière absolue un accompagnement individualisé à hauteur de 20 heures par semaine, comme sollicité par ses parents.

En conséquence, il conviendra de faire droit à cette demande de ses parents aux fins d'attribution d'une aide humaine à la scolarisation individualisée à hauteur de 20 heures par semaine, pour une durée de trois ans, en suite de la demande formée le 16 mai 2023.

Sur les demandes accessoires

En application de l'article 696 du code de procédure civile, désormais applicable aux instances en cours en suite de l'abrogation des dispositions de l'article R144-10 du code de la sécurité sociale à la suite de l'entrée en vigueur du décret n°2018-928 du 29 octobre 2018, il conviendra de condamner la MDPH des Hauts-de-Seine aux dépens de l'instance dès lors qu'elle succombe.

Il sera rappelé que le présent jugement est exécutoire de plein-droit à titre provisoire.

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL, statuant par décision contradictoire, rendue en premier ressort et par mise à disposition au greffe :

DÉCLARE recevable le recours formé par Monsieur [O] [K] et par Madame [L] [K], ès-qualités de représentants légaux leur enfant [U] [K] ;

ACCORDE à l'enfant [U] [K] une aide humaine à la scolarisation individualisée à raison de 20 heures par semaine, pour une durée de trois ans, en suite de la demande formée le 16 mai 2023 ;

RAPPELLE que le présent jugement est exécutoire de plein-droit à titre provisoire ;

DÉBOUTE les parties de toutes demandes plus amples ou contraires ;

CONDAMNE la MDPH des Hauts-de-Seine aux entiers dépens.

Et le présent jugement est signé par Matthieu DANGLA, Vice-Président et par Gaëlle PUTHIER, Greffière, présents lors du prononcé.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Nanterre
Formation : Ctx protection sociale
Numéro d'arrêt : 24/00621
Date de la décision : 20/08/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 29/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-20;24.00621 ?
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