TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE NANTERRE
Pôle social
JUGEMENT
rendu le 26 juillet 2024
■
Contentieux des Elections
professionnelles
N° RG 24/00013 - N° Portalis DB3R-W-B7I-ZF4M
N° MINUTE :
24/00070
Copie certifiée conforme délivrée le :
à :
Maître Nicolas COLLET-THIRY,
Maître Clara BELLEST,
aux parties
DEMANDERESSES
Syndicat SUD COMMERCES ET SERVICES ILE DE FRANCE, sis [Adresse 29]
UNION SYNDICALE SOLIDAIRE, sis [Adresse 12]
représentés par Maître Nicolas COLLET-THIRY, avocat au barreau de PARIS
DÉFENDEURS
S.A.S. ESSET, dont le siège social est sis [Adresse 7]
représentée par Maître Clara BELLEST, avocat au barreau de PARIS, vestiaire P107
Madame [SE] [YH], demeurant [Adresse 23]
Monsieur [H] [W], demeurant [Adresse 21]
Monsieur [CB] [Z], demeurant [Adresse 31]
Monsieur [VB] [KB], demeurant ACCUEIL BASE DE LOISIRS VAL DE SEINE - [Localité 25]
Monsieur [C] [YB], demeurant [Adresse 26]
représentés par Maître Nicolas COLLET-THIRY, avocat au barreau de PARIS
Syndicat SNUHAB - CFE-CGC, sis [Adresse 5]
Fédération CFTC-CSFV, sis [Adresse 13]
Syndicat CGT DU COMMERCE, sis [Adresse 9]
Syndicat FO FEC SERVICE, sis [Adresse 19]
Syndicat CFDT FEDERATION DES SERVICES, sis [Adresse 34],
[Adresse 3]
Monsieur [ZF] [VD], demeurant [Adresse 10]
Madame [T] [CM], demeurant [Adresse 11]
Monsieur [XZ] [KC], demeurant [Adresse 30]
Madame [LA] [UD], demeurant [Adresse 2]
Madame [JD] [BV], demeurant [Adresse 20]
Monsieur [N] [Y], demeurant [Adresse 14]
Monsieur [A] [X], demeurant [Adresse 17]
Madame [F] [S], demeurant [Adresse 16]
Monsieur [VD] [UB], demeurant [Adresse 28]
Madame [LB] [YZ], demeurant [Adresse 4]
Madame [U] [LZ], demeurant [Adresse 8]
Madame [XB] [NA], demeurant [Adresse 18]
Décision du 26 juillet 2024
Pôle social - Elections Professionnelles - N° RG 24/00013 - N° Portalis DB3R-W-B7I-ZF4M
Madame [M] [O], demeurant [Adresse 22]
Monsieur [CG] [J], demeurant [Adresse 32]
Madame [E] [G], demeurant [Adresse 33]
Madame [D] [L], demeurant [Adresse 6]
Monsieur [R] [B], demeurant [Adresse 27]
Monsieur [H] [V], demeurant [Adresse 1]
Monsieur [P] [KD], demeurant [Adresse 15]
Madame [CA] [K], demeurant [Adresse 24]
non comparants, ni représentés,
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Vincent SIZAIRE, Vice-président, assisté de Pascale GALY, Greffier, présents lors des débats
DATE DES DÉBATS
Audience publique du 28 juin 2024
JUGEMENT
jugement réputé contradictoire, prononcé publiquement et en dernier ressort par mise à disposition le 26 juillet 2024
EXPOSE DU LITIGE
Le 12 décembre 2023, la direction de la société Esset et la majorité des organisations syndicales ont conclu un protocole d’accord pré-électoral en prévision de l’élection des membres du comité social et économique, laquelle s’est tenue du 2 au 8 février 2024.
Par requête enregistrée le 19 janvier 2024, le syndicat SUD commerce et services Ile de France et l’union syndicale solidaires ont saisi la présente juridiction d’une demande d’annulation de cette élection.
Les requérants, la société Esset, les organisations syndicales ayant participé au scrutin et l’ensemble des personnes élues ont été régulièrement convoquées à l’audience du 28 juin 2024.
Dans le dernier état de leurs écritures et de leurs observations, le syndicat SUD commerce et services Ile de France, l’union syndicale solidaires, M [CB] [I], M [H] [W], M [VB] [KB], Mme [SE] [YH] et M [C] [YB] demandent au tribunal :
- L’annulation du protocole d’accord pré-électoral du 12 décembre 2023 ;
- L’annulation de l’élection des membres du comité social et économique ;
- D’ordonner à la direction d’ouvrir de nouvelles négociations en vue de la conclusion d’un nouveau protocole d’accord pré-électoral et de leur transmettre tous éléments d’information utiles en vue de déterminer l’effectif de l’entreprise, sous astreinte de 500 euros par jour de retard et par document manquant ;
- La condamnation de la société Esset à leur verser chacun la somme de 5 000 euros en réparation de leur préjudice ;
- La condamnation de la société Esset à leur verser chacun la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
A l’appui de leurs prétentions, ils soutiennent que le protocole d’accord pré-électoral a été adopté au terme de négociations déloyales dès lors que la direction ne leur a pas donné les informations leur permettant d’apprécier les effectifs de l’entreprise. Ils soutiennent également que l’employeur devait retenir la date du premier tour du scrutin pour le calcul des effectifs et que l’effectif retenu ne correspond pas à l’effectif réel de la société.
Dans le dernier état de ses écritures et de ses observations, la société Esset conclut au rejet de la demande et sollicite la condamnation des demandeurs à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle indique avoir transmis aux organisations syndicales toutes les informations leur permettant d’apprécier les effectifs de l’entreprise et qu’il n’existe aucune irrégularité dans le calcul des effectifs.
Les autres défendeurs n’ont pas comparu à l’audience.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande d’annulation
En ce qui concerne la déloyauté de la négociation collective
Il résulte des dispositions des articles L. 2232-6 et L. 2232-12 du code du travail que la nullité d'une convention ou d'un accord collectif est encourue lorsque toutes les organisations syndicales n'ont pas été convoquées à sa négociation, que les négociations ont été tenues de façon séparée ou qu’elles n'ont pas été mises à même de discuter utilement les termes du projet soumis à la signature en demandant le cas échéant la poursuite des négociations.
En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que plusieurs réunions de négociation associant l’ensemble des organisations syndicales et, pour l’une d’entre elles, l’administration du travail, ont été organisées avant la signature du protocole d’accord pré-électoral du 12 décembre 2023.
Il en ressort également que, pour contrôler l’effectif de l’entreprise, les organisations syndicales se sont vues remettre par l’employeur des fichiers reprenant l’affectation et la nature de l’emploi occupé par chaque salarié et ont également été en mesure de consulter les registres uniques du personnel, faisant apparaître l’ensemble des personnes recrutées par l’entreprise. Les échanges de courriels versés au débat par la société Esset font également apparaître que ces documents ont permis aux autres organisations syndicales de procéder elles-mêmes au calcul de l’effectif et de valider ainsi celui présenté par la direction.
Les demandeurs n’apportent quant à eux aucun élément de nature à faire présumer que ces documents ne leur permettaient pas de vérifier l’effectif de l’entreprise et notamment le nombre de salariés mis à disposition, le motif de recours aux contrats à durée déterminée et le nombre de salariés ayant quitté l’entreprise au 1er novembre 2023.
Le moyen tiré de la déloyauté des négociations doit dès lors être écarté.
En ce qui concerne le calcul des effectifs
Il résulte des dispositions des articles 2314-1 et R. 2314-1 du code du travail que l’effectif théorique pour le calcul du nombre de sièges au comité social et économique devant être pourvus doit s’apprécier à la date du premier tour du scrutin. Il résulte par ailleurs des dispositions de l’article L.2314-32 du même code et des principes généraux du droit électoral qu’une irrégularité dans le déroulement des élections professionnelles n’est de nature à entraîner leur annulation que si elle en a effectivement faussé les résultats.
En l'espèce, s’il ressort des pièces du dossier que l’effectif des salariés retenu pour la détermination du nombre de siège au comité social et économique n’a pas varié depuis le 31 août 2023, les demandeurs n’apportent aucun élément de nature à démontrer qu’il était en réalité supérieur à 500 à la date du premier tour des élections et qu’en conséquence le nombre de siège à pourvoir aurait dû être augmenté.
Ainsi, si le procès-verbal de la commission santé, sécurité et conditions de travail du 5 décembre 2023 et du rapport de l’expert-comptable du comité social et économique du 13 mai 2024 mentionnent un effectif supérieur à 500 salariés, il ressort de ces mêmes documents que ce calcul prend en compte les apprentis et les titulaires d’un contrat de professionnalisation. Or, en application de l’article L. 1111-3 du code du travail, ces derniers ne doivent pas être pris en compte pour le calcul des effectifs de l’entreprise. En retranchant leur nombre de l’effectif global de l’entreprise, ce dernier s’avère inférieur à 500 salariés.
De la même façon, l’effectif retenu pour le calcul de la prime d’intéressement correspond, conformément aux dispositions de l’article L.130-1 du code de la sécurité sociale, « à la moyenne du nombre de personnes employées au cours de chacun des mois de l'année civile précédente ». Ainsi, l’effectif retenu pour le versement de la prime d’intéressement pour l’année 2023 mis en avant par les demandeurs correspond à l’effectif moyen de l’entreprise observé en 2022. Il ne saurait dès lors être pris en compte pour apprécier l’effectif de l’entreprise au 2 février 2024, date du premier tour des élections professionnelles.
Aucune pièce du dossier ne permet ainsi de relever, dans le calcul des effectifs de l’entreprise, d’irrégularité ayant faussé le cours des élections.
Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que les demandes d’annulation et, par voie de conséquence, les demandes d’injonction, doivent être rejetées.
Sur la demande indemnitaire
Il n’entre pas dans les pouvoirs du juge saisi, en application de l’article L. 2314-32 du code du travail, d’une contestation en matière d’élections professionnelles, de se prononcer sur une demande de condamnation indemnitaire formée par une partie.
En toutes hypothèses, ainsi qu’il a été exposé plus haut, aucune pièce du dossier ne permet de considérer que le processus électoral a été entaché d’irrégularités de nature à porter atteinte à l’intérêt collectif de la profession représentée par les syndicats requérants.
Leur demande indemnitaire doit en conséquence être rejetée.
Sur les frais de l’instance
La société Esset n’étant pas la partie perdante, la demande présentée à son endroit au titre des frais de l’instance ne peut qu’être rejetée.
Il n’y a pas davantage lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge des demandeurs une somme au titre des frais exposés par la défenderesse et non compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant par jugement réputé contradictoire, publiquement et en dernier ressort :
Déboute le syndicat SUD commerce et services Ile de France, l’union syndicale solidaires, M [CB] [I], M [H] [W], M [VB] [KB], Mme [SE] [YH] et M [C] [YB] de l’ensemble de leurs demandes.
Déboute la société Esset de sa demande présentée en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Et le présent jugement est signé par Vincent SIZAIRE, Vice-président et par Rose ADELAÏDE , Greffier, présents lors du prononcé.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT