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22/08/2024 | FRANCE | N°21/03432

France | France, Tribunal judiciaire de Meaux, 1ère ch. - sect. 6, 22 août 2024, 21/03432


- N° RG 21/03432 - N° Portalis DB2Y-W-B7F-CCK3M
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MEAUX

1ère Chambre Civile
Section 6 - Contentieux


N° RG 21/03432 - N° Portalis DB2Y-W-B7F-CCK3M
Minute n° 24/

JUGEMENT du 22 AOUT 2024


PARTIES EN CAUSE

DEMANDERESSE

Madame [K] [L]
[Adresse 12]
[Localité 24] (ANGLETERRE)

représentée par Maître François DAUPTAIN, avocat au barreau de Meaux (SELARL TOURAUT AVOCATS) ;

DEFENDEURS

Madame [X] [W] [J] [B]
[Adresse 2]<

br>[Localité 16]

représentée par Maître Clotilde BREMOND, avocat au barreau de Meaux ;

Madame [A] [V] [B]
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 9]

n’ayan...

- N° RG 21/03432 - N° Portalis DB2Y-W-B7F-CCK3M
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MEAUX

1ère Chambre Civile
Section 6 - Contentieux

N° RG 21/03432 - N° Portalis DB2Y-W-B7F-CCK3M
Minute n° 24/

JUGEMENT du 22 AOUT 2024

PARTIES EN CAUSE

DEMANDERESSE

Madame [K] [L]
[Adresse 12]
[Localité 24] (ANGLETERRE)

représentée par Maître François DAUPTAIN, avocat au barreau de Meaux (SELARL TOURAUT AVOCATS) ;

DEFENDEURS

Madame [X] [W] [J] [B]
[Adresse 2]
[Localité 16]

représentée par Maître Clotilde BREMOND, avocat au barreau de Meaux ;

Madame [A] [V] [B]
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 9]

n’ayant pas constitué avocat ;

Monsieur [G] [T] [H] [B]
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 9]

n’ayant pas constitué avocat ;

- N° RG 21/03432 - N° Portalis DB2Y-W-B7F-CCK3M
Madame [M] [C] [N] [B]
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 9]

n’ayant pas constitué avocat ;

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Lors des débats et du délibéré :

Présidente : Mme Fatima ZEDDOUN, vice-présidente
Assesseurs : M. Renaud NOIROT, juge
Mme Cécile VISBECQ, juge

GREFFIER : Lors des débats et au prononcé : Mme Sandrine FANTON, greffier

DÉBATS

A l'audience publique du 28 juin 2024.

JUGEMENT

- réputé contradictoire ;

- rendu publiquement, en premier ressort, par mise à disposition au greffe à la date du délibéré, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Fatima ZEDDOUN, présidente, et par Sandrine FANTON greffier, lors du prononcé ;

* * * *

EXPOSE DU LITIGE

[C] [L] est décédée le [Date décès 8] 2011 à [Localité 22], laissant pour lui succéder ses trois enfants :
- M. [Y] [B],
- Mme [X] [B],
- Mme [K] [L].

[Y] [B] est décédé le [Date décès 7] 2012, laissant pour lui succéder ses trois enfants :
- M. [G] [B],
- Mme [M] [B],
- Mme [A] [B].

L’actif principal de la succession est constitué d’une maison d’habitation sise [Adresse 2] à [Localité 16].

Par acte de commissaire de justice du 31 mai 2021, Mme [K] [L] a fait assigner Mme [X] [B] en fixation d’une indemnité d’occupation et paiement d’une provision à la charge de cette dernière.

Par ordonnance en date du 18 janvier 2024, le Juge de la mise en état a déclaré comme prescrite l’indemnité d’occupation demandée pour la période antérieure au 31 mai 2016.

Par ses dernières écritures notifiées par le RPVA 12 février 2024, Mme [K] [L] demande au tribunal de :
« Vu les articles 815 et 815-9 du code civil,
Vu l’article 1240 du code civil,
Vu les articles 695 et suivants du code de procédure civile,
Dire ne pas s’opposer à l’ouverture des opérations de compte liquidation partage de l’indivision.
Fixer l’indemnité d’occupation due par Madame [X] [B] à l’indivision successorale à la somme de 1000 € par mois à compter du 1er juin 2016 jusqu’à la libération effective des lieux, la vente de l’immeuble ou la régularisation d’un acte de partage mettant fin à l’indivision.
Condamner Madame [X] [B] à verser une provision à Madame [K] [L] la somme de 20000 € au titre de l’arriéré d’indemnité d’occupation due après confusion des droits sur la période novembre 2015 à novembre 2020.
Condamner Madame [X] [B] à verser à Madame [K] [L] la somme de 10000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral.
Débouter Madame [X] [B] de ses demandes.
Condamner Madame [X] [B] à verser à Madame [K] [L] la somme de 2000 € au titre des frais irrépétibles exposés.
Condamner Madame [X] [B] aux entiers dépens ».

Mme [K] [L] expose notamment que :
- elle s’en rapporte à justice concernant la demande d’ouverture du partage judiciaire ;
- Mme [X] [B] occupe l’immeuble indivis de façon exclusive depuis novembre 2015 ;
- l’immeuble indivis est évalué à 290 100 € ;
- Mme [X] [B] ne justifie pas suffisamment de sa capacité financière au paiement d’une soulte ;
- elle réside à [Localité 24], ne peut dès lors occuper l’immeuble indivis et ne saurait être redevable d’une indemnité d’occupation, peu importe que Mme [X] [B] ait décidé de faire figurer son nom sur la boite aux lettres ou que d’anciennes affaires à elles soient éventuellement entreposées dans les combles de la maison ;
- elle ne possède aucune clé de la maison, Mme [X] [B] ayant décidé de changer les serrures ;
- la valeur locative mensuelle de l’immeuble indivis est de 1200 € ;
- Mme [X] [B] est débitrice à son égard d’un tiers de l’indemnité d’occupation ;
- la résistance abusive de Mme [X] [B] lui cause préjudice, de même que les querelles générant stress et anxiété.

Par ses dernières écritures notifiées par le RPVA le 11 mars 2024 et signifiées à M. [G] [B] et Mmes [M] et [A] [B] par actes de commissaire de justice du 21 juillet 2022, Mme [X] [B] demande au tribunal de :
« Vu les articles 815 à 815-9 du Code Civil,
Vu l’article 831-2 et suivants du Code civil,
Vu les articles 1360 et suivants du Code civil,
Vu les pièces versées aux débats,
JUGER recevables et bien fondées les demandes présentées par Madame [X] [B],
DEBOUTER Madame [K] [L] de sa demande de fixation de l’indemnité d’occupation due par Madame [X] [B] à hauteur de 1.000 € par mois à compter de novembre 2015,
JUGER que Madame [K] [L] et Madame [X] [B] sont redevables envers l’indivision successorale d’une indemnité d’occupation d’un montant de 640 € par mois, à compter du 31 mai 2016 et jusqu’à régularisation d’un acte de partage mettant fin à l’indivision ou libération effective des lieux,
DEBOUTER Madame [K] [L] de sa demande de condamnation de Madame [B] à lui régler une provision de 20.000 € à valoir sur l’indemnité d’occupation,
DEBOUTER Madame [L] de ses autres demandes,
ORDONNER l’ouverture des opérations de compte liquidation partage de l’indivision successorale existant entre Mesdames [X] [B], [K] [L], Monsieur [G] [B], Mesdames [M] [B] et [A] [B],
DESIGNER à cette fin tel notaire qu’il plaira au Tribunal,
DIRE que le Notaire ainsi désigné devra dresser un état liquidatif établissant les comptes entre les copartageants, la masse partageable et les droits des parties,

COMMETTRE un de Mesdames ou Messieurs les Juges près le Tribunal Judiciaire de MEAUX pour surveiller la poursuite des opérations de partage et faire rapport sur l'homologation de la liquidation s'il y a lieu,
JUGER qu’en cas d’empêchement de l’un ou de l’une de Messieurs ou Mesdames les Juge ou Notaire commis, il sera pourvu à leur remplacement par ordonnance de Monsieur le Président, rendue sur simple requête,
ATTRIBUER à titre préférentiel à Madame [X] [B] le bien immobilier dépendant de l’indivision successorale, situé [Adresse 2] pour un prix de 255.000 €.
CONDAMNER Madame [K] [L] à régler à Madame [X] [B] la somme de 3.720 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
CONDAMNER Madame [K] [L] aux entiers dépens ».

Mme [X] [B] expose notamment que :
- les indivisaires s’étaient rapprochés d’un notaire pour un partage amiable qui n’a pas abouti ;
- elle a toujours vécu à [Localité 16] et [Localité 19], ce depuis 1986 ;
- les deux dernières estimations qu’elle a faites de la maison en 2024 l’évaluent entre 256587 € à 267158 € l’une, et entre 250000 € et 260000 € l’autre ;
- elle dispose et justifie de sa capacité financière, pouvant emprunter 186000 € auprès de sa banque ;
- elle n’a pas la jouissance exclusive de la maison, mais partage cette jouissance avec la demanderesse qui a un jeu de clé, a des affaires personnelles entreposées dans la maison et a son nom sur la boite aux lettres, de sorte qu’elles sont toutes deux redevables d’une indemnité d’occupation ;
- sa sœur avait la possibilité, à tout moment, de venir et de jouir du bien ;
- avant qu’elle ne l’occupe, la maison avait été louée en 2014 pour un loyer de 800 € par mois correspondant à la valeur locative ;
- la demande de provision est prématurée dans la mesure où des comptes doivent être faits ;
- elle a payé des charges et des travaux sur l’immeuble indivis ouvrant droit à créance à son profit pour un montant total de 49051 € ;
- elle a payé au notaire certaines sommes au titre de l’indemnité d’occupation ;
- Mme [L] ne démontre ni faute, ni préjudice, ni lien de causalité au soutien de sa demande de dommages et intérêts ;
- elle n’a pas fait preuve de résistance abusive.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures susvisées des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 18 mars 2024.

Assignés à l’étude de commissaire de justice, M. [G] [B] et Mmes [M] et [A] [B] n’ont pas constitué avocat, de sorte que le présent jugement sera réputé contradictoire.

L’affaire a été évoquée à l’audience des plaidoiries du 28 juin 2024 et mise en délibéré au 22 août 2024.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de rappeler aux parties que l’article 768 du code de procédure civile dispose :
« Les conclusions doivent formuler expressément les prétentions des parties ainsi que les moyens en fait et en droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau énumérant les pièces justifiant ces prétentions est annexé aux conclusions.
Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Les moyens qui n'auraient pas été formulés dans les conclusions précédentes doivent être présentés de manière formellement distincte. Le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Les parties doivent reprendre dans leurs dernières conclusions les prétentions et moyens présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et le tribunal ne statue que sur les dernières conclusions déposées. Les parties doivent reprendre dans leurs dernières conclusions les prétentions et moyens présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et le tribunal ne statue que sur les dernières conclusions déposées » (le tribunal met en relief).

Sur la demande en partage judiciaire et le notaire à désigner

En application de l'article 815 du code civil, nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut toujours être provoqué.

L'article 840 de ce même code ajoute que le partage est fait en justice lorsque l'un des indivisaires refuse de consentir au partage amiable ou s'il s'élève des contestations sur la manière d'y procéder ou de le terminer ou lorsque le partage amiable n'a pas été autorisé ou approuvé dans l'un des cas prévus aux articles 836 et 837.

En l'espèce, il n'a pas été possible de procéder à la liquidation amiable de l’indivision successorale née du décès de [C] [L] le [Date décès 8] 2011 à [Localité 22], comme en témoigne sa persistance malgré l’écoulement du temps et la sollicitation d’un notaire aux fins de partage amiable.

Il convient en conséquence d'ordonner l'ouverture des opérations de partage judiciaire de l’indivision successorale née du décès de [C] [L] le [Date décès 8] 2011 à [Localité 22].

Selon l’article 1361 du code de procédure civile, le tribunal ordonne le partage, s’il peut avoir lieu, ou la vente par licitation du bien, et désigne un notaire chargé de dresser l’acte de partage.

Selon l’article 1364 du code de procédure civile, si la complexité des opérations le justifie, le tribunal désigne un notaire pour procéder aux opérations de partage et commet un juge pour les surveiller. Le notaire est choisi par les copartageants et à défaut par le tribunal.

En l’espèce, la complexité des opérations à venir, en raison de l’existence d’un bien immobilier et de comptes à établir, justifie la désignation d’un notaire sous le contrôle d'un juge commis.

Les parties ne proposant pas de notaire à désigner, il sera désigné Me [F] [U], notaire à [Localité 14].

Il sera rappelé que le notaire désigné par le tribunal a pour mission, conformément aux dispositions de l’article 1368 du code de procédure civile, de dresser un état liquidatif qui établit les comptes entre copartageants, la masse partageable, les droits des parties et la composition des lots à répartir.

L’esprit de la loi, tel qu’il résulte des articles 1373 à 1375 du code de procédure civile, n’est pas de faire trancher par le juge, au stade de l’ouverture des opérations, des contestations isolées en préjugeant des opérations de liquidation partage qui forment un tout. La présente juridiction n’a en effet pas vocation à effectuer une pré-liquidation des droits respectifs des parties, une telle mission incombant au notaire saisi dans les conditions fixées par les articles 1364 et suivants du code de procédure civile. Ce n’est qu’en cas de désaccord des copartageants sur le projet d’acte liquidatif dressé par le notaire commis, que le tribunal, auquel ce projet, ainsi qu’un procès-verbal des dires respectifs des parties seront transmis, statuera sur l’ensemble des désaccords persistants.

Néanmoins, il peut s’avérer opportun, en dehors du cadre posé par les dispositions précitées, de trancher des contestations, notamment des contestations de principe, dès lors que les parties en ont débattu de façon complète, et que la décision sur ce point n’est pas susceptible de nuire à la cohérence des opérations à venir.

Sur la demande d’attribution préférentielle

L’article 831-2 du code civil dispose :
« Le conjoint survivant ou tout héritier copropriétaire peut également demander l'attribution préférentielle :
1° De la propriété ou du droit au bail du local qui lui sert effectivement d'habitation, s'il y avait sa résidence à l'époque du décès, et du mobilier le garnissant, ainsi que du véhicule du défunt dès lors que ce véhicule lui est nécessaire pour les besoins de la vie courante ;
2° De la propriété ou du droit au bail du local à usage professionnel servant effectivement à l'exercice de sa profession et des objets mobiliers nécessaires à l'exercice de sa profession ;
3° De l'ensemble des éléments mobiliers nécessaires à l'exploitation d'un bien rural cultivé par le défunt à titre de fermier ou de métayer lorsque le bail continue au profit du demandeur ou lorsqu'un nouveau bail est consenti à ce dernier ».

En l’espèce, il ne ressort pas des éléments du débat que Mme [X] [B] habitait l’immeuble au jour du décès de Mme [C] [L]. Il est au contraire constant que l’immeuble a été loué à un tiers avant que Mme [X] [B] ne l’occupe, le contrat de bail étant produit.

Dès lors, cette demande sera rejetée, faute de remplir les conditions exigées par la loi.

Néanmoins, les héritiers peuvent s’entendre pour que l’immeuble soit alloti à Mme [X] [B] qui l’occupe, ce d’autant que Mme [K] [L] n’était pas opposée dans ses écritures à l’attribution préférentielle demandée par sa soeur. A cette fin, il apparaît utile de fixer la valeur de l’immeuble telle que demandée par Mme [X] [B] dans sa demande d’attribution « pour un prix de 255000 € ».

De toutes les évaluations produites, celle de l’agence [20] du 7 mars 2024 est à la fois la plus récente et la plus circonstanciée quant à l’immeuble objet de l’évaluation ; il ne s’agit pas d’une valorisation abstraite obtenue sur internet sans visite des lieux par un agent immobilier. Il ressort de cette évaluation une valorisation entre 250000 € et 260000 €.

Par conséquent, il sera partiellement fait droit à la demande de Mme [X] [B] et la valeur de l’immeuble indivis sera fixée à 255000 €.

Sur les demandes réciproques d’indemnité d’occupation

Il convient de rappeler que le juge de la mise en état a dit la demande irrecevable car prescrite, pour la période antérieure au 31 mai 2016.

Aux termes de l’article 815-9 du code civil, chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l’effet des actes régulièrement passés au cours de l’indivision.
L’indivisaire qui use et jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d’une indemnité.

Les juges du fond évaluent souverainement le montant de l’indemnité due, en application de l’article 815-9 du code civil, pour l’occupation privative d’un bien indivis. Son montant est en principe égal à la valeur locative du bien sur la période considérée, affectée d'un correctif à la baisse en raison du caractère juridiquement précaire de l'occupation.

En l’espèce, Mme [X] [B] reconnaît l’occupation de l’immeuble, mais soutient qu’elle est commune avec Mme [K] [L].

Mme [K] [L] produit de nombreuses pièces, notamment du trésor public, qui prouvent qu’elle vit à [Localité 24] depuis 2000. Elle ne peut dès lors occuper l’immeuble indivis et l’occupation de Mme [X] [B] est par conséquent exclusive. Il est inopérant que le nom de Mme [K] [L] figure sur la boite aux lettres, qu’elle ait une clé ou encore que certaines de ses anciennes affaires soient dans les combles de la maison, eu égard à l’éloignement géographique de Mme [K] [L]. Au surplus, Mme [X] [B] ne prouve pas que sa sœur a en sa possession une clé, alors qu’il ressort des messages échangés entre les parties qu’elle a changé les serrures lors de son emménagement dans l’immeuble indivis. Au demeurant, Mme [X] [B] reconnaît implicitement dans ses écritures que sa jouissance a été paisible et n’a jamais été perturbée par sa sœur.

Par conséquent, la demande d’indemnité d’occupation à l’égard de Mme [K] [L] sera rejetée et il sera dit que Mme [X] [B] doit une indemnité d’occupation à compter du 1er juin 2016.

Aucune des parties ne produit d’avis de valeur locative. Toutefois, il est constant que l’immeuble avait été loué le 21 juin 2014 pour un loyer mensuel de 800 €, le contrat de bail étant produit. Eu égard à l’évolution à la hausse des loyers, la valeur locative retenue à compter du 1er juin 2016 sera de 900 €. L’indemnité d’occupation sera donc de 720 € par mois, après application d’une décote de 20% eu égard au caractère juridiquement précaire de l’occupation.

Par conséquent, il sera dit que Mme [X] [B] doit à l’indivision successorale une indemnité d’occupation mensuelle de 720 € à compter du 1er juin 2016.

Sur la demande de provision du fait de l’indemnité d’occupation due par Mme [X] [B]

Aux termes de l’article 815-9 du code civil, la demande visant à régler l’exercice du droit d’usage et de jouissance par les indivisaires du bien indivis relève de la compétence exclusive du Président du tribunal judiciaire.

Aux termes de l’article 815-11 du même code, tout indivisaire peut demander sa part annuelle dans les bénéfices, déduction faite des dépenses entraînées par les actes auxquels il a consenti ou qui lui sont opposables (…). En cas de contestation, le président du tribunal judiciaire peut ordonner une répartition provisionnelle des bénéfices sous réserve d’un compte à établir lors de la liquidation définitive.

L’indemnité d’occupation privative doit être assimilée à un revenu accroissant l’indivision et doit être prise en compte pour l’appréciation des demandes formulées sur le fondement de l’article 815-11 du code civil.

Enfin en vertu de l’article 1380 du code de procédure civile, les demandes formées en application des articles (…) 815-9 et 815-11 du code civil sont portées devant le président du tribunal judiciaire qui statue selon la procédure accélérée au fond.

Il convient donc de déclarer la demande irrecevable faute d’avoir été présentée devant le juge compétent.

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et préjudice moral subséquent

Aux termes de l’article 1240 du code civil, « tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

En l’espèce, l’échec du partage amiable ne peut constituer une faute dans la mesure où il incombe à la partie la plus diligente de demander le partage judiciaire, demande au surplus initiée par la défenderesse, Mme [X] [B]. Et la mésentente familiale ne saurait être constitutive d’une faute.

Par conséquent, cette demande sera rejetée.

Sur les dépens, les frais irrépétibles et l’exécution provisoire

Les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.

Les demandes au titre des frais irrépétibles seront rejetées au regard de la coloration familiale de ce contentieux.

L’exécution provisoire de droit en application de l’article 514 du code de procédure civile applicable à la cause sera rappelée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant après débats en audience publique, par jugement réputé contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe,

Ordonne l’ouverture des opérations de liquidation et partage judiciaire de l’indivision successorale née du décès de [C] [L] le [Date décès 8] 2011 à [Localité 22] et existant entre :
- Mme [K] [L] née le [Date naissance 10] 1977 à [Localité 23] (95),
- Mme [X] [B] née le [Date naissance 6] 1973 à [Localité 17] (94),
- M. [G] [B] né le [Date naissance 3] 1996 à [Localité 15] (77),
- Mme [M] [B] née le [Date naissance 13] 1999 à [Localité 15] (77),
- Mme [A] [B] née le [Date naissance 5] 2000 à [Localité 21] ;

Désigne pour y procéder Me [F] [U], notaire à [Localité 14], [Adresse 4] (Tél : [XXXXXXXX01]) ;

Désigne en qualité de juge commis le magistrat présidant la section des liquidations et indivisions relevant de la compétence du tribunal judiciaire de Meaux pour surveiller ces opérations et faire son rapport sur le partage en cas de difficulté ;

Dit qu’en cas d’empêchement du notaire il sera procédé à son remplacement par ordonnance du juge commis rendue sur requête ;

Rappelle que le notaire accomplira sa mission dans les conditions fixées par les articles 1365 et suivants du code de procédure civile ;

Rappelle que le notaire commis pourra s’adjoindre si la valeur ou la consistance des biens le justifie, un expert choisi d’un commun accord entre les parties ou, à défaut, désigné par le Juge commis ;

Dit que le notaire ainsi désigné se fera remettre tous documents financiers utiles à sa mission, en intervenant directement tant auprès de parties qu’auprès des tiers, sans que le secret professionnel ne puisse lui être opposé ;

Autorise le notaire ci-dessus désigné à obtenir des fichiers FICOBA et FICOVIE ainsi que des établissements bancaires et financiers auprès desquels les parties ont ouvert un compte ou détiennent des avoirs financiers sous toutes formes, toutes informations utiles à l’accomplissement de sa mission ;

Rappelle que l'état liquidatif devra être établi dans le délai d'un an suivant la désignation du notaire, et qu'une prorogation de délai d'un an au plus pourra être accordée par le juge commis, si la complexité des opérations le justifie, sur demande du notaire ou d'un copartageant ;

Rappelle que ce délai est suspendu en cas d’adjudication des biens et jusqu’au jour de la réalisation définitive de celle-ci ;

Rappelle que les parties devront remettre au notaire tout document utile à l'accomplissement de sa mission, et qu'à défaut le juge commis peut prononcer une astreinte à cette fin ;

Rappelle que les copartageants peuvent, à tout moment, abandonner les voies judiciaires et poursuivre le partage à l’amiable et qu'en cas de signature d'un tel acte de partage amiable le notaire en informe le Tribunal ;

Déboute Mme [X] [B] de sa demande d’attribution préférentielle de l’immeuble indivis sis [Adresse 2] à [Localité 16] ;

Fixe à 255000 € la valeur de l’immeuble indivis sis [Adresse 2] à [Localité 16] ;

Rejette la demande d’indemnité d’occupation à l’encontre de Mme [K] [L] ;

Dit que Mme [X] [B] doit à l’indivision successorale une indemnité d’occupation mensuelle de 720 € à compter du 1er juin 2016 et jusqu’à libération effective, des lieux, vente de l’immeuble ou partage divis ;

Déclare irrecevable pour incompétence du tribunal la demande de provision de Mme [K] [L] à l’encontre de Mme [X] [B] pour un montant de 20000 € ;

Déboute Mme [K] [L] de sa demande de dommages et intérêts à l’encontre de Mme [X] [B] pour un montant de 10000 € ;

Rejette toute demande autre, plus ample ou contraire ;

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage ;

Rejette les demandes des parties fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;

Rappelle que le présent jugement bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire ;

Renvoie l’affaire à l’audience dématérialisée de mise en état du juge commis du 9 janvier 2025 à 9 heures pour contrôle de l’avancement des opérations de compte liquidation et partage ;

Invite les parties et le notaire à renseigner le juge commis pour la date fixée, puis aux dates de renvoi qui seront arrêtées, de l’état d’avancement des opérations ;

Dit que cette information sera faite :
- pour les parties représentées par un avocat, par RPVA,
- à défaut de représentation par avocat et pour le notaire désigné par courrier électronique à l'adresse : [Courriel 18] ;

Rappelle qu'à défaut pour les parties d'accomplir ces diligences au fur et à mesure des opérations de liquidation, l'affaire sera supprimée du rang des affaires en cours.

Et le présent jugement a été signé par Fatima ZEDDOUN, présidente, et par Sandrine FANTON, greffier.

Le greffier La présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Meaux
Formation : 1ère ch. - sect. 6
Numéro d'arrêt : 21/03432
Date de la décision : 22/08/2024
Sens de l'arrêt : Partages - ordonne le partage et désigne un notaire pour formaliser l'acte

Origine de la décision
Date de l'import : 03/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-22;21.03432 ?
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