Min N° 24/00566
N° RG 23/04490 - N° Portalis DB2Y-W-B7H-CDIYE
M. [C] [W]
C/
Société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droit de la SA SYGMA BANQUE
Société AVENIR SOLUTION ENERGIE
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
JUGEMENT DU 17 juillet 2024
DEMANDEUR :
Monsieur [C] [W]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représenté par Me Charlotte BOULLARD substituant Me Sandrine LAUGIER, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant
DÉFENDERESSES :
Société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Maître Sébastien MENDES-GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant
Société AVENIR SOLUTION ENERGIE
[Adresse 2]
[Localité 6]
non comparante, ni représentée
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Président : Madame CART Magalie, Juge
Greffier : Madame DE PINHO Maria, Greffière
DÉBATS :
Audience publique du : 22 mai 2024
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Sandrine LAUGIER
Copie délivrée
le :
à : SELAS CLOIX & MENDES-GIL
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 26 décembre 2013, dans le cadre d'un démarchage à domicile, la société AVENIR SOLUTION ENERGIE a conclu avec Monsieur [C] [W] un bon de commande pour la fourniture et la pose de panneaux photovoltaïques, pour un prix total de 23.190 euros TTC, avec financement par un prêt.
Le 13 janvier 2014, Monsieur [C] [W] a consenti à une offre préalable de crédit affecté pour financer l'opération auprès de la S.A S.A SYGMA BANQUE, aux droits de laquelle vient la BANQUE BNP PARIBAS, à hauteur de 23.190 euros, remboursable sur une durée de 144 mois.
Par actes de commissaire de justice des 25 août 2023 et 28 août 2023, Monsieur [C] [W] a fait assigner la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE et la société AVENIR SOLUTION ENERGIE devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Meaux aux fins de voir :
déclarer recevable et bien-fondé en ses demandes ;
juger son action non prescrite ;
à titre principal : juger que le bon de commande signé le 26 décembre 2013 ne satisfait pas aux mentions obligatoires prévues en matière de démarchage à domicile ; et juger que son consentement a été vicié pour cause d'erreur sur la rentabilité économique de l'opération ;
prononcer la nullité du contrat de vente conclu le 26 décembre 2013 avec la société AVENIR SOLUTION ENERGIE ;
prononcer la nullité consécutive du contrat de crédit affecté conclu avec la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE ;
condamner la société AVENIR SOLUTION ENERGIE à restituer à Monsieur [C] [W] l’intégralité du prix de vente de l’installation photovoltaïque d’un montant de 23.190 euros ; ainsi qu'à procéder à la désinstallation du matériel posé suivant bon de commande du 26 décembre 2023 et à la remise en état de l'immeuble à ses frais, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir; et juger qu'à défaut de reprise du matériel dans un délai de deux mois à compter de la décision à intervenir cette dernière sera réputée y avoir renoncé ;
juger que la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE, a commis une faute lors du déblocage des fonds au bénéfice de la société AVENIR SOLUTION ENERGIE et juger que ladite banque sera privée de son droit à réclamer la restitution du capital prêté ;
à titre principal juger que la déchéance du droit à restitution de la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE, n'est pas conditionnée à la démonstration d'un préjudice ; et subsidiairement que le demandeur justifie d'un préjudice ;
condamner S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE, à lui restituer l'intégralité des sommes versées par le demandeur au titre du capital, intérêts et frais accessoires en vertu du contrat affecté du 13 janvier 2014, soit la somme de 20.377,50 euros (à parfaire) ;
à titre subsidiaire :
juger que la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE, a manqué à son devoir de mise en garde ;
condamner la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE, à lui payer la somme de 20.000 euros au titre des dommages et intérêts en réparation de son préjudice lié à la perte de chance de ne pas souscrire un prêt excessif ;
juger que la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE, a manqué à son obligation d'information et de conseil ;
prononcer la déchéance de l'intégralité du droit aux intérêts afférents au contrat de crédit conclu le 13 janvier 2014 ;
à titre infiniment subsidiaire :
juger que si la banque ne devait être privée que de son droit à percevoir les intérêts, frais et accessoires du prêt, le demandeur continuera de rembourser mensuellement le prêt sur la base d'un nouveau tableau d'amortissement produit par la banque ;
En tout état de cause :
condamner solidairement et in solidum la société AVENIR SOLUTION ENERGIE et la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE, à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de son préjudice moral ;
débouter la société AVENIR SOLUTION ENERGIE et la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE, de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;
dire n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de droit ;
condamner solidairement et in solidum la société AVENIR SOLUTION ENERGIE et la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE, à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Après un premier appel du dossier à l'audience du 8 novembre 2023 et trois renvois ordonnés à la demande des parties pour mise en état du dossier, l'affaire a été appelée et retenue à l'audience du 22 mai 2024.
A cette audience, Monsieur [C] [W], représenté par son conseil, se réfère oralement aux écritures déposés. Il maintient les demandes figurant dans son assignation.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action, il soutient en application de l'article 2224 du code civil, que le point de départ de la prescription quinquennale extinctive de droit commun n'est pas fixé au jour des faits susceptibles de fonder une action en justice, mais au jour où le titulaire du droit d'agir en a eu connaissance ou aurait dû les connaître, c’est-à-dire au moment où il a eu connaissance du vice en question et de son préjudice, dans toute son ampleur, et du fait générateur de responsabilité d’agissant d’une action en responsabilité d'un consommateur pour faute de sa banque.
A cet égard, Monsieur [C] [W] fait valoir, d'une part, que la rentabilité d'une installation censée produire un gain ou une économie d'énergie ne peut être appréciée qu'après plusieurs années de production ; d'autre part, il rappelle le principe d'efficacité et d'effectivité des sanctions consacré en droit européen de la consommation, spécialement en cas de manquement par le professionnel du crédit à ses obligations. Il soutient qu'il n'était pas en mesure de déceler lui-même l'irrégularité affectant le bon de commande, sans l'intervention d'un tiers sachant ou expert, étant de profession ouvrier agricole et que cette irrégularité ne ressortait pas de la seule lecture de l'acte. Il produit de nombreuses décisions de justice concernant le report de la prescription et un rapport d'expertise amiable réalisé le 10 décembre 2021.
Monsieur [C] [W] fonde son action en nullité du contrat principal sur le fondement des articles 1109 et 1110 anciens du code civil, sur une erreur quant à la rentabilité de l'opération portant sur des promesses de rentabilité constituant la substance même du contrat qui en est l'objet ; et sur le fait que ce dernier est entaché d'un vice résultant d'une méconnaissance des règles spéciales et d'ordre public du droit de la consommation, notamment des dispositions de l'article L.121-23 du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur à la signature du contrat litigieux, au motif que le bon de commande signé le 26 décembre 2013 qui relève des dispositions relatives au démarchage à domicile présente des irrégularités concernant la détermination de la nature et des caractéristiques essentielles des panneaux, les délais et modalités de livraison, ainsi que le délai d'installation et de mise en service.
Il fait valoir que la nullité emporte un effacement rétroactif du contrat et une remise des choses en leur état antérieur, le bon de commande du 26 décembre 2013 étant annulé et censé n'avoir jamais existé.
Il souligne que les irrégularités dénoncées relèvent d'un manquement à l'ordre public ayant pour conséquence une nullité absolue du bon de commande, telle prévue à l'article 1179 du code civil, en raison de multiples mentions obligatoires manquantes, non susceptible de confirmation du fait de l'impossibilité de les déceler en tant que non professionnel du droit de la consommation. A titre subsidiaire, si le tribunal considérait qu'il n'y avait pas de reconnaître la nullité absolue du bon de commande, il sollicite la nullité relative du contrat de vente du fait de l'absence de confirmation du bon de commande par le demandeur qui n'avait pas connaissance des vices affectant l'acte au moment de la signature des documents et du paiement du prêt.
Il expose que par application de l'article L.321-55 du code de la consommation et du principe de l'interdépendance des contrats, la nullité du contrat de vente principal entraîne la résolution ou résiliation judiciaire du contrat de crédit affecté.
Sur la responsabilité de la banque, il soutient que celle-ci aurait commis une faute en ayant débloqué les fonds sans avoir procédé aux vérifications quant à la régularité du bon de commande et du bon fonctionnement de l'installation, justifiant la déchéance du droit à restitution du capital qui résulterait normalement de l'effet rétroactif attaché à la nullité du contrat de prêt. Enfin, à titre subsidiaire, il évoque les manquements de la banque dans le respect de son devoir de mise en garde et de prudence au regard d'un contractant profane et du caractère illusoire des rendements promis du fait d'économies réalisées souvent inférieures au montant des mensualités du crédit affecté souscrit, ainsi qu'à son obligation d'information et de conseil quant à la portée de l'engagement de l'emprunteur et des explications personnalisées et adaptées à sa situation entraînant une déchéance totale du droit aux intérêts concernant le contrat de crédit affecté souscrit le 13 janvier 2014.
La S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE, représentée par son conseil, indique se référer à ses écritures déposées à l'audience et aux termes desquels elle sollicite du tribunal de :
déclarer irrecevables les demandes de Monsieur [C] [W], en nullité du contrat principal conclu avec la société AVENIR SOLUTION ENERGIE sur le fondement d'irrégularités formelles pour violation des dispositions impératives du code de la consommation et pour erreur sur la rentabilité économique de l'opération ;
A titre principal :
débouter Monsieur [C] [W] de sa demande d'annulation du contrat conclu le 26 décembre 2013 avec la société AVENIR SOLUTION ENERGIE, et lui ordonner de poursuivre normalement le remboursement du crédit ;
A titre subsidiaire, en cas de nullité des contrats :
dire que la banque n'a commis aucune faute dans la vérification du bon de commande ni dans le versement des fonds prêtés ;
dire de surcroît que l'acquéreur n'établit pas le préjudice qu'il aurait subi en lien avec l'éventuelle irrégularité alléguée du bon de commande ou le versement des fonds, et donc avec la faute alléguée à l'encontre de la banque, ce alors même que l'installation fonctionne ;
dire en conséquence que le demandeur ne justifie pas des conditions d'engagement de la responsabilité de la banque ;
dire et juger que du fait de la nullité, l'emprunteur est tenu de restituer le capital au prêteur et en conséquence le condamner à lui régler la somme de 23.190 euros ;
Très subsidiairement :
limiter la réparation qui serait due par la banque eu égard au préjudice effectivement subi par l'emprunteur à charge pour lui de l'établir et eu égard à la faute de l'emprunteur ayant concouru à son propre préjudice ;
dire et juger que l'acquéreur reste tenu de restituer l'entier capital à hauteur de 23.190 euros et ordonner la compensation des créances réciproques à due concurrence ;
A titre infiniment subsidiaire, en cas de nullité des contrats et de refus d'ordonner la restitution du capital prêté à charge de l'emprunteur :
Condamner Monsieur [C] [W] à payer à la banque la somme de 23.190 euros correspondant au capital perdu à titre de dommage et intérêts en réparation de sa légèreté blâmable ;
lui enjoindre à la restitution à ses frais du matériel installé chez lui à la société AVENIR SOLUTION ENERGIE dans un délai d'un mois à compter de la signification du jugement, ainsi que les revenus perçus au titre de la revente d'électricité ;
dire et juger qu'à défaut de restitution, il restera tenu au remboursement du capital prêté ;
dire et juger en cas de nullité des contrats que la société AVENIR SOLUTION ENERGIE est garante de la restitution du capital prêté, ce qui n'exonère toutefois pas l'emprunteur de son obligation lorsqu'il n'en a pas été déchargé ; et donc la condamner à verser à la banque la somme de 23.190 euros à ce titre outre le paiement d'une somme de 10.877,53 euros correspondant aux intérêts perdus ;
subsidiairement en l'absence de restitution du capital prêté ou partiellement, condamner la société AVENIR SOLUTION ENERGIE à payer à la banque la somme de 23.190 euros au titre de la répétition de l'indu, et à défaut sur le fondement de la responsabilité ; et la condamner au paiement des intérêts perdus du fait de l'annulation des contrats avec paiement à la banque de la somme de 10.877,53 euros ;
En tout état de cause, condamner la société AVENIR SOLUTION ENERGIE à garantir la banque de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre vis à vis de l'emprunteur ; et en conséquence en cas de décharge de l'obligation de l'emprunteur sur le fondement de la responsabilité de la banque et la condamner à régler à la banque la somme de 39.124,80 euros dans la limite de la décharge prononcée ;
En tout état de cause :
juger que les griefs formés par les acquéreurs au titre du devoir de mise en garde, de conseil et de l'obligation pré-contractuelle d'information ne sont pas fondés ;
débouter Monsieur [C] [W] de sa demande de dommages et intérêts pour perte de chance, de sa demande de déchéance du droit aux intérêts de la banque, dire que les autres griefs ne sont pas fondés et le débouter de sa demande de dommages et intérêts, et le débouter de toutes autres demandes ;
ordonner la compensation des créances réciproques à concurrence ;
le condamner au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction au profit de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL.
La S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE, soulève in limine litis l'irrecevabilité des demandes de Monsieur [C] [W] compte-tenu de la prescription extinctive entachant son action sur le fondement de l'article 2224 du code civil et de l'article L.110-4 du code de la consommation pour les actions mixtes pour les contrats conclus entre un consommateur et un professionnel, dans la mesure où celle-ci est intervenue plus de 9 ans après la conclusion des contrats.
Elle fait valoir que le point de départ de la prescription de l'action en nullité, fondée sur les dispositions du code de la consommation, a commencé à courir le jour où Monsieur [C] [W] a été en mesure de vérifier la régularité du bon de commande, soit le 26 décembre 2013, jour de sa signature ; et par la lecture des dispositions des articles L 121-23 et suivants du code de la consommation figurant sur le bon de commande.
Elle soutient que le délai pour agir a ainsi expiré le 27 décembre 2018, soit avant la délivrance de l'assignation le 25 août 2023.
S'agissant du point de départ de l'action en nullité du contrat principal pour erreur quant à la rentabilité de l'opération portant sur des promesses de rentabilité, elle fait valoir qu'en matière de vente de centrales photovoltaïques, le point de départ de la prescription peut être ?xé à la date de réception de la première facture de vente de l'électricité produite à EDF, soit en l'espèce le 18 août 2017.
Sur la nullité du contrat de principal invoquée par le demandeur, elle affirme que Monsieur [C] [W] ne rapporte pas la preuve de l'existence quant à l'erreur sur la rentabilité de l'opération portant sur des promesses de rentabilité dont il aurait été victime, ce dernier ne démontrant pas que la rentabilité promise ait été déterminante de son consentement contrairement au seul report possible du point de départ de la prescription au jour de la découverte de l'erreur prévu aux dispositions de l'article 1304 du code civil dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2016.
Elle ajoute qu’à défaut d'annulation du contrat principal, le contrat de crédit ne saurait être annulé.
Elle soutient également que l'action en responsabilité est prescrite, car il disposait des informations dès la signature du bon de commande le 26 décembre 2013 ; cette action initiée à l'encontre de la banque visant à la privation de la créance de restitution du capital privé étant également affectée par la prescription du fait du maintien du contrat.
Par note en délibéré, autorisée par le tribunal, reçue au greffe le 27 mai 2024, le conseil de la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE, a transmis son dossier de plaidoirie comprenant ses conclusions et ses pièces.
Bien que régulièrement cité par acte de commissaire de justice signifié à personne morale, la société AVENIR SOLUTION ENERGIE n'est pas représentée à l'audience.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens respectifs des parties, il est renvoyé à leurs écritures, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'affaire a été mise en délibéré au 17 juillet 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les fins de non-recevoir tirées de la prescription de l'action
Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
En l'espèce, Monsieur [C] [W] fonde son action en nullité du contrat de vente et en responsabilité de la banque, d'une part, sur le non-respect des dispositions du code de la consommation, et d’autre part sur l'erreur quant à la rentabilité de l'opération portant sur des promesses de rentabilité.
Les parties s'opposent quant au point de départ du délai de prescription de l'action.
- Sur la recevabilité de l'action en nullité pour erreur quant à la rentabilité de l'opération portant sur des promesses de rentabilité
L'action en nullité fondée sur le dol ou l'erreur se prescrit par cinq ans à compter de la date à laquelle le plaignant a découvert ou aurait dû découvrir les manœuvres ou la réticence dolosives.
En l'espèce, Monsieur [C] [W] soulève la nullité du contrat pour erreur quant à la rentabilité de l'opération portant sur des promesses de rentabilité, au motif que le caractère autofinancé et rentable de l'opération, vanté par le vendeur, n'était finalement pas avéré, étant par ailleurs relevé qu'aucune stipulation portant sur des éléments relatifs à la rentabilité de l'installation ne figure dans le contrat de vente principal.
Il a versé aux débats la première facture de vente émise le 18 août 2017, qui constitue, en matière de panneaux photovoltaïques, le point de départ du délai de prescription de l'action en nullité du contrat de vente pour erreur.
En exerçant leur action en nullité par assignation des 25 août 2023 et 28 août 2023, il a agi au-delà du délai de cinq ans qui courrait à compter du 18 août 2017.
L'action de Monsieur [C] [W] en nullité pour erreur quant à la rentabilité de l'opération portant sur des promesses de rentabilité est donc prescrite et sera déclarée irrecevable.
- Sur la recevabilité de l'action en nullité pour non respect des dispositions du code de la consommation
En application du texte précité, le point de départ du délai de prescription s'agissant de l'action en nullité pour non respect des dispositions du code de la consommation se situe au jour où l'emprunteur est en mesure de déceler les erreurs alléguées.
L'article L. 121-23 du code de la consommation, dans sa version applicable à la date du contrat principal, dispose que :
« Les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :
1° Noms du fournisseur et du démarcheur ;
2° Adresse du fournisseur ;
3° Adresse du lieu de conclusion du contrat ;
4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;
5° Conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services ;
6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L. 313-1 ;
7° Faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L.121-23, L.121-24, L.121-25 et L.121-26 ».
En l'espèce, Monsieur [C] [W] invoque les irrégularités suivantes dans le bon de commande signé le 26 décembre 2013 :
l'absence de mention relative à la marque et aux dimensions des panneaux photovoltaïques, ce qui renvoie à l'absence de désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts (4°),
l'absence de mention sur la date de livraison de l'installation ni sur ses modalités concrètes, comme le délai d'installation et de mise en service, ce qui renvoie à l'absence de mentions relatives aux conditions d'exécution du contrat et des délais de mise en service des panneaux (5°).
Or il convient de relever que les dispositions des articles L.121-23 à L.121-26 du code de la consommation sont reprises textuellement de façon exhaustive et lisible dans les documents générales de vente fournies avec le bon de commande.
En outre, compte tenu de la nature des manquements invoqués, il était en mesure, dès la signature du bon de commande le 26 décembre 2013, de vérifier l'omission ou l'irrégularité des mentions dénoncés dans la présente procédure, et ce bien qu'il ne soit pas un « professionnel » du droit de la consommation.
En exerçant son action en nullité par assignation des 25 et 28 août 2023, il a agi au-delà du délai de cinq ans qui courrait à compter du 26 décembre 2013.
L'action de Monsieur [C] [W] en nullité du contrat de vente conclu le 26 décembre 2013 avec la société AVENIR SOLUTION ENERGIE et du contrat de crédit affecté conclu le 13 janvier 2024 avec la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE, pour non-respect des dispositions du code de la consommation est donc prescrite et sera donc déclarée irrecevable.
- Sur la recevabilité de l'action en responsabilité contre l'établissement de crédit
En l'espèce, Monsieur [C] [W] soulèvent la nullité du contrat pour erreur quant à la rentabilité de l'opération portant sur des promesses de rentabilité au motif que la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de de la S.A SYGMA BANQUE, aurait commis une faute en ayant débloqué les fonds sans avoir procédé aux vérifications quant à la régularité du bon de commande et quant à son devoir de conseil et de mise en garde sur l'absence de rentabilité du dispositif, avant de débloquer les fonds.
La prescription quinquennale court, s'agissant des irrégularités formelles du contrat de crédit, à compter de la formation du contrat qui correspond au jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître les irrégularités alléguées.
En l'espèce, le délai de prescription quinquennal ayant commencé à courir à compter du 26 décembre 2013, date de signature du contrat de vente principal avec signature le 13 janvier 2014 du contrat de crédit affecté, l'action en responsabilité de la banque se trouve prescrite.
L'action de Monsieur [C] [W] en responsabilité contre l'établissement de crédit est donc également prescrite et sera déclarée irrecevable.
Sur les demandes accessoires et la demande reconventionnelle de la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE au titre des frais irrépétibles
En application de l'article 696 du code de procédure civile, Monsieur [C] [W] partie perdante, sera condamné aux dépens.
Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge peut condamner la partie perdante à payer une somme au titre des frais de justice exposés et non compris dans les dépens. Cependant, pour des raisons d'équité tirées de la situation des parties, il peut, même d'office, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.
En l'espèce, compte tenu des frais exposés par la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE, non compris dans les dépens dans le cadre de la présente procédure judiciaire, Monsieur [C] [W] sera condamné à lui verser la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Enfin, selon l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement. Toutefois, selon l’article 514-1 du même code, le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire. Il statue, d'office ou à la demande d'une partie, par décision spécialement motivée.
En l'espèce, l'exécution provisoire n'étant pas incompatible avec la nature de l'affaire, il n'y a pas lieu d'écarter l'exécution provisoire de droit de la présente décision.
PAR CES MOTIFS,
Le juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et rendu en premier ressort,
Déclare irrecevable, du fait de sa prescription, l'action formée par Monsieur [C] [W] en nullité du contrat de vente conclu le 26 décembre 2013 avec la société AVENIR SOLUTION ENERGIE et du contrat de crédit affecté conclu le 13 janvier 2014 avec la S.A BANQUE BNP PARIBAS, venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE, tant celle en nullité pour non respect des dispositions du code de la consommation que celle en nullité pour erreur quant à la rentabilité de l'opération portant sur des promesses de rentabilité ;
Déclare irrecevable, du fait de sa prescription, l'action en responsabilité formée par Monsieur [C] [W] à l’encontre de la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE ;
Condamne Monsieur [C] [W] à payer à la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la S.A SYGMA BANQUE, la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Condamne Monsieur [C] [W] aux dépens ;
Dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de droit de la présente décision.
La greffière La Juge des contentieux de la protection