Min N° 24/00472
N° RG 24/00986 - N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDOD3
S.A. BANQUE FRANCAISE MUTUALISTE
C/
Mme [E] [V]
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
JUGEMENT DU 12 juin 2024
DEMANDERESSE :
S.A. BANQUE FRANCAISE MUTUALISTE
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Ingrid BOILEAU, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
DÉFENDERESSE :
Madame [E] [V]
[Adresse 1]
[Localité 4]
non comparante
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Président : Madame COLLANGE Elisabeth, Juge
Greffier : Madame DUMAY Nathalie, faisant fonction de Greffière, lors des débats et Madame DE PINHO Maria, Greffière, lors de la mise à disposition
DÉBATS :
Audience publique du : 10 avril 2024
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Ingrid BOILEAU
Copie délivrée
le :
à : Madame [E] [V]
EXPOSE DU LITIGE
Suivant offre de crédit préalable acceptée par signature électronique le 12 octobre 2021, la S.A Banque Française Mutualiste a consenti à Mme [E] [V] un prêt personnel n°10988642 d'un montant de 35.000 euros, remboursable en 63 échéances de 589,69 euros (hors assurance), portant intérêt au taux contractuel de 2,26 %.
Plusieurs échéances n'ayant pas été honorées, la S.A Banque Française Mutualiste a entendu se prévaloir de la déchéance du terme de ces contrats.
Par acte de commissaire de justice du 30 janvier 2024, la S.A Banque Française Mutualiste a fait assigner Mme [E] [V] aux fins de voir :
- à titre principal, constater la déchéance du terme du prêt et condamner l'emprunteur au paiement de la somme de 37.004,57 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 2,26 % sur le principal de 34.841,45 euros à compter du 28 février 2023, et au taux légal pour le surplus à compter du 28 février 2023 ;
- à titre subsidiaire, prononcer la résolution du contrat de prêt et la condamner au paiement de la somme de 34.841,45 euros, avec les intérêts au taux contractuel à compter de l'assignation ;
- en tout état de cause, condamner Mme [E] [V] à lui payer la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 10 avril 2024.
La S.A Banque Française Mutualiste, représentée par son conseil, demande le bénéfice de son acte introductif d'instance et, sur les moyens relevés d'office par le juge sur le respect des diverses obligations édictées par le code de la consommation et annexés à la note d'audience, indique que son action n'est pas forclose et qu'elle est en mesure de justifier de la régularité des contrats.
Mme [E] [V], citée selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile, n’est ni présente ni représentée à l’audience.
La décision était mise en délibéré au 12 juin 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
En application de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.
I - SUR LA DEMANDE PRINCIPALE EN PAIEMENT
Sur la recevabilité de l'action
Aux termes des dispositions de l'article R.312-35 du code de la consommation, les actions en paiement engagées à la suite de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance, à peine de forclusion.
L'action de la S.A Banque Française Mutualiste, introduite par assignation du 30 janvier 2024, alors que le premier incident de paiement non régularisé date du 5 février 2022, est recevable.
Sur la déchéance du terme
Il résulte des articles 1103 et 1224 du code civil et L.312-39 du code de la consommation que lorsqu’une mise demeure, adressée par la banque à l’emprunteur et précisant qu’en l’absence de reprise du paiement des échéances dans un certain délai la déchéance du terme serait prononcée, est demeurée sans effet, la déchéance du terme est acquise à l’expiration de ce délai.
En l'espèce, il ressort des pièces communiquées que Mme [E] [V] a cessé de régler les échéances du prêt, que la S.A Banque Française Mutualiste a fait parvenir une demande de règlement des échéances impayées sous huit jours par courrier recommandé du 22 novembre 2022, (revenu avec la mention « destinataire inconnu à l'adresse », et que cette mise en demeure est restée sans effet.
Ainsi, l'absence de règlement dans les délais impartis par le prêteur a entraîné la déchéance du terme du prêt si bien que la S.A Banque Française Mutualiste est bien fondée à demander le remboursement immédiat des sommes exigibles selon les termes du contrat.
Sur le droit du prêteur aux intérêts
La S.A Banque Française Mutualiste demande à bénéficier des intérêts au taux contractuel.
Il lui appartient donc de démontrer, conformément aux dispositions de l'article 1353 du code civil, que la formation du contrat du 12 octobre 2021 et son exécution sont conformes aux dispositions d'ordre public du code de la consommation.
Sur la consultation du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP)
Aux termes de l'article L. 312-16 du code de la consommation, avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur doit vérifier la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations. Celles-ci sont fournies par l'emprunteur lui-même et par les éléments tirés du fichier des incidents de paiement (FICP), lequel doit être consulté par l'organisme de crédit, selon les modalités prescrites par l'arrêté du 26 octobre 2010. Cet arrêté précise en son article 2 que le FICP doit obligatoirement être consulté par l'organisme de crédit avant toute décision effective d'octroyer un crédit à la consommation.
L'article 13 de l'arrêté du 26 octobre 2010 oblige les prêteurs à conserver des preuves de la consultation du fichier, de son motif et de son résultat sur un support durable, en vue de pouvoir justifier de cette consultation.
L'article L. 341-2 du code de la consommation prévoit que le prêteur qui n'a pas respecté cette obligation de consultation est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.
En l'espèce, la pièce versée aux débats par le préteur ne précise pas le résultat de cette consultation auprès de la Banque de France, permettant de s’assurer de la réalité de cette consultation et de l’exactitude de la réponse apportée par cette institution.
En conséquence, il y a lieu de prononcer la déchéance totale du droit du prêteur aux intérêts pour ce motif.
Sur les sommes dues
Conformément à l'article L.341-1 du code de la consommation, le débiteur n'est tenu qu'au remboursement du seul capital restant dû, après déduction des intérêts réglés à tort.
Cette limitation légale de la créance du prêteur exclut qu'il puisse prétendre au paiement de l'indemnité prévue par les articles L.312-39 et D.312-16 du code de la consommation.
La créance de la S.A Banque Française Mutualiste s'établit donc comme suit :
- capital emprunté depuis l'origine : 35.000 €
- sous déduction des versements antérieurs à la déchéance du terme, suivant l'historique de compte (1.206,45 €) et postérieurs à la déchéance du terme suivant décompte actualisé au 10/01/204 (0,00 €).
Soit un montant total de créance de 33.793,55 euros, sous réserve des versements postérieurs et/ou non pris en compte dans le décompte.
Il y a donc lieu de condamner Mme [E] [V] au paiement de cette somme, laquelle produira intérêt à taux légal non majoré à compter du prononcé de la présente décision afin d'assurer le caractère effectif et dissuasif de la déchéance du droit aux intérêts.
II - SUR LES MESURES ACCESSOIRES
En application de l'article 696 du code de procédure civile, Mme [E] [V], partie perdante, supportera la charge des dépens.
En revanche, il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la S.A Banque Française Mutualiste le montant de ses frais irrépétibles, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément aux articles 514 et 515 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par jugement mis à disposition au greffe, réputé contradictoire et en premier ressort,
Déclare l'action de la S.A Banque Française Mutualiste recevable ;
Constate la déchéance du terme du prêt n°1098862 consenti à Mme [E] [V] ;
Prononce la déchéance totale du droit aux intérêts contractuels ;
Écarte l'application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil et L.313-3 du code monétaire et financier ;
Condamne Mme [E] [V] à payer à la S.A Banque Française Mutualiste la somme de 33.793,55 euros pour solde du prêt personnel n°10988642 avec intérêt au taux légal non majoré à compter du prononcé de la présente décision ;
Rejette la demande de la S.A Banque Française Mutualiste au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [E] [V] aux dépens ;
Rappelle que l'exécution provisoire est de droit.
LE GREFFIER LE JUGE