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12/06/2024 | FRANCE | N°23/01906

France | France, Tribunal judiciaire de Meaux, Ctx gen jcp, 12 juin 2024, 23/01906


Min N° 24/00459
N° RG 23/01906 - N° Portalis DB2Y-W-B7H-CDCTE

S.A. CREDIT LYONNAIS (LCL)

C/
M. [Z] [G]



TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION

JUGEMENT DU 12 juin 2024




DEMANDERESSE :

S.A. CREDIT LYONNAIS (LCL)
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Maître Xavier HELAIN de la SELARL HKH AVOCATS, avocats au barreau d’ESSONNE, avocats plaidant



DÉFENDEUR :

Monsieur [Z] [G]
[Adresse 2]
[Localité 4]

non comparant



COMPOSITION DU

TRIBUNAL :

Président : Madame COLLANGE Elisabeth, Juge
Greffier : Madame DUMAY Nathalie, faisant fonction de Greffière, lors des débats et Madame DE PINHO Maria, Greffière...

Min N° 24/00459
N° RG 23/01906 - N° Portalis DB2Y-W-B7H-CDCTE

S.A. CREDIT LYONNAIS (LCL)

C/
M. [Z] [G]

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION

JUGEMENT DU 12 juin 2024

DEMANDERESSE :

S.A. CREDIT LYONNAIS (LCL)
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Maître Xavier HELAIN de la SELARL HKH AVOCATS, avocats au barreau d’ESSONNE, avocats plaidant

DÉFENDEUR :

Monsieur [Z] [G]
[Adresse 2]
[Localité 4]

non comparant

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Madame COLLANGE Elisabeth, Juge
Greffier : Madame DUMAY Nathalie, faisant fonction de Greffière, lors des débats et Madame DE PINHO Maria, Greffière, lors de la mise à disposition

DÉBATS :

Audience publique du : 10 avril 2024

Copie exécutoire délivrée
le :
à : SELARL HKH AVOCATS

Copie délivrée
le :
à : Monsieur [Z] [G]

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant offre préalable acceptée le 31 mars 2016, la S.A Crédit Lyonnais (LCL) a consenti à Monsieur [Z] [G] un prêt personnel d'un montant de 40.000 euros, remboursable en 108 mensualités, portant intérêt au taux conventionnel de 2,40 %.

Plusieurs échéances n'ayant pas été honorées, la S.A Crédit Lyonnais (LCL) a entendu se prévaloir de la déchéance du terme dudit contrat.

Par acte de commissaire de justice en date du 18 avril 2023, la S.A Crédit Lyonnais (LCL) a fait assigner Monsieur [Z] [G] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Meaux, aux fins de voir :
-à titre principal, constater la déchéance du terme du prêt et condamner ce dernier à lui payer la somme de 41.815,43 euros, avec intérêts au taux contractuel de 2,40 % l'an à compter de la mise en demeure du 24 octobre 2022, et à titre subsidiaire à compter de l'assignation, avec capitalisation annuelle des intérêts conformément à l'article 1343-2 du code civil ;
-à titre subsidiaire, prononcer la résiliation du contrat de prêt et condamner ce dernier à lui payer la même somme, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir ;
-en tout état de cause, le condamner au paiement de la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens.

Au terme d'un renvoi, l'affaire a été appelée et retenue à l'audience du 20 septembre 2023. Seule la société demanderesse était représentée et l'affaire a été mise en délibéré.

Une réouverture des débats a ensuite été ordonnée " pour observations des parties sur la demande de délais de paiement formulée par écrit par la mère de M. [G] (munie d'un pouvoir - courrier du 28/04/2023, reçu le 5 mai 2023) ".

L'affaire a été à nouveau appelée à l'audience du 10 avril 2024.

La S.A Crédit Lyonnais (LCL), représentée par son conseil, maintient ses demandes initiales. Sur les moyens relevés d'office par le juge sur le respect des diverses obligations édictées par le code de la consommation et annexés à la note d'audience, elle a indiqué que son action n'était pas forclose et s'en est remis à l'appréciation du juge sur les causes de déchéance du droit aux intérêts.

Monsieur [Z] [G] n'est ni présent ni représenté à l'audience.

Il est fait état de la demande de délais de paiement formulée par M. [G] dans son courrier du 28 avril 2023, à savoir des règlements mensuels de 1.000 euros à compter de 2024. La S.A Crédit Lyonnais (LCL) s'oppose à cette demande compte tenu du montant de la dette.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

I-SUR LA JONCTION DES PROCEDURES

Aux termes de l'article 367 du code de procédure civile, le juge peut, à la demande des parties ou d'office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble.

En l'espèce, la présente affaire a été enrôlée sous les RG n°23/02037 et RG n°23/01906.

S'agissant de la même instance, il convient de joindre les deux dossiers sous le numéro de RG unique 23/01906.

II- SUR LA DEMANDE PRINCIPALE EN PAIEMENT

Sur la recevabilité

Conformément aux dispositions de l'article 125 du code de procédure civile, la forclusion de l'action en paiement est une fin de non-recevoir qui doit être relevée d'office par le juge.

Aux termes des dispositions de l'article R. 312-35 du code de la consommation, les actions en paiement engagées à la suite de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance, à peine de forclusion.

En l'espèce, il ressort des documents contractuels versés aux débats qu'après une période de différé d'amortissement de 48 mois débutant en mai 2020, Monsieur [Z] [G] était tenu dès février 2022 d'acquitter des mensualités de 880,81 euros.
A l'analyse de l'historique de compte produit, le premier incident de paiement non régularisé imputable à l'emprunteur correspond à l'échéance d'avril 2022.
L'action ayant été engagée le 18 avril 2023, soit avant l'expiration du délai de deux années à compter du premier incident de paiement non régularisé, elle n'est pas forclose.

Sur la déchéance du terme

Il résulte des articles 1103 et 1224 du code civil et L. 312-39 du code de la consommation que lorsqu'une mise demeure, adressée par la banque à l'emprunteur et précisant qu'en l'absence de reprise du paiement des échéances dans un certain délai la déchéance du terme serait prononcée, est demeurée sans effet, la déchéance du terme est acquise à l'expiration de ce délai..

En l'espèce, la demande de condamnation formée, à titre principal, par la S.A Crédit Lyonnais (LCL) est fondée sur la déchéance du terme du contrat de prêt.

Or, la demanderesse verse aux débats un courrier de mise en demeure daté du 6 mai 2022, par lequel elle sollicite le paiement de la somme de 758,20 euros sous huit jours, sans toutefois transmettre l'accusé réception de ce courrier faisant preuve de sa distribution. Dès lors, il ne saurait être valablement soutenu que cette mise en demeure a été portée à la connaissance de l'emprunteur, offrant ainsi la possibilité à ce dernier de régulariser sa situation d'impayé.

Il en résulte que la déchéance du terme n'a pu régulièrement intervenir.

Cette prétention sera donc rejetée.

Par suite, il y a lieu de statuer sur la prétention formée à titre subsidiaire et ses suites.

Sur la résiliation judiciaire du contrat de prêt

Aux termes de l'article 1224 du code civil, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.

Il est constant que la résolution judiciaire des contrats à exécution successive est une résiliation n'opérant que pour l'avenir.

En l'espèce, il résulte de l'historique de compte versé aux débats que plus aucune échéance du crédit n'a été réglée à compter du mois de mai 2022.

Cette inexécution contractuelle est d'une gravité suffisante pour que soit prononcée, à la date du présent jugement, la résolution du contrat de crédit liant les parties.

En conséquence, il y a lieu de prononcer la résiliation du contrat de prêt consenti à Monsieur [Z] [G].

Sur le droit du prêteur aux intérêts

La S.A Crédit Lyonnais (LCL) demande à bénéficier des intérêts au taux contractuel sur la période contractuelle.

Il lui appartient donc de démontrer, conformément aux dispositions de l'article 1353 du code civil, que la formation du contrat du 31 mars 2016 et son exécution sont conformes aux dispositions d'ordre public du code de la consommation.

Sur la consultation du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP)

En application de l'article L.312-16 et de l'article L.312-57 du code de la consommation, avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur doit vérifier la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations. Celles-ci sont fournies par l'emprunteur lui-même et par les éléments tirés du fichier des incidents de paiement (FICP), lequel doit être consulté par l'organisme de crédit, selon les modalités prescrites par l'arrêté du 26 octobre 2010. Cet arrêté précise en son article 2 que le FICP doit obligatoirement être consulté par l'organisme de crédit avant toute décision effective d'octroyer un crédit à la consommation.

L'article 13 de l'arrêté du 26 octobre 2010 oblige les prêteurs à conserver des preuves de la consultation du fichier, de son motif et de son résultat sur un support durable, en vue de pouvoir justifier de cette consultation.

L'article L.341-2 du code de la consommation prévoit que le prêteur qui n'a pas respecté cette obligation de consultation est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

En l'espèce, force est de constater que la S.A Crédit Lyonnais (LCL) ne produit pas la preuve de la consultation de ce fichier lors de l'octroi du prêt.

En conséquence, il y a lieu de prononcer la déchéance totale du droit du prêteur aux intérêts pour ce motif.

Sur les sommes dues

Conformément à l'article L.341-1 du code de la consommation, le débiteur n'est tenu qu'au remboursement du seul capital restant dû, après déduction des intérêts réglés à tort.

Cette limitation légale de la créance du prêteur exclut qu'il puisse prétendre au paiement de l'indemnité prévue par les articles L.312-39 et D.312-16 du code de la consommation.

La créance de S.A Crédit Lyonnais (LCL) s'établit donc comme suit :
- capital emprunté depuis l'origine : 40.000 €
- sous déduction des versements antérieurs à la déchéance du terme, suivant l'historique de compte (7.961,12 €) et postérieurs à la déchéance du terme suivant décompte au 24/10/2022 (0,00€)
Soit un montant total de créance de 32.038,88 euros, sous réserve des versements postérieurs et/ou non pris en compte dans le décompte.

Il y a donc lieu de condamner Monsieur [Z] [G] au paiement de cette somme, laquelle produira intérêt à taux légal non majoré à compter du prononcé de la présente décision afin d'assurer le caractère effectif et dissuasif de la déchéance du droit aux intérêts.

En conséquence, Monsieur [Z] [G] sera condamné à payer à la S.A Crédit Lyonnais (LCL) la somme de 32.038,88 euros pour solde du prêt, outre les intérêts au taux légal non majoré à compter de la présente décision.

III-SUR LA DEMANDE DE DELAIS DE PAIEMENT

En application de l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier.

Aux termes de l'article 832 du code de procédure civile, sans préjudice des dispositions de l'article 68, la demande incidente tendant à l'octroi d'un délai de paiement en application de l'article 1343-5 du code civil peut être formée par courrier remis ou adressé au greffe. Les pièces que la partie souhaite invoquer à l'appui de sa demande sont jointes à son courrier. La demande est communiquée aux autres parties, à l'audience, par le juge, sauf la faculté pour ce dernier de la leur faire notifier par le greffier, accompagnée des pièces jointes, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. L'auteur de cette demande incidente peut ne pas se présenter à l'audience, conformément au second alinéa de l'article 446-1. Dans ce cas, le juge ne fait droit aux demandes présentées contre cette partie que s'il les estime régulières, recevables et bien fondées.

Il résulte de l'article 446-1 du même code, les parties présentent oralement à l'audience leurs prétentions et les moyens à leur soutien. Elles peuvent également se référer aux prétentions et aux moyens qu'elles auraient formulés par écrit. Les observations des parties sont notées au dossier ou consignées dans un procès-verbal. Lorsqu'une disposition particulière le prévoit, les parties peuvent être autorisées à formuler leurs prétentions et leurs moyens par écrit sans se présenter à l'audience. Le jugement rendu dans ces conditions est contradictoire. Néanmoins, le juge a toujours la faculté d'ordonner que les parties se présentent devant lui.

En l'espèce, Mme [P] [L], chargée par son fils de le représenter dans le cadre de la présente procédure, demande dans un courrier du 28 avril 2023 adressé au créancier et transmis le jour même au greffe, à pouvoir régler la dette de manière échelonnée, indiquant être en capacité de verser la somme mensuelle de 800 euros à compter du 31 mai 2023, puis la somme mensuelle de 1.000 euros à compter du 20 janvier 2024. Elle explique que son fils a été embauché en juillet 2022 et qu'il pourrait reprendre les règlements à compter de 2024.

Les revenus de M. [G], ou de Mme [L] qui se propose de régler en lieu et place de son fils, ne sont pas précisés.

Force est de constater que pour l'heure, aucun règlement n'a été effectué au bénéfice du créancier depuis 2022.

En outre, les propositions de règlement ainsi formulées, dont il n'est pas possible d'évaluer la crédibilité sans pièces justificatives produites, ne permettent pas l'apurement de la dette dans le délai légal de deux ans.

En conséquence, la demande de délais de paiement sera rejetée.

III - SUR LES MESURES ACCESSOIRES

En application de l'article 696 du code de procédure civile, M. [G], partie perdante, supportera la charge des dépens.

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la S.A Crédit Lyonnais (LCL) le montant de ses frais irrépétibles, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément aux articles 514 et 515 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire, rendu en premier ressort,

Ordonne la jonction des procédures n° 23/01906 et n° 23/02037 sous le numéro unique de RG n° 23/01906 ;

Déclare la S.A Crédit Lyonnais (LCL) recevable en ses demandes au titre du crédit souscrit le 31 mars 2016 par Monsieur [Z] [G] ;

Constate que les conditions de prononcé régulier de la déchéance du terme de ce prêt ne sont pas réunies ;

Prononce la résiliation judiciaire dudit contrat de prêt à la date du présent jugement ;

Prononce la déchéance totale du droit aux intérêts contractuels ;

Écarte l'application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil et L.313-3 du code monétaire et financier ;

Condamne Monsieur [Z] [G] à payer à la S.A Crédit Lyonnais (LCL) la somme de 32.038,88 pour solde dudit prêt, avec les intérêts au taux légal non majoré à compter du prononcé de la présente décision ;

Déboute Monsieur [Z] [G] de sa demande de délais de paiement ;

Déboute la S.A Crédit Lyonnais (LCL) de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de toute demande plus ample ou contraire ;

Condamne Monsieur [Z] [G] aux dépens ;

Dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de la présente décision.

LE GREFFIERLE JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Meaux
Formation : Ctx gen jcp
Numéro d'arrêt : 23/01906
Date de la décision : 12/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-12;23.01906 ?
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