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11/07/2024 | FRANCE | N°21/05256

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 1ère chambre cab2, 11 juillet 2024, 21/05256


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE


JUGEMENT N°24/ DU 11 Juillet 2024


Enrôlement : N° RG 21/05256 - N° Portalis DBW3-W-B7F-Y22C

AFFAIRE : Mme [Y] [W]( Maître Bruno ZANDOTTI de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES)
C/ M. [M] [B] (Me Amélia CONTISSA)


DÉBATS : A l'audience Publique du 23 Mai 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président
Assesseur : JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente (juge rapporteur)
Assesseur : BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente

Greffier

lors des débats : BESANÇON Bénédicte

Vu le rapport fait à l’audience

A l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le p...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N°24/ DU 11 Juillet 2024

Enrôlement : N° RG 21/05256 - N° Portalis DBW3-W-B7F-Y22C

AFFAIRE : Mme [Y] [W]( Maître Bruno ZANDOTTI de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES)
C/ M. [M] [B] (Me Amélia CONTISSA)

DÉBATS : A l'audience Publique du 23 Mai 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président
Assesseur : JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente (juge rapporteur)
Assesseur : BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente

Greffier lors des débats : BESANÇON Bénédicte

Vu le rapport fait à l’audience

A l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 11 Juillet 2024

Jugement signé par SPATERI Thomas, Vice-Président et par BERARD Béatrice, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DU JUGEMENT

réputée contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDERESSE

Madame [Y] [W]
née le [Date naissance 8] 1965 à [Localité 20]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 13]

représentée par Maître Bruno ZANDOTTI de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE,

C O N T R E

DEFENDEURS

Monsieur le docteur [H] [N]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 6]

représenté par Me Amélia CONTISSA substitué à l’audience par Me Basile PERRON, avocats postulant au barreau de MARSEILLE, et par Me Philippe CHOULET de L’AARPI Inter Barreaux CABINET CHOULET AVOCATS, avocat plaidant

Monsieur le docteur [T] [O]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 5]

représenté par Maître Joanne REINA de la SELARL PLANTAVIN REINA ET ASSOCIES, avocat postulant au barreau de MARSEILLE, et par Maître Amélie CHIFFERT de L’AARPI ACLH AVOCATS, avocat plaidant au barreau de PARIS

La Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRPCEN), prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège, dont le siège social est sis [Adresse 9]

défaillant

Monsieur le docteur [M] [B]
né le [Date naissance 2] 1959 à [Localité 20]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 10]

représenté par Maître Philippe CARLINI de la SELARL CARLINI & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE,

Monsieur le docteur [L] [X]
de nationalité Française, domicilié [15], [Adresse 4]

représenté par Me Hervé ZUELGARAY, avocat au barreau de NICE, vestiaire : 281

Madame le Docteur [BX] [A]-[U]
née le [Date naissance 7] 1972 à [Localité 20]
de nationalité Française, domicilié [16], [Adresse 14]

représentée par Maître Diane DELCOURT de la SCP CABINET ROSENFELD & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE,

EXPOSE DU LITIGE

Suite à une chute, [Y] [W], née le [Date naissance 8] 1965, s’est vu prescrire un IRM du genou gauche, réalisé par le Docteur [IW] [F] le 15 septembre 2014.

En 2015, se plaignant de douleurs à l’aine et au bassin, elle a consulté son médecin traitant le Docteur [B] qui, le 12 février 2015, a prescri une radiographie du rachis lombaire et du bassin, qui objectivait des lésions de lombarthrose débutante et une arthrose postérieure prédominante à droite en L5-S1.

Le 15 mars 2015, elle a été victime d’une nouvelle chute à son domicile. Une IRM du rachis lombaire était prescrite par son médecin traitant, le Docteur [B].

Le 20 mars 2015, le Docteur [N], radiologue, interprétait l’imagerie comme suit:
« Les diamètres du canal rachidien sont normaux.
Protrusion peu significative médiane L4L5, L5S1.
Aucune hernie discale.
Pas de conflit disco radiculaire.
Intégrité des disques sus jacents.
Discrète hypertrophie des massifs articulaires postérieurs L4L5, L5S1.
Cône médullaire normal. »

Début avril 2015, Madame [W] présentait une recrudescence de ses douleurs pour lesquelles elle reconsultait son médecin traitant qui l’adressait à un rhumatologue.
Elle a ainsi consulté le Docteur [O], rhumatologue, le 23 avril 2015.
Ce dernier lui prescrivait des séances de kinésithérapie et du SOLUPRED 20.

Le 18 mai 2015, une radiographie du rachis lombaire, du bassin, de la cage thoracique et du gril costal droit était réalisée par le Docteur [A], à la demande du Docteur [J], laquelle révélait une absence de lésion post-traumatique semi-récente, un pincement modéré des espaces intervertébraux et une surcharge arthrosique des massifs articulaires postérieures d’origine dégénérative en L4L5 et L5S1.
Au mois de juillet 2015, Madame [W] consultait le Docteur [X], médecin du sport à l’hôpital [21], qui prescrivait un scanner du bassin révélant des lésions lytiques.
Le 10 août 2015, devant des douleurs lombaires basses non soulagées par la morphine, Madame [W] se rendait aux urgences de l’hôpital [21] où elle était reçue en consultation par le Docteur [X].
Ce dernier analysait les imageries précédemment réalisées par Madame [W] qu’il jugeait plutôt rassurantes, mais prescrivait, au vu du scanner, la réalisation d’une IRM, pour suspicion d’une ostéonécrose.
Une IRM était réalisée le 21 août 2015 dont les résultats montraient un aspect très hétérogène de la moelle osseuse avec plusieurs lésions des ailes iliaques.
Un bilan d’extension était alors prescrit.
Un scanner cérébral et thoraco-abdomino-pelvien était réalisé le 26 août 2015 et révélait la « présence de multiples lésions lytiques intéressant l’ensemble du squelette axial, avec géodes à l’emporte-pièce de la voûte crânienne, tassements vertébraux pluri-étagés et lésions ostéolytiques soufflantes des ailes iliaques (…) compatible avec une atteinte myélomateuse diffuse ».
La patiente était hospitalisée dans le service du Professeur [I] en rhumatologie.
Elle était ensuite transférée dans le service d’hématologie et thérapie cellulaire de l’hôpital de [19] pour prise en charge d’une suspicion de myélome multiple.
Il était objectivé un myélome multiple de stade III Salmon et Durie associé à une insuffisance rénale aigüe régressive.

A compter du 24 septembre 2015, Madame [W] bénéficiait de quatre cures de VRD (VERCADE-REVLIMID-DEXAMETHASONE).
Le 28 janvier 2016, la patiente bénéficiait d’une autogreffe de cellules souches ainsi que de deux cures de consolidation par VRD début avril 2016.
L’IRM du rachis réalisée le 4 juillet 2016 mettait en évidence la présence de multiples fractures et tassements vertébraux avec persistance d’un œdème intravertébral en T8, T11, L1, L3, L4, L5.
Le 19 juillet 2016, Madame [W] bénéficiait d’une première vertébroplastie sur L3, L4 et L5, puis d’une seconde vertébroplastie sur L1 et T11 le 4 octobre 2016.
Le 27 janvier 2017, il était réalisé une IRM des sacro-iliaques qui ne révélait aucune anomalie significative des articulations sacro iliaques, mais objectivait une «hétérogénéité de la moëlle osseuse en rapport avec une atteinte myélomateuse diffuse» ainsi qu’un « œdème osseux de l’aileron sacré gauche en rapport avec une lésion fracturaire ».

Madame [W] a fait assigner le Docteur [O], rhumatologue, le Docteur [N], radiologue, le Docteur [F], radiologue, ainsi que la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRCPEN) devant le juge des référés aux fins d’organisation d’une expertise judiciaire au contradictoire de l’ensemble de ces parties.
Par ordonnance en date du 11 juillet 2018, une expertise a été ordonnée, confiée au Docteur [E], spécialisé en cancérologie, et au Docteur [S], spécialisé en radiologie.
Un pré-rapport a été déposé le 20 décembre 2018, retenant des manquements à l’encontre du Docteur [O] et du Docteur [N], comme étant à l’origine d’un retard de diagnostic du myélome de six mois.

Par acte en date du 5 mars 2019, Madame [W] a fait assigner les Docteurs [B] et [A], afin que les opérations d’expertise en cours leur soient déclarées communes.
Par courrier en date du 5 mars 2019 adressé au magistrat chargé du contrôle des expertises, le Docteur [E] indiquait que cette mise en cause n’était pas justifiée sur le plan hémato-cancérologique et ne ferait que retarder inutilement le dépôt du rapport d’expertise.
Par ordonnance en date du 20 mai 2019, le Président du Tribunal judiciaire de Marseille a rejeté la demande visant à voir déclarer communes et opposables aux Docteurs [B] et [A] les opérations d’expertise en cours.

Les experts ont déposé leur rapport définitif le 31 mai 2019, concluant à une erreur de diagnostic, à l’origine d’un retard de prise en charge du cancer de Madame [W], imputable aux Docteurs [N] et [O] à hauteur de 50% chacun.
Par la suite, Madame [W] a justifié de la consolidation de son état de santé, en date du 5 juin 2019, de sorte que le juge chargé du contrôle des expertises a sollicité des Docteurs [E] et [S] qu’ils reprennent les opérations expertales afin de terminer leur mission.
Les experts ont établi un complément de rapport le 15 décembre 2019
Par courrier en date du 14 janvier 2020, le magistrat chargé du contrôle des expertises a enjoint auxexperts de laisser aux parties un délai pour adresser leurs dires éventuels.
En avril 2020, Les experts adressaient une réponse aux dires des parties

Par acte en date du 11 mai 2021, Madame [W] a fait assigner les Docteurs [N] et [O] devant le Tribunal judiciaire de Marseille afin d’obtenir l’indemnisation de ses préjudices.
Par acte en date du 14 novembre 2022, Madame [W] a fait assigner la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRPCEN) devant le Tribunal judiciaire de Marseille.
Les deux affaires ont fait l’objet d’une jonction sous le numéro RG 21-5256.

Par actes en date des 15 juin et 1er juillet 2022, le Docteur [N] a fait assigner en intervention forcée les Docteurs [B], [A]-[U] et [X] afin, à titre principal, que soit ordonnée une contre-expertise à leur contradictoire, et à titre subsidiaire, que leur responsabilité soit retenue et qu’ils soient condamnés à le relever et garantir intégralement des condamnations qui pourraient survenir à son encontre.

Les affaires ont été jointes sous le numéro RG 21-5256.

Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 19 octobre 2023 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé des moyens, [Y] [W] demande au Tribunal de :
- juger que les Docteurs [H] [N], [T] [O], [M] [B] et [BX] [A]-[U] ont commis des manquements fautifs ayant participé au retard de diagnostic en lien direct et certain avec le préjudice qu’elle a subi,
- En conséquence, les condamner de façon solidaire à indemniser son préjudice,
- lui octroyer les sommes suivantes :
DFTP de classe 1 pendant trois mois = 900 € x 3 / 10 = 270 €.
DFTP de classe 2 pendant deux mois = 900 € x 2 / 4 = 450 €.
DFTP de classe 3 du 2/09/15 au 4/10/2016 soit 13 mois= 900x13x3/4= 8775€
Souffrances endurées : 4,5/7 : 20.000€
PET : 10.000€
FD : 22.474,80 €.
PGPA : 82.384€ ou subsidiairement la somme de 57.379 €
FLA : 17.956,78€ + 13.930,40€ = 31.887,18€
ATP : 248.255,92 €.
DFP : 27.000€
PA : 12.000€
PEP : 9.000€
PS : 15.000€
- condamner solidairement les Docteurs [N], [O], [B] et [A]-[U] au règlement d’une somme de 5.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Bruno ZANDOTTI qui y a pourvu,
- ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir.

Elle soutient que l’ensemble des praticiens ont commis des fautes et n’ont pas assurés une prise en charge diligente et conforme aux données de la science, y compris les Docteurs [B] et [A]-[U] et les experts ont mis hors de cause ces trois praticiens sans aucune démonstration médico-légale; qu’ainsi, le Docteur [N] aurait dû effectuer des séquences T1 et ne pas se contenter des seules séquences T2 qui sont réalisées par commodité compte tenu de leur caractère rapide, sans que la présence d’antalgique n’ait aucune influence sur la nécessité de réaliser cet examen; qu’en sa qualité de professionnel de la radiologie, il ne pouvait pas ignorer que les douleurs diffuses et majeures avec utilisation d’antidouleurs de palier 3 pouvaient induire des pathologies cancéreuses de type myélome qu’il ne pouvait retrouver qu’en réalisant des séquences T1; qu’en outre,il aurait dû solliciter la réalisation d’investigations complémentaires ce qu’il n’a pas fait; que le Docteur [O] ne verse pas aux débats le dossier de consultation de Madame [W], ce qui constitue un manquement évident aux obligations qui sont les siennes ; qu’il est également fautif pour n’avoir procédé à aucun examen médical de Madame [W], ne l’ayant reçue que quelques minutes, la questionnant à minima sur les raisons de sa présence et ne la laissant même pas expliquer l’évolution de la situation; qu’il a ainsi négligé les éléments cliniques présentés par la patiente, à savoir notamment une persistance de douleurs rachidiennes résistantes aux antalgiques de palier 3 qui aurait dû conduire à demander, à minima, des tests biologiques qui auraient permis d’établir le diagnostic de myélome; qu’il n’a pas prescrit de nouvelle IRM alors que celle réalisée par le Docteur [N] ne répondait pas aux attentes ( pas de séquence T1); qu’enfin, il a prescrit des corticoïdes (SOLUPRED) qui a contribué au retard de diagnostic en masquant la symptomatologie; que l’existence d’un diagnostic difficile à établir n’exonère pas le praticien de son obligation de mettre en œuvre tous les moyens dont il dispose pour parvenir au diagnostic correct; que s’agissant du Docteur [B], il était son médecin généraliste et est intervenu au moins à huit reprises en 2015 avant que le diagnostic de myélome ne soit posé; que le médecin traitant joue un rôle central dans le suivi du patient et que le Docteur [B] peut se voir reprocher, a minima, une errance de diagnostic; qu’il n’a prescrit aucun bilan biologique standard alors qu’il voyait cette patiente tous les mois et la connaissait depuis de nombreuses années, et qu’elle présentait des troubles et les douleurs invalidantes résistantes au traitement ; que ce bilan biologique aurait pourtant pu permettre de détecter une anémie, une VS augmentée avec une CRP anormale; que le simple fait le myélome ne soit pas une pathologie régulière et fréquente peut l’exonérer de sa responsabilité ; que le Docteur [A]-[U] l’a reçue en raison de douleurs invalidantes persistantes sans l’interroger davantage sur ces douleurs inexpliquées; que par ailleurs, les radiographies réalisées au mois de mai 2015, interprétées par le médecin radiologue comme « normales », révèlent en réalité, à leur lecture, des lésions lytiques anormales visibles révélatrices d’un myélome; que si la pathologie oncologique affectant Madame [W] avait été diagnostiquée au moment des examens pratiqués par les deux médecins mis en cause, alors le traitement aurait été instauré ce qui aurait évité les migrations osseuses, et ce de façon certaine; qu’elle sollicite une condamnation solidaire entre les praticiens dont les manquements ont entraîné de façon non individualisable les préjudices dont elle sollicite réparation.
Elle ajoute que le rapport établi par les experts est clair, précis et exhaustif ne laissant subsister aucun doute ni aucune interrogation, qu’elle soit relative à la responsabilité ou à d’éventuels manquements qui auraient été commis par les Docteurs [N] et [O]; qu’en tout état de cause, la mise en cause des Docteurs [B], [A] [U] et [X], à laquelle elle ne s’était pas opposée à l’issue du premier accedit, a échoué en raison d’un avis contraire de l’expert et elle n’a pas à en supporter les conséquences; que les conclusions expertales des Docteurs [E] et [S] sont largement corroborées par les pièces du dossier médical ainsi que par une bibliographie étayée qui constituent des éléments de preuve suffisants pour permettre à la juridiction de retenir le rapport d’expertise à l’encontre de l’ensemble des parties mises en cause.

En défense, dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 11 septembre 2023 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé des moyens, le Docteur [H] [N] demande au Tribunal de :
À titre principal,
- rejeter comme étant injustifiées et infondées, les demandes adverses, en l’absence de preuve d’une quelconque erreur fautive caractérisée de diagnostic lui étant imputable, de nature à expliquer, ne serait-ce que partiellement, le préjudice aujourd'hui subi par Madame [W],
À titre subsidiaire,
- rejeter l’ensemble des demandes adverses en l’absence d’imputabilité médicale, et donc de causalité juridique, entre les soins qu’il a donnés et le préjudice allégué, en application de la causalité adéquate, les manquements commis postérieurement par le Docteur [O], voire ceux commis par les Docteurs [B], [A] et [X], constituant la cause sine qua non du retard à la prise en charge,
- limiter la quote part de sa responsabilité à 10 % maximum du préjudice imputable et, dans tous les cas, condamner le Docteur [O], voire les Docteurs [B], [X] et [A]-[U], à le relever et garantir de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charg,
- En présence d’un rapport d’expertise judiciaire inexploitable, ne permettant pas au tribunal d’être suffisamment éclairé sur les circonstances médico-légales ayant présidé à la prise en charge de Madame [W], ordonner une contre-expertise, confiée à un collège d’experts composé d’un spécialiste en cancérologie est d’un spécialiste en radiologie, selon la mission qu’il détaille,
- dire que l’expert qui sera désigné pourra, en cas de nécessité, s’adjoindre le concours de tout spécialiste de son choix, dans un domaine distinct du sien, après en avoir avisé les parties et leurs conseils et recueilli leur accord et devra effectuer sa mission conformément aux dispositions des articles 233 à 248 et 273 et suivants du Code de procédure civile et devra époser un pré-rapport afin de permettre aux parties de faire valoir leurs observations préalablement au dépôt du rapport définitif,
À titre très subsidiaire,
- rejeter l’ensemble des demandes adverses, après application de la théorie de la perte de chance, la preuve n’est tant pas établie que la patiente a perdu une chance de pouvoir bénéficier d’un diagnostic de myélome plus précoce ou, à tout le moins, limiter le taux de chance perdu à une fraction infime du préjudice total,
- rejeter ou réduire à de plus justes proportions les demandes indemnitaires adverses,
Dans tous les cas,
- condamner Madame [W], ou tout succombant, à lui verser la somme de 3.000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens de l’instance distraits au profit de Maître Michel BOULOUYS, Avocat.

Il fait valoir qu’il n’a pas commis de faute dans la prise en charge de la patiente lors de la réalisation de l’IRM du rachis lombaire le 20 mars 2015 pour « recherche de conflit disco radiculaire », aucune recommandation impérative n’imposant la réalisation d'une IRM avec séquence T1, chez cette patiente dont la preuve n'est pas apportée qu'elle était sous antalgiques de palier 3; qu’en outre, le diagnostic de myélome était ici extrêmement difficile à suspecter en première intention et d’ailleurs, aucun des médecins spécialistes intervenus après lui n’ont posé, ni même suspecté, le diagnostic de myélome, alors que la symptomatologie s'était nécessairement aggravée depuis son intervention; qu’il n’a ainsi commis aucune erreur fautive de diagnostic, compte tenu des spécificités du cancer de cette patiente, et du tableau clinique trompeur qui a pu masquer la pathologie sous-jacente; qu’en tout état de cause, il y a lieu de recourir à la théorie de la causalité adéquate, et la cause la plus directe du dommage résulte bien davantage des fautes commises postérieurement à son intervention; qu’ainsi, le Docteur [O] se devait de redemander une IRM avec les 2 séquences Tl et T2 et de confronter les résultats aux examens biologiques qu’il devait prescrire, et éviter de prescrire du SOLUPRED qui masque la symptomatologie et contribue à un retard de diagnostic de myélome ; que les experts ont mis hors de cause le médecin généraliste [B], le radiologue [A] ainsi que le médecin du sport [X], davantage par « paresse » que par une véritable démonstration médico-légale, or le médecin généraliste est intervenu à huit reprises après le Docteur [N], avant que le diagnostic de myélome ne soit posé; que le grief fait au Docteur [N] par les experts de ne pas avoir davantage interrogé la patiente sur ses « douleurs inexpliquées » peut tout aussi bien être dirigé à l'encontre du Docteur [A], médecin radiologue intervenu dans le parcours de soins le 18 mai 2015; qu’il verse aux débats le rapport critique établi par le Docteur [C] [G], médecin spécialisé en radiodiagnostic et imagerie médicale, apportant la preuve que les clichés radiographiques réalisés par le Docteur [A] le 18 mai 2015, pourtant analysés comme étant « normaux» par le médecin radiologue, objectivaient en réalité des signes pathologiques typiques tout à fait évocateurs d'un myélome; qu’enfin, le Docteur [X] a examiné l'ensemble des clichés radiographiques au mois de juillet 2015 et a considéré que les résultats étaient « rassurants », or les douleurs demeuraient toujours « inexpliquées » et la seule thérapeutique proposée par le Docteur [X] a été d’hospitaliser la patiente dans un centre de rééducation; que les experts n’ont pas retenu de manquement au motif que le Docteur [X] était médecin du sport, or lui-même ne justifie pas davantage de compétences en matière de cancérologie ou d’hématologie que le Docteur [X]; qu’ainsi, les causes sine qua non du retard à la prise en charge subi par la patiente résultent exclusivement des fautes commises postérieurement à la prise en charge par le Docteur [N], par le rhumatologue [O], par le médecin généraliste traitant [B], par le radiologue [A] et, enfin, par le médecin du sport [X], et en tout état de cause, la quote-part de responsabilité du Docteur [N] ne pourra être de 50 % comme l'indiquent les experts mais au maximum de 10%, avant application de la théorie de la perte de chance; que plus subsidiairement, le Docteur [O], voire les Docteurs [B], [X] et [A]-[U], devront être condamnés à le relever et garantir intégralement des condamnations qui pourraient être mises à sa charge.
Il ajoute que les experts ne précisent pas si des lésions annonciatrices d’un myélome auraient été identifiées dans l’hypothèse où le Docteur [N] aurait réalisé une IRM avec une séquence de type T1; que l’absence de discussion médico-légale au contradictoire de l'ensemble des acteurs de santé intervenus dans la prise en charge de la patiente justifie la réalisation d’une contre-expertise ordonnée au contradictoire de tous; qu’en tout état de cause, il doit être fait application de la théorie de la perte de chance, puisque rien ne permet d'affirmer qu'il est certain qu'une prise en charge plus rapide aurait évité à la patiente d'endurer les complications survenues; qu’en outre, à supposer que le Docteur [N] ait bien réalisé une IRM du rachis lombaire avec une séquence T1, il n’est pas établi que cette imagerie aurait permis de déceler, le 20 mars 2015, des lésions susceptibles de faire évoquer le diagnostic de myélome, et les experts n’ont pas répondu au dire formulé en ce sens; qu’ainsi, la perte de chance de bénéficier d'une prise en charge plus rapide est inexistante ou en tout état de cause ne peut correspondre qu’à une fraction infime du préjudice total.
Il sollicite enfin le rejet ou la réduction des demandes indemnitaires formulées.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 11 décembre 2023 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé des moyens, le Docteur [T] [O] demande au Tribunal de :
A titre principal,
- écarter sa responsabilité,
- débouter Madame [W] de l’intégralité des demandes formulées à son encontre, en l’absence de preuve d’une erreur de diagnostic fautive en lien avec les complications osseuses myélomateuses présentées par Madame [W],
A titre subsidiaire, dans l’hypothèse où le Tribunal estimerait ne pouvoir écarter sa responsabilité,
- condamner les Docteurs [N], [B], [A] et [X] à le relever indemne de toute condamnation susceptible d’être prononcée à son encontre,
Sur la mesure d’expertise sollicitée par le Docteur [N],
- lui donner acte ce qu’il n’entend pas s’opposer à la mesure d’expertise sollicitée par le Docteur [N] à titre subsidiaire, au contradictoire des Docteurs [B], [X] et [A], appelés en intervention forcée,
En conséquence,
- ordonner, avant-dire-droit, une nouvelle mesure d’expertise au contradictoire des Docteurs [B], [X] et [A], confiée à un collège d’experts composé d’un rhumatologue, d’un onco-hématologue et d’un radiologue, selon la mission qu’il détaille,
- préalablement au dépôt du rapport d’expertise, dire que l’expert devra adresser un pré-rapport aux parties, lesquelles, dans les six semaines de sa réception, lui feront connaître leurs observations auxquelles il devra répondre dans son rapport,
- dire que les frais de consignation à expertise seront mis à la charge du Docteur [N],
A titre infiniment subsidiaire, dans l’hypothèse où le tribunal n’estimerait pas utile d’ordonner une nouvelle mesure d’expertise et retiendrait la responsabilité du Docteur [O],
- débouter Madame [W] ou tout autre partie de l’intégralité de ses demandes dirigées à l’encontre du Docteur [O], faute de démonstration d’une perte de chance réelle et sérieuse d’éviter les complications osseuses myélomateuses,
A défaut, en cas de reconnaissance de l’existence d’une perte de chance imputable au manquement reproché au docteur [O],
- limiter la perte de chance imputable au retard de diagnostic à hauteur de 10% maximum et en répartir la charge dans une proportion de 30% maximum pour le Docteur [O], soit 3% maximum imputable au Docteur [O],
- répartir le surplus entre les Docteurs [N], [B], [A]-[U] et [X],
En tout état de cause,
- condamner les Docteurs [N], [B], [A]-[U] et [X] à le relever et garantir du surplus des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,
- réduire à de plus justes proportions les demandes indemnitaires de Madame [W], avant application du taux de perte de chance retenu, comme suit :
DFTP : 5.475 €
PET : 8.000€
Souffrances endurées : 15.000€
ATP temporaire : 6.417,60€
PGPA ; rejet
DFP : A titre principal, 16.000€, subsidiairement 27 000€
Frais de logement adaptés : rejet en l’absence de justificatifs suffisants
ATP définitive : base de 3h/semaine et Subsidiairement 172.699,77€
PED : 5.000€
Préjudice d’agrément : 4.000€
Préjudice sexuel : 5.000€
- ramener les demandes de condamnations formulées à l’encontre du Docteur [O] au titre des frais irrépétibles et des dépens à de plus justes proportions,
- débouter toute partie de toute demande de condamnation en ce qu’elle serait dirigée à son encontre.

Il soutient n’avoir commis aucun manquement du fait de l’absence de production du dossier médical de Madame [W] lors des opérations d’expertise, puisque ce dossier a bien été conservé par la SELARL à laquelle il appartenait mais qu’il a été mis dans l’impossibilité matérielle d’y accéder du fait d’un conflit avec son associé ; qu’il a néanmoins pu obtenir une capture d’écran du dossier de consultation du 23 avril 2015; que lors de cette unique consultation, Madame [W] ne présentait pas de signes évocateurs d’un myélome et les experts n’ont pas pris en compte la difficulté diagnostique du myélome et les signes atypiques présentés par Madame [W], qu’il a reçue une seule fois en consultation pour des douleurs lombaires, dans un contexte traumatique et d’arthrose; qu’aucun des autres médecins n’a diagnostiqué, ni même songé à une telle pathologie; que le bilan radiologique dont il disposait lors de son unique consultation montrait une contusion rotulienne associée à de l’arthrose, dans un contexte de chute et il a donc logiquement traité ces deux pathologies, en proposant à la patiente de revenir en l’absence d’amélioration à quinze jours ce que Madame [W] n’a pas fait, et il n’a donc pas pu constater un échec thérapeutique et compléter le bilan; qu’au vu des recommandations de la HAS de 2017, il n’y avait pas lieu de suspecter un myélome et de prescrire une électrophorèse des protéines sériques (EPS); que si Madame [W] l’avait reconsulté, il aurait pu compléter son bilan par de l’imagerie et un bilan biologique spécifique, au vu de la persistance inexpliquée de douleurs; qu’il disposait d’une IRM et de radiographies du rachis normales, sans signes de lésions suspectes, lors de sa consultation du 23 avril 2015 et qu’il n’est nullement fait obligation de réaliser une séquence IRM T1 pour des douleurs mécaniques lombaires; que contrairement à ce qu’affirment les experts, Madame [W] n’était pas sous antalgiques de palier 3 lors de la consultation du 23 avril 2013, mais sous antalgiques de palier 2, ce qui n’a rien de surprenant dans les pathologies rachidiennes; que le médecin traitant le docteur [B] n’a prescrit aucun bilan biologique standard d’août 2014 à août 2015, et il ne lui appartenait pas de se substituer au médecin traitant de la patiente, lequel était le seul à disposer de l’historique symptomatologique de la patiente, et dont le rôle est primordial pour dépister la maladie et pour initier la démarche diagnostique en lien avec les autres spécialistes; que la prescription d’un corticoïde fait partie de l'arsenal thérapeutique du myélome, et en tout état de cause, ce traitement n'a eu aucune conséquence dommageable, puisque aucun myélogramme n'a été prescrit jusqu'au diagnostic confirmé en septembre 2015; qu’en tout état de cause, l’imputabilité des complications osseuses myélomateuses au retard de diagnostic auquel il aurait prétendument participé n’est nullement démontrée, fusse au titre de la perte de chance; que l’existence d’un myélome lors de la consultation du Docteur [O] n’est pas établie, et il est probable que même si une séquence IRM T1 ou un bilan hémato biologique avait été réalisé, ces examens complémentaires n'auraient rien révélé d'anormal et en tout état de cause, n’aurait pas nécessité de soins particuliers à cette date; qu’un diagnostic plus précoce du myélome n’aurait certainement pas permis d’éviter les complications osseuses myélomateuses, exclusivement liée à l’agressivité de la pathologie tumorale dont était atteinte Madame [W]; que le lien causal entre le manquement reproché et les séquelles n’est donc pas établi, d’autant plus que les autres praticiens ont jouté un rôle causal déterminant dans le retard diagnostic du myélome; qu’en effet, le médecin traitant n’a pas prescrit un bilan biologique standard,et n’a pas fait une description détaillée de la symptomatologie présentée par la patiente, persistante et s’aggravant, aux divers praticiens consultés, ce qui a considérablement aggravé le retard de diagnostic du myélome; que le Docteur [N], en sa qualité de radiologue, était le plus à même de décider de la séquence IRM à réaliser au vu du motif du bilan iconographique sollicité, et c’est bien le manquement initial du Docteur [N] qui constitue le fait générateur au retard de diagnostic; que le Docteur [A], radiologue, a pratiqué une radiographie du rachis le 18 mai 2015, soit près d’un mois après la consultation du Docteur [O] et l’a interprétée comme normale, or elle aurait dû prescrire un bilan d’imagerie complémentaire, puisque selon les experts, il existait, de manière certaine, des signes radiologiques évocateurs d’un myélome; que le Docteur [X], médecin du sport, a vu Madame [W] en consultation en juillet 2015 en raison de persistance de douleurs inexpliquées, et prescrivait un scanner du bassin, lequel mettait en évidence « des lésions lytiques multiples » sans rattacher ces lésions ostéolytiques à un myélome, se méprenant ainsi sur l’interprétation du scanner et ne prescrivant pas davantage de bilans biologiques complémentaires face aux signes radiologiques évidents et certains de myélome; qu’il a ainsi contribué à un retard diagnostic; qu’ainsi, ce sont les fautes cumulées des Docteurs [N], [B], [A] et [X] qui ont conduit à un retard de diagnostic préjudiciable pour la patiente, et sa responsabilité devra être écartée, à défaut de démonstration d’une erreur de diagnostic caractérisée et d’un lien de causalité direct et certain entre sa prétendue faute et les complications osseuses présentées par la patiente; qu’il n’est pas davantage démontré l’existence d’une perte de chance sérieuse entre le manquement qui lui est reproché et les complications osseuses; qu’à titre subsidiaire, il y a lieu d’ordonner une contre-expertise, le rapport d’expertise judiciaire des Docteurs [E] et [S] soumis aux débats étant entaché de vices formels, et lacunaire sur le fond du débat et ne permettant pas d’éclairer suffisamment la juridiction; que si le tribunal estimait toutefois devoir retenir une part de responsabilité du Docteur [O], sans recourir à une mesure de contre-expertise au contradictoire des Docteurs [A], [X] et [B], il devrait nécessairement pondérer sa responsabilitéau titre de la perte de chance qui ne saurait excéder 10% et condamner les Docteurs [N], [A], [X] et [B] à le relever et garantir de toute condamnation complémentaire; qu’il y a lieu de réduire à de plus justes proportions les demandes indemnitaires formulées.

Dans ses dernières conclusions signiifiées par voie électronique le 23 octobre 2023 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé des moyens, le Docteur [M] [B] demande au Tribunal de :
A titre principal :
- prendre acte de ce qu'il ressort du rapport d’expertise du Docteur [E] et du Docteur [S] que sa responsabilité doit être écartée,
En conséquence,
- prendre acte qu’il ne pourra être condamné à relever et garantir le Docteur [N] en cas de condamnation,
A titre subsidiaire :
- prendre acte de ce qu’il formule les plus expresses protestations et réserves quant à une éventuelle responsabilité,
- prendre acte de ce qu’il ne s’oppose pas à la désignation d’un expert, qui pourra en cas de nécessité s’adjoindre le concours de tout spécialiste de son choix dans un domaine distinct du sien, aprés en avoir avisé les parties et leurs conseils et recueilli leur accord, et qui devra déposer un pré-rapport,
- réserver Ies dépens.

Il rappelle que les experts ont estimé que, médecin généraliste, il ne disposait pas des compétences spécifiques pour poser un diagnostic sur la symptomatologie présentée par Madame [W], et qu’il a adopté un comportement adapté en adressant sa patiente au Docteur [O] afin d’avoir un avis spécialisé; que dans l’hypothèse où le Tribunal ne s'estimerait pas suffisamment éclairé sur Ies différentes prises en charges de Madame [W], il conviendra de faire droit a la demande de contre-expertise sollicitée; qu’il formule les plus expresses protestations et réserves quant à une éventuelle responsabilité.

Dans ses dernières conclusions signifées par voie électronique le 12 décembre 2023 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé des moyens, le Docteur [BX] [A]-[U] demande au Tribunal de :
- rejeter 1a demande de contre-expertise formulée en ce qu’elle vise le Docteur [A]-[U],
- débouter Madame [W] de sa demande de condamnation dirigée à son encontre,
- débouter 1e Docteur [N] et le Docteur [O] de leur demande de condamnation dirigée à son encontre,
- condamner 1e Docteur [N] à lui verser la somme de 3.000 €, sur 1e fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
- condamner le Docteur [N] aux entiers dépens de l’instance, distraits an profit de Maître Diane DELCOURT, de la SCP CABINET ROSENFELD ET ASSOCIES, sur son affirmation de droit.

Elle indique que sa mise en cause a été écartée de manière étayée par le collège d’experts dès le stade de son pré-rapport, le 10 décembre 2018, puis de manière indirecte au stade du raport post-consolidation; qu’en effet, 1'examen pratiqué par le Docteur [A]-[U] n’était pas adapté à l’établissement du diagnostic de myélome, et elle était saisie dans le cadre d’un bilan de douleurs inexpliquées, et non pas la recherche spécifique de lésions myélomateuses; que l’argumentaire du Docteur [N] est exclusivement fondé sur le rapport critique établi par le Docteur [C] [G], son médecin-conseil, qui est contestable puisqu’il ne s’appuie sur aucune référence scientifique, et il ne s’agit que d’une analyse personnelle, qui a été soumis aux experts sous forme de dire, qui a été longuement critiqué; que les conclusions des experts sont claires : si a posteriori, l’examen des images interprétées par le Docteur [A]-[U] peut permettre de retrouver des lésions “compatibles”avec des localisations de myélome, ces images ne montraient, pas, à l’instant “T”, de signes “évidents” de cette pathologie; que le rapport privé établi par le Docteur [R] [Z], communiqué par le Docteur [O], ne critique nullement sa prise en charge; que le Docteur [N] sollicite une contre-expertise dans le seul but de pallier sa carence dans l’administration de la preuve d'une faute du Docteur [A]-[U]; qu’elle s’oppose à cette demande de contre-expertise ; qu’aucune faute n’étant démontrée à son encontre, les demande de condamnation ou de relever et garantir devront être rejetées.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 3 mai 2023 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé des moyens, le Docteur [L] [X] demande au Tribunal de :
A titre principal,
- rejeter la demande d’expertise formulée par le Docteur [N] en ce qu’elle le vise,
- débouter le Docteur [N] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre,
- condamner le Docteur [N] à lui verser la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
- condamner le Docteur [N] aux entiers dépens,
A titre subsidiaire, dans l’hypothèse où il était fait droit à la demande d’expertise formulée par le Docteur [N],
- prendre acte des protestations et réserves formulées par le Docteur [X],
- débouter le Docteur [N] du surplus de ses demandes, fins et conclusions en ce qu’elles sont dirigées à l’encontre du Docteur [X],
- réserver les dépens et l’article 700 du Code de procédure civile.

Il soutient que les éléments du dossier permettent d’écarter tout manquement de sa part dans la prise en charge de Madame [W]; qu’en effet, il a fait preuve de réactivité en prescrivant les examens diagnostiques adaptés qui ont permis d’aboutir rapidement au diagnostic de myélome; qu’il ne saurait sérieusement lui être reproché d’avoir retardé la pose du diagnostic et la prise en charge du myélome eu égard à la proximité entre sa consultation du 10 août 2015 et la mise en place de la chimiothérapie début septembre 2015; que les experts n’ont nullement remis en cause la qualité de sa prise en charge, rappelant qu’il est médecin du sport et non rhumatologue; qu’il n’est fait état d’aucun élément nouveau de nature à remettre en cause les conclusions expertales; que le Docteur [N] fonde sa demande d’expertise sur le rapport critique établi le 3 juin 2020 par le Docteur [G], son médecin conseil, qui ne fait état en son sein d’aucun manquement du Docteur [X].

Assignée par remise de l’acte à personne habilitée, la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRPCEN) n’a pas constitué avocat. Pa courrier du 24 janvier 2023, elle a indiqué que le montant provisoire de ses débours s’élevait à la somme de 51.343,44 euros.

La procédure a été clôturée à al date du 12 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l’article 1142-1 I du Code de la santé publique, hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.

L’article 33 du Code de déontologie médicale codifié à l’article R. 4127-33 du Code de la Santé Publique prévoit : « Le médecin doit toujours élaborer son diagnostic avec le plus grand soin, en y consacrant le temps nécessaire, en s’aidant dans toute la mesure du possible des méthodes scientifiques les mieux adaptées et, s'il y a lieu, de concours appropriés.»

Madame [W] soutient que les Docteurs [N], [O], [B], [X] et [A]-[U] n’ont pas assuré une prise en charge diligente et conforme aux données de la science, ce qui a abouti à un retard de diagnostic qui lui a été préjudiciable.

Les experts ont retenu uniquement la responsabilité des Docteurs [N] et [O], le premier étant le radiologue ayant réalisé l’IRM le 20 mars 2015, le second étant le rhumatologue ayant reçu Madame [W] en consultation le 23 avril 2015.

Les Docteurs [B], [X] et [A]-CHAVIDAN n’ont pas été appelés aux opérations d’expertise, les experts ayant estimé que leur mise en cause «n’était pas justifiée sur le plan hémato-cancérologique ».

Les recommandations de la HAS de 2010 indiquent que dans le cas d’un myélome, le rôle du médecin traitant est primordial pour dépister la maladie et pour initier la démarche diagnostique en lien avec les autres spécialistes.

Il ressort du rapport d’expertise que seul le Docteur [B] a vu la patiente à plusieurs reprises, et a pu constater que ses douleurs persistaient et s’aggravaient, en dépit de la prise d’antalgiques de plus en plus puissants.

Les indications que donnent le médecin traitant lorsqu’il oriente un patient vers un spécialiste sont primordiales et permettent de l’éclairer pour établir un diagnostic.
Il en va de même des indications fournies lorsqu’il prescrit un examen, que ce soit un IRM ou une radiographie.

Il apparaît en l’espèce que les experts se fondent en partie sur les indications données par le médecin traitant pour écarter la responsabilité de certains intervenants, notamment sur le fait qu’ils n’étaient pas spécialement requis pour la recherche de lésions myélomateuses.

Le Docteur [B] avait un rôle central dans le suivi de la patiente qu’il a vu à de nombreuses reprises en 2015, et notamment les 5 février, 4 mars, 16 mars, 1er avril, 22 avril, 18 mai, 5 juin, 19 juin, 25 juin et 30 juin ; il lui appartenait précisément de décrire les symptômes et l’aggravation constatée lorsqu’il l’a adressé successivement à ses confrères spécialistes.
La question se pose également de l’absence de prescription d’un bilan sanguin classique, devant la persistance des douleurs et l’absence d’anomalies visibles aux examens prescrits.

Selon le rapport d’expertise, le dossier clinique du Docteur [B] indique :
“04/03/2015 arthrose postérieure prédominant en L5-S1 - Possibilité discopathies des 3 derniers étages - Pincement des 2 sacro-iliaques”
“16/03/2015 : douleurs talon depuis le 20/01/2015"
“01/04/2015 : Imagerie lombaire RAS. Mais toujours des douleurs et boiterie. Tramadol 100 LP : 2 à 4".
L’IRM réalisé le 20 mars 2015 par le Docteur [N] pose comme indication la recherche de conflit radiculo-radiculaire et mentionne une étude sagittale T2, axiale T2.

Le docteur [N] aurait donc été spécialement consulté pour une recherche de conflit radiculo-radiculaire.
Il est établi qu’à la date de sa consultation, la patiente était effectivement sous antalgiques mais de palier II (CODOLIPRAN introduit le 2 février et TRAMADOL introduit le 4 mars), l’antalgique de palier III ayant été introduit postérieurement.

Or les experts affirment : “Le Docteur [N] devant des douleurs lombaires persistantes malgré la prescription d’antalgiques de pallier III devait faire une IRM avec séquence T1, T2 sans saturation de graisse. Dans le myélome, en présence de radiographies standard normales, l’IRM détecte 50% de lésions focales et diffuses en l’absence d’ostéopénie ou d’ostéolyse focale. En séquence T1, il est mis en évidence une infiltration médullaire diffuse chez 40% des patients alors même qu’aucune lésion osseuse n’est détectable”, ajoutant que “la séquence T1 doit être systématique”.
Ils précisent néanmoins que la littérature indique que les séquences à utiliser ne font pas l'objet d'un consensus et qu’il est d’usage dans le plus grand nombre de centres d’imagerie médicale de coupler ces deux séquences lors de l’exploration courante du rachis.”
Ils indiquent encore que “le Docteur [N] a orienté son diagnostic vers un conflit disco radiculaire négligeant à tort un autre diagnostic”, et qu’« il appartenait au Docteur [N] de soigneusement interroger la patiente pour (...) déterminer son examen en fonction de ces données capitales puisque 60 % des patients avec un myélome sous-jacent se présentent avec des douleurs résistant à tout antalgique dans les deux ans précédant le diagnostic. Il pouvait aussi interroger le Docteur [B], médecin traitant qui faisait la demande d’examen. Il n’a pas interrogé soigneusement la patiente comme celle-ci l’a confirmé lors des opérations d’expertise. Il aurait réalisé alors un examen radiologique complet comportant une séquence T1 pour ne pas méconnaître une autre pathologie. Mais le Docteur [N] a orienté son diagnostic vers un conflit disco-radiculaire négligeant à tort un autre diagnostic.
Pour ne pas avoir interrogé la patiente et orienté son examen en fonction de cet interrogatoire, la responsabilité médico-légale du Docteur [N] est engagée.»

La radiographie réalisée le 18 mai 2015 par le Docteur [A], pose comme indication: “bilan algique”, l’examen réalisé étant une radiographie du rachis lombaire, bassin de face, thoracique et grill costal droit prescrit par le Docteur [K] [J].

Les experts indiquent que la radiographie du 18 mai 2015 réalisée par le Docteur [A] montre de “discrètes petites hyper clartés sur l’extrémité supérieure des fémurs et sur le bassin qui sont compatibles avec le diagnostic final posé de myélome”, précisant que l’indication de l’examen à cette date n’était pas la recherche spécifique de lésions myélomateuses mais un bilan de douleurs inexpliquées.

Ils énoncent qu’ “il convient de confronter les données radiographiques au contexte clinique et au bilan biologique indispensable en cas de suspicion de myélome”.

Les experts indiquent encore que « la persistance de douleurs rachidiennes résistant aux antalgiques de palier III devait conduire à demander des examens hémato-biologiques, NFS plaquettes. Vitesse de sédimentation (VS), CRP électrophorèse des protides sérique une protéinurie.
Les résultats de ces examens peuvent montrer :
-Une VS élevée avec une CRP normale est très évocatrice de myélome en l’absence de contexte inflammatoire ou infectieux
- une anémie normochrome normocytaire arégénérative
- l’électrophorèse des protides met en évidence un pic monoclonal dans 85% des cas et dans 15% des cas une hypogammaglobulinémie

Tous signes évocateurs d’un myélome et devant conduire à des explorations en milieu spécialisé (HAS Décembre 2010) », or la question se pose encore une fois du rôle du médecin traitant qui n’a pas prescrit de bilan biologique.

Les recommandations de bonne pratique de la HAS de janvier 2017 intitulées « Quand prescrire une électrophorèse des protéines sériques (EPS) et conduite à tenir en cas d'une immunoglobuline monoclonale » posent douze indications formelles à la prescription d’un tel examen :
• infections à répétition des voies aériennes supérieures et pulmonaires
• Douleurs osseuses non traumatiques sans anomalies à l’examen radiologique standard • Polyarthrite inexpliquée
• Adénopathies, splénomégalie
• Neuropathie périphérique inexpliquée
• Purpura vasculaire
• Anomalies de l’hémogramme sans cause évidente (principalement anémie, lymphopénie isolée ou hyperlym-phocytose)
• Vitesse de sédimentation élevée avec CRP normale (en dehors de la grossesse et en
tenant compte de l’âge)
• Hypercalcémie (corrigée en fonction de l’albuminémie/protidémie)
• Insuffisance rénale récente (sans obstacle)
• Protéinurie significative (? 0,5 g/L)
• Certaines anomalies osseuses radiologiques : fracture vertébrale suspecte, fracture
pathologique, géodes
Et dans une situation d’urgence rare : le syndrome d’hyperviscosité.
Le motif de la prescription est une aide à l’interprétation pour le biologiste médical.”

Madame [W] semblait bien présenter des douleurs osseuses non traumatiques sans anomalies à l’examen radiologique standard.

Les Docteurs [B], [X] et [A]-CHAVIDAN n’ont pas pu apporter leur explications et précisions sur les constatations cliniques qu’ils ont pu effectuer et les suites qu’ils leur ont données, qu’il apparaît nécessaire de connaître pour déterminer la responsabilité de chacun des intervenants.

Au vu de ces éléments, le Tribunal ne s’estime pas suffisamment éclairé; il apparaît donc nécessaire d’ordonner une nouvelle expertise.

Cette expertise sera confiée à [V] [AK], expert en radiologie, et [P] [D], expert en oncologie, inscrits sur la liste de la Cour d’appel de Lyon, et dont la mission sera précisée au dispositif.

Les frais d’expertise seront avancés par le Docteur [N], qui la réclame.

Les frais et dépens seront réservés.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire rendu en premier ressort,

Avant dire droit,

Ordonne une mesure d’expertise ;

Désigne pour y procéder [V] [AK], expert en radiologie inscrite sur la liste de la Cour d’appel de Lyon, demeurant [Adresse 11] [Courriel 17] [XXXXXXXX03] , [P] [D], expert en oncologie inscrit sur la liste de la Cour d’appel de Lyon, , demeurant [Adresse 12] [Courriel 18] [XXXXXXXX01],

avec pour mission de :
- Convoquer toutes les parties ;
- Entendre tous sachants ;
- Se faire communiquer par [Y] [W] tous les éléments médicaux relatifs à son suivi et aux actes critiqués, et se faire communiquer par tous tiers détenteurs l’ensemble des documents médicaux nécessaires ainsi que ceux détenus par tous médecins et établissements de soins concernant la prise en charge du patient ;
- Prendre connaissance de la situation personnelle et professionnelle du patient ; fournir le maximum de renseignements sur son mode de vie, ses conditions d’activité professionnelle, son statut exact ;
- Retracer son état médical avant les actes critiqués ;
- Procéder à un examen clinique détaillé de la victime ;
- Décrire les soins et interventions dont la victime a été l’objet, en les rapportant à leurs auteurs, et l’évolution de l’état de santé ;
- Réunir tous les éléments permettant de déterminer si les soins ont été consciencieux, attentifs et dispensés selon les règles de l’art et les données acquises de la science médicale à l’époque des faits, et en cas de manquements, en préciser la nature et le ou les auteurs ainsi que leurs conséquences au regard de l’état initial du patient comme de l’évolution prévisible de celui-ci ;
- À partir des déclarations de la victime, au besoin de ses proches et de tout sachant, et des documents médicaux fournis, relater les circonstances de l’accident, décrire, en cas de difficultés particulières éprouvées par la victime, les conditions de reprise de l’autonomie et lorsqu’elle a eu recours à une aide temporaire (humaine ou matérielle), en précisant la nature et la durée ;
- Décrire tous les soins médicaux et paramédicaux mis en œuvre jusqu’à la consolidation, en précisant leur imputabilité, leur nature, leur durée et en indiquant les dates d’hospitalisation avec, les durées exactes d’hospitalisation et, pour chaque période d’hospitalisation, le nom de l’établissement, les services concernés et la nature des soins ;
- Recueillir les doléances de la victime et au besoin de ses proches ; l’interroger sur les conditions d’apparition des lésions, l’importance des douleurs, la gêne fonctionnelle subie et leurs conséquences sur la vie quotidienne ; décrire les souffrances physiques, psychiques ou morales liées à l’accident s’étendant de la date de celui-ci à la date de consolidation ;
- Décrire au besoin un état antérieur en en retenant que les seuls antécédents qui peuvent avoir une incidence sur les lésions et leurs séquelles ;
- Abstraction faite de l’état antérieur, et de l’évolution naturelle de l’affection et du/des traitements qu’elle rendait nécessaire, en s’attardant qu’aux conséquences directes et certaines des manquements relevés, analyser, à l’issue de cet examen, dans un exposé précis et synthétique:
- La réalité des lésions initiales ;
- La réalité de l’état séquellaire ;
- L’imputabilité directe et certaine des séquelles aux lésions initiales en précisant au besoin l’incidence d’un état antérieur ;
- Perte de gains professionnels actuels
Indiquer les périodes pendant lesquelles la victime a été, du fait de son déficit fonctionnel temporaire, dans l’incapacité d’exercer totalement ou partiellement son activité professionnelle;
En cas d’incapacité partielle, préciser le taux et la durée ;
Préciser la durée des arrêts de travail retenus par l’organisme social au vu des justificatifs produits et dire si ces arrêts de travail sont liés au fait dommageable ;
- Déficit fonctionnel temporaire Indiquer les périodes pendant lesquelles la victime a été, du fait de son déficit fonctionnel temporaire, dans l’incapacité totale ou partielle de poursuivre ses activités habituelles ;
En cas d’incapacité partielle, préciser le taux et la durée ;
- Consolidation
Fixer la date de consolidation et, en l’absence de consolidation, dire à quelle date il conviendra de revoir la victime ;
Préciser, lorsque cela est possible, les dommages prévisibles pour l’évaluation d’une éventuelle provision ;
- Souffrances endurées
Décrire les souffrances physiques, psychiques et morales endurées avant la consolidation du fait dommageable ;
L’évaluer selon l’échelle habituelle de 7 degrés ;
- Déficit fonctionnel permanent
Indiquer si, après consolidation, la victime subit un déficit fonctionnel permanent consistant en une altération permanente d’une ou plusieurs fonctions physiques, psychosensorielles ou intellectuelles, auxquelles s’ajoutent les éventuels phénomènes douloureux, répercussions psychologiques normalement liés à l’atteinte séquellaire décrite ainsi que les conséquences habituellement et objectivement liées à cette atteinte dans la vie de tous les jours ;
En évaluer l’importance et au besoin en chiffrer le taux ; dans l’hypothèse d’un état antérieur, préciser en quoi l’accident a eu une incidence sur cet état antérieur et décrire les conséquences;
- Assistance par tierce personne
Indiquer, le cas échéant, si l’assistance constante ou occasionnelle d’une tierce personne (étrangère ou non à la famille) est ou a été nécessaire pour effectuer les démarches et plus généralement pour accomplir les actes de la vie quotidienne ; préciser la nature de l’aide à prodiguer (qualification professionnelle) et sa durée quotidienne, ainsi que les conditions dans lesquelles ces besoins sont actuellement satisfaits ;
- Dépenses de santé futures
Décrire les soins futurs et les aides techniques compensatoires au handicap de la victime (prothèse, appareillage spécifique, véhicule) en précisant la fréquence de leur renouvellement ; indiquer leur caractère occasionnel ou viager, la nature, la quantité, ainsi que la durée prévisible;
- Frais de logement et/ou de véhicule adaptés
Donner son avis sur d’éventuels aménagements nécessaires pour permettre, le cas échéant, à la victime d’adapter son logement et/ou son véhicule à son handicap ;
- Perte gains professionnels futurs
Indiquer notamment au vu des justificatifs produits, si le déficit fonctionnel permanent entraîne l’obligation pour la victime de cesser totalement ou partiellement son activité professionnelle ou de changer d’activité professionnelle ;
- Incidence professionnelle
Indiquer notamment au vu des justificatifs produits, si le déficit fonctionnel permanent entraîne d’autres répercussions sur son activité professionnelle actuelle ou future ( obligation de formation pour un reclassement professionnel, pénibilité accrue dans son activité, « dévalorisation » sur la marché, etc. ) ;
- Dommage esthétique
Donner un avis sur l’existence, la nature et l’importance du dommage esthétique imputable à l’accident, indépendamment d’une éventuelle atteinte psychologique déjà prise en compte au titre de l’AIPP, et en précisant s’il est temporaire avant consolidation et/ou définitif ;
L’évaluer selon l’échelle habituelle de 7 degrés ;
- Préjudice sexuel
Dire en émettant un avis motivé si les séquelles sont susceptibles d’être à l’origine d’un retentissement sur la vie sexuelle du patient, en discutant son imputabilité ;
- Préjudice d’agrément
Donner son avis médical sur les difficultés éventuelles de se livrer pour la victime, à des activités spécifiques sportives ou de loisirs effectivement pratiquées antérieurement et dire s’il existe ou existera un préjudice direct, certain et définitif ;
- Relater toutes les constatations ou observations ne rentrant pas dans le cadre des rubriques mentionnées ci-dessus que l’Expert jugera nécessaires pour l’exacte appréciation des préjudices subis par le patient et en tirer toutes les conclusions médico-légales ;
- Les conclusions du rapport d’expertise, même en l’absence de consolidation acquise devront comporter un récapitulatif des différents postes de préjudices conformément à la nouvelle nomenclature proposée ;
- Dire que l’Expert qui sera désigné pourra, en cas de nécessité, s’adjoindre le concours de tout spécialiste de son choix, dans un domaine distinct du sien, après en avoir avisé les parties et leurs conseils et recueilli leur accord et devra effectuer sa mission conformément aux dispositions des articles 233 à 248 et 273 et suivants du Code de procédure civile ;
- Déposer un pré-rapport afin de permettre aux parties de faire valoir leurs observations
préalablement au dépôt du rapport définitif ;

Dit que le Docteur [N] devra consigner entre les mains du régisseur d'avances et de recettes de ce tribunal la somme de 5.000 euros H.T à valoir sur la rémunération des experts, qui pourra le cas échéant être augmentée de la TVA si l’expert y est assujetti, et ce dans le délai d’un mois à compter du présent jugement, à peine de caducité de la mesure d’expertise;

Dit que le montant de la TVA devra être directement versé à la Régie du Tribunal par le Docteur [N] dès que l'expert lui aura signifié par écrit son assujettissement à cette taxe;

Dit que les experts accompliront leur mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile ; qu'ils devront recueillir les explications des parties et prendre connaissance de tous documents utiles à leur information, à charge d'en indiquer les sources ; qu'ils pourront s’adjoindre tout spécialiste de son choix, à charge pour eux d’en informer préalablement le magistrat chargé du contrôle des expertises et de joindre l’avis du sapiteur à son rapport ;

Dit que les experts devront faire connaître leur acceptation ou leur refus d’exécuter l’expertise dans un délai de 15 jours après avoir pris connaissance du jugement le désignant ;

Dit qu’en cas d’empêchement, refus ou négligence de l’expert commis, celui-ci sera remplacé par ordonnance sur requête de la partie la plus diligente ;

Dit qu'ils devront remettre aux parties leurs pré-conclusions écrites et répondre aux dires;

Dit que les experts devront déposer au service du contrôle des expertises du tribunal judiciaire de Marseilleun rapport détaillé et motivé, en double exemplaire, de leurs opérations et conclusions dans un délai de six mois à compter du versement de la consignation;

Dit que les experts, en même temps qu’ils déposeront leur rapport au service du contrôle des expertises du Tribunal judiciaire de Marseille, en feront remettre une copie à chacune des parties;

Dit que le dossier sera rappelé devant le juge de la mise en état sur avis par le service du contrôle des expertises du dépôt du rapport ;

Réserve les dépens et frais irrépétibles.

AINSI JUGE PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIERE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE 11 JUILLET 2024.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 1ère chambre cab2
Numéro d'arrêt : 21/05256
Date de la décision : 11/07/2024
Sens de l'arrêt : Expertise

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-11;21.05256 ?
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