TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE
TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION B
JUGEMENT N°
Enrôlement : N° RG 21/03078 - N° Portalis DBW3-W-B7F-YTJ6
AFFAIRE :
Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES PROVENCE (la SELARL JURICADJI)
C/
Mme [T] [Y] [O] (Me Amaury AYOUN)
Rapport oral préalablement fait
DÉBATS : A l'audience Publique du 16 Mai 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré
Président : Madame Patricia GARNIER, Juge
Greffier : Madame Olivia ROUX, lors des débats
A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au : 04 Juillet 2024
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2024
PRONONCE en audience publique par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2024
Par Madame Patricia GARNIER, Juge
Assistée de Madame Olivia ROUX,
NATURE DU JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort
NOM DES PARTIES
DEMANDERESSE
Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES PROVENCE
immatriculé au RCS Aix en provence 381 976 448
pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège,
dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Maître Sophie ALEXANDER de la SELARL JURICADJI, avocats au barreau de MARSEILLE
C O N T R E
DEFENDERESSE
Madame [T] [Y] [O]
née le [Date naissance 2] 1960 à [Localité 5] (CAMBDOGE)
de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Amaury AYOUN, avocat au barreau de MARSEILLE
FAITS ET PROCEDURE
Selon offre de prêt immobilier émise le 31 mars 2010, reçue le 20 avril 2010 et acceptée le 14 avril 2010 par Madame [Y] [O], la société CAISSE REGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES PROVENCE lui a consenti plusieurs crédits afin de financer l’achat d’un logement neuf à usage de résidence principale à [Localité 4] :
- un crédit n°C2FCV6011PR d’un montant de 230.000,00 euros d’une durée de 300 mois, au taux fixe de 3,85%,
- un crédit n°C2FCV6021PR d’un montant de 100.000,00 euros d’une durée de 300 mois, au taux fixe de 3,85%,
- un crédit n°C2FCV6031PR d’un montant de 100.000,00 euros d’une durée de 300 mois, selon un taux révisable indexé sur la valeur de l’EURIBOR 3 mois (avec pour valeur 0,716% lors de l’octroi du prêt).
*
Par acte en date du 5 mars 2021, la société CAISSE REGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES PROVENCE a assigné Madame [Y] [O] aux fins de voir le tribunal la condamner au paiement des sommes suivantes, et les intérêts aux taux contractuels :
- 192.688,46 euros au titre du crédit n°C2FCV6011PR,
- 86.928,62 euros au titre du crédit n° C2FCV6021PR,
- 91.049,15 euros au titre du crédit n°C2FCV6031PR,
- 3.000,00 euros au titre des frais irrépétibles.
Ces demandes étaient réitérées dans ses conclusions notifiées par RPVA le 28 mars 2023.
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Par conclusions notifiées par RPVA le 26 avril 2022, Madame [T] [Y] [O] conclut au débouté de la banque, sollicitant de voir le tribunal :
faisant valoir que la déchéance du terme n’a pas été valablement prononcée.
JUGER que la déchéance du terme des prêts n’a pas été valablement prononcée;
ORDONNER la suspension des obligations de Madame [Y] [O] pendant une durée de deux ans à compter du prononcé du jugement à intervenir ;
JUGER que les obligations suspendues ne produiront pas intérêts ;
JUGER que les pénalités et majorations de retard cessent d’être dues durant la période de délais conformément à l’article 1343-5 du Code civil ;
JUGER que la présente décision entraîne suspension de toutes les procédures d’exécution engagées pour le recouvrement de la dette conformément à l’article 1343-5 du Code civil ;
DÉBOUTER la société CAISSE REGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES PROVENCE de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
CONDAMNER la société CAISSE REGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES PROVENCE la somme de 960 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile eu égard aux frais irrépétibles qu'elle a été dans l'obligation d'engager ;
CONDAMNER la société CAISSE REGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES PROVENCE aux entiers dépens de l'instance en ce compris les actes inutiles quelle a fait délivrer conformément aux dispositions de l'article 696 du Code de Procédure Civile.
*
Au-delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l'espèce des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, le Tribunal entend se référer pour l'exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessus.
Le Juge de la Mise en Etat a clôturé l'affaire le 11 janvier 2024 et a renvoyé devant l'audience de plaidoirie du 16 mai 2024. L'affaire a été mise en délibéré au 04 juillet 2024.
MOTIFS
- Sur la déchéance du terme
Le contrat de prêt prévoit dans son article 3 – CONSEQUENCE DES CONDITIONS SUSPENSIVES ET RESOLUTOIRES-DECHEANCE DU TERME:
(…) En cas de survenance d’un des cas de déchéance du terme ci dessus visé, le prêteur manifestera son intention de se prévaloir de l’exigibilité immédiate de la totalité de sa créance par lettre recommandée avec accusé de réception adressée à l’emprunteur ».
En l’espèce, madame [T] [Y] [O] fait valoir que la banque n’a pas valablement prononcé à déchéance du terme.
Il ressort des pièces versées aux débats que deux courriers ont été envoyés en recommandé avec accusé de réception à la débitrice.
Le premier date du 16 octobre 2020, la somme due était de 37 595,82€, ce qui n’est pas contesté par la débitrice, a été envoyé à l’adresse indiquée sur le contrat de prêt. Le courrier est revenu comme étant non délivré suite à une adresse erronée.
Le second date du 8 janvier 2021, la somme due était de 44711,84€, ce qui n’est toujours pas contestée par la débitrice, a été envoyé à l’adresse [Adresse 1], il est intitulé dernière mise en demeure avant déchéance du terme et a été distribuée, il n’est pas possible de savoir s’il a été retirée par le destinataire.
Toutefois, il ressort de l’acte d’assignation que l’adresse était la bonne et d’un échange de courriel entre madame [O] et son conseiller bancaire qu’elle était informée qu’il existait un problème de paiement de son prêt.
De plus, il ressort parfaitement des lettres de mise en demeure que la déchéance du terme est prononcée suite au non paiement des échéances dues par madame [O].
Dans ces conditions, le Tribunal devra considérer que en l’état des mises en demeure ci dessus, la déchéance du terme qui lui a été notifiée apparaît parfaitement régulière.
- Sur la demande de délais
L'article 1343-5 du Code Civil prévoit :
Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.
Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.
La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.
Toute stipulation contraire est réputée non écrite. Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d'aliment.
L'article 1343-5 du Code Civil prévoit deux possibilités à savoir le report du paiement ou l'échelonnement de celui-ci. Madame [O] sollicite l’obtention d’un délai de paiement d’une durée de deux années, ce qui est contesté par la banque du fait de l’ancienneté de la banque et de la mauvaise foi de celle-ci qui s’était abstenu de l’avertir de son changement d’adresse.
Toutefois, il ressort des pièces versées aux débats que depuis fin 2020, madame [O] a rencontré de gros problèmes de santé ayant donné lieu à des arrêts maladie et à une baisse de revenus conséquente. Elle est également débitrices de nombreuses autres dettes.
Dans ces conditions, il conviendra de lui accorder le délai de supension de deux ans de sa dette à madame [O] à compter de la notification du jugement à venir.
- Sur les autres chefs de demandes
Il convient d'allouer à la banque la somme équitable de 1.500,00 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
L’exécution provisoire du présent jugement est de droit.
*
PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL
STATUANT en matière civile ordinaire, publiquement, par jugement contradictoire, en premier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi,
CONDAMNE madame [T] [Y] [O] à verser à la société coopérative à capital variable CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES PROVENCE les sommes suivantes :
- 192.688,46 euros au titre du crédit n°C2FCV6011PR au taux contractuel de 3,85 % à compter du 1er février 2021 jusqu’au parfait paiement ;
- 86.928,62 euros au titre du crédit n° C2FCV6021PR au taux contractuel de 3,85 % à compter du 1er février 2021 jusqu’au parfait paiement ;
- 91.049,15 euros au titre du crédit n°C2FCV6031PR au taux contractuel de 1,85 % à compter du 1er février 2021 jusqu’au parfait paiement ;
PRONONCE le report de la dette à dans deux ans à compter de la notification du présent jugement à madame [T] [Y] [O] selon les modalités prévues à l’article 1343-5 du code civil;
CONDAMNE madame [T] [Y] [O] à verser à la société coopérative à capital variable CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES PROVENCE la somme de 1.500,00 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
REJETTE toute autre demande ;
CONDAMNE madame [T] [Y] [O] aux dépens.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au Greffe de la Troisième Chambre section B du Tribunal Judiciaire de MARSEILLE le 4 juillet 2024
Signé par Madame GARNIER, Président, et par Madame ROUX, Greffier présent lors de la mise à disposition au Greffe de la décision.
LE GREFFIER LE PRESIDENT