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25/06/2024 | FRANCE | N°17/03102

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc : urssaf, 25 juin 2024, 17/03102


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]


JUGEMENT N°24/01821 du 25 Juin 2024

Numéro de recours: N° RG 17/03102 - N° Portalis DBW3-W-B7B-VQWN


AFFAIRE :


DEMANDERESSE

Société INSTITUTION DE PREVOYANCE DU BATIMENT
BTP PREVOYANCE
[Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par Me Emmanuel DECHANCE, avocat au barreau de PARIS


c/ DEFENDERESSE

Organisme URSSAF PACA
[Adresse 6]
[Localité 2]

représenté par madame [E] [

V], inspectrice juridique munie d’un pouvoir régulier


Numéro de recours: N° RG 17/03300 - N° Portalis DBW3-W-B7B-VQWH



DEMANDERESSE

Société BTP PREVOYANCE
[A...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]

JUGEMENT N°24/01821 du 25 Juin 2024

Numéro de recours: N° RG 17/03102 - N° Portalis DBW3-W-B7B-VQWN

AFFAIRE :


DEMANDERESSE

Société INSTITUTION DE PREVOYANCE DU BATIMENT
BTP PREVOYANCE
[Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par Me Emmanuel DECHANCE, avocat au barreau de PARIS

c/ DEFENDERESSE

Organisme URSSAF PACA
[Adresse 6]
[Localité 2]

représenté par madame [E] [V], inspectrice juridique munie d’un pouvoir régulier

Numéro de recours: N° RG 17/03300 - N° Portalis DBW3-W-B7B-VQWH

DEMANDERESSE

Société BTP PREVOYANCE
[Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par Me Emmanuel DECHANCE, avocat au barreau de PARIS

c/ DEFENDERESSE

Organisme URSSAF PACA
[Adresse 6]
[Localité 2]

représenté par madame [E] [V], inspectrice juridique munie d’un pouvoir régulier

DÉBATS : À l'audience publique du 19 Mars 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : PASCAL Florent, Vice-Président

Assesseurs : BALY Laurent
GARZETTI Gilles

Greffier : DALAYRAC Didier,

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 25 Juin 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE :

L’institution BTP PREVOYANCE est chargée de la mise en œuvre des garanties complémentaires de prévoyance instituées au profit des personnels du bâtiment et des travaux publics par divers accords collectifs nationaux, comportant notamment des garanties obligatoires indemnités de fin de carrière (« IRT »), indemnités journalières servies en cas d’arrêt de travail au-delà de 90 jours (« IJ »), et des garanties facultatives en cas d’arrêts de travail de moins de 90 jours (« GAT »).

Dans le cadre de conventions tripartites entre les caisses de prévoyance du bâtiment, l’ACOSS et l’URSSAF, BTP PREVOYANCE verse les cotisations et contributions sociales sur ces prestations en lieu et place des employeurs.

Elle a fait l'objet d'un contrôle de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires par l'Union de Recouvrement des cotisations de Sécurité sociale et d'Allocations Familiales de Provence-Alpes-Cote d'Azur (ci-après URSSAF PACA) pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014.

Le 12 octobre 2015, l'URSSAF a notifié à BTP PREVOYANCE une lettre d'observations contenant trente-neuf chefs de redressement et précisant que les vérifications permettaient de dégager un crédit de cotisations en faveur de la cotisante de 3.210.135 €.

Après échanges contradictoires, l’URSSAF a adressé à BTP PREVOYANCE dix mises en demeure en date du 23 décembre 2015, pour un montant total cumulé de 6.033.853 €, aux établissements concernés.

Par courriers en date du 22 décembre 2015, l’URSSAF a également notifié cinq avis de crédit qu’elle imputait au compte des établissements concernés, pour un montant total cumulé de 8.473.788,50 €.

Par quinze courriers en date du 22 janvier 2016, BTP PREVOYANCE a saisi la commission de recours amiable de l'URSSAF aux fins de prononcer l'annulation des mises en demeure et de voir ordonner à son profit des remboursements de cotisations majorés y compris ceux afférents aux déductions effectuées, aux crédits dégagés par l'URSSAF et aux crédits qu’elle sollicite.

Par décision du 8 décembre 2016, notifiée le 29 décembre suivant, la commission a fait partiellement droit aux demandes de BTP PREVOYANCE, et a modifié le solde des redressements porté au crédit de la cotisante à hauteur de 725.560 € pour l’année 2012, 832.788 € pour l’année 2013, et 947.026 € pour l’année 2014.

Par requêtes des 20 février et 28 février 2017, enregistrées sous deux numéros RG distincts (17/03102 et 17/03300), BTP PREVOYANCE a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône d’un recours contentieux à l’encontre de la décision explicite de la commission de recours amiable de l’URSSAF PACA.

L'affaire a fait l'objet, par voie de mention au dossier, d'un dessaisissement au profit du pôle social du tribunal judiciaire de Marseille, en vertu de la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle.

L’affaire a été retenue à l’audience au fond du 19 mars 2023.

BTP PREVOYANCE, représentée par son conseil soutenant oralement ses conclusions, demande au tribunal de :
S’agissant de l’établissement GAT OUVRIER ALM,
-sur le point n°2 de la lettre d’observations, fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 5.766 € pour l’année 2012 ;
-sur le point n°3, fixer le montant du redressement à la charge de BTP PREVOYANCE à hauteur de 31.389 € pour l’année 2012, et 24.281 € pour l’année 2013 ;

S’agissant de l’établissement GAT OUVRIER GAT,
-sur le point n°4, fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 260.260 € pour l’année 2012 ;
-sur le point n°5, fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 6.742€ pour l’année 2012 ;
-sur le point n°6, fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 124.354 € pour l’année 2012, 124.957 € pour l’année 2013, et 114.842 € pour l’année 2014 ;

S’agissant de l’établissement GAT SMA CAMB AUX RG,
-sur le point n°9, fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 18.778 € pour l’année 2012, 31.900 € pour l’année 2013, et 33.912 € pour l’année 2014 ;

S’agissant de l’établissement IJ OUVRIER ALM,
-annuler le point n°10 de la lettre d’observations ;
-sur le point n°13, fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 53.398 € pour l’année 2012, 50.900 € pour l’année 2013, et fixer le montant du redressement à sa charge à hauteur de 6.256 € pour l’année 2014 ;

S’agissant de l’établissement IJ OUVRIER RG,
-annuler le point n°15 de la lettre d’observations ;
-sur le point n°19, fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 1.094.185 € pour l’année 2012, 1.131.347 € pour l’année 2013, et fixer le montant du redressement à sa charge à hauteur de 19.457 € pour l’année 2014 ;
-annuler le point n°20 au titre de l’année 2013 ;

S’agissant de l’établissement GAT SMA CAMB AUX ALM,
-annuler le point n°21 au titre de l’année 2013 ;
-sur le point n°22, fixer le montant du redressement à la charge de BTP PREVOYANCE à hauteur de 8.625 € pour l’année 2012, 8.341 € pour l’année 2013, et 5.275 € pour l’année 2014 ;

S’agissant de l’établissement IJ SMA CAMB AUX ALM,
-sur le point n°24, fixer le montant du redressement à la charge de BTP PREVOYANCE à hauteur de 3.327 € pour l’année 2013, et 2.418 € pour l’année 2014 ;

S’agissant de l’établissement IJ SMA CAMB AUX RG,
-sur le point n°25, fixer le montant du redressement à la charge de BTP PREVOYANCE à hauteur de 13.707 € pour l’année 2012, et fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 2.603 € pour l’année 2013 et 4.686 € pour l’année 2014 ;

S’agissant de l’établissement OUVRIER REVENUS REMPLACE.RG + ALM,
-sur le point n°26, fixer le montant du redressement à la charge de BTP PREVOYANCE à hauteur de 515.678 € pour l’année 2014 ;
-sur le point n°27, fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 76.212 € pour l’année 2012 ;
sur le point n°28, fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 2.074.747 € ;
S’agissant de l’établissement IRT ALM,
-sur le point n°29, fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 6.328 € pour l’année 2012, 2.883 € pour l’année 2013, et 2.446 € pour l’année 2014 ;
-sur le point n°31, fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 3.546 € pour l’année 2014 ;

S’agissant de l’établissement IRT RG,
-sur le point n°32, fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 185.790 € pour l’année 2012 ;
-sur le point n°33, fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 33.375 € pour l’année 2012 et 62.623 € pour l’année 2014 ;
-sur le point n°34, fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 103.373 € pour l’année 2014 ;

S’agissant de l’établissement ETAM REVENUS REMPLACEMENT RG ALM,
-annuler le point n°35 de la lettre d’observations ;

S’agissant de l’établissement CADRE REMPLACEMENT RG ALM,
-sur le point n°37, fixer le montant du redressement à la charge de de BTP PREVOYANCE à hauteur de 13.359 € au titre de l’année 2012 ;
-sur le point n°38, fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 16.680 € pour l’année 2012, et fixer le montant du redressement à la charge de BTP PREVOYANCE à hauteur de 2.427 € pour l’année 2013 ;
-sur le point n°39, fixer le crédit de cotisations en faveur de BTP PREVOYANCE à hauteur de 720.090 € pour l’année 2012, 833.291 € pour l’année 2013, et 947.086 € pour l’année 2014 ;

-condamner l’URSSAF PACA à lui verser la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

L’URSSAF PACA, représentée par une inspectrice juridique soutenant oralement ses conclusions, demande pour sa part au tribunal de :

-lui donner acte qu’elle a décidé d’annuler le rappel des cotisations de l’année 2013 du point n°19 à hauteur de 151.378 € et de ramener ce chef de redressement pour les années 2012 et 2014 à hauteur de 156.312 € en cotisations ;

-débouter pour le surplus l’institution BTP PREVOYANCE de l’ensemble de ses demandes en ce qu’elle excèdent les décisions de la commission de recours amiable du 8 décembre 2016 rendues pour chacun de ses établissements ;

-condamner l’établissement IJ OUVRIER ALM PAR SAINT VERAN à lui payer la somme de 272.884 € au titre de la mise en demeure n°61654828 du 23 décembre 2015, et à titre subsidiaire, le condamner à payer la somme de 203.562 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice constitué par le manque à collecter en cotisations de sécurité sociale chiffré au titre des points n°10 et 15 ;

-condamner l’établissement GAT SMA CAMB AUX ALM PAR SAINT VERAN à lui payer la somme de 55.445 € au titre de la mise en demeure n°61654993 du 23 décembre 2015 ;

-condamner l’établissement IJ SMA CAMB AUX RG PAR SAINT VERAN à lui payer la somme de 32.410 € au titre de la mise en demeure n°61655064 du 23 décembre 2015 ;

-condamner l’établissement IRT ALM PAR SAINT VERAN à lui payer la somme de 74.420 € au titre de la mise en demeure n°61654978 du 23 décembre 2015 ;

-condamner l’établissement ETAM REVENUS REMPLACEMENT RG ALM à lui payer la somme de 1.311.718 € au titre de la mise en demeure n°61655101 du 23 décembre 2015 ;

-condamner l’établissement GAT OUVRIER ALM PAR SAINT VERAN à lui payer la somme de 93.892 € au titre de la mise en demeure n°61654964 du 23 décembre 2015 ;

-condamner l’établissement IJ SMA CAMB AUX ALM PAR SAINT VERAN à lui payer la somme de 12.799 € au titre de la mise en demeure n°61660296 du 23 décembre 2015 ;

-condamner l’établissement IJ OUVRIER RG PAR SAINT VERAN à lui payer la somme de 3.941.551 € au titre de la mise en demeure n°61660355 du 23 décembre 2015, et à titre subsidiaire, le condamner à payer la somme de 2.800.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice constitué par le manque à collecter en cotisations de sécurité sociale chiffré au titre des points n°15 ;

-condamner BTP PREVOYANCE au paiement de la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

En application de l’article 455 du Code de procédure civile, il convient de se reporter aux conclusions déposées par les parties à l’audience, reprenant l’exposé complet de leurs moyens et prétentions.

L’affaire a été mise en délibéré au 25 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur les frais professionnels – fiabilisation de l’application de la DFS par sondage (points n°2, 4, 5, 29, 30, 32, 33)

Aux termes des dispositions de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale, sont considérées comme rémunérations pour le calcul des cotisations sociales, toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire.

Il résulte, en outre, de l'article R.242-1 du code de la sécurité sociale, que les prestations de remplacement servies au titre d’un régime de prévoyance sont incluses dans l'assiette des cotisations et contributions sociales à proportion de la part financée par l’employeur.

Par dérogation au principe sus-énoncé, ne sont pas comprises dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale les sommes versées aux salariés au titre des frais professionnels, dans les conditions et limites fixées par l'arrêté ministériel du 20 décembre 2002.

L’article 9 de l'arrêté prévoit que certaines professions, notamment celles du secteur du bâtiment et travaux publics, peuvent bénéficier d’une déduction forfaitaire spécifique de 10 % au titre des frais professionnels supplémentaires conformément à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000.
La pratique de la déduction forfaitaire spécifique relève d’une option de l’employeur ; néanmoins, même si la nature de l’activité du salarié autorise cette déduction, l’application de celle-ci par l’employeur est subordonnée à la réalisation de certaines conditions.

En l’espèce, lors de la vérification des justificatifs pour chaque individu de l’échantillon, les agents de contrôle ont constaté des erreurs concernant l’application de la DFS.

Le détail de ces anomalies a été communiqué à BTP PREVOYANCE, et à partir des montants fournis, les inspecteurs ont calculé la régularisation à hauteur de 10 % du montant payé pour chaque individu pour qui la DFS aurait dû être appliqué ou non.

Devant la commission de recours amiable de l’URSSAF, BTP PREVOYANCE a produit des justificatifs ayant permis de réduire les chefs de redressement à ce titre en procédant à un nouveau calcul de l’échantillon suivant la méthode de l’extrapolation acceptée par la cotisante.

BTP PREVOYANCE reproche à la commission de ne pas avoir tiré les conséquences de l’acceptation des justificatifs produits en annulant intégralement les redressements opérés de ces chefs.

Or, les justificatifs produits, et qui ont été retenus par l’URSSAF à hauteur de leur valeur probante, ne pouvaient avoir pour effet que de rectifier à due proportion l’échantillon à partir duquel le redressement a été recalculé.

Les pièces justificatives produites demeurant parcellaires, il n’était donc pas permis à l’organisme, dans le cadre des règles spécifiques d’échantillonnage et d’extrapolation acceptées par la cotisante, de s’affranchir de ces dernières et d’annuler l’intégralité du redressement.

Il s’ensuit que l’URSSAF PACA a fait une exacte application de la loi, et que les moyens de BTP PREVOYANCE à ce titre ne sont pas fondés.

Sur les divergences de bases (points n°3, 6, 9, 13, 19, 20, 21, 22, 24, 25, 31, 34 et 35)

Lors de la vérification, les inspecteurs du recouvrement ont constaté des écarts entre les bases CSG-CRDS, « Pôle Emploi » et « Totalité », calculées à partir des montants fournis par les services de BTP PREVOYANCE et les montants déclarés auprès de l’organisme pour chacune des trois années vérifiées.

En conséquence, la régularisation des contributions en cause a été effectuée en fonction des divergences constatées par les agents de contrôle.

BTP PREVOYANCE considère que les bases reconstituées retenues par les inspecteurs sont erronées et en proposent de nouvelles.

Or, il n’est pas contesté que les chiffres indiqués dans la lettre d’observations proviennent des documents fournis par la cotisante, et que les constatations des agents de contrôle font foi jusqu’à preuve contraire.

L’URSSAF rappelle qu’à la suite du contrôle de l’année 2009, BTP PREVOYANCE avait modifié ses règles d’imputation comptable afin de pouvoir identifier à l’intérieur d’un même compte les différents types de bénéficiaires et les cotisations afférentes.
Cette modification de comptabilité s’est faite en intégrant une clé de validation à chaque écriture comptable, dénommée Champ Universel Flexible (CUF).

En pratique toutefois, la mise en place de ce procédé « CUF » n’a pas permis de corroborer les bases déclarées à l’URSSAF.

Il a donc été fait état de ces divergences à BTP PREVOYANCE qui a apporté, en cours de contrôle, des modifications aux critères retenus pour l’identification.

Malgré les réponses de cette dernière, les divergences ont subsisté et il lui a été demandé que soit comptablement identifié le montant de chaque base de prestation déclarée.

Les chiffres présentés dans la lettre d’observations proviennent des documents fournis par ses soins, alors que les nouveaux chiffres allégués sont produits sans aucune explication sur leur origine ou leur mode de calcul.

L’URSSAF souligne qu’il a été impossible de vérifier l’exactitude des nouvelles bases communiquées par BTP PREVOYANCE lors de la saisine de la commission de recours amiable, la phase contradictoire du contrôle ouverte par la lettre d’observations étant alors échue.

Il est acquis que les cotisants sont tenus de présenter aux agents chargés du contrôle tout document et de permettre l’accès à tous supports d’information qui leur sont demandés par ces agents comme nécessaires à l’exercice du contrôle.

Dès lors que le contrôle est clos après la période contradictoire telle que définie par l’article R.243-59 du code de la sécurité sociale et que la cotisante n’a pas apporté tous les éléments nécessaires à la vérification de l’application qu’elle avait faite de la législation de sécurité sociale, d’assurance chômage et de garantie des salaires pendant cette même phase procédurale, aucune pièce ne peut être versée aux débats devant la juridiction de recours.

C’est donc à bon droit qu’à défaut de justification suffisante, il a été procédé par l’URSSAF à la réintégration des différences constatées dans l’assiette des cotisations, les griefs formulés par BTP PREVOYANCE à ce titre n’étant pas fondés.

Sur les taux de CSG-CRDS sur les revenus de remplacement (points n°26, 27, 28, 37, 38, 39)

En application de l’article L.136-1 du code de la sécurité sociale, il est institué une contribution sociale sur les revenus d’activité et sur les revenus de remplacement à laquelle sont assujettis les personnes physiques qui sont à la fois considérées comme domiciliées en France pour l’établissement de l’impôt sur le revenu et à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire français d’assurance maladie.

Lors de la vérification des justificatifs fournis pour chaque individu de l’échantillon, les agents de contrôle ont constaté des erreurs concernant les taux de CSG applicables (de 0 %, 3,8 %, ou 7,1% selon les cas).

Le détail de ces anomalies a été communiqué à BTP PREVOYANCE, et les agents de contrôle ont calculé la régularisation pour chacun des individus en cause en appliquant la différence entre le taux pratiqué et celui qui aurait dû l’être sur le montant de la prestation concernée, tel que communiqué par les services de BTP PREVOYANCE.

Devant la commission de recours amiable de l’URSSAF, BTP PREVOYANCE a produit des justificatifs ayant permis de réduire les chefs de redressement à ce titre en procédant à un nouveau calcul de l’échantillon suivant la méthode de l’extrapolation acceptée par la cotisante.

BTP PREVOYANCE reproche à la commission de ne pas avoir tiré les conséquences de l’acceptation des justificatifs produits en annulant intégralement les redressements opérés de ce chef.

Or, les justificatifs produits, et qui ont été retenus par l’URSSAF à hauteur de leur valeur probante, ne pouvaient avoir pour effet que de rectifier à due proportion l’échantillon à partir duquel le redressement a été recalculé.

Les pièces justificatives produites demeurant parcellaires, il n’était donc pas permis à l’organisme, dans le cadre des règles spécifiques d’échantillonnage et d’extrapolation acceptées par la cotisante, de s’affranchir de ces dernières et d’annuler l’intégralité du redressement.

Il s’ensuit que l’URSSAF PACA a fait une exacte application de la loi, et que les moyens de BTP PREVOYANCE à ce titre ne sont pas fondés.

Sur le trop versé en net sur les IJ non précédées de GAT (points n°10 et 15)

Les inspecteurs du recouvrement ont relevé que BTP PREVOYANCE ne procédait sur ces prestations versées qu’à la retenue du précompte salarial correspondant aux contributions CSG-CRDS, à l’exclusion des cotisations sociales.

Ils considèrent qu’en application des articles L.242-1 et R.242-1 du code de la sécurité sociale, ces prestations devaient être soumises non seulement aux prélèvements CSG-CRDS, mais aussi à cotisations sociales.

Il résulte de la lettre d’observations que BTP PREVOYANCE verse des indemnités journalières non précédées de GAT aux salariés des entreprises adhérentes qui ont pris cette option (paiement direct au salarié) et qu'elle informe ensuite les employeurs du montant brut à déclarer pour les salariés concernés.
Il y est également indiqué que sur ces montants bruts, BTP PREVOYANCE ne précompte que la CSG-CRDS et non l’ensemble des charges salariales, payant de ce fait, selon les inspecteurs du recouvrement, un montant net qui ne correspond plus au brut déclaré par les employeurs.

L’URSSAF a réintégré dans l’assiette des cotisations la différence entre le montant des indemnités journalières qu’aurait dû percevoir les salariés concernés et le montant réellement payé par BTP PREVOYANCE.

Il résulte cependant des articles R.243-6 et L.242-1 du code de la sécurité sociale, que les cotisations sociales sont par principe versées par la personne qui a qualité d’employeur, hors le cas des versements effectués par un tiers comme prévu à l’article L.242-1-4 du code de la sécurité sociale ou par d’autres textes spéciaux.

Il n’est pas discuté qu’aucune convention ne prévoit que BTP PREVOYANCE soit substituée à l'entreprise adhérente, en sa qualité d’employeur, dans ses obligations déclaratives.

BTP PREVOYANCE n’ayant pas la qualité d’employeur, il s’ensuit que l’URSSAF était mal fondée à lui imposer, à ce titre, un rappel de cotisations.

C’est en vain que l’URSSAF fait valoir que BTP PREVOYANCE n’a pas mis ses entreprises adhérentes, ayant la qualité d’employeur, en mesure de déclarer et payer les cotisations qui leur incombent alors même qu’il résulte des constatations des inspecteurs du recouvrement que BTP PREVOYANCE communique le montant brut des prestations servies et à soumettre à cotisations.
Le redressement doit dès lors être annulé sur ces points.

L’URSSAF PACA soutient, à titre subsidiaire, la responsabilité civile pour faute de BTP PREVOYANCE en invoquant une pratique irrégulière, découlant du seul précompte de la CSG-CRDS, et réitérée malgré un redressement pour un motif identique en 2012, qui a eu pour conséquence d’éluder des cotisations que l’organisme sera dans l’incapacité de recouvrer en l’absence d’employeurs identifiés.

Or, l’organisme ne démontre nullement en quoi en communiquant le montant brut des prestations servies et à soumettre à cotisations, hors CSG-CRDS, BTP PREVOYANCE n’aurait pas mis en état les employeurs concernés de procéder à la déclaration et au paiement des cotisations, tant salariales que patronales qui leur incombent.

BTP PREVOYANCE n’a pas failli aux obligations mises à sa charge et n’a pas empêché les employeurs concernés de procéder à la déclaration et au paiement des cotisations qui leur incombent.

Par ailleurs, le manque à collecter invoqué par l’URSSAF ne présente aucun caractère certain dans la mesure où il n’est pas établi que les entreprises adhérentes n’aient pas toutes déclaré et versé les cotisations dues, ou qu’elle ait fait l’objet d’un contrôle ou d’un redressement, sur le territoire national, par une autre URSSAF.

En conséquence, la demande de dommages et intérêts est mal fondée et sera rejetée.

Compte tenu du solde créditeur dégagé en faveur de BTP PREVOYANCE à l’issue des opérations de vérification réalisées pour les années 2012 à 2014, il n’y a pas lieu d’ordonner sa condamnation au paiement des mises en demeure délivrées le 23 décembre 2015, alors que celles-ci ont vocation à être compensées avec les avis de crédit du 22 décembre 2015 notifiés pour les mêmes périodes.

Sur les demandes accessoires

L’URSSAF PACA, succombant partiellement à l’instance, en supportera les dépens.

Les considérations relatives à l’équité ou à la situation économique des parties ne justifient pas de condamnation sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

Compte tenu de la nature et de l’ancienneté du litige, la présente décision sera assortie de l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort,

Ordonne la jonction des affaires enregistrées sous les numéros RG 17/03102 et n°17/03300, avec poursuite de l'instance sous le numéro unique 17/03102 ;

Donne acte à l’URSSAF PACA de l’annulation du rappel de cotisations au titre de l’année 2013 du point n°19 de la lettre d’observations du 12 octobre 2015 notifiée à BTP PREVOYANCE, ramenant ce chef de redressement à la somme de 156.312 € en cotisations pour les années 2012 et 2014 ;

Annule les chefs de redressements n°10 et 15 de la lettre d’observations du 12 octobre 2015, et les rappels de cotisations subséquents ;

Déboute les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires ;

Dit n’y avoir lieu à condamnation sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne l’URSSAF PACA aux dépens de l’instance ;

Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement.

Conformément aux dispositions de l'article 538 du Code de procédure civile, tout appel de la présente décision doit être formé, à peine de forclusion, dans le délai d’un mois à compter de sa notification.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 25 juin 2024.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc : urssaf
Numéro d'arrêt : 17/03102
Date de la décision : 25/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-25;17.03102 ?
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