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18/06/2024 | FRANCE | N°19/00178

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc: cpam, 18 juin 2024, 19/00178


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
Caserne du Muy
CS 70302 – 21 rue Ahmed Litim
13331 Marseille cedex 03


JUGEMENT N°24/02690 du 18 Juin 2024

Numéro de recours: N° RG 19/00178 - N° Portalis DBW3-W-B7D-V3IO

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
S.A.S. [3]
[Adresse 5]
[Localité 1]
représentée par Me Morgane COURTOIS D’ARCOLLIERES, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Juliette MILLOT, avocat au barreau de PARIS


c/ DEFENDERESSE
Organisme CPCAM DES BOUCHES-DU-RHONE
*
[Localité 2]<

br>représentée par Mme [Z] (Inspecteur)




DÉBATS : À l'audience publique du 14 Mars 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et d...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
Caserne du Muy
CS 70302 – 21 rue Ahmed Litim
13331 Marseille cedex 03

JUGEMENT N°24/02690 du 18 Juin 2024

Numéro de recours: N° RG 19/00178 - N° Portalis DBW3-W-B7D-V3IO

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
S.A.S. [3]
[Adresse 5]
[Localité 1]
représentée par Me Morgane COURTOIS D’ARCOLLIERES, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Juliette MILLOT, avocat au barreau de PARIS

c/ DEFENDERESSE
Organisme CPCAM DES BOUCHES-DU-RHONE
*
[Localité 2]
représentée par Mme [Z] (Inspecteur)

DÉBATS : À l'audience publique du 14 Mars 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : PAWLOWSKI Anne-Sophie, Vice-Présidente

Assesseurs : PFISTER Laurent
DURAND Patrick

L’agent du greffe lors des débats : AROUS [P],

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 18 Juin 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

La SAS [3] a régularisé le 28 mai 2018 une déclaration d'accident du travail pour le compte de son salarié, [D] [J], mentionnant les circonstances suivantes :

« Date : 26.04.2018 ; Heure : 17h15 ; Activité de la victime lors de l’accident : l’intérimaire a voulu descendre de son chariot ; Nature de l’accident : selon ses dires la victime serait descendue du chariot avant qu’il ne soit à l’arrêt total. Celui-ci aurait heurté son talon. Il a continué sa journée de travail et en a référé à son chef d’équipe ; Objet dont le contact a blessé la victime : chariot ; Siège des lésions : pied, pied gauche, talon, talon gauche ».

Un certificat médical initial établi le 27 avril 2018 par le docteur [O], médecin généraliste, a constaté : « écrasement talon pied gauche, plaie du talon, douleur à l’appui et à la marche ».

Par courrier en date du 5 juin 2018, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) des Bouches-du-Rhône a notifié à la société [3] sa décision de prise en charge de l'accident de [D] [J] au titre de la législation sur les risques professionnels.

Le 8 novembre 2018, la société [3] a saisi la commission de recours amiable de la CPAM des Bouches-du-Rhône afin de contester la durée des arrêts de travail et des soins prescrits à [D] [J] suite de l’accident du travail du 27 avril 2018.

Par courrier recommandé avec demande d'avis de réception expédié 14 décembre 2018, la société [3] a, par l’intermédiaire de son avocat, saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d’un recours à l’encontre de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable.

Cette affaire a fait l'objet, par voie de mention au dossier, d'un dessaisissement au profit du pôle social du tribunal de grande instance de Marseille, devenu tribunal judiciaire de Marseille, en vertu de la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle

La commission de recours amiable a explicitement rejeté le recours de la société [3] par décision du 22 janvier 2019.

Après une phase de mise en état, l’affaire a été appelée et retenue à l’audience de plaidoirie du 14 mars 2024.

Par voie de conclusions soutenues oralement par son avocat, la société [3] demande au tribunal de déclarer que les arrêts de travail prescrits à [D] [J] à compter du 12 mai 2018 lui sont inopposables.

A l’appui de ses prétentions, la société soutient qu’il existe une disproportion entre les lésions constatées suivant certificat médical initial et la durée totale des arrêts de travail de [D] [J]. Elle fait par ailleurs valoir que, depuis le 12 mai 2018, les arrêts de travail de son salarié ne sont plus délivrés par le docteur [O] mais par le docteur [G], dont le cabinet médical se situe à plus de 75 kilomètres du domicile de [D] [J]. Elle souligne, d’une part, qu’il est curieux que son salarié se rende dans un cabinet aussi éloigné de son domicile situé à [Localité 4] alors même qu’il souffre de douleurs au pied, et d’autre part, que ces arrêts ne peuvent faire l’objet d’une indemnisation en application de l’article L162-4-4 du code de la sécurité sociale.

La CPAM des Bouches-du-Rhône, représentée par un inspecteur juridique soutenant oralement ses écritures, demande au tribunal de dire opposables à la société [3] l’ensemble des arrêts de travail, soins et prestations consécutifs à l’accident du travail du 26 avril 2018, de débouter la société [3] de l’ensemble de ses demandes, et de la condamner au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, la caisse soutient que la présomption d’imputabilité des lésions au travail couvre l’ensemble des prestations servies jusqu’à la guérison ou la consolidation de l’état de santé de l’assuré. Elle ajoute que, selon la jurisprudence en vigueur, la seule production du certificat médical initial et des relevés de paiement des indemnités journalières est suffisante à rapporter la preuve de la continuité des symptômes et des soins. La caisse estime que la société [3] ne rapporte pas la preuve d’une cause totalement étrangère au travail, et que les dispositions de l’article L162-4-4 du code de la sécurité sociale ne s’appliquent pas dans le cadre des rapports caisse / employeur, de sorte que les arrêts et soins prescrits à [D] [J] doivent déclarés opposables à la société.

L'affaire est mise en délibéré au 18 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Il est désormais acquis qu'il résulte des dispositions de l'article L.411-1 du code de la sécurité sociale que la présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, dès lors qu'un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d'accident du travail est assorti d'un arrêt de travail, s'étend pendant toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime, et il appartient à l'employeur qui conteste cette présomption d'apporter la preuve contraire.

En l’espèce, il ressort de la déclaration d’accident du travail renseignée par la société [3] que, le 26 avril 2018, [D] [J] a heurté son talon du pied gauche contre un chariot.

Le certificat médical initial du 27 avril 2018, produit aux débats, constate un écrasement du talon du pied gauche, une plaie du talon, ainsi que des douleurs à l’appui et à la marche, rendant nécessaire la prescription d’un arrêt de travail jusqu’au 2 mai 2018.

Les lésions issues de cet accident du travail ont été déclarées guéries le 18 mars 2020.

Il en résulte que la présomption d’imputabilité de l’accident du 26 avril 2018 s’étend sur toute la durée d’incapacité de travail jusqu’au 18 mars 2020, date de guérison des lésions de l’assuré, à moins que la société [3] ne rapporte la preuve que les lésions prises en charge ont une origine totalement étrangère au travail.

La société [3] se prévaut des dispositions de l'article L162-4-4 du code de la sécurité sociale, en application desquelles, en cas de prolongation d'un arrêt de travail, l'indemnisation n'est maintenue que si la prolongation de l'arrêt est prescrite par le médecin prescripteur de l'arrêt initial ou par le médecin traitant, sauf impossibilité dûment justifiée par l'assuré à l'exception des cas définis par décret.

Elle souligne que depuis le 12 mai 2018, les arrêts de travail de son salarié ne sont plus délivrés par le docteur [O], médecin prescripteur de l’arrêt initial, mais par le docteur [G], et considère donc que c’est à tort que ces arrêts ont été pris en charge par la caisse.

Le tribunal relève cependant que, non seulement l’article L162-4-4 institue une limitation qui ne concerne que les prestations en espèces et non les prestations en nature, mais en outre il est inscrit dans le livre premier du code de la sécurité sociale alors que la législation sur les accidents du travail est instituée par le livre IV.

Les prestations en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle sont réglementées au titre III du livre quatrième et la procédure au titre IV du livre IV du même code, et ces titres instituent des procédures propres à ces accidents et maladies qui ne reprennent pas les dispositions de l'article L162-4-4 précité.

Au contraire, l'article L432-2 du code de la sécurité sociale, qui se situe dans le titre III du livre quatrième, dispose que la victime conserve le libre choix de son médecin, de son pharmacien et, le cas échéant, des auxiliaires médicaux dont l'intervention est prescrite par le médecin.

Dès lors, le moyen soulevé de ce chef par la société [3] est inopérant.

Le tribunal observe en outre que la société [3] ne produit aucune pièce aux débats de nature à établir l’existence d’une origine étrangère au travail des lésions, les simples circonstances que la lésion initiale ait entraîné la prescription d’arrêts de travail et de soins jusqu’au 18 mars 2020, et que le médecin prescripteur se trouve à plusieurs kilomètres de du domicile de l’assuré étant insuffisantes à rapporter une telle preuve.

Le moyen n’est donc pas fondé et, par suite, il conviendra de débouter la société [3] de l’intégralité de ses demandes.

La prise en charge par la CPAM des Bouches-du-Rhône des arrêts, soins et prestations relatifs à l’accident du travail dont a été victime [D] [J] le 26 avril 2018 sera en conséquence déclarée opposable à la société [3].

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, la société [3], qui succombe en ses prétentions, sera condamnée aux dépens de l’instance.

Il serait inéquitable que la CPAM des Bouches-du-Rhône supporte l’intégralité des frais de procédure qu’elle a été contrainte d’exposer dans le cadre de la présente instance. La société [3] sera dès lors condamnée à lui verser la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant après en avoir délibéré, par jugement contradictoire, et en premier ressort,

DECLARE recevable mais mal fondé le recours de la SAS [3],

DEBOUTE en conséquence la SAS [3] de l’ensemble de ses demandes,

DECLARE opposables à la SAS [3] l’ensemble des arrêt, soins et prestations relatifs à l’accident du travail dont a été victime [D] [J] le 26 avril 2018,

CONDAMNE la SAS [3] à verser à la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SAS [3] aux dépens de l’instance.

RAPPELLE que la présente décision est susceptible d’appel dans le délai d’un mois à compter de sa notification.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 18 juin 2024.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc: cpam
Numéro d'arrêt : 19/00178
Date de la décision : 18/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-18;19.00178 ?
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