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13/06/2024 | FRANCE | N°23/12667

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 1ère chambre cab2, 13 juin 2024, 23/12667


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE


JUGEMENT N°24/ DU 13 Juin 2024


Enrôlement : N° RG 23/12667 - N° Portalis DBW3-W-B7H-4GAM

AFFAIRE : M. [O], [D] [X]( Me Maryline PARMAKSIZIAN)
C/ S.C.I. VIROMA LES MILLES (Me Bernard KUCHUKIAN)


DÉBATS : A l'audience Publique du 04 Avril 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL:

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président
Assesseur : JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente (juge rapporteur)
Assesseur : UGOLINI Laëtitia, Vice-Président

Greffier lors des débats :

ALLIONE Bernadette

Vu le rapport fait à l’audience

A l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la déci...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N°24/ DU 13 Juin 2024

Enrôlement : N° RG 23/12667 - N° Portalis DBW3-W-B7H-4GAM

AFFAIRE : M. [O], [D] [X]( Me Maryline PARMAKSIZIAN)
C/ S.C.I. VIROMA LES MILLES (Me Bernard KUCHUKIAN)

DÉBATS : A l'audience Publique du 04 Avril 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL:

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président
Assesseur : JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente (juge rapporteur)
Assesseur : UGOLINI Laëtitia, Vice-Président

Greffier lors des débats : ALLIONE Bernadette

Vu le rapport fait à l’audience

A l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 13 Juin 2024

Jugement signé par SPATERI Thomas, Vice-Président et par BERARD Béatrice, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDEUR

Monsieur [O], [D] [X]
né le [Date naissance 2] 1940 à [Localité 6] (ITALIE)
de nationalité Française, demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Maryline PARMAKSIZIAN, avocat au barreau de MARSEILLE,

C O N T R E

DEFENDERESSE

Société VIROMA (anciennement VIROMA LES MILLES), Société civile immatriculée au RCS de Marseille sous le n° 321 314 643 agissant par son gérant social M. [N] [M]dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Bernard KUCHUKIAN, avocat au barreau de MARSEILLE,

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte en date du 13 décembre 2023, [O] [X] a fait assigner la SCI VIROMA (anciennement dénommée VIROMA LES MILLES jusqu’au 31 août 2022) pour obtenir l’annulation de la troisième délibération de l’assemblée générale mixte de la SCI VIROMA du 31 août 2022.

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 7 février 2024 auxquelles il y a lieu de se référer pour un plus ample exposé des moyens, [O] [X] demande au Tribunal de :
- annuler la troisième résolution de l’Assemblée Générale mixte de la société VIROMA du 31 août 2022,
- débouter la société VIROMA de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la société VIROMA à lui payer la somme de 3.600 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la société VIROMA et aux entiers dépens.

Il expose que la gérante de la SCI VIROMA, [C] [X] épouse [M], a convoqué une Assemblée Générale mixte le 26 juillet 2022 pour le 31 août 2022; que victime d’un accident domestique le 2 août 2022 entraînant une fracture de l’épaule, il n’a pas pu assister à cette assemblée qui se tenait sur la commune de [Localité 5] alors qu’il est domicilié à [Localité 4]; qu’à réception du procès-verbal de l’Assemblée Générale du 31 août 2022, il a constaté qu’elle avait délibéré sur une troisième résolution qui ne figurait pas à l’ordre du jour.
Il affirme qu’il est en droit de soulever la nullité de la délibération litigieuse, dès lors qu’il apparaît que les modalités de convocation à l’assemblée générale n’ont pas été respectées, et que la délibération lui fait grief; qu’en effet, la troisième délibération votée lors de l’assemblée générale du 31 août 2022 de la société VIROMA a pour objet de lui rendre opposable le prix de 40.000 € au motif qu’il n’aurait pas contesté l’assemblée générale du 30 septembre 2020, or le fait de ne pas avoir contesté la délibération de l’Assemblée Générale du 30 septembre 2020 n’a pas pour effet de rendre valable une délibération nulle et la Cour de cassation a jugé que l’exception de nullité est perpétuelle nonobstant la prescription triennale de l’article 1844-14 du Code civil; qu’en tout état de cause, par jugement du 2 juin 2022, le Tribunal judiciaire de Marseille a condamné la société VIROMA à lui payer la somme de 962.000 € au titre de la valeur de ses parts sociales et ainsi que le relève ce jugement, il n’y a pas d'accord des parties à l'instance sur le prix de 40.000 €, et c'est donc à juste titre que l’expert, après avoir analysé cette cession dans sa réponse à un dire, ne l’a pas retenue pour son évaluation; que par ordonnance du 6 janvier 2021, le Président du Tribunal judiciaire de Marseille a également retenu que [O] [X] n’avait aucunement agréé un prix de parts quelconque mais seulement renoncé à exercer son droit de préemption.
Sur la demande reconventionnelle formulée par la SCI VIROMA, il indique qu’il a manifestement un intérêt légitime à solliciter l’annulation de cette délibération afin de ne pas se voir opposer devant la Cour d’appel son acceptation tacite sur la valeur des parts sociales résultant d’une tierce cession à laquelle il n’était pas partie.

En défense, dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 9 février 2024 auxquelles il y a lieu de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la SCI VIROMA demande au Tribunal de :
- débouter Monsieur [O] [X],
Reconventionnement,
- le condamner à lui payer la somme de 3.000 € au titre de dommages-intérêts,
- l’inviter à informer dans l’actuelle procédure du sort du pourvoi en cassation qu’il a formé contre l’arrêt du 3 mars 2022 de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence,
- le condamner aux dépens et au paiement de la somme de 3.600 € au titre de participation aux frais de l’article 700 du Code de procédure civile,
- ne pas écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Elle fait valoir que la présente procédure s’inscrit dans un long conflit interne de la famille [X], à propos de sociétés communes; qu’une procédure est actuellement pendante devant la Cour d’appel d’Aix-en- Provence en chambre 3-4 R.G. 22/08131, à l’encontre du jugement du 2 juin 2022 du Tribunal judiciaire de Marseille, ayant fixé à plus de 900.000 € la valeur du retrait des parts sociales de l’un de ses associés [O] [X], dont l’exécution provisoire a été arrêtée par ordonnance du Premier Président du 8 juillet 2022.
Elle précise que l’assemblée générale s’est tenue à [Localité 5], siège du cabinet d’expertise comptable MOTTA, et qu’aucune disposition des statuts ne prévoit la tenue de l’assemblée des associés en un lieu déterminé; que [O] [X] aurait pu se faire représenter ou accompagner par toute personne de son choix, ou en demander le report, ou encore exprimer ses observations par courrier, qui aurait été annexé au procès-verbal de l’assemblée générale ; qu’à la date de l’assignation le 13 décembre 2023, l’action triennale en nullité éventuelle de la délibération du 27 octobre 2020 était prescrite.
Elle soutient que la convocation a été adressée le 26 juillet 2022, pour une assemblée générale prévue pour le 31 août suivant, et le délai réglementaire de 15 jours est bien respecté; que le rapport de gérance sur l’activité de la société au cours de l’année 2021, qui comporte le texte des neuf résolutions proposées au vote par la gérance, est joint à la convocation avec d’autres documents; que ce document rappelle les difficultés juridiques encore non définitivement tranchées nées du mécanisme de fixation de la valeur des parts sociales,et notamment l’arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence du 3 mars 2022 qui met à néant deux ordonnances de référé obtenues par [O] [X], et la décision du 28 avril 2022, par laquelle la Cour d’appel refuse à [W] [X] le droit de se retirer comme son frère [O] de la même société, au motif de l’accord finalement trouvé entre tous les associés au sein de la société, dans l’intérêt de celle-ci, en 2020, pour fixer à 40.000 € la valeur de référence de 70 parts; qu’en effet, en 2020, sans opposition et même avec l’accord de [O] [X], la valeur de 70 parts sociales a été fixée à 40.000 € pour le prix d’achat par ses neveux et sa nièce des parts sociales de [C] [M], la tante de ces trois nouveau associés; qu’ainsi, 70 parts sociales valent 40.000 € en vertu des règles de l’article 1843-4 du Code civil, et peu importe alors la condamnation du Tribunal judiciaire du 3 juin 2022 à payer 962.000 €, qui a refusé d’appliquer le pacte social légal de 40.000 €.
A titre reconventionnel, il demande que soit précisé le sort du pourvoi en cassation formé contre l’arrêt du 3 mars 2022 de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence, et l’allocation de la somme de 3.000 euros de dommages intérêts pour procédure abusive.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Aux termes de l’article 1844-10 alinéa 3 du Code civil, «La nullité des actes ou délibérations des organes de la société ne peut résulter que de la violation d'une disposition impérative du présent titre à l'exception du dernier alinéa de l'article 1833, ou de l'une des causes de nullité des contrats en général.»

L’article 40 alinéa 1 du décret n°78-704 du 3 juillet 1978 précise : « Les associés sont convoqués 15 jours au moins avant la réunion de l’assemblée par lettre recommandée. Celle-ci indique l’ordre du jour de telle sorte que le contenu et la portée des questions qui y sont inscrites apparaissent clairement sans qu’il y ait lieu de se reporter à d’autres documents. »

Les modalités de convocation des associés aux assemblées générales sont prescrites à peine de nullité en cas de grief, et ainsi, la violation de l'article 40 du décret de 1978 peut être sanctionnée par la nullité des délibérations prises par l'assemblée irrégulièrement convoquée.

En l’espèce, il est établi que l’ordre du jour adressé à [O] [X] avec sa convocation du 26 juillet 2022 pour l’assemblée générale mixte du 31 août 2022 était le suivant:
« Lecture du rapport du gérant,
Modification de la dénomination sociale
Démission de la gérance et nomination d’un nouveau gérant, Approbation des comptes de l’exercice clos le 31/12/2021 et quitus à la gérance pour l’année 2022
Affectation du résultat de l’exercice 2021
Approbation des charges non déductibles,
Questions diverses,
Pouvoir pour l’accomplissement des formalités. »

Il est constant que la troisième résolution qui a été votée comme suit : « L’assemblée générale constate l’impossibilité pour la société de payer 962.000 € à l’associé retrayant.
Les associés confirment l’offre de lui payer 40.000 € pour ses 70 parts sociales, valeur correspondant à celle qu’il a avalisées pour la cession des 70 parts sociales de sa sœur [C] [X]. Cette résolution soumise au vote est adoptée à l’unanimité des associés présents ou représentés.» n’était pas prévue dans cet ordre du jour.

Cette résolution fait grief à [O] [X] puisqu’elle va à l’encontre du jugement du 2 juin 2022 par lequel il a obtenu la condamnation de la société VIROMA à lui payer la somme de 962.000 euros au titre de la valeur de ses parts sociales, et en tout cas pourrait laisser penser qu’il renonce à ce jugement en acceptant l’offre des associés de lui verser une somme de 40.000 euros.

Ce jugement est actuellement frappé d’appel et aucune décision n’a pour l’heure été rendue par la Cour d’appel.

La troisième résolution adoptée par l’assemblée générale du 31 août 2022 doit donc être annulée.

La SCI VIROMA ne démontre pas la particulière mauvaise foi dont aurait fait preuve [O] [X] en agissant en justice; sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive sera donc rejetée.

La société VIROMA demande au Tribunal d’inviter [O] [X] à l’informer du sort du pourvoi en cassation qu’il a formé contre l’arrêt du 3 mars 2022 de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence.
Sans lien avec la présente instance, cette demande sera rejetée.

Succombant, la SCI VIROMA sera condamnée aux dépens.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge du demandeur l’intégralité des frais irrépétibles qu’il a exposés ; la SCI VIROMA sera donc condamnée à lui payer la somme de 3.600 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

Le présent jugement est de droit exécutoire à titre provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire rendu en premier ressort,

Annule la troisième résolution adoptée par l’assemblée générale du 31 août 2022,

Déboute la SCI VIROMA de l’intégralité de ses demandes,

Condamne la SCI VIROMA aux dépens,

Condamne la SCI VIROMA à payer à [O] [X] la somme de 3.600 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

AINSI JUGE PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIERE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE 13 JUIN 2024.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 1ère chambre cab2
Numéro d'arrêt : 23/12667
Date de la décision : 13/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-13;23.12667 ?
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