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12/06/2024 | FRANCE | N°21/00564

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc: cpam, 12 juin 2024, 21/00564


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 8]
[Adresse 10]
[Localité 1]


JUGEMENT N°24/02634 du 12 Juin 2024

Numéro de recours: N° RG 21/00564 - N° Portalis DBW3-W-B7F-YO7E

AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [W] [V]
né le 09 Mai 1956 à [Localité 9] (MARNE)
[Adresse 4]
[Adresse 13]
[Localité 2]
représenté par Me Serge AYACHE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Simon GASQUET, avocat au barreau de MARSEILLE

c/ DEFENDERESSE
S.A. [16]
[Adresse 5]
[Adresse 5

]
[Localité 6]
représentée par Me Véronique CONDEMINE, avocat au barreau de BORDEAUX

Appelée en la cause:
Organisme CPCAM DES BOUCHES-DU-R...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 8]
[Adresse 10]
[Localité 1]

JUGEMENT N°24/02634 du 12 Juin 2024

Numéro de recours: N° RG 21/00564 - N° Portalis DBW3-W-B7F-YO7E

AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [W] [V]
né le 09 Mai 1956 à [Localité 9] (MARNE)
[Adresse 4]
[Adresse 13]
[Localité 2]
représenté par Me Serge AYACHE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Simon GASQUET, avocat au barreau de MARSEILLE

c/ DEFENDERESSE
S.A. [16]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 6]
représentée par Me Véronique CONDEMINE, avocat au barreau de BORDEAUX

Appelée en la cause:
Organisme CPCAM DES BOUCHES-DU-RHONE
[Adresse 3]
dispensée de comparaître

DÉBATS : À l'audience publique du 03 Avril 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : MEO Hélène, Première Vice-Présidente

Assesseurs : PESCE-CASTELLA Catherine
AMIELH Stéphane

L’agent du greffe lors des débats : MULLERI Cindy

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 12 Juin 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort
EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [W] [V], embauché par la société [16] selon contrat de travail à durée indéterminée à compter du 15 octobre 2018 en qualité de chef d'agence, a été victime le 18 avril 2019 d'un accident du travail.

La déclaration d'accident du travail établie le 19 avril 2018 par l'employeur mentionne les circonstances suivantes : " Chute du portail qui est sorti de son rail et a basculé sur le salarié qui s'est retrouvé coincé dessous ".

Le certificat médical initial établi le 18 avril 2018 au service des urgences de la clinique générale de [Localité 14] fait état des lésions suivantes : " Contusion des 2 genoux. Entorse cheville droite ".

Le certificat médical de prolongation établi le 2 mai 2019 au centre hospitalier du [15] fait état d'une " fracture du plateau tibial externe à gauche ".

Par courrier en date du 30 avril 2019, la caisse primaire centrale d'assurance maladie (ci-après la CPCAM ou la caisse) des Bouches-du-Rhône a pris en charge cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels.

Son état de santé a été considéré comme consolidé à la date du 1er avril 2020 et la CPCAM des Bouches-du-Rhône lui a notifié un taux d'incapacité permanente partielle de 14 % (ci-après taux d'IPP) et une rente annuelle de 3.355,27 € à compter du 2 avril 2020 pour les suites de " séquelles indemnisables d'une fracture du plateau tibial externe gauche, d'une entorse de la cheville droite, traitées orthopédiquement, consistant en une raideur de la cheville et d'une instabilité du genou gauche associé à un stress post traumatique ".

Le 14 septembre 2020, Monsieur [W] [V] a sollicité auprès de la CPCAM des Bouches-du-Rhône la mise en œuvre de la procédure de conciliation prévue dans le cadre d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, et le 13 novembre 2020 un procès-verbal de non-conciliation a été établi par la CPCAM des Bouches-du-Rhône.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 février 2021, Monsieur [W] [V] a saisi par l'intermédiaire de son conseil, le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

Après une phase de mise en état clôturée le 29 novembre 2023 avec effet différé au 20 mars 2024, l'affaire a été appelée à l'audience de plaidoirie du 3 avril 2024.

Monsieur [W] [V], représenté à l'audience par son conseil reprenant oralement ses conclusions n° 2, demande au tribunal de :
déclarer recevable et bien fondé son action ;dire et juger qu'il a été victime d'une faute inexcusable de son employeur, la société [16] ; En conséquence :
ordonner, avant-dire droit, une expertise médicale afin d'évaluer l'ensemble des préjudices qu'il a subis en raison de la faute inexcusable de son employeur avec pour mission telle qu'énoncée dans le dispositif des conclusions ; condamner la société [16] à lui verser une provision de 15.000 € ; majorer à son maximum la rente qui lui a été allouée au titre de l'accident du travail ; débouter la société [16] de toutes ses demandes ; déclarer le jugement à intervenir commun et opposable à la CPCAM des Bouches-du-Rhône ; condamner la CPCAM des Bouches-du-Rhône à lui verser directement la provision ; condamner la société [16] à lui verser la somme de 7.500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
À l'appui de son action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, il soutient qu'il résulte des nombreux manquements de la société [16] aux règles de sécurité qu'elle avait conscience du danger auquel il était exposé et qu'elle n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

La société [16], représentée à l'audience par son conseil reprenant oralement ses conclusions responsives et récapitulatives n° 4, demande au tribunal de :
À titre principal :
constater l'absence de faute inexcusable de sa part ; En conséquence :
débouter Monsieur [W] [V] de l'ensemble de ses demandes ; condamner Monsieur [W] [V] au paiement de la somme de 2.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance ; À titre subsidiaire :
supprimer de la mission d'expertise le poste 11 relatif à la difficulté ou l'impossibilité pour la victime de poursuivre l'exercice de sa profession ou d'opérer une conversion et le poste 13 relatif à l'atteinte à l'intégrité physique et psychique constitutive du déficit fonctionnel permanent ; limiter le montant de la provision sollicitée par Monsieur [W] [V] à de plus justes proportions ; dire que la CPCAM des Bouches-du-Rhône fera l'avance des sommes allouées à Monsieur [W] [V] au titre de la majoration de la rente, de l'indemnisation provisionnelle ainsi que des frais d'expertise ; déclarer le jugement à intervenir commun et opposable à la CPCAM des Bouches-du-Rhône ; débouter Monsieur [W] [V] de sa demande formée au titre des frais irrépétibles ou la limiter à de plus justes proportions.
À l'appui de ses demandes, elle soutient que Monsieur [W] [V] ne démontre nullement qu'elle avait ou aurait dû avoir conscience du danger encouru par ce dernier en manipulant un portail manuel qui résulte de la rupture brutale du mortier de scellement du portail, sans signe annonciateur, alors qu'aucune faiblesse ou détérioration du mortier de scellement ne lui avait été signalée et que l'imprévisibilité de cette rupture ne lui permettait pas d'en prévenir les effets.

Elle répond aux moyens soulevés par Monsieur [W] [V] concernant les règles de sécurité. Ainsi, elle soutient qu'il fait une confusion entre les obligations du maître d'ouvrage pour la conception des lieux de travail (articles R. 4211-1 à R. 4217-2 du code du travail) et celles de l'employeur pour l'utilisation des lieux de travail (article R. 4221-1 à R. 4228-37 du code du travail) dans la mesure où, au moment de l'accident, le chantier était encore en phase de conception des lieux de travail.

Elle fait également valoir que l'accident de Monsieur [W] [V] n'est pas intervenu en raison d'une défaillance du système de guidage du portail dont il n'est nullement démontré qu'il n'était pas muni d'un système de sécurité adéquate pour l'empêcher de sortir de ses rails mais d'une rupture du mortier de scellement ayant entrainé la chute de l'installation.

Enfin, elle soutient que ce n'est qu'au moment de la prise de possession des locaux, et au plus tard dans le mois qui suit, que l'employeur est tenu de transmettre aux utilisateurs un dossier de maintenance des lieux de travail, et non pas dès le stade de la conception des lieux de travail de sorte que lorsque Monsieur [W] [V] a été victime d'un accident du travail, elle n'était pas encore soumise à cette obligation.

La CPCAM des Bouches-du-Rhône, dispensée de comparaître, aux termes de ses écritures régulièrement communiquées aux parties en amont de l'audience, s'en rapporte à la décision du tribunal quant à la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur et demande au tribunal de lui octroyer le bénéfice de l'action récursoire prévue aux articles L. 452-2, L. 452-3 et L. 452-3-1 du code de la sécurité sociale à l'égard de la société [16] afin qu'elle soit condamné à lui rembourser la totalité des sommes dont elle sera tenue d'assurer par avance le paiement, si la faute inexcusable de l'employeur est reconnue.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux écritures des parties pour un exposé plus ample de leurs moyens et prétentions.

L'affaire a été mise en délibéré au 12 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité du recours

Aux termes de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale, le droit à reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur se prescrit par 2 ans à compter du jour de l'accident du travail ou de la cessation du paiement du paiement de l'indemnité journalière.

En l'espèce, bien que la recevabilité du recours de Monsieur [W] [V] ne soit contestée ni par la société [16] ni par la CPCAM des Bouches-du-Rhône, il demande au tribunal de déclarer son action en faute inexcusable de l'employeur recevable.

Il y a lieu de déclarer son recours recevable car introduit dans le délai de 2 ans prévue à l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale.

Sur la faute inexcusable de l'employeur

En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat ; le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

L'employeur a, en particulier, l'obligation de veiller à l'adaptation de ces mesures de sécurité pour tenir compte des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes. Il doit éviter les risques et évaluer ceux qui ne peuvent pas l'être, combattre les risques à la source, adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail, planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions du travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants.

Il appartient au salarié qui souhaite voir reconnaître la faute inexcusable de son employeur ou de ceux qu'il s'est substitué dans la direction dans la survenance de son accident d'établir que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il était exposé, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle du salarié. Il suffit qu'elle en soit la cause nécessaire pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée, alors même que d'autres fautes auraient concouru au dommage.

Enfin, la conscience du danger exigée de l'employeur est analysée in abstracto et ne vise pas une connaissance effective de celui-ci. En d'autres termes, il suffit de constater que l'auteur " ne pouvait ignorer " celui-ci ou " ne pouvait pas ne pas [en] avoir conscience " ou encore qu'il aurait dû en avoir conscience. La conscience du danger s'apprécie au moment où pendant la période de l'exposition au risque.

***

La société [16] est concessionnaire de plusieurs marques de matériels de travaux publics et a pour activité la location de machines et d'équipements pour la construction.

Il résulte du contrat de travail conclu entre les parties que Monsieur [W] [V] a été embauché à compter du 15 octobre 2018 par la société [16] en qualité de chef d'agence " au sein du futur établissement des Bouches-du-Rhône ". Le contrat précise par ailleurs que la rémunération mensuelle brute de l'employé sera complétée par une partie variable en fonction de la réussite de plusieurs objectifs, dont le premier est ainsi libellé " trouver le site et aménager l'agence ".

Il est important de souligner que l'accident du travail est intervenu dans la première phase d'exécution du contrat de travail, alors que le site, préalablement trouvé par Monsieur [W] [V], était en cours d'aménagement.

Ce lieu situé à [Localité 7], sur un important espace extérieur, était équipé de deux portails dont l'un était automatique et l'autre manuel.

Il n'est pas contesté par les parties que Monsieur [W] [V] était en train d'ouvrir le portail manuel pour permettre l'accès à une entreprise extérieure quand son scellement a lâché ce qui a entraîné la chute du portal sur le salarié.

En l'espèce, Monsieur [W] [V] soutient que la conscience du danger se déduit des nombreux manquements de la société [16] à son obligation de sécurité.

Il fait valoir dans ce cadre, d'une part, que le portail n'était pas équipé d'un système de sécurité et que la société [16] n'a pas vérifié l'état du portail ni condamné l'accès à ce dernier et, d'autre part, qu'elle n'a pas évalué le risque de chute des portails d'accès.

La société [16] quant à elle fait valoir que :
Monsieur [W] [V] ne démontre nullement qu'elle avait ou aurait dû avoir conscience du danger qu'il courait en manipulant le portail manuel; Elle n'a jamais été alerté par la société responsable de l'exécution des travaux (la société [11]), ni par les intervenants au chantier (tel la société [12]), ni par Monsieur [W] [V] lui-même, d'une quelconque défaillance du portail manuel ;Il n'est nullement démontré par Monsieur [W] [V] que le portail était dépourvu d'un système de sécurité adéquat tel que prévu à l'article R. 4224-11 du code du travail ; L'accident de Monsieur [W] [V] n'est pas intervenu en raison de la défaillance du système de guidage du portail mais d'une rupture du mortier de scellement entrainant la chute de l'installation ;Elle n'avait pas l'obligation de vérifier l'état des portails ni de tenir un dossier de maintenance dans la mesure où le site était en cours d'aménagement et que les obligations des articles R. 4224-12 et R. 4224-17 du code du travail ne s'impose à l'employeur qu'au moment de la réception de l'ouvrage.
Sur le système de sécurité et la maintenance des portails

L'article R. 4224-11 du code du travail dispose que : " Les portes et portails coulissants sont munis d'un système de sécurité les empêchant de sortir de leur rail et de tomber.
Les portes et portails s'ouvrant vers le haut sont munis d'un système de sécurité les empêchant de retomber ".

L'article R. 4224-12 du code du travail dispose que : " Les portes et portails sont entretenus et contrôlés régulièrement.
Lorsque leur chute peut présenter un danger pour les travailleurs, notamment en raison de leurs dimensions, de leur poids ou de leur mode de fixation, la périodicité des contrôles et les interventions sont consignées dans le dossier prévu à l'article R. 4224-17 ".

L'article R. 4224-17 du code du travail dispose que : " Les installations et dispositifs techniques et de sécurité des lieux de travail sont entretenus et vérifiés suivant une périodicité appropriée.
Toute défectuosité susceptible d'affecter la santé et la sécurité des travailleurs est éliminée le plus rapidement possible.
La périodicité des contrôles et les interventions sont consignées dans un dossier qui est, le cas échéant, annexé au dossier de maintenance des lieux de travail prévu à l'article R. 4211-3. Ce dossier regroupe notamment la consigne et les documents prévus en matière d'aération, d'assainissement et d'éclairage aux articles R. 4222-21 et R. 4223-11 ".

En l'espèce, Monsieur [W] [V] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe dans le cadre de la preuve de la conscience du danger par l'employeur, que le portail n'était pas équipé d'un système de sécurité.

Par ailleurs, les dispositions des articles R. 4224-11, R. 4224-12 et R. 4224-17 du code du travail font partie du titre II du livre II de la quatrième partie du code du travail intitulé "obligations de l'employeur pour l'utilisation des lieux de travail".

Il résulte de l'article R. 4221-1 du code du travail que cette notion de lieux de travail se définit ainsi : " Pour l'application du présent titre, on entend par lieux de travail les lieux destinés à recevoir des postes de travail situés ou non dans les bâtiments de l'établissement, ainsi que tout autre endroit compris dans l'aire de l'établissement auquel le travailleur a accès dans le cadre de son travail.
Les champs, bois et autres terrains faisant partie d'un établissement agricole ou forestier, mais situés en dehors de la zone bâtie d'un tel établissement, ne sont pas considérés comme des lieux de travail ".

En l'espèce, si le lieu sur lequel l'accident du travail s'est produit était destiné à recevoir des postes de travail dans un futur proche, il ne constituait toutefois pas encore un établissement dans la mesure où le site était en cours de construction et d'aménagement de sorte que l'employeur n'était pas encore soumis à l'obligation d'entretien et de contrôle prévu aux articles R. 4224-12 et R. 4224-17 du code du travail.

Enfin, il résulte des dispositions de l'article R. 4211-3 du code du travail que le dossier de maintenance des lieux de travail (DMLT) ne doit être élaboré et transmis aux utilisateurs par le maitre d'ouvrage qu'au moment de la prise de possession des locaux et au plus tard dans le mois qui suit, de sorte qu'en l'espèce la société [16] n'avait pas cette obligation au moment où s'est produit l'accident du travail dont a été victime Monsieur [W] [V].

Sur l'évaluation des risques

L'article R. 4121-1 du code du travail dispose que : " L'employeur transcrit et met à jour dans un document unique les résultats de l'évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs à laquelle il procède en application de l'article L. 4121-3.
Cette évaluation comporte un inventaire des risques identifiés dans chaque unité de travail de l'entreprise ou de l'établissement, y compris ceux liés aux ambiances thermiques ".

L'article R. 4121-2 du code du travail, tel qu'en vigueur au moment du litige, disposait que : " La mise à jour du document unique d'évaluation des risques est réalisée :
1° Au moins chaque année ;
2° Lors de toute décision d'aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, au sens de l'article L. 4612-8 ;
3° Lorsqu'une information supplémentaire intéressant l'évaluation d'un risque dans une unité de travail est recueillie ".

En l'espèce, la société [16] verse aux débats un DUER daté du 19 avril 2019 pour ses deux activités de travaux de bureau d'une part, et de négoce et location de matériel de bâtiment et travaux publics (BTP) d'autre part, cette dernière activité comportant trois unités de travail : attaché commercial, chauffeur et mécanicien dépanneur.

Contrairement à ce que soutient Monsieur [W] [V], la société [16] n'avait pas à mettre à jour le DUER sur le lieu de l'accident du travail dont il a été victime le 18 avril 2019 dans la mesure où, d'une part, il s'agissait d'un chantier en construction dont Monsieur [W] [V] était chargé de la supervision sans être responsable de l'exécution des travaux, cette tâche ayant été confiée à la société [11] et, d'autre part, que les unités de travail n'étaient pas constituées au moment de l'accident du travail.

Il résulte de l'ensemble de ces constatations que la société [16] ne pouvait avoir conscience du danger ayant entraîné l'accident du travail de Monsieur [W] [V] sans qu'il ne soit nécessaire de statuer sur les éventuelles mesures de préventions d'un danger dont elle ne pouvait avoir conscience.

Par conséquent, Monsieur [W] [V] sera débouté de l'intégralité de ses demandes.

Sur les demandes accessoires

Aucune circonstance d'équité ne commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, Monsieur [W] [V], qui succombe, dans ses prétentions sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant après débats publics, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort :

DÉCLARE Monsieur [W] [V] recevable mais mal-fondé en son action;

DÉBOUTE Monsieur [W] [V] de l'ensemble de ses demandes ;

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [W] [V] aux entiers dépens ;

DIT que tout appel de la présente décision doit, à peine de forclusion, être formé dans le mois de la réception de sa notification.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc: cpam
Numéro d'arrêt : 21/00564
Date de la décision : 12/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-12;21.00564 ?
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