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11/06/2024 | FRANCE | N°23/00434

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc: rd/carsat, 11 juin 2024, 23/00434


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]


JUGEMENT N°24/02052 du 11 Juin 2024

Numéro de recours: N° RG 23/00434 - N° Portalis DBW3-W-B7H-3CPK

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
Organisme [6]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté par Me Lionel ASSOUS-LEGRAND, avocat au barreau de PARIS


c/ DEFENDEUR
Monsieur [V] [T]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représenté par Me Nathalie FOUQUE-AUGIER, avocat au barreau de MARSEILLE



DÉBATS :

À l'audience publique du 08 Avril 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : BOUAFFASSA Myriam, Juge

Assesseurs : AL...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]

JUGEMENT N°24/02052 du 11 Juin 2024

Numéro de recours: N° RG 23/00434 - N° Portalis DBW3-W-B7H-3CPK

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
Organisme [6]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté par Me Lionel ASSOUS-LEGRAND, avocat au barreau de PARIS

c/ DEFENDEUR
Monsieur [V] [T]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représenté par Me Nathalie FOUQUE-AUGIER, avocat au barreau de MARSEILLE

DÉBATS : À l'audience publique du 08 Avril 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : BOUAFFASSA Myriam, Juge

Assesseurs : ALLEGRE Thierry
COGNIS Thomas

L’agent du greffe lors des débats : KALIMA Rasmia,

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 11 Juin 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en dernier ressort

EXPOSE DU LITIGE

Par courrier recommandé expédié le 14 février 2023, Monsieur [V] [T] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille d'une opposition à une contrainte décernée le 11 janvier 2023 par le Directeur de l'[6] (ci-après [6]), signifiée le 31 janvier 2023, pour le paiement de la somme de 5.106,02 €, au titre des cotisations et majorations du régime des artistes-auteurs professionnelles (RAAP) pour l'année 2019.

L'affaire a été appelée à l'audience du 9 janvier 2024 et a fait l'objet d'un renvoi à l'audience du 8 avril 2024.

A l'audience du 8 avril 2024, L'[6], représentée par son Conseil, demande au tribunal de :

-Juger Monsieur [V] [T] mal fondé en ses demandes et l'en débouter ;
-Valider la mise en demeure du 15 septembre 2022, pour son entier montant soit la somme totale de 5.106,02 € ;
-Valider la contrainte signifiée le 31 janvier 2023 pour son montant total outre les frais de signification ;
-Condamner Monsieur [V] [T] à verser à l'[6] la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, l'[6] fait valoir que Monsieur [V] [T] ne conteste pas exercer une activité d'artiste auteur et avoir perçu des droits d'auteurs, de sorte qu'il est nécessairement affilié au RAAP, outre son affiliation au RACL et RACD. L'organisme soutient que la question de l'opportunité de l'affiliation obligatoire au RAAP ne relève pas de la compétence du Tribunal et que les nombreuses charges et cotisations pesant sur Monsieur [T] ne sont pas de nature à remettre en cause son obligation de cotiser au RAAP. L'[6] ajoute que Monsieur [T] ne démontre pas remplir les conditions fixées pour prétendre aux exonérations.

Monsieur [V] [T], représenté par son Conseil, demande au tribunal de :

-Annuler la mise en demeure du 10 septembre 2021 ;
-Annuler la contrainte signifiée le 31 janvier 2023 ;
-Débouter l'[6] de ses demandes au titre des régularisations de l'année 2019;
-Débouter l'[6] de sa demande de 1.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
-Condamner l'[6] à lui verser la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
-Condamner l'[6] aux entiers dépens.

A l'appui de ses demandes, Monsieur [V] [T] expose que la mise en demeure est insuffisamment motivée et qu'elle ne lui permet pas d'avoir une parfaite connaissance et une totale compréhension des sommes dues. Sur le fond, il fait valoir que le montant des cotisations réclamées ne correspond pas aux revenus sur lesquels elles devraient être calculées. Il précise qu'il s'est acquitté des cotisations RACL ayant le même objet. Il soutient que les cotisations RAAP, qui relèvent du régime général, s'ajoutent abusivement au régime spécial RACL alors que ces deux cotisations ont un objet commun.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile il est renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé plus ample de leurs prétentions et leurs moyens.

L'affaire a été mise en délibéré au 11 juin 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'opposition

L'article R. 133-3 du code de la sécurité sociale dispose que le débiteur peut former opposition par inscription au secrétariat du tribunal compétent dans le ressort duquel il est domicilié ou pour les débiteurs domiciliés à l'étranger, au secrétariat du tribunal compétent dans le ressort de l'organisme créancier par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au secrétariat dudit tribunal dans les quinze jours à compter de la notification ou de la signification.
L'opposition doit être motivée.

En l'espèce, la contrainte a été signifiée par acte d'huissier daté du 31 janvier 2023 et le délai de quinze jours pour former opposition a valablement commencé à courir à compter de cette date.

L'opposition a été formée par courrier recommandé expédié le 14 février 2023 soit dans le délai de 15 jours légalement prescrit.

Par conséquent, l'opposition formée par Monsieur [V] [T] le 14 février 2023 à l'encontre de la contrainte signifiée le 31 janvier 2023 doit être déclarée recevable.

Sur la validité de la mise en demeure

Sur la régularité de la mise en demeure du 10 septembre 2021

En application de l'article L.244-2 du code de la sécurité sociale, toute action aux fins de recouvrement de cotisations sociales doit être précédée, à peine de nullité, d'une mise en demeure adressée à l'employeur l'invitant à régulariser sa situation dans le mois.

En application de l'article R.244-1 du code de la sécurité sociale, la mise en demeure doit mentionner la cause, la nature et le montant des cotisations réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.

En l'espèce, la mise en demeure du 10 septembre 2021 adressée à Monsieur [V] [T] mentionne régulièrement le montant des cotisations en principal ainsi que les majorations, la nature de ces cotisations (RAAP et RACL) la période d'exigibilité ainsi que le délai de 30 jours impartis pour s'acquitter des sommes.

La mention selon laquelle les sommes n'ont pas été réglées constitue la cause de la mise en recouvrement des sommes réclamées par l'organisme.

Si l'assiette et le taux des cotisations ne sont pas mentionnés dans la mise en demeure, Monsieur [V] [T] en avait toutefois connaissance, ces éléments ayant été mentionnés dans les appels de cotisations et relances qui lui ont préalablement été adressés.

Il s'en suit que la mise en demeure comporte régulièrement l'ensemble des mentions requises et permet à Monsieur [V] [T] d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation.

Le moyen tiré du défaut de motivation sera donc rejeté.

Sur le bien-fondé de la contrainte

En vertu de l'article L. 382-1 du code de la sécurité sociale, " les artistes auteurs d'œuvres littéraires et dramatiques, musicales et chorégraphiques, audiovisuelles et cinématographiques, graphiques et plastiques, ainsi que photographiques, sous réserve des dispositions suivantes, sont affiliés obligatoirement au régime général de sécurité sociale pour les assurances sociales et bénéficient des prestations familiales dans les mêmes conditions que les salariés ".

Aux termes du décret n°61-1304 du 4 décembre 1961 relatif au régime d'assurance vieillesse complémentaire des auteurs et compositeurs de musique "Les auteurs et compositeurs de musique qui au cours d'une année ont perçu, à ce titre, un montant de redevances de droits d'exécution publique et de droits de reproduction mécanique d'œuvres littéraires ou musicales non dramatiques au moins égal au minimum fixé par le règlement prévu à l'article 2 du présent décret, sont redevables d'une cotisation destinée à financer un régime d'assurance vieillesse complémentaire fonctionnant entre les personnes susmentionnées. (…) Le régime d'assurance vieillesse complémentaire institué par le présent décret, dont la gestion est assurée par l'[6] mentionnée au premier alinéa de l'article 1er du décret n° 2011-2074 du 30 décembre 2011 relatif à la gouvernance des régimes d'assurance vieillesse complémentaire des artistes et auteurs relevant de l'article L. 382-1 du code de la sécurité sociale, est administré par un conseil d'administration, dont la composition est fixée par le règlement prévu à l'alinéa ci-après. (…)."

Par ailleurs, aux termes de l'arrêté du 21 novembre 2013 portant approbation du règlement du régime des artistes auteurs professionnels (RAAP), des modifications apportées au règlement du régime de retraite des auteurs et compositeurs lyriques (RACL) et au règlement du régime de retraite des auteurs et compositeurs dramatiques et auteurs de films (RACD), le régime RAAP géré par la caisse [6] " (…) s'applique à titre obligatoire aux personnes visées à l'article L. 382-1 du code de la sécurité sociale, auteurs et compositeurs de musique, auteurs et compositeurs dramatiques, auteurs de films, personnes exerçant leur activité dans le domaine des arts graphiques, plastiques et photographiques, écrivains ou traducteurs littéraires. Pour les auteurs et compositeurs, l'affiliation et l'obligation de cotiser qui en découle prennent leur source dans la perception des redevances de droits d'auteurs ".

Dès lors, les artistes-auteurs professionnels, dès lors qu'ils sont rémunérés en droits d'auteur, sont soumis à un régime complémentaire obligatoire géré par l'[6] qui comprend :
-D'une part, un régime commun dénommé RAAP où l'adhérent cotise dès lors qu'il a perçu un minimum de droits d'auteurs sur l'année civile qui précède,
-D'autre part, les régimes spécifiques RACD et RACL dont les cotisations sont retenues à la source par les sociétés de gestion de droits ou les producteurs.

À partir de 2016, les cotisations au RAAP, jusqu'alors forfaitaires et calculées en fonction de la classe de cotisation choisie par l'affilié, ont été soumises à un système de cotisation proportionnelle au revenu de l'artiste.

Le Tribunal judiciaire n'a aucune compétence pour apprécier le bien-fondé d'un système de retraite obligatoire mis en place pour une profession ou encore le mode de calcul des cotisations retenu, lesquels relèvent du pouvoir réglementaire, de sorte que les arguments soulevés sur ce point par Monsieur [T] ne peuvent être pris en considération par le Tribunal.

Monsieur [V] [T] qui ne conteste pas avoir exercé au cours de l'année 2017 une activité d'artiste-auteur est donc affilié obligatoirement au régime des artistes-auteurs professionnels (RAAP), régime de retraite complémentaire obligatoire géré par l'[6].

A ce titre, une mise en demeure datée du 10 septembre 2021 lui a été délivrée par la Directrice de l'[6] pour le paiement de la somme de 5.106,02 € dont 4.862,88 € de cotisations exigibles au titre du régime RAAP pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2019 et 243,14 € de majorations de retard.

Monsieur [V] [T] conteste les sommes réclamées par l'organisme.

Toutefois, il ne rapporte aucun élément de nature à remettre en cause le montant des cotisations réclamées au titre de l'article L. 382-1 du Code de la sécurité sociale.

Le récapitulatif fiscal de ses droits d'auteur, produit par Monsieur [V] [T] vise les droits d'auteur perçus en 2019 et non les droits d'auteur perçus en 2018 qui constituent l'assiette de cotisations 2019.

Il résulte du relevé de droits d'auteurs établi par la [7] que Monsieur [V] [T] a perçu la somme de 249.722 € au titre de ses revenus de droits d'auteur de l'année 2018.

Par conséquent, une cotisation obligatoire était due au RAAP au titre de l'année 2019 dans la mesure où le montant des droits perçus en 2018 sont supérieurs au seuil d'affiliation fixé sur la période litigieuse à la somme de 8.892 euros.

L'article 3II du décret 2015-1877 du 30 décembre 2015 a fixé le taux de cotisation au RAAP à 6% pour la période d'exigibilité concernée, taux ramené à 4% sur les revenus déjà assujettis aux régimes RACD et/ou RACL conformément à l'article 2 II du décret 62-420 du 11 avril 1962 relatif au régime d'assurance vieillesse-complémentaire des articles et auteurs professionnels.

Enfin, selon l'article 26 du règlement applicable au RAAP dans sa version applicable aux cotisations 2019 produit, le non-paiement de la cotisation ou fraction de cotisation due au RAAP entraine l'exigibilité de la totalité de la cotisation due ainsi que l'application d'une majoration de 5%.

L'[6] a expliqué clairement le calcul effectué en fonction des principes ci-dessus rappelés et de l'assiette sociale totale des droits d'auteurs communiquée par la [7].

Il conviendra dès lors de valider la contrainte signifiée le 31 janvier 2023 s'agissant de la cotisation RAAP relative à la période du 1er janvier au 31 décembre 2019, pour son entier montant de 5.106,02 € et de condamner
Monsieur [V] [T] au paiement de ladite somme.

Sur les mesures accessoires

En application de l'article 696 du code de procédure civile et de l'article R133-6 du code de la sécurité sociale, la partie succombant à l'instance doit supporter les dépens ainsi que les frais de signification de la contrainte.

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de l'[6].

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire, et en dernier ressort :

DÉCLARE recevable le recours formé par Monsieur [V] [T] à l'encontre de l'[6] ([6]) mais mal fondé ;

VALIDE la contrainte n° 002825935-2019-11012023 décernée le 11 janvier 2023 par le Directeur de l'[6], signifiée le 31 janvier 2023, pour le paiement de la somme de 5.106,02 €, au titre des cotisations et contributions du régime RAAP pour la période d'exigibilité du 1er janvier au 31 décembre 2019, en ce compris 243,14 euros de majorations de retard ;

CONDAMNE Monsieur [V] [T] à payer à l'[6] la somme de de 5.106,02 € au titre des cotisations et contributions du régime RAAP pour la période d'exigibilité du 1er janvier au 31 décembre 2019, en ce compris 243,14 euros de majorations de retard ;

CONDAMNE Monsieur [V] [T] aux dépens ;

RAPPELLE que l'exécution provisoire de ce jugement est de droit ;

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc: rd/carsat
Numéro d'arrêt : 23/00434
Date de la décision : 11/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-11;23.00434 ?
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