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30/05/2024 | FRANCE | N°21/01402

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc: cpam, 30 mai 2024, 21/01402


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Adresse 4]


JUGEMENT N°24/02489 du 30 Mai 2024

Numéro de recours: N° RG 21/01402 - N° Portalis DBW3-W-B7F-YZ2G

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
S.E.L.U.R.L. [6] “[5]”
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Adrien LANGLOIS, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Marie-hélène SALASCA-BLANC, avocat au barreau de MARSEILLE


c/ DEFENDERESSE
Organisme CPAM [Localité 3]
[Localité 1]
représentée par Mme [OU] [U

] (Inspecteur juridique), munie d’un pouvoir régulier


DÉBATS : À l'audience publique du 12 Février 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL lors ...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Adresse 4]

JUGEMENT N°24/02489 du 30 Mai 2024

Numéro de recours: N° RG 21/01402 - N° Portalis DBW3-W-B7F-YZ2G

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
S.E.L.U.R.L. [6] “[5]”
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Adrien LANGLOIS, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Marie-hélène SALASCA-BLANC, avocat au barreau de MARSEILLE

c/ DEFENDERESSE
Organisme CPAM [Localité 3]
[Localité 1]
représentée par Mme [OU] [U] (Inspecteur juridique), munie d’un pouvoir régulier

DÉBATS : À l'audience publique du 12 Février 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : DEPARIS Eric, Vice-Président

Assesseurs : JAUBERT Caroline
AMELLAL Ginette

Lors des débats : ELGUER Christine, Greffier

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 30 Mai 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 25 mai 2021, la SELURL [6] (ci-après [6]) a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille d’un recours contre la décision implicite de rejet de la Commission de Recours Amiable de la caisse primaire centrale d’assurance maladie des [Localité 3] (ci-après CRA), à l’encontre de la mise en demeure du 7 janvier 2021 de la caisse primaire centrale d’assurance maladie des [Localité 3] (ci-après CPAM ou la caisse) d’un montant de 60080,02 € au motif que des anomalies de facturation ont été constatées sur la période du 1er juillet 2015 au 30 juin 2017. Il s’agissait du recours n° RG 21/01402.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 janvier 2020, la [6] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille d’un recours contre la décision implicite de rejet de la CRA de la CPAM des [Localité 3], faisant suite à la notification par la CPAM des [Localité 3] d’une pénalité financière d’un montant de 3000 euros par courrier en date du 22 novembre 2019. Il s’agissait du recours n° RG 20/00323.

Par ordonnance présidentielle du 16 mai 2023, il a été prononcé la jonction des recours n° RG 21/01402 et RG 20/00323 sous le seul numéro RG 21/01402.

L’affaire a été appelée à l’audience de fond du 12 février 2024.

La [6], représentée par son conseil soutenant oralement ses conclusions, sollicite du tribunal de :

A titre principal :
-Dire et juger que la matérialité des faits qui lui sont reprochés n’est pas avérée, que la mise en demeure du 7 janvier 2021 est irrégulière et prononcer sa nullité,
-Dire et juger ne pas y avoir lieu à pénalité financière et déclarer nulle et non avenue la pénalité du 22 novembre 2019,
-Débouter la CPAM des [Localité 3] de l’ensemble de ses demandes,

A titre subsidiaire :
-Dire et juger que la pénalité du 22 novembre 2019 est irrégulière en son principe et disproportionnée en son montant et la réduire à de plus justes proportions,
-Condamner la CPAM des [Localité 3] à lui payer la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Elle soutient que la procédure de recouvrement de l’indu et la mise en demeure sont entachées d’irrégularités. A ce titre, elle fait valoir que faute de décision explicite de la CRA, le tribunal de céans n’est pas en mesure d’appréhender la validité de la procédure de recouvrement de l’indu, que la mise en demeure ne comporte pas le ou les motifs qui ont conduit au rejet de ses observations, et que la CPAM des [Localité 3] n’avait pas le droit de mentionner qu’elle avait la possibilité de procéder à des retenues sur les prestations à venir dans la mesure où elle avait produit des observations et qu’elle conteste l’indu.

Sur le fond, elle conteste cet indu tant dans son principe que dans son montant. Elle explique au tribunal les raisons pour lesquelles les six griefs retenus par la CPAM à l’appui de l’indu lui paraissent injustifiés.

Concernant la pénalité, elle soutient que celle – ci est irrégulière dans son principe et disproportionnée dans son montant dans la mesure où cette pénalité ne repose pas sur des agissements fautifs avérées et non contestées et que la commission des pénalités avait proposé une pénalité d’un montant de 1000 € et non 3000 €.

La CPAM des [Localité 3], représentée par un inspecteur juridique soutenant oralement ses conclusions, sollicite du tribunal de :

-débouter la [6] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
-condamner la [6] au paiement de la somme de 60080,02 € au titre de l’indu,
-condamner la [6] au paiement de la somme de 3000 € au titre de la pénalité financière,
-condamner la [6] aux entiers dépens.

Elle soutient que la procédure de recouvrement et la mise en demeure relative à l’indu sont parfaitement régulières et n’encourent aucune nullité. A ce titre, elle fait valoir qu’aucun texte ni aucune jurisprudence ne prévoit une exposition des motifs au fond de rejet des observations du professionnel de santé, que la [6] a été informé des griefs qui lui sont reprochés dès la notification de payer et que la mise en demeure comporte la cause, la nature et le montant des sommes réclamées. Elle fait également valoir que le fait de rappeler dans la mise en demeure la possibilité prévue à l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale de récupérer les sommes indument perçues sur les prestations à venir n’a pas pour effet de rendre nulle la mise en demeure et que la [6] ne se prévaut d’aucune retenue illégale.

Sur le fond, elle explique en quoi les griefs reprochés et le montant de l’indu sont parfaitement justifiés.

Concernant la pénalité, elle soutient que la [6] a été informé que les faits qui lui étaient reprochés était de nature à justifier l’engagement de la procédure des pénalités financières de l’article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale et qu’elle a tenu compte des observations de la [6] pour fixer le montant de cette pénalité à 3000 € alors que les dispositions de l’article R. 147-8-1 du code de la sécurité sociale l’autorisait à prononcer une pénalité d’un montant maximum de 30040,01 €.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter pour un meilleur exposé du litige aux moyens présentés par les parties dans leurs conclusions respectives.

Les affaires ont été mises en délibéré au 30 mai 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la régularité de la procédure de recouvrement de l’indu

L’article L 133-4 du code de la sécurité sociale dispose que :
« En cas d'inobservation des règles de tarification, de distribution ou de facturation :
1° Des actes, prestations et produits figurant sur les listes mentionnées aux articles L. 162-1-7, L. 162-17, L. 165-1, L. 162-22-7, L. 162-22-7-3 et L. 162-23-6 ou relevant des dispositions des articles L. 162-16-5-1-1, L. 162-16-5-2, L. 162-17-2-1, L. 162-22-6, L. 162-23-1 et L. 165-1-5 ;

2° Des frais de transports mentionnés à l'article L. 160-8,

l'organisme de prise en charge recouvre l'indu correspondant auprès du professionnel, du distributeur ou de l'établissement à l'origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l'assuré, à un autre professionnel de santé, à un distributeur ou à un établissement.

Il en est de même en cas de facturation en vue du remboursement, par les organismes d'assurance maladie, d'un acte non effectué ou de prestations et produits non délivrés ou lorsque ces actes sont effectués ou ces prestations et produits délivrés alors que le professionnel fait l'objet d'une interdiction d'exercer son activité libérale dans les conditions prévues au III de l'article L. 641-9 du code de commerce.

Lorsque le professionnel ou l'établissement faisant l'objet de la notification d'indu est également débiteur à l'égard de l'assuré ou de son organisme complémentaire, l'organisme de prise en charge peut récupérer la totalité de l'indu. Il restitue à l'assuré et, le cas échéant, à son organisme complémentaire les montants qu'ils ont versés à tort.

Lorsque l'action en recouvrement porte sur une activité d'hospitalisation à domicile facturée par un établissement de santé mentionné à l'article L. 6125-2 du code de la santé publique, l'indu notifié par l'organisme de prise en charge est minoré d'une somme égale à un pourcentage des prestations facturées par l'établissement. Ce pourcentage est fixé par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.

L'action en recouvrement, qui se prescrit par trois ans, sauf en cas de fraude, à compter de la date de paiement de la somme indue, s'ouvre par l'envoi au professionnel ou à l'établissement d'une notification de payer le montant réclamé ou de produire, le cas échéant, leurs observations.

Si le professionnel ou l'établissement n'a ni payé le montant réclamé, ni produit d'observations et sous réserve qu'il n'en conteste pas le caractère indu, l'organisme de prise en charge peut récupérer ce montant par retenue sur les versements de toute nature à venir.

En cas de rejet total ou partiel des observations de l'intéressé, le directeur de l'organisme d'assurance maladie adresse, par lettre recommandée, une mise en demeure à l'intéressé de payer dans le délai d'un mois. La mise en demeure ne peut concerner que des sommes portées sur la notification.

Lorsque la mise en demeure reste sans effet, le directeur de l'organisme peut délivrer une contrainte qui, à défaut d'opposition du débiteur devant le tribunal judiciaire spécialement désigné en application de l'article L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire, comporte tous les effets d'un jugement et confère notamment le bénéfice de l'hypothèque judiciaire. Une majoration de 10 % est applicable aux sommes réclamées qui n'ont pas été réglées aux dates d'exigibilité mentionnées dans la mise en demeure. Cette majoration peut faire l'objet d'une remise.

Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article. »

L’article R. 133-9-1 du code de la sécurité sociale dispose que : « I.-La notification de payer prévue à l'article L. 133-4 est envoyée par le directeur de l'organisme d'assurance maladie au professionnel, à l'établissement ou au distributeur par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception.

Cette lettre précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement. Elle mentionne l'existence d'un délai de deux mois à partir de sa réception imparti au débiteur pour s'acquitter des sommes réclamées ainsi que les voies et délais de recours. Dans le même délai, l'intéressé peut présenter des observations écrites à l'organisme d'assurance maladie.

A défaut de paiement à l'expiration du délai de forclusion prévu à l'article R. 142-1 ou après notification de la décision de la commission instituée à ce même article, le directeur de l'organisme de sécurité sociale compétent lui adresse la mise en demeure prévue à l'article L. 133-4 par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception.

Cette mise en demeure comporte la cause, la nature et le montant des sommes demeurant réclamées, la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement, le motif qui, le cas échéant, a conduit à rejeter totalement ou partiellement les observations présentées ainsi que l'existence du nouveau délai d'un mois imparti, à compter de sa réception, pour s'acquitter des sommes réclamées. Elle mentionne, en outre, l'existence et le montant de la majoration de 10 % appliquée en l'absence de paiement dans ce délai, ainsi que les voies et délais de recours ».

L’article R 133-9-2 code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, dispose que :

« L'action en recouvrement de prestations indues s'ouvre par l'envoi au débiteur par le directeur de l'organisme compétent d'une notification de payer le montant réclamé par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception. Cette lettre précise le motif, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements donnant lieu à répétition. Elle mentionne l'existence d'un délai de deux mois imparti au débiteur pour s'acquitter des sommes réclamées et les modalités selon lesquelles les indus de prestations pourront être récupérés, le cas échéant, par retenues sur les prestations à venir. Elle indique les voies et délais de recours ainsi que les conditions dans lesquelles le débiteur peut, dans le délai mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 142-1, présenter ses observations écrites ou orales.

A l'expiration du délai de forclusion prévu à l'article R. 142-1 ou après notification de la décision de la commission instituée à ce même article, le directeur de l'organisme créancier compétent, en cas de refus du débiteur de payer, lui adresse par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception une mise en demeure de payer dans le délai d'un mois qui comporte le motif, la nature et le montant des sommes demeurant réclamées, la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement, les voies et délais de recours et le motif qui, le cas échéant, a conduit à rejeter totalement ou partiellement les observations présentées ».

Il est de jurisprudence constante que la notification d'indu suivie d'une annexe comportant un tableau récapitulatif détaillé au titre des actes facturés et comportant notamment, le numéro de l'assuré social, nom et prénom du patient, ses dates d'entrée et de sortie, le numéro de facture, le montant facturé, la date du paiement, le montant de l'indu, le motif de celui-ci en vertu des règles de facturation remplit les conditions de motivation telles que prévues par l'article R 133-9-1 du Code de la Sécurité Sociale (Cass. 2e civ., 18 nov. 2010, n° 09-16.806).

Il appartient à l'organisme d'assurance maladie de rapporter, à l'appui de sa demande de répétition de l'indu fondée sur les dispositions de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, la preuve du non-respect des règles de tarification et de facturation, puis, au professionnel ou à l'établissement de santé, de discuter des éléments de preuve produits par l'organisme à charge pour lui d'apporter la preuve contraire.

***

En l’espèce, la [6] soutient que la procédure de recouvrement de l’indu et la mise en demeure sont entachées d’irrégularités.

A ce titre, elle fait valoir que :
-faute de décision explicite de la CRA, le tribunal de céans n’est pas en mesure d’appréhender la validité de la procédure de recouvrement de l’indu,
-la mise en demeure ne comporte pas le ou les motifs qui ont conduit au rejet de ses observations,
-la CPAM des [Localité 3] n’avait pas le droit de mentionner dans la mise en demeure la possibilité de procéder à des retenues sur les prestations à venir dans la mesure où elle avait produit des observations.

A titre liminaire, il convient de rappeler que l’absence de décision explicite de la Commission de Recours Amiable de la CPAM des [Localité 3] n’affecte pas la capacité ni la possibilité pour le tribunal de céans de vérifier la validité de la procédure de recouvrement de l’indu et qu’en l’absence de décision explicite de rejet la [6] avait la possibilité de saisir le tribunal de céans d’un recours contre la décision implicite de rejet de cette commission, ce qu’elle a d’ailleurs fait tant pour contester l’indu réclamé par la CPAM que la pénalité y afférente.

Conformément aux dispositions des articles L 133-4, R. 133-9-1 et R. 133-9-2 du code de la sécurité sociale, la CPAM des [Localité 3] a notifié à la [6] une notification de payer par lettre recommandée avec accusé de réception du 14 février 2019, distribuée et signée par la [6] le 15 février 2019.

Cette notification de payer précise bien la cause, la nature, le montant des sommes réclamées et la date des versements indus donnant lieu à recouvrement. De plus, l’annexe à cette notification d’indu mentionne bien pour chacun des 6 griefs le numéro de sécurité sociale des assurés concernés, le numéro et la date de prescription, le numéro et la date de délivrance des médicaments, le libellé le prix unitaire et la quantité de médicament délivrée, le montant rembourser et son taux de remboursement, le numéro et la date de facturation et le montant du préjudice.

Elle mentionne également la possibilité pour la [6] de saisir la Commission de Recours Amiable de la caisse et la possibilité de présenter des observations dans le délai de deux mois. Il convient de noter que la [6] avait la possibilité de saisir la Commission de Recours Amiable de la caisse tout en présentant des observations, l’une de ses possibilités n’étant pas exclusive de l’autre.
Or, en l’espèce, aucun élément produit aux débats ne permet d’établir que la [6] ait fait usage de la possibilité qui lui était offerte de transmettre ses observations, cette dernière ayant directement saisi la commission de recours amiable de sa contestation sans présenter d’observations.

Conformément aux dispositions des articles L 133-4, R. 133-9-1 et R 133-9-2 code de la sécurité sociale du code, la CPAM de [Localité 3] a ensuite notifié à la [6] une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 janvier 2021, signée et distribuée le 8 janvier 2021. Elle était accompagnée des annexes jointes à la notification de payer.

Cette mise en demeure mentionne bien :
-le motif, la nature et le montant des sommes demeurant réclamées,
-la date des versements indus donnant lieu à recouvrement,
-le délai d’un mois imparti au débiteur pour s'acquitter des sommes réclamées et l’application d’une majoration de 10 % appliquée en l'absence de paiement dans ce délai,
-les voies et délais de recours.

Conformément aux dispositions de l’article R. 133-9-2 code de la sécurité sociale, elle mentionne également les modalités selon lesquelles les indus de prestations pourront être récupérés, le cas échéant, par retenues sur les prestations à venir. La [6] ne saurait reprocher à la CPAM des [Localité 3] d’avoir mentionner dans la mise en demeure cette mention prévue à l’article R. 133-9-2 du code de la sécurité sociale et ce d’autant plus qu’elle ne démontre pas que la CPAM des [Localité 3] a procédé à de telles retenues, et pour cause puisqu’elle ne l’a pas fait.

Enfin, dans la mesure où la [6] a saisi directement la Commission de Recours Amiable sans formuler d’observations auprès de la caisse, la mise en demeure mentionne bien l’absence d’observations et le rejet implicite du recours de la [6] par la Commission de Recours Amiable. La CPAM de [Localité 3] n’avait pas à indiquer le ou les motifs de rejet d’observations inexistantes.

En conséquence, il convient de dire et juger que la procédure de recouvrement de créance est régulière et que la CPAM des [Localité 3] a bien respecté cette procédure.

Sur le bien-fondé de l’indu

En matière de contestation d’un indu, il appartient à la caisse d’établir la nature et le montant de l’indu et au professionnel de santé d’apporter des éléments de nature à établir le bien-fondé de sa contestation.

En l’espèce, la [6] conteste les 6 griefs et les sommes réclamées par la CPAM des [Localité 3].

•Le premier grief concerne la facturation de médicaments à prescription réservée à certains médecins spécialistes sur la présentation d’ordonnance établies par des prescripteurs non habilités pour un montant de 35553,71 €.

L'article R. 5121-77 du code de la santé publique dispose que « L'autorisation de mise sur le marché, l'autorisation temporaire d'utilisation ou l'autorisation d'importation d'un médicament peut classer celui-ci dans une des catégories de médicaments soumis à prescription restreinte suivantes :

1° Médicament réservé à l'usage hospitalier ;
2° Médicament à prescription hospitalière ;
3° Médicament à prescription initiale hospitalière ;
4° Médicament à prescription réservée à certains médecins spécialistes ;
5° Médicament nécessitant une surveillance particulière pendant le traitement.
(…) »

L’article R. 5121-78 du code de la santé publique dispose que « Lors de la présentation d'une ordonnance prescrivant un médicament classé dans une des catégories de médicaments soumis à prescription restreinte, le pharmacien s'assure, selon les règles de la présente section, de l'habilitation du prescripteur à le prescrire et, le cas échéant, de la présence, sur l'ordonnance, des mentions obligatoires et de la présentation simultanée de l'ordonnance initiale ».

En l’espèce, la CPAM des [Localité 3] verse aux débats un tableau « annexe 1 » qui rapporte la preuve de la nature et du montant de l’indu afférent à ce grief.

De son côté, la [6] explique que les délais de plus en plus longs pour obtenir un rendez-vous auprès d’un médecin spécialiste et la difficulté de certains patients à se déplacer, les ont conduits à avoir recours au renouvellement d’ordonnances auprès de leur médecin traitant. Elle affirme que ces prescriptions ont été faites en accord avec les médecins spécialistes et les médecins généraliste dans le seul intérêt des 6 patients concernées afin de ne pas interrompre leurs traitements vitaux et que ces prescriptions ont été régularisées à postériori à l’exception d’une seule en raison du départ en retraite du médecin spécialiste.

Elle justifie :
-d’une ordonnance du médicament GLIVEC pour le patient [W] [EO] établie par le Docteur [C] [AP], oncologue, le 16 juillet 2016 pour 3 mois,
-de 5 ordonnances du médicament HUMIRA pour le patient [UO] [O] établies par le Docteur [P], gastro-entérologue, du 6 juin 2016 pour un mois, du 3 septembre 2016 pour deux mois, du 30 novembre 2017 pour trois mois, du 13 mars 2017 pour trois mois, et du 13 avril 2017 pour deux mois,
-de 4 ordonnances du médicament FAMPYRA établies par le Professeur [J] [YG], neurologue, pour la patiente [X] [DZ] du 10 décembre 2015 pour un mois à renouveler six fois, du 7 mars 2016 pour un mois à renouveler six fois, du 28 juillet 2016 pour un mois à renouveler six fois, et du 21 juin 2017 pour un mois à renouveler six fois,
-de 3 ordonnances du médicament ENBREL établies par le Professeur [ZE] [GZ], dermatologue-cancérologue, pour la patiente [N] [L], dont les dates de prescriptions sont illisibles.

Toutefois, outre le fait que ces prescriptions médicales ne concernent que 4 patients sur 6, la [6] reconnaissait dans son courrier de saisine de la Commission de Recours Amiable de la caisse quelle a commis une erreur en délivrant plusieurs traitements qui ont été prescrits par des médecins non habilités alors que, conformément aux dispositions de l’article R. 5121-78 du code de la santé publique, elle aurait dû s’assurer de l’habilitation du prescripteur à prescrire les médicaments.

En outre, une régularisation à postériori ne fait pas disparaitre l’irrégularité qui a donné lieu à la prise en charge indue par la caisse, ni le droit de cette dernière à recouvrement de cet indu.

Il convient donc de valider ce grief.

•Le second grief, concerne la facturation de médicaments à prescription hospitalière sur présentation d’ordonnances établies par des prescripteurs non habilités pour un montant de 10870,44 €

Afin de justifier ce grief, la CPAM des [Localité 3] verse au débat un tableau « annexe 2 » qui permet d’établir la nature et le montant de l’indu.

La [6] explique que pour les mêmes raisons que le premier grief et dans l’intérêt exclusif de la patiente, Madame [OC], les quatre prescriptions du médicament AFFINITOR ont été délivrées sur la base d’ordonnances établies par son médecin généraliste puis régularisées par un radiothérapeute.

Toutefois, tout comme pour le premier grief, la régularisation à posteriori d’ordonnances même dans l’intérêt exclusif d’une patiente, n’a pas pour effet d’exonérer la [6] de son erreur, ni le droit de la CPAM des [Localité 3] au recouvrement de l’indu, lequel est justifié.

Il convient donc de valider ce grief.

•Le troisième grief concerne la facturation de renouvellements non prescrits de médicaments pour un montant de 11583,02 €

Ce grief porte sur des traitements de cinq patients : Monsieur [R] [JH], Madame [X] [DZ], Monsieur [E] [K], Madame [B] [S], Monsieur [PX] [Y].

Dans ses écritures la [6] ne se justifie que pour un seul des cinq patients, Monsieur [K], pour lequel elle explique qu’une ordonnance a été établie le 26 avril 2016 par son médecin oncologue pour une durée de 4 mois et la délivrance des médicaments a été effectuée tous les mois du 26 avril 2016 au 16 juillet 2016 et qu’elle a demandé au médecin prescripteur une nouvelle ordonnance.

Elle indique en outre que certaines prescriptions ont été entachées d’erreurs de traitement informatique. Dans les pièces versées aux débats, elle admet une erreur de facturation de sa part pour le patient [E] [K] et la patiente [H] [JH], un mauvais comptage de sa part pour la patiente [X] [DZ], ne pas comprendre le grief concernant la patiente [B] [S] et avoir facturé en doublon par erreur l’ordonnance du 20 septembre 2016 pour le patient [PX] [Y].

De son côté, la CPAM de [Localité 3] explique parfaitement en quoi les indus afférents à ces cinq patients sont justifiés.

En effet, elle verse aux débats un tableau « annexe 3 » qui permet d’établir la nature et le montant de l’indu pour chacun des 5 patients.

Concernant le patient [E] [K], il ressort des explications de la caisse que la [6] a facturé cinq fois une ordonnance établie pour une durée de 4 mois, que cette 5ème facturation ne peut être considérée comme une délivrance exceptionnelle car la [6] n’a pas délivré le plus petit conditionnement et la prescription ne porte pas la mention « délivrance exceptionnelle » et que cette 5ème facturation ne peut correspondre à un besoin thérapeutique du patient dans la mesure où au 16 juillet 2016 du fait des délivrances rapprochées effectuées le 13 juin et le 25 juin 2016, il restait au patient suffisamment de comprimés pour se soigner jusqu’à la prochaine consultation le 9 août 2016.

Concernant le patient [R] [JH], il ressort des explications de la caisse que la [6] a délivré 8 mois de traitement de GENOTONORM alors que l’ordonnance hospitalière ne précisait pas explicitement la durée du traitement. En outre, à compter de la 5ème facturation en janvier 2016, tous les exemplaires de cette ordonnance portent la mention « 6 mois » ajoutée à la main à côté du libellé de prescription, et en janvier et février 2016, la date de prescription saisie par la pharmacie est erronée, ce qui rend difficile le rattachement de ces deux facturations à la prescription du 7 septembre 2015.
Dans sa lettre de saisine de la Commission de Recours Amiable, la [6] indiquait qu’il s’agissait d’une erreur de facturation.

Concernant la patiente [X] [DZ] il ressort des explications de la caisse que la facturation du 25 mars 2016, objet de l’indu, correspondant à un 7ème renouvellement qui n’avait pas lieu d’être et ce d’autant plus que la patiente disposait d’une nouvelle ordonnance datée du 11 mars 2016.

Concernant la patiente [B] [S] il ressort des explications de la caisse que la [6] a facturé 4 fois le traitement alors que l’ordonnance du 2 août 2016 du Docteur [KR] était établie pour une durée de traitement de 3 mois.

Enfin, concernant le patient [PX] [Y] il ressort des explications de la caisse que la [6] a facturé 6 fois le traitement de 4 médicaments alors que l’ordonnance du 20 septembre 2016 avait été établie pour une durée de 3 mois seulement, les facturations du 23 janvier 2017, du 11 février 2017 et du 21 avril 2017 étant des facturations de renouvellement non prescrits.

Il convient donc de valider ce grief.

•Le quatrième grief concerne la facturation en une seule fois de médicaments pour une durée de traitement supérieure à 28 ou 30 jours pour un montant de 249,30 €

L’article L. 5132-1 du code de la santé publique dispose que « sont comprises comme substances vénéneuses : (…] 4° Les substances inscrites sur la liste I et la liste II définies à l'article L. 5132-6 ».

L’article L. 5132-6 du code de la santé publique dispose que « Les listes I et II mentionnées au 4° de l'article L. 5132-1 comprennent :

1° Certaines substances classées dangereuses pour la santé conformément à l'article L. 1342-2 ;
2° Les médicaments susceptibles de présenter directement ou indirectement un danger pour la santé ;
3° Les médicaments à usage humain contenant des substances dont l'activité ou les effets indésirables nécessitent une surveillance médicale ;
4° (Abrogé) ;
5° Tout autre produit ou substance présentant pour la santé des risques directs ou indirects ».

L’article R. 5132-12 du code de la santé publique relatif aux médicaments relevant des listes I et II, médicaments stupéfiants et psychotropes, et substances entrant dans la préparation des médicaments dispose que : « Il ne peut être délivré en une seule fois une quantité de médicaments correspondant à une durée de traitement supérieure à quatre semaines ou à un mois de trente jours selon le conditionnement.

Toutefois, les médicaments présentés sous un conditionnement correspondant à une durée de traitement supérieure à un mois peuvent être délivrés pour cette durée dans la limite de trois mois. En outre, quel que soit leur conditionnement, les médicaments contraceptifs peuvent être délivrés pour une durée de douze semaines ».

L’article R 5132-14 du code de la santé publique relatif aux médicaments relevant des listes I et II, médicaments stupéfiants et psychotropes, et substances entrant dans la préparation des médicaments dispose que « Le renouvellement de la délivrance d'un médicament ou d'une préparation relevant de la présente section ne peut avoir lieu qu'après un délai déterminé résultant de la posologie et des quantités précédemment délivrées.

Le renouvellement fait l'objet d'un nouvel enregistrement. Lorsque le renouvellement est effectué par le même dispensateur, l'enregistrement peut consister en la seule indication du numéro afférent à la délivrance précédente.

Sont ajoutées sur l'ordonnance les mêmes indications que celles énumérées à l'article R. 5132-13 ».

En l’espèce, ce grief concerne 3 délivrances de médicaments en quantité supérieure à un traitement de 28 ou 30 jours pour le médicament KWIKPEN qui contient de l’insuline et le médicament VERSATIS qui contient de la lidocaïne. Ces deux médicaments sont classés dans la liste II des médicaments.

Dans sa lettre de saisine de la Commission de Recours Amiable la [6] indiquait qu’il s’agissait de facturations provenant de son ancien logiciel, ne plus avoir accès aux ordonnances et ne pas pouvoir les contester. La [6] soutient néanmoins que compte tenu de la prescription et du dosage de ces médicaments elle a dû en délivrer 2 boites.

De son côté, la CPAM des [Localité 3] soutient que, concernant le patient [G] [M], une seule boite du médicament HUMALOG 600 UI KWIKPEN SOL INJ 5 était suffisant pour assurer le traitement du patient pendant 1 mois, et qu’il en allait de même concernant la prescription du médicament VERSATIS 5 % EMPLATRE MEDIC SACHET 30 à la patiente [NR] [I].

Le tableau « annexe 4 » versé aux débats permet de rapporter la preuve de la nature et du montant de l’indu.

Il convient donc de valider ce grief.

•Le cinquième grief concerne le chevauchement des périodes de facturation pour exécution anticipée d’une nouvelle ordonnance comportant le même traitement pour un montant de 400,35 €

Concernant ce grief, la [6] soutient que leur ancien logiciel ne permettait pas de signaler la date de délivrance antérieure mais qu’il n’y avait pas eu de délivrances ni de facturations supplémentaires et que ces délivrances anticipées visaient très certainement à prévoir des départs ou absences des patients.

Dans les pièces versées aux débats, elle indiquait ne pas contester la prescription du 19 juillet 2016 à la patiente [A] [T] et pour la prescription du 6 février 2017 de cette même patiente elle indique que sur l’ensemble de l’année elle n’a délivré que 11 boites et qu’il n’y a pas eu de facturation supplémentaire. Concernant la patiente [F] [V], elle indique que le logiciel qu’elle utilisait ne permettait pas d’alerter sur les délivrances antérieures.

Dans sa lettre de saisine de la Commission de Recours Amiable elle indiquait pourtant qu’il s’agissait d’erreur de leur part et ne pas contester ce grief.

Il ressort des explications de la [6] qu’elle reconnait avoir délivré de façon anticipée des médicaments.

De son côté, la CPAM des [Localité 3] verse aux débats un tableau « annexe 5 » qui rapporte la preuve de la nature et du montant de l’indu

Il convient donc de valider ce grief.

•Le sixième grief concerne la facturation de médicaments en quantité supérieure à la quantité nécessaire au traitement prescrit sur la période de facturation pour un montant de 1423,20 euros

Ce grief concerne des prescriptions médicales de 3 patients : Madame [PL] [D], Monsieur [Z] [ZP] et Madame [JZ] [UD].

La [6] indique que pour les patients [Z] [ZP] et [JZ] [UD] si certaines délivrances ont été rapprochées, c’était en prévision de voyages ou de déplacement mais qu’il n’y a pas eu de surconsommation puisque Monsieur [ZP] a reçu 12 boites du médicament LANTUS sur l’année et Madame [UD] n’en a pas pris tous les mois.

Le LANTUS est un médicament qui contient de l’insuline et est classé dans la liste II des médicaments.

Elle ne se justifie pas sur les prescriptions à la patiente [PL] [D]. Toutefois dans sa lettre de saisine de la Commission de Recours Amiable, elle reconnaissait que « il y a eu effectivement trop de délivrance par rapport à la quantité prescrite ».

Il ressort des explications et des pièces versées aux débats par la CPAM des [Localité 3] que la [6] a délivré et facturé des boites de médicament en quantité supérieure à la quantité nécessaire au traitement prescrit.

En effet :
-concernant la patiente [PL] [D], la [6] a facturé 22 boites du médicament RENAGEL en 21 mois alors que, compte tenu du conditionnement de ce médicament en 180 comprimés, 15 boites étaient suffisantes,

-concernant le patient [Z] [ZP], la [6] a facturé 25 boites du médicament LANTUS 100 UI/ML SOL INJ STYLO 5/3 ML en 23 mois alors qu’au regard de la posologie prescrite 20 boites suffisaient,

-concernant la patiente [JZ] [UD], la [6] a facturé 21 boites de LANTUS 100 UI/ML SOL INJ STYLO 5/3 ML en 22 mois alors qu’au regard de la posologie prescrite 15 boites suffisaient,

Il convient donc de valider ce grief.

L’ensemble des 6 griefs reprochés par la CPAM des [Localité 3] à la [6] étant justifiés, il convient de condamner cette dernière à payer la somme de 60080,02 € au titre de l’indu réclamé par mise en demeure du 7 janvier 2021.

Sur la pénalité financière

L’article L. 114-17-1 I dispose que les professionnels et établissement de santé peuvent faire l'objet d'une pénalité prononcée par le directeur de l'organisme local d'assurance maladie.

Le II de cet article dispose que la pénalité est due pour toute inobservation des règles du code de la sécurité sociale ou du code de la santé publique ayant abouti à une demande, une prise en charge ou un versement indu d'une prestation en nature ou en espèces par l'organisme local d'assurance maladie.

Le III de cet article prévoit que le montant de la pénalité est fixé en fonction de la gravité des faits reprochés proportionnellement aux sommes concernées dans la limite de 50 % de celles-ci.

Le IV de cet article dispose que le directeur de l'organisme local d'assurance maladie notifie les faits reprochés à la personne physique ou morale en cause afin qu'elle puisse présenter ses observations dans un délai fixé par voie réglementaire.
A l'expiration de ce délai, le directeur :
1° Décide de ne pas poursuivre la procédure ;
2° Notifie à l'intéressé un avertissement ;
3° Ou saisit la commission des pénalités ;

A réception de l'avis de la commission, le directeur :
a) Soit décide de ne pas poursuivre la procédure ;
b) Soit notifie à l'intéressé un avertissement ;
c) Soit notifie à l'intéressé la pénalité qu'il décide de lui infliger, en indiquant le délai dans lequel il doit s'en acquitter ou les modalités selon lesquelles elle sera récupérée sur les prestations à venir.

Le V de l’article L. 114-7-1 du code de la sécurité sociale dispose que la pénalité ne peut être prononcée qu'après avis d'une commission composée et constituée au sein du conseil ou du conseil d'administration de l'organisme local d'assurance maladie et qu’elle apprécie la responsabilité de la personne physique ou morale dans la réalisation des faits reprochés. Si elle l'estime établie, elle propose le prononcé d'une pénalité dont elle évalue le montant. L'avis de la commission est adressé simultanément au directeur de l'organisme et à l'intéressé.

L’article R. 147-2 du code de la sécurité sociale précise la procédure de notification d’une pénalité financière. Cet article dispose que :
« I.- Lorsqu'il a connaissance de faits susceptibles de faire l'objet de la pénalité financière mentionnée à l'article L. 114-17-1, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles adresse à la personne physique ou morale en cause la notification prévue à cet article par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception. Lorsque ces faits ont donné lieu à l'engagement de la procédure mentionnée à l'article L. 315-1, la notification ne peut intervenir qu'à l'issue de cette procédure. Cette notification précise les faits reprochés et le montant de la pénalité encourue et indique à la personne en cause qu'elle dispose d'un délai d'un mois à compter de sa réception pour demander à être entendue, si elle le souhaite, ou pour présenter des observations écrites.

Lorsque la procédure de sanction est engagée à l'encontre d'un établissement de santé ou d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie en informe simultanément le directeur général de l'agence régionale de santé.

A l'issue du délai d'un mois à compter de la notification ou après audition de la personne en cause, si celle-ci intervient postérieurement à l'expiration de ce délai, le directeur l'organisme local d'assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles peut :

1° Soit décider d'abandonner la procédure. Dans ce cas, il en informe ladite personne dans les meilleurs délais ;

2° Soit, dans un délai de quinze jours, prononcer un avertissement, sauf si les faits relèvent des cas prévus aux 3° et 4° du II de l'article L. 114-17-1. L'avertissement précise les voies et délais de recours. Il en informe simultanément la commission prévue à l'article L. 114-17-1 ;

3° Soit, dans un délai de quinze jours, saisir la commission mentionnée au V de l'article L. 114-17-1 et lui communiquer les griefs et, s'ils existent, les observations écrites de la personne en cause ou le procès-verbal de l'audition. Il en informe simultanément cette personne et lui indique qu'elle aura la possibilité, si elle le souhaite, d'être entendue par la commission.

Les informations communiquées à la commission ne doivent comporter aucune mention nominative ou susceptible de permettre l'identification d'une personne dans des conditions de nature à porter atteinte au secret médical.

II.-Après que le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou son représentant, accompagné le cas échéant par un représentant du service du contrôle médical ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles, a présenté ses observations, et après avoir entendu, le cas échéant, la personne en cause, la commission rend un avis motivé, portant notamment sur la matérialité et la gravité des faits reprochés, la responsabilité de la personne et le montant de la pénalité ou de chacune des pénalités susceptible d'être appliquée.

La commission doit adresser son avis au directeur de l'organisme local ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles ainsi qu'à la personne en cause dans un délai maximum de deux mois à compter de sa saisine. Ce délai peut être augmenté d'une durée ne pouvant excéder un mois si la commission estime qu'un complément d'information est nécessaire. Si la commission ne s'est pas prononcée au terme du délai qui lui est imparti, l'avis est réputé rendu.

Lors des auditions mentionnées au présent article, la personne en cause peut se faire assister ou se faire représenter par la personne de son choix.

III.-A compter de la réception de l'avis de la commission ou de la date à laquelle celui-ci est réputé avoir été rendu, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles peut :

1° Soit décider d'abandonner la procédure, auquel cas il en informe ladite personne dans les meilleur délais ;

2° Soit décider de poursuivre la procédure, auquel cas il dispose d'un délai de quinze jours pour saisir le directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie d'une demande d'avis conforme, par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception, en précisant les éléments prévus dans la notification mentionnée au I et le montant de la pénalité envisagée. A défaut de saisine dans le délai imparti, la procédure est réputée abandonnée.

Le directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie ou son représentant dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception de la demande pour formuler son avis. Il le transmet au directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception. Si le directeur général ne s'est pas prononcé dans ce délai, son avis est réputé favorable.

Si l'avis du directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie est défavorable, la procédure est abandonnée. Le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles en informe la personne en cause dans les meilleurs délais.

Si l'avis du directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie est favorable, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles dispose d'un délai de quinze jours pour notifier la pénalité à la personne en cause par une décision motivée et par tout moyen permettant de rapporter la preuve de la date de réception. Il en adresse une copie à la commission à titre d'information. A défaut de notification dans le délai imparti, la procédure est réputée abandonnée.

Cette notification de payer précise la cause, la nature, le montant des sommes réclamées au titre de la pénalité ou de chacune des pénalités prononcées et mentionne l'existence d'un délai de deux mois, à partir de sa réception, imparti au débiteur pour s'acquitter des sommes réclamées, ainsi que les voies et les délais de recours. Elle mentionne également, le cas échéant, les modalités de recouvrement de la pénalité par retenues sur les prestations ultérieures à verser à l'intéressé.

A défaut de paiement dans ce délai, la mise en demeure prévue au septième alinéa du IV de l'article L. 114-17-1 est adressée, par tout moyen permettant de déterminer la date de réception. Elle comporte les précisions relatives aux sommes réclamées mentionnées à l'alinéa précédent, les voies et délais de recours ainsi que l'existence d'un nouveau délai d'un mois, à partir de sa réception, imparti au débiteur pour s'acquitter des sommes réclamées. Elle indique en outre l'existence et le montant de la majoration de 10 % prévue au même septième alinéa, appliquée en l'absence de paiement dans ce délai.
(…) »
***

1) Sur la régularité de la procédure de pénalité financière

En l’espèce, la [6] conteste la régularité de la pénalité financière en indiquant que cette notification était prématurée eu égard au fait que les faits reprochés par la CPAM des [Localité 3] ne sont pas avérés et demeurent contestés.

Suite à la notification d’indu le 14 février 2019, la CPAM des [Localité 3] a notifié à la pharmacie les griefs de nature à justifier l’engagement d’une procédure de la pénalité financière prévue à l’article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale par courrier en date du 29 juillet 2019, envoyé à la [6] par lettre recommandée avec accusé de réception signée et distribuée le 31 juillet 2019.

Cette notification mentionne bien les faits reprochés à la [6], le montant maximum de la pénalité encourue, le délai d’un mois pour présenter des observations écrites ou demander à être entendue.

Par courrier du 9 septembre 2019, notifié par lettre recommandée avec accusé de réception signée et distribuée le 10 septembre 2019, la CPAM des [Localité 3] a informé la [6] de la saisine de la commission des pénalités financières.

Cette commission s’est réunie le 23 septembre 2019 et s’est prononcé pour l’application d’une pénalité financière de 1000 €.

Par courrier du 10 octobre 2019, versé aux débats par la [6], la CPAM des [Localité 3] a notifié à la [6] l’avis rendu par la commission des pénalités financières.

Par courrier du 22 novembre 2019, notifié par lettre recommandée avec accusé de réception signée et distribuée le 23 novembre 2019, la CPAM des [Localité 3] a notifié à la [6] une pénalité financière d’un montant de 3000 €.

Cette notification de pénalité financière mentionne bien la cause, la nature et le montant de ladite pénalité, ainsi que le délai de 2 mois à partir de sa réception imparti au débiteur pour s'acquitter des sommes réclamées et les voies et les délais de recours.

Il convient de dire et juger que la procédure de notification de la pénalité financière a été respectée.

2) Sur le bien-fondé de la pénalité financière et de son montant

Conformément aux dispositions de l’article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale une pénalité est due pour toute inobservation du code de la sécurité sociale ou du code de la santé publique ayant abouti à une demande, une prise en charge ou un versement indu d'une prestation en nature ou en espèces par l'organisme local d'assurance maladie.

Il est constant que la pénalité financière prévue par l'article L. 114-17-1 du Code de la sécurité sociale n'est pas subordonnée à la preuve de l'intention frauduleuse du professionnel de santé mais de la seule inobservation des règles du code de la sécurité sociale ou du code de la santé publique.

Selon une jurisprudence constante, il appartient au juge du contentieux de la sécurité sociale saisi d'un recours formé contre la pénalité prononcée dans les conditions qu'il précise, de vérifier la matérialité, la qualification et la gravité des faits reprochés à la personne concernée ainsi que l'adéquation du montant de la pénalité à l'importance de l'infraction commise par cette dernière.

En l’espèce, la [6] conteste la réalité des faits reprochés par la CPAM des [Localité 3] et le montant de la pénalité financière.

Toutefois, il a été démontré que les 6 griefs sur lesquels se fonde l’indu étaient justifiés et que la [6] n’avait pas respecté les dispositions suivantes :

-l’article R. 5121-78 du code de la santé publique qui prévoit les conditions de délivrance d’un médicament soumis à prescription restreinte,
-les articles L. 5125-23, R. 5123-2 et R. 5132-22 du code de la santé publique, qui prévoient les conditions pour une délivrance conforme à la prescription médicale,
-l’article R. 5132-12 du code de la santé publique qui prévoit les conditions pour une délivrance d’un traitement supérieur à 4 semaines et dans la limite de 3 mois,
-l’article R. 5132-14 du code de la santé publique qui prévoit les conditions d’exécution d’une nouvelle ordonnance comportant le même traitement précédemment délivré,
-l’article R. 162-20-6 du code de la sécurité sociale qui prévoit de délivrer le conditionnement le plus économique.

Ces inobservations ont abouti au versement indu de la somme de 60080,02 € en prestations en nature par la CPAM des [Localité 3].

Conformément aux dispositions des articles L. 114-17-1 et R. 147-8-1 du code de la sécurité sociale le montant de la pénalité pouvait être fixé dans la limite de 50 % des sommes indues, soit en l’espèce dans la limite de 30040,01 €.

Compte tenu de la gravité des faits, le tribunal décide de confirmer la pénalité financière notifiée le 22 novembre 2019 pour son montant de 3000 € et de condamner la [6] à verser cette somme à la CPAM des [Localité 3].

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

En application des dispositions de l’article 696 du Code de procédure civile, la partie succombant à l’instance en supporte les dépens.

En l’espèce, la [6], partie perdante, supporte les entiers dépens de l’instance.

Pour cette même raison, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de la [6] au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire, et en premier ressort,

DÉBOUTE la SELURL [6] de l’ensemble de ses demandes ;

CONDAMNE la SELURL [6] à payer à la caisse primaire centrale d’assurance maladie des [Localité 3] la somme de 60080,02 euros (Soixante mille quatre-vingts euros et deux centimes) au titre des indus de prestations en nature réclamés dans la mise en demeure du 7 janvier 2021 ;

CONDAMNE la SELURL [6] à payer à la caisse primaire centrale d’assurance maladie des [Localité 3] la somme de 3000 euros (Trois mille euros) au titre de la pénalité financière notifiée par courrier en date du 22 novembre 2019;

LAISSE la charge des dépens de l'instance à la charge de la SELURL [6] ;

Conformément aux dispositions de l’article 538 du Code de procédure civile, tout appel de la présente décision doit être formé, à peine de forclusion, dans le délai d’un mois à compter de sa notification.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 30 mai 2024.

Notifié le :

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc: cpam
Numéro d'arrêt : 21/01402
Date de la décision : 30/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-30;21.01402 ?
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