La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/05/2024 | FRANCE | N°17/03655

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc: cpam, 30 mai 2024, 17/03655


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]


JUGEMENT N°24/02482 du 30 Mai 2024

Numéro de recours: N° RG 17/03655 - N° Portalis DBW3-W-B7B-VKLD

AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [B] [K]
[Adresse 4]
[Localité 2]
représenté par Me Nicole GASIOR, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Sabrina REBOUL, avocat au barreau de MARSEILLE


c/ DEFENDERESSE
Organisme CPAM 13
[Adresse 3]
représentée par Mme [T] [M] (Inspecteur juridique), munie d’un p

ouvoir régulier



DÉBATS : À l'audience publique du 12 Février 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Prés...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]

JUGEMENT N°24/02482 du 30 Mai 2024

Numéro de recours: N° RG 17/03655 - N° Portalis DBW3-W-B7B-VKLD

AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [B] [K]
[Adresse 4]
[Localité 2]
représenté par Me Nicole GASIOR, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Sabrina REBOUL, avocat au barreau de MARSEILLE

c/ DEFENDERESSE
Organisme CPAM 13
[Adresse 3]
représentée par Mme [T] [M] (Inspecteur juridique), munie d’un pouvoir régulier

DÉBATS : À l'audience publique du 12 Février 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : DEPARIS Eric, Vice-Président

Assesseurs : JAUBERT Caroline
AMELLAL Ginette

Lors des débats : ELGUER Christine, Greffier

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 30 Mai 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

[B] [K], alors employé par la société [6] en qualité de technicien en photocopieur, a été victime d’un accident de trajet le 23 avril 2015, pris en charge au titre de la législation professionnelle par la Caisse primaire d’assurance maladie des Bouches du Rhône.

Suivant courrier en date 5 août 2016, la Caisse primaire d’assurance maladie a fixé la date de consolidation de l’état de [B] [K] au 9 août 2016, sans séquelle indemnisable.

Suite à l’expertise technique réalisée par le docteur [V] le 17 novembre 2016 à la demande de [B] [K], la Caisse primaire d’assurance maladie a, par courrier du 30 novembre 2016, confirmé sa décision initiale.

Par courrier adressé le 19 avril 2017, [B] [K] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône aux fins de contester la décision implicite de la commission de recours amiable de la Caisse primaire d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône saisie le 31 janvier 2017, qui a rejeté son recours contre la décision fixant la date de consolidation et le caractère non indemnisable de ses séquelles.

En raison de la disparition au 31 décembre 2018, de la juridiction sociale du fait de la loi, l'affaire a fait l'objet par voie de mention au dossier d'un dessaisissement au profit du pôle social du tribunal de grande instance de Marseille, en vertu de la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle.

Par jugement du 14 mai 2021, le pôle social du tribunal judiciaire a prononcé une expertise médicale avant dire droit et commis à l’expert la mission suivante :

« - convoquer les parties,
- examiner [B] [K],
- entendre les parties en leurs observations,
- se faire remettre l’ensemble des certificats médicaux et tous documents administratifs médicaux qui pourraient être utiles,
- fixer la date de consolidation,
- se prononcer sur le taux d’incapacité permanente partielle, à la date de consolidation, imputable à l’accident du travail survenu le 23 avril 2015 ».

Aux termes de son rapport d’expertise daté du 31 octobre 2022, le Docteur [O] [R] a considéré que la date de consolidation de l’état de santé de Monsieur [K] consécutive à l’accident du 23 avril 2015 devait être fixée au 1er juin 2016 et qu’à cette date son taux d’incapacité permanente partielle était de 10%.

L’affaire a été rappelée à l’audience de plaidoirie du 12 février 2024.

Monsieur [B] [K], représenté par son avocat à l’audience, soutient oralement ses dernières conclusions aux termes desquelles il demande au tribunal de :
- Homologuer partiellement le rapport du Docteur [R], en ce qu’il a fixé le taux d’IPP à 10% ;
- Constater que le Docteur [R] n’a donné au tribunal aucun élément de nature à justifier la date de consolidation au 1er juin 2016 ;
- Rejeter la demande reconventionnelle formulée par la caisse au titre de l’indu du 1er juin au 9 août 2016 ;
A titre subsidiaire :
- Homologuer le rapport du Docteur [R] ;
- Fixer la date de consolidation au 1er juin 2016 ;
- Fixer le taux d’IPP à 10 % ;
- Le renvoyer devant la caisse afin qu’il soit rempli de ses droits au titre des séquelles indemnisables ;
A titre infiniment subsidiaire :
- Ordonner une expertise médicale confiée à tel expert qu’il plaira à la Juridiction avec pour mission de déterminer la date de consolidation et de dire le taux d’incapacité partielle permanente à la date de la consolidation ;
En tout état de cause
- Condamner la caisse aux entiers dépens ;
- Condamner la caisse à verser à Monsieur [K] la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La CPAM, représentée par un inspecteur dument habilité, demande au tribunal de :

- d’entériner le rapport d’expertise du Docteur [R] sur la fixation de la consolidation au 01 juin 2016 ;
- de condamner Monsieur [K] à lui rembourser la somme de 4 589,20 euros, correspondant au trop-perçu d’indemnités journalières versées au titre de l’accident du travail du 23 avril 2015 ;
- Dire et juger que l’état de santé de Monsieur [K] ne justifie pas la fixation d’un taux d’IPP ;
- Rejeter les demandes de Monsieur [K].

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile il est renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé plus ample de leurs prétentions et leurs moyens.

L’affaire a été mise en délibéré au 30 mai 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la fixation de la date de consolidation

L’article L.442-6 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, dispose que « la caisse primaire fixe la date de la guérison ou de la consolidation de la blessure d'après l'avis du médecin traitant ou, en cas de désaccord, d'après l'avis émis par l'expert. »

Il est constant que la date de consolidation, indépendante des soins toujours en cours ou de l’appréciation de l’aptitude au travail, est fixée lorsque l’état de santé du salarié a cessé de se détériorer ou s’est stabilisé et qu’il conserve toutefois des séquelles de son accident du travail.

La consolidation suppose que les lésions du salarié découlant de son accident du travail ou de sa maladie professionnelle ont pris un caractère permanent ou définitif. Elle met fin à l’indemnisation de l’arrêt du travail au titre de la législation sur les risques professionnels.

Enfin, il résulte d’une jurisprudence constante que :

- Contrairement aux expertises judiciaires de droit commun, le pouvoir d'appréciation de la difficulté d'ordre médicale en matière d'expertises techniques de l'article L 141-1 du code de la sécurité sociale est dévolu à l'expert, le juge étant totalement dessaisi de son pouvoir d'appréciation des différentes pièces, médicales ou non, produites aux débats.

- Le juge est tenu par les conclusions de l’expertise technique, dès lors qu’elles sont claires et précises, sauf à ordonner un complément d’expertise, notamment, si les conclusions de l’expertise apparaissent contradictoires ou, sur demande d’une des parties, une nouvelle expertise.

En l’espèce, la CPAM avait fixé au 9 août 2016 la date de consolidation de l’état de santé consécutif à l’accident de trajet, dont avait été victime Monsieur [B] [K], le 23 avril 2015.

Cette date avait été confirmée par une expertise médicale technique mise en œuvre, à la demande de l’assuré, par la CPAM et réalisée par le docteur [N] [V] le 17 novembre 2016.

Dans le cadre de la présente instance, une nouvelle expertise a été ordonnée par le présent tribunal, et l’expert mandaté, le Docteur [O] [R], a, pour sa part, considéré que la date de consolidation pouvait être fixée le 1er juin 2016, soit antérieurement à la date retenue par la CPAM.

L’assuré, pour sa part, conteste la dernière expertise, faisant valoir que le Docteur [O] [R] ne se fonde sur aucun élément médical précis justifiant la fixation de la consolidation de son état de santé au 1er juin 2016 et demande à ce que la date retenue soit a minima celle initialement déterminée par la CPAM.

Compte tenu de l’ancienneté du litige, et dès lors que la CPAM avait initialement fixé la date de consolidation au 9 août 2016, de sorte qu’un consensus existe finalement entre les parties a minima sur cette date, la date de consolidation de l’état de santé, consécutif à l’accident de trajet 23 avril 2015 dont a été victime Monsieur [B] [K], sera fixée au 9 août 2016, sans qu’il soit nécessaire de diligenter une troisième expertise pour trancher la différence de date ayant nouvellement surgi à l’occasion de la dernière expertise.

Sur la demande de remboursement d’un indu d’indemnités journalières

En application de l’article 1302 du code civil, en son premier alinéa, tout paiement suppose une dette ; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution.

En l’espèce la CPAM demande au tribunal de condamner Monsieur [B] [K] à lui rembourser la somme de 4 589,20 euros, correspondant au trop-perçu d’indemnités journalières versées au titre de son accident de trajet du 23 avril 2015 pour la période du 1er juin 2016 au 9 août 2016.

Toutefois, il résulte de ce qu’il précède que la date de consolidation est maintenue au 9 août 2016, de sorte que les indemnités journalières versées à Monsieur [B] [K] du 1er juin au 9 août 2016 été bien dues.

La CPAM sera donc déboutée de cette demande.

Sur la fixation du taux d’incapacité partielle permanente

L’article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, alinéa 1er, dans sa version applicable au litige dispose que : “ Le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité.”

Le barème indicatif d’invalidité des accidents du travail en application de l’annexe I à l’article R. 434-32 du code de la sécurité sociale, a vocation à indemniser la diminution de validité qui résulte de la perte ou l’altération des organes des fonctions du corps humain, à l’exclusion de tout autre préjudice, tels que les préjudices moral ou d’agrément, ainsi que de toutes douleurs, hormis celles reconnues comme indemnisables par ledit barème d’invalidité.

En l’espèce, aux termes de son rapport en date du 31 octobre 2022, le Docteur [O] [R], a estimé que le taux d’IPP dont souffrait Monsieur [B] [K] à la date de sa consolidation devait être fixé à 10%.

En l’occurrence, l’expert a conclu sa discussion de la manière suivante : « le syndrome cervical postérieur, l’atteinte radiculaire C6 droite et gauche les douleurs neuropathiques (brûlure et paresthésie cervicale postérieure) sont en lien direct et certains avec l’accident du 23 avril ».

Il a ensuite estimé que le taux d’IP de 10 % se justifiait faisant application du barème UCANSS 2022 du code de la sécurité sociale annexe 1 - barème indicatif d’invalidité (accident du travail) - qui prévoit notamment l’évaluation suivante : « 3 - RACHIS
3.1 RACHIS CERVICAL.
(…)
Persistance de douleurs et gêne fonctionnelle, qu'il y ait ou non séquelles de fracture d'une pièce vertébrale :
- Discrètes 5 à 15
- Importantes 15 à 30
- Très importantes séquelles anatomiques et fonctionnelles 40 à 50 (…) ».

Il ressort de son rapport d’expertise que le Docteur [O] [R] a analysé et évalué la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que ses aptitudes et sa qualification professionnelle, avant de se prononcer sur le taux d’IPP et ce compte tenu du barème indicatif d'invalidité tel que susvisé, de sorte que contrairement à ce qu’allègue la CPAM ce taux est médicalement justifié.

La CPAM conteste les conclusions de l’expert s’agissant du taux d’IPP, soutenant en premier lieu que ce taux ne peut se justifier dans la situation de Monsieur [B] [K] car il persiste une pathologie sous-jacente qui continue d’évoluer pour son propre compte.

Toutefois, l’existence d’une pathologie sous-jacente, évoluant pour son propre compte n’exclut pas celle de séquelles indépendantes liées à un accident de trajet, de sorte que cet argument de la caisse est inopérant.

De la même manière, et contrairement à ce que soutient cette dernière en second lieu, la prise en charge de la myélopathie cervico-arthrosique au titre de la maladie ordinaire ne fait pas obstacle à la prise en charge de séquelles liées à des phénomène douloureux sur le plan cervico-brachial.

Au-delà de ces arguments, la CPAM n’apporte aucun élément objectif permettant de remettre en cause les dernières conclusions expertales, au demeurant claires, motivées et dénuées de toute forme d’ambigüité sur les séquelles de l’accident litigieux, dont a été victime Monsieur [B] [K].

En conséquence, il conviendra d’entériner le rapport d’expertise du 31 octobre 2022 du Docteur [O] [R] s’agissant de la fixation du taux d’IPP.

Par conséquent, le taux d’IPP consécutif à l’accident de trajet dont a été victime Monsieur [B] [K] le 23 avril 2015 sera fixé à 10 %.

Sur les demandes accessoires

Compte tenu de l’issue du litige, à savoir la confirmation de la date de consolidation initialement fixée par la caisse l’infirmation de sa décision sur les séquelles indemnisables, il y a lieu de :

- partager les dépens de l’instance entre les parties par moitié, en application de l’article 696 du code de procédure civile ;
- rejeter la demande de Monsieur [B] [K] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ni l’équité, ni la situation économique des parties n’exige d’y faire droit.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant après débats en audience publique, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire, en premier ressort :

DIT que l'état de santé de Monsieur [B] [K] à la suite de son accident de trajet du 23 avril 2015 était consolidé au 9 août 2016 ;

FIXE à 10 % son taux d’incapacité permanente partielle, à la date de consolidation, imputable à son accident de trajet survenue le 23 avril 2015 ;

DEBOUTE la CPAM des Bouches-du-Rhône de sa demande tendant à condamner Monsieur [B] [K] à lui rembourser la somme de 4 589,20 euros, correspondant au trop-perçu d’indemnités journalières versées au titre de son accident de trajet du 23 avril 2015 ;

RENVOIE Monsieur [B] [K] devant la CPAM des Bouches-du-Rhône afin qu’il soit rempli de ses droits en conséquence ;

CONDAMNE les parties à partager les dépens par moitié ;

DEBOUTE Monsieur [B] [K] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

DIT que tout appel de la présente décision doit être formé, sous peine de forclusion, dans le délai d’un mois à compter de la réception de sa notification, conformément aux dispositions de l'article 538 du Code de procédure civile.

Notifié le :

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc: cpam
Numéro d'arrêt : 17/03655
Date de la décision : 30/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 05/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-30;17.03655 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award