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27/05/2024 | FRANCE | N°23/03973

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 2ème chambre cab2, 27 mai 2024, 23/03973


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE


JUGEMENT N°


Enrôlement : N° RG 23/03973 - N° Portalis DBW3-W-B7H-3H45

AFFAIRE : Mme [M] [Y] (Me Fall PARAISO)
C/ CPAM DES BOUCHES DU RHONE ( )
- Compagnie d’assurance MATMUT ( )


DÉBATS : A l'audience Publique du 15 Avril 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré

Président : Madame Elsa VALENTINI

Greffier : Madame Célia SANDJIVY, lors des débats

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au : 27 Ma

i 2024

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 27 Mai 2024

PRONONCE par mis...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N°

Enrôlement : N° RG 23/03973 - N° Portalis DBW3-W-B7H-3H45

AFFAIRE : Mme [M] [Y] (Me Fall PARAISO)
C/ CPAM DES BOUCHES DU RHONE ( )
- Compagnie d’assurance MATMUT ( )

DÉBATS : A l'audience Publique du 15 Avril 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré

Président : Madame Elsa VALENTINI

Greffier : Madame Célia SANDJIVY, lors des débats

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au : 27 Mai 2024

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 27 Mai 2024

PRONONCE par mise à disposition le 27 Mai 2024

Par Madame Elsa VALENTINI, Juge

Assistée de Madame Célia SANDJIVY, Greffier

NATURE DU JUGEMENT

réputée contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDERESSE

Madame [M] [Y]
née le [Date naissance 1] 1951 à , demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Fall PARAISO, avocat au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DEFENDERESSES

CPAM DES BOUCHES DU RHONE, dont le siège social est sis [Adresse 2] prise en la personne de son représentant légal en exercice

défaillant

Compagnie d’assurance MATMUT, Mutuelle Assurance des Travailleurs Mutualistes, immatrciulée au RCS de ROUEN sous le n°775 701 447 dont le siège social se situe [Adresse 4], prise en sa délégation régionale située sis [Adresse 3] prise en la personne de son représentant légal en exercice

représentée par Maître Philippe DE GOLBERY de la SELARL LESCUDIER & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE

**********

Le 2 septembre 2020, Madame [M] [Y], née le [Date naissance 1] 1951, a été victime, en qualité de piétonne, d’un accident de la circulation impliquant un véhicule assuré auprès de la société MATMUT.

L’assureur a versé à Madame [Y] une provision amiable de 1.000 euros et a mandaté le docteur [F] afin de l’examiner.
L’expert a rendu son rapport le 21 juillet 2021.

Sur la base de ce rapport, la société MATMUT a formulé une offre d’indemnisation qui n’a pas été acceptée.

Par actes des 31 mars et 4 avril 2023 assignant la société MATMUT et la CPAM des Bouches du Rhône, suivis de conclusions notifiées le 23 octobre 2023, Madame [Y] demande au tribunal de :
- CONDAMNER la compagnie d’assurance MATMUT à lui payer la somme de 26 282,80 € en réparation de son entier préjudice résultant de l’accident de la circulation du 2 septembre 2020, déduction faite de la provision versée
- CONDAMNER la compagnie d’assurance MATMUT à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
- CONDAMNER la compagnie d’assurance MATMUT aux entiers dépens
- DÉBOUTER la compagnie d’assurance MATMUT de ses demandes plus amples ou contraires
- DÉCLARER le jugement opposable à la CPAM des Bouches-du-Rhône
- DÉBOUTER les requises de toutes demandes, moyens, fins et conclusions contraires
- ORDONNER l’exécution provisoire.

Aux termes de conclusions notifiées le 5 juin 2023, la société MATMUT demande au tribunal de :
- lui DONNER ACTE de ce qu’elle n’a en aucun cas contesté le droit à indemnisation de la requérante
- ENTÉRINER les conclusions du Dr [F]
- ÉVALUER l’entier préjudice de Madame [M] [Y] en déclarant satisfactoires les offres d’indemnisation suivantes :
-D.S.A. : Mémoire
-DFTT : 1.104,00 €
-DFTP : 1.099,00 €
-SE : 5.800,00 €
-DFP : 7.700,00 €
-PEP : 1.200,00 €
-PA : 800,00 €
-Tierce Personne : 1.080,00 €
- RETRANCHER le recours des tiers-payeurs des postes de préjudice sur lesquels ils doivent s’imputer
- TENIR COMPTE de la provision de 1.000,00 € déjà versée à Madame [M] [Y]
- la DÉBOUTER de ses prétentions contraires ou plus amples
- DIRE n’y avoir lieu à exécution provisoire et déclarer commune et opposable à l’organisme social appelé en cause, la décision à intervenir
- REFUSER de faire application de l’article 700 du CPC au profit de Madame [Y]
- STATUER ce que de droit sur le sort des dépens qui seront distraits au profit de la Société LESCUDIER & ASSOCIÉS, Avocat en la cause, qui y a pourvu (articles 696 et 699 du CPC).

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions quant à l’exposé détaillé des prétentions et moyens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 19 février 2024.

L’affaire a été appelée à l’audience du 15 avril 2024 et mise en délibéré au 27 mai 2024.

La CPAM des Bouches du Rhône, régulièrement assignée, n’ayant pas constitué avocat ; le présent jugement sera réputé contradictoire à l’égard de l’ensemble des parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le droit à indemnisation

En application de l’article 3 de la loi du 5 juillet 1985, les victimes, hormis les conducteurs des véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles ont subis, sans que puisse leur être opposée leur propre faute à l’exception de leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l’accident.

En l’espèce, il est acquis aux débats que le 2 septembre 2020, Madame [Y] a été victime, en qualité de piétonne, d’un accident de la circulation impliquant un véhicule assuré auprès de la société MATMUT.

Le droit à indemnisation de Madame [Y] n’est pas contesté et résulte tant des circonstances de l’accident que de loi du 5 juillet 1985, aucune faute n’étant prouvée ni même alléguée à l’encontre de cette piétonne.

Le droit à indemnisation de Madame [Y] étant plein et entier, la société MATMUT sera par conséquent condamnée à l’ indemniser de l’intégralité de son préjudice.

Sur l’évaluation du préjudice

Aux termes non contestés du rapport d’expertise amiable du docteur [F] l’accident a causé à Madame [Y] une fracture du col fémoral droit.

Les conséquences médico-légales sont les suivantes :
- GTT du 02/09/2020 au 14/10/2020
- GTP de classe 3 du 15/10/2020 au 15/11/2020, avec aide humaine de 1h/jour
- GTP de classe 2 du 16/11/2020 au 31/12/2020, avec aide humaine de 4h/semaine
- GTP de classe 1 du 01/01/2021 au 02/06/2021
- Consolidation : 02/06/2021
- Souffrances endurées : 3/7
- Préjudice esthétique permanent : 1/7
- AIPP : 7 %
- Préjudice d’agrément.

Au vu de l'ensemble des éléments produits aux débats, le préjudice subi par Madame [Y], âgée de 69 ans lors de l’accident, sera réparé ainsi que suit.

1°) Les Préjudices Patrimoniaux

Assistance par tierce personne avant consolidation
Il convient d'indemniser les dépenses destinées à compenser les activités non professionnelles particulières qui ne peuvent être assumées par la victime directe durant sa maladie traumatique, comme l'assistance temporaire d'une tierce personne pour les besoins de la vie courante, étant rappelé que l’indemnisation s'entend en fonction des besoins et non en fonction de la dépense justifiée. Le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne saurait être subordonné à la production de justificatifs des dépenses effectives.

L’expert a fixé le besoin d’assistance par une tierce personne de Madame [Y] de la façon suivante :
- 1h/jour du 15/10/2020 au 15/11/2020
- 4h/semaine du 16/11/2020 au 31/12/2020.

Il convient de fixer l’indemnisation du poste de préjudice lié à la nécessité d’avoir été assistée d’une tierce personne pour les besoins de la vie courante jusqu’à la consolidation sur la base d’un taux horaire de 20 € et d’allouer, en conséquence, à ce titre à Madame [Y], la somme de 1.134, 29 euros décomposée comme suit :
31j x 1h x 20 € = 620 €
(45j/7) x 4h x 20 € = 514, 29 €.

2°) Les Préjudices Extra Patrimoniaux :

Déficit fonctionnel temporaire
Ce poste de préjudice indemnise l'invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant la maladie traumatique. Le déficit fonctionnel temporaire inclut pour la période antérieure à la date de consolidation, l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique.

L’expert retient les éléments suivants :
- GTT du 02/09/2020 au 14/10/2020
- GTP de classe 3 du 15/10/2020 au 15/11/2020
- GTP de classe 2 du 16/11/2020 au 31/12/2020
- GTP de classe 1 du 01/01/2021 au 02/06/2021.

Sur la base d’une indemnisation de 28 € par jour pour un déficit total pour rester dans la demande, les troubles dans les conditions d'existence subis par Madame [Y] jusqu'à la consolidation, justifient l'octroi d'une somme de 2.350, 60 euros, calculée comme suit :
42j x 28 € = 1.176 €
31j x 28 € x 50 % = 434 €
45j x 28 € x 25 % = 315 €
152j x 28 € x 10 % = 425, 60 €.

Souffrances endurées
Il s'agit de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c'est-à-dire du jour de l'accident à celui de sa consolidation. A compter de la consolidation, les souffrances endurées vont relever du déficit fonctionnel permanent et seront donc indemnisées à ce titre.

En l'espèce, elles sont caractérisées par le traumatisme initial et les traitements subis s’agissant notamment de l’hospitalisation, de l’intervention chirurgicale, du traitement médicamenteux et de la rééducation. Cotées à 3/7 par l’expert, elles seront réparées par l'allocation de la somme de 7.000 euros.

Déficit fonctionnel permanent
Ce préjudice a pour composante les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, les douleurs qui persistent depuis la consolidation, la perte de la qualité de la vie et les troubles définitifs apportés à ces conditions d'existence.

La victime souffrant d’un déficit fonctionnel permanent évalué à 7 % par l’expert compte-tenu des séquelles relevées et étant âgée de 69 ans lors de la consolidation de son état, il lui sera alloué la somme de 7.910 euros.

Préjudice esthétique permanent
Côté à 1/7 en raison de la cicatrice opératoire, il justifie l’octroi de la somme de 2.000 euros.

Préjudice d'agrément
Ce préjudice vise exclusivement à réparer le préjudice spécifique “lié à l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique, sportive ou de loisirs”.
La jurisprudence des cours d'appel ne limite pas l’indemnisation du préjudice d’agrément à l’impossibilité de pratiquer une activité sportive ou de loisirs exercée antérieurement à l’accident.
Elle indemnise également les limitations ou les difficultés à poursuivre ces activités.

Madame [Y] expose qu’avant l’accident elle pratiquait régulièrement la randonnée et le vélo ; qu’elle n’a pas pu reprendre ces activités, ni la natation du fait des séquelles de l’accident. Elle sollicite à ce titre la somme de 5.000 euros.

L’assureur offre la somme de 800 euros pour ce poste de préjudice.

La requérant ne produit aucune pièce établissant qu’elle pratiquait régulièrement la randonnée ou tout autre sport avant l’accident. Elle ne justifie donc pas d’un préjudice d’agrément distinct de la diminution des plaisirs de la vie notamment du fait de l’impossibilité de se livrer à certaines activités d’agrément déjà indemnisée au titre du déficit fonctionnel permanent.
Par conséquent, il sera alloué à Madame [Y] la somme offerte par la MATMUT.

Sur les demandes accessoires

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, la société MATMUT, succombante, sera condamnée aux entiers dépens.

Madame [Y] ayant été contrainte d’exposer des frais pour obtenir la reconnaissance de ses droits, il est équitable de condamner la MATMUT à lui payer la somme de 1.500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire de droit.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL,

Statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, réputé contradictoire et en premier ressort,

CONDAMNE la société MATMUT à payer à Madame [M] [Y] les sommes suivantes, en deniers ou quittances, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, en réparation des préjudices suivants :

- 1.134, 29 euros au titre de l’assistance par tierce personne
- 2.350, 60 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire
- 7.000 euros au titre des souffrances endurées
- 7.910 euros au titre du déficit fonctionnel permanent
- 2.000 euros au titre du préjudice esthétique permanent
- 800 euros au titre du préjudice d’agrément

DIT que la provision déjà versée de 1.000 euros viendra en déduction des sommes ainsi allouées ;

DIT le présent jugement commun à la CPAM des Bouches du Rhône ;

CONDAMNE la société MATMUT à payer à Madame [M] [Y] la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

DIT n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire ;

CONDAMNE la société MATMUT aux dépens.

AINSI JUGE ET PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DE LA DEUXIEME CHAMBRE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE
27 MAI 2024

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 2ème chambre cab2
Numéro d'arrêt : 23/03973
Date de la décision : 27/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-27;23.03973 ?
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