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23/05/2024 | FRANCE | N°22/00232

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc: rd/carsat, 23 mai 2024, 22/00232


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 1]


JUGEMENT N°24/02508 du 23 Mai 2024

Numéro de recours: N° RG 22/00232 - N° Portalis DBW3-W-B7G-ZT32

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
S.A. [5]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par la SELARL GRIMALDI & Associés, avocats au barreau de MARSEILLE


c/ DEFENDERESSE
Organisme [12]
[Adresse 10]
[Adresse 10]
[Localité 2]
Représentée par la SELARL DE LA GRANGE ET FITOUSSI AVOCATS, avocats au barreau de MARSE

ILLE

Appelé(s) en la cause:

DÉBATS : À l'audience publique du 07 Février 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :
...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 1]

JUGEMENT N°24/02508 du 23 Mai 2024

Numéro de recours: N° RG 22/00232 - N° Portalis DBW3-W-B7G-ZT32

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
S.A. [5]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par la SELARL GRIMALDI & Associés, avocats au barreau de MARSEILLE

c/ DEFENDERESSE
Organisme [12]
[Adresse 10]
[Adresse 10]
[Localité 2]
Représentée par la SELARL DE LA GRANGE ET FITOUSSI AVOCATS, avocats au barreau de MARSEILLE

Appelé(s) en la cause:

DÉBATS : À l'audience publique du 07 Février 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : DEPARIS Eric, Vice-Président

Assesseurs : KASBARIAN Nicolas
DICHRI Rendi

L’agent du greffe lors des débats : KALIMA Rasmia,

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 23 Mai 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort
RG N°22/00232

EXPOSE DU LITIGE :

Par requête expédiée par lettre recommandée le 18 janvier 2022, la S.A. [5] a saisi le tribunal judiciaire de Marseille en contestation de la décision de l’Établissement National des Invalides de la Marine (ENIM), régime social des marins, du 25 novembre 2021, suite à recours préalable obligatoire confirmant sa décision du 22 septembre 2021, relative à sa demande d’inopposabilité de la prise en charge de l’affection de son salarié, M. [R] [E], au titre du tableau n°30 bis des maladies professionnelles.

Les parties ayant été régulièrement convoquées, l’affaire a été retenue à l'audience de fond du 7 février 2024.

Par voie de conclusions reprises oralement à l’audience par son conseil, la S.A. [5] sollicite le tribunal aux fins de juger inopposable à son égard la décision de prise en charge de la maladie de M. [R] [E] au titre de la législation professionnelle et condamner l’ENIM au paiement de la somme de 3 000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, la S.A. [5] fait valoir, d’une part, l'absence à la fois de lien contractuel entre M. [R] [E] et la personne morale requérante essentiellement par l'effet de la privatisation de la compagnie [4] et l’échange d’action intervenus à partir de 1996, alors que M. [E] a cessé ses activités en 1994 ; d’autre part, que la caisse ne rapporte pas la preuve que les conditions de prise en charge au titre du tableau n°30 bis des maladies professionnelles quant à la durée de 10 ans et aux travaux, sont remplies pour ce salarié qui a essentiellement exercé des fonctions d’officier de pont.

Aux termes de ses écritures reprises oralement à l’audience par son conseil, l’ENIM sollicite quant à lui le tribunal aux fins de :
- déclarer opposable à la S.A. [5] la décision de prise en charge de l’affection présentée par M. [R] [E] au titre du tableau n°30 bis des maladies professionnelles ;
- débouter la S.A. [5] de l’ensemble de ses demandes ;
- condamner la S.A. [5] au paiement de la somme de 3 000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, l’ENIM fait valoir la procédure de constitution de la S.A. [5], et qu’autre part que les conditions du tableau n°30 bis sont satisfaites.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, il est renvoyé aux pièces et conclusions déposées par les parties à l’audience pour un exposé plus ample de leurs moyens et prétentions.

L’affaire a été mise en délibéré au 23 mai 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur le lien contractuel.

Sur cet aspect du litige, la thèse alléguée au recours est contredite par les conditions de succession de la [6] devenue [4] après fusion avec la [8], intervenue dans un contexte de privatisation accomplie de 1996 à 2006 en faveur de la [7] venue aux droits de la [9] (la SA [5]) créée dès 1978, devenue la SA [5] ;

En dépit de la cessation du travail de M. [R] [E] avant 1999 correspondant à la fusion effective des structures commerciales [4] et la SA [5], l'obligation au passif social non seulement résulte de la transmission universelle du patrimoine de la société absorbée, à savoir la SA [4], vers la SA [5], société absorbante, mais s'étend à toute obligation née du chef de la société absorbée ;

De fait, la requérante ne conteste pas, puisque émanant de sa pièce n° 4 d’une part qu’il ressort des lignes de service de Monsieur [E] qu’il exerçait les fonctions de :
- assistant lieutenant mécanicien sur les navires Rousseau, Rostand, Aquillon, Zélande, Ronsard Tellier ;
- second mécanicien sur le Tchekhov ;
- officier polyvalent sur les navires La Pérouse, Pasteur Ronsard, Renoir, Fort Desaix II ;
- lieutenant de pont sur les navires Ile Maurice II, Grieg, Mont Louis, Marion Dufresne, Zeebrugge, Haussmann, Atlantic Service, Borodine, Montcalm, Gauguin, Fort Royal II, Fort St Charles, Fort Fleur d’Epée, Atlantic Center.
Et d’autre part qu’il ressort des registres des affaires maritimes que l’ensemble de ces navires appartiennent ou ont appartenu à la SA [5].

En conséquence la SA [5], venue aux droits de l'armateur des navires sur lesquels M. [R] [E] a exercé la profession de marin au moins de 1980 à 1994, doit être considérée tenue en qualité d'employeur substitué au regard de la législation professionnelle ;

Sur le caractère professionnel de la maladie

L’article L.461-1 du Code de la sécurité sociale dispose qu’est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Le tableau n°30 bis des maladies professionnelles est rédigé comme suit :

Désignation de la maladie

Délai de prise en charge

Liste limitative des travaux susceptibles de provoquer cette maladie
Cancer broncho-pulmonaire primitif.
40 ans (sous réserve
d'une durée d'exposition de 10 ans).
Travaux directement associés à la production des matériaux contenant de l'amiante.
Travaux nécessitant l'utilisation d'amiante en vrac.
Travaux d'isolation utilisant des matériaux contenant de l'amiante.
Travaux de retrait d'amiante.
Travaux de pose et de dépose de matériaux isolants à base d'amiante.
Travaux de construction et de réparation navale.
Travaux d'usinage, de découpe et de ponçage de matériaux contenant de l'amiante.
Fabrication de matériels de friction contenant de l'amiante.
Travaux d'entretien ou de maintenance effectués sur des équipements contenant des matériaux à base d'amiante.

Il est de jurisprudence constante qu’il n’est pas imposé que le salarié participe directement à l’emploi ou à la manipulation de l’agent nocif, et donc à l’exécution des travaux à risque mais qu’il soit exposé à celui-ci dans l’exercice de son activité, à savoir que l’agent nocif soit présent sur la lieu de travail.

Le tribunal constate d’une part que la société ne conteste pas la présence d’amiante sur les lieux de travail en ce que l’ENIM  verse aux débats le décret 98-332 du 29 avril 1998 qui relève que les navires de pêches et autres navires, comprenant les navires pétroliers sont présumés avoir contenu de l’amiante si leur date de construction est antérieure au 31 décembre 1999.

Il est d’autre part relevé que la S.A. [5] se contredit dans ses écritures au regard de sa pièce n° 4 précitée puisque M. [R] [E] est loin de n’avoir été qu’officier de pont de 1980 à 1994 mais également assistant lieutenant mécanicien, officier polyvalent et second mécanicien amené de facto à effectuer des travaux de construction et de réparation navale et travaux d’entretien ou de maintenance effectués sur des équipements contenant des matériaux à base d’amiante pendant au moins dix ans.

En tout état de cause, face à ces éléments, et même pour le poste d’officier de pont, au regard de ce qui précède, la requérante ne produit aucune fiche de l’ensemble des postes occupés dont la description des tâches démontrerait que son salarié a été exempté des travaux en cause et protégé des émanations d’amiante, ni ne démontre le travail dans des conditions d’exposition au même matériau auprès d’un autre employeur désigné.

Au vu de l’ensemble des éléments communiqués, il y a lieu de considérer que la caisse rapporte la preuve de la réunion des conditions de prise en charge du tableau n°30 bis des maladies professionnelles, et la demande de la S.A. [5] en inopposabilité de la décision du 22 septembre 2021 de reconnaissance du caractère professionnel de l’affection de M. [R] [E] doit être rejetée.

Sur les demandes accessoires

L’équité commande, notamment au regard des circonstances et de l’issue du litige, qu’il soit alloué à l’ENIM la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

En application des dispositions de l'article 696 du Code de procédure civile, la S.A. [5], qui succombe en ses prétentions, sera condamnée aux entiers dépens de l’instance.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort,

DÉCLARE recevable, mais mal fondé, le recours de la S.A. [5] à l’encontre de la décision de l’ENIM du 25 novembre 2021 confirmant l’opposabilité de la décision de l’ENIM du 22 septembre 2021 de prise en charge de la maladie de M. [R] [E] au titre du tableau n°30 bis des maladies professionnelles ;

DÉCLARE opposable à la S.A. [5] la décision de l’ENIM du 22 septembre 2021 de prise en charge de la maladie de M. [R] [E] au titre du tableau n°30 bis des maladies professionnelles ;

DÉBOUTE la S.A. [5] de l’ensemble de ses demandes ;

CONDAMNE la S.A. [5] au paiement de la somme de 3 000 € à l’ENIM  au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la S.A. [5] aux dépens de l’instance.

Conformément aux dispositions de l'article 538 du code de procédure civile, les parties disposent, à peine de forclusion, d'un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision pour interjeter appel.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 23 mai 2024.

LA GREFFIÈRE
LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc: rd/carsat
Numéro d'arrêt : 22/00232
Date de la décision : 23/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-23;22.00232 ?
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