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16/05/2024 | FRANCE | N°21/05710

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 3ème chbre cab b1, 16 mai 2024, 21/05710


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION B


JUGEMENT N°


Enrôlement : N° RG 21/05710 - N° Portalis DBW3-W-B7F-Y4WR

AFFAIRE :

Mme [J] [G] (Me Anne LAMARCHE)
C/
S.A. CNP ASSURANCES (la SELARL CABINET CERMOLACCE-GUEDON)
Monsieur [Y] [O]

Rapport oral préalablement fait


DÉBATS : A l'audience Publique du 14 Mars 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré

Président : Madame Patricia GARNIER, Juge

Greffier : Madame Olivia ROUX, lors des débats<

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A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au : 16 Mai 2024

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aur...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION B

JUGEMENT N°

Enrôlement : N° RG 21/05710 - N° Portalis DBW3-W-B7F-Y4WR

AFFAIRE :

Mme [J] [G] (Me Anne LAMARCHE)
C/
S.A. CNP ASSURANCES (la SELARL CABINET CERMOLACCE-GUEDON)
Monsieur [Y] [O]

Rapport oral préalablement fait

DÉBATS : A l'audience Publique du 14 Mars 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré

Président : Madame Patricia GARNIER, Juge

Greffier : Madame Olivia ROUX, lors des débats

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au : 16 Mai 2024

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 16 Mai 2024

PRONONCE en audience publique par mise à disposition au greffe le 16 Mai 2024

Par Madame Patricia GARNIER, Juge

Assistée de Madame Olivia ROUX,

NATURE DU JUGEMENT

réputée contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDERESSE

Madame [J] [G]
née le 02 Février 1958 à [Localité 4]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Anne LAMARCHE, avocat au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DEFENDEURS

S.A. CNP ASSURANCES
immatriculé au RCS Nanterre 341 737 062
pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège,
dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Maître Pascal CERMOLACCE de la SELARL CABINET CERMOLACCE-GUEDON, avocats au barreau de MARSEILLE

Monsieur [Y] [O]
, demeurant [Adresse 3]

défaillant

FAITS ET PROCEDURE

Madame [B] [O], décédée le 17 janvier 2020, avait souscrit à l'égard de sa fille, madame [J] [G], un contrat d'assurance vie auprès de la SA CNP ASSURANCES.
Pourtant selon courrier du 16 juin 2020, elle a appris que sa mère avait modifié le bénéficiaire de son assurance vie.
Elle a sollicité le juge des référés, qui, par ordonnance du 6 janvier 2021 a ordonné à la SA CNP ASSURANCES de lui transmettre les conditions générales et particulières du contrat d’assurance vie souscrit par sa mère, madame [O].
C'est ainsi qu’elle a appris que, depuis le 9 juillet 2009, le nouveau bénéficiaire du contrat d’assurance vie de sa mère était monsieur [Y] [O], le frère de la défunte.
Madame [B] [O] était placée sous tutelle depuis un jugement en date du 9 février 2017.

C'est dans ce contexte que madame [J] [G], par acte en date du 8 juin 2021, a assigné la SA CNP ASSURANCES et monsieur [Y] [O] devant le Tribunal Judiciaire de Marseille.

Par conclusions notifiées par RPVA le 1er février 2023, au visa des articles 414-1 et suivants, 1130, 1178 et suivants du code civil, madame [J] [G] sollicite du tribunal de :
- PRONONCER la nullité de la demande de changement de la clause bénéficiaire du contrat n°96567080022 en date du 7 juillet 2009 au regard de l’incapacité manifestent de madame [O] de rédiger une telle clause ;
- JUGER que la modification du contrat d’assurance vie au bénéfice de Monsieur [O] a été obtenu par dol ;
- en l’état de la nullité de la demande de changement de bénéficiaires JUGER que madame [J] [G] et seul le bénéficiaire du contrat d’assurance vie n°96567080022souscrit par Madame [O] en date du 15 janvier 2002 ;
- par conséquent, en application du contrat, OCTROYER à madame [J] [G] la somme de 6968,93 euros ;
-CONSTATER l’accord de la SA CNP ASSURANCES de procéder au paiement de cette somme et au besoin les condamner ;
-CONDAMNER tout succombant au paiement de la somme de 2000 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
-CONDAMNER la SA CNP ASSURANCES aux entiers dépens en ce compris le coût du constat du huissier ;
- ne pas écarter l’exécution provisoire de droit.
Par conclusions notifiées par RPVA le 25 octobre 2023, la SA CNP ASSURANCES, au visa de l’article L132-25 du code des assurances, sollicite du juge de :
- JUGER Qu’aucune responsabilité ne peut être retenue à l’encontre de la SA CNP ASSURANCES ;
- DONNER ACTE à la la SA CNP ASSURANCES de ce qu’elle s’en rapporte à justice ;
si par impossible, le tribunal annulait la clause litigieuse et ordonnait le versement du capital bénéficiaire précédent, en l’occurrence Madame madame [J] [G] ,
- DONNER ACTE à la la SA CNP ASSURANCES de ce qu’elle s’exécuterait spontanément ;
-CONDAMNER tout succombant à payer à la SA CNP ASSURANCES la somme de 2000 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
- CONDAMNER tout succombant aux entiers dépens.

Bien que régulièrement assignée selon les modalités de l’article 658 du Code de Procédure Civile, monsieur [Y] [O] n’a pas constitué avocat.

Au-delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l'espèce des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, le Tribunal entend se référer pour l'exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessus.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 octobre 2023 pour que l'affaire soit plaidée le 14 mars 2024.
L'affaire a été mise en délibéré au 16 mai 2024.

MOTIFS

En vertu de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
En application des dispositions article 1315 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement celui qui s'en prétend libéré, doit prouver le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En application des dispositions de l’article 414-1 du code civil, pour faire un acte valable, il faut être sain d'esprit. C'est à ceux qui agissent en nullité pour cette cause de prouver l'existence d'un trouble mental au moment de l'acte.

Il ressort des éléments versés aux débats que madame [O], mère de madame [J] [G], avait souscrit un contrat d’assurance vie à son nom auprès de la SA CNP ASSURANCES.

Par courrier en date du 9 juillet 2009, soit postérieurement à l’entrée en vigueur de l’article 414-1 du code civil applicable à l’espèce, un courrier était envoyé à la SA CNP ASSURANCES mentionnant la modification de la clause bénéficiaire de ce contrat au bénéfice de monsieur [Y] [O], frère de la défunte.

Cette modification est contestée par madame [J] [G] qui fait valoir que sa mère ne disposait pas de toutes ses capacités quand elle a modifié cette clause.

À l’appui de sa demande, concernant son état de santé, elle verse aux débats le jugement de placement sous tutelle du 9 février 2017 et un certificat médical du 10 décembre 2019 exposant l’état neurologique de sa mère ne permet pas la gestion de démarches administratives.
Afin de démontrer que sa mère ne savait pas lire et écrire, elle produit une attestation de la société de services d’aide à la personne qui intervenait à son domicile du 1er août 2006 au 30 juin 2010 puis du 1er juillet 2010 au 1er février 2020, qui expose qu’elle était devenue totalement dépendante à partir de juin 2016 totalement grabataire du 1er octobre 2017 au 1er février 2020. Elle y ajoute deux attestations émanant d’une voisine et de sa tutrice qui exposent que madame [O] ne savait ni lire ni écrire. Sa tutrice explique qu’avant son placement sous tutelle, sa grand-mère avait été victime de nombreux abus de la part de sa propre famille (nièce, sœur, frère,…) et que ses comptes bancaires avaient été totalement vidés.
Enfin, elle verse aux débats des justificatifs de domicile démontrant qu’elle n’habitait pas chez monsieur [O], le nouveau titulaire du contrat d’assurance vie, contrairement à l’adresse qui est indiquée sur le courrier du 9 juillet 2009 modifiant le bénéficiaire de la clause.

Il ressort de l’ensemble de ces éléments, que bien avant son placement sous tutelle, madame [O] avait été victime de nombreux abus et notamment d’abus financiers car elle était en état de faiblesse du fait qu’elle ne savait ni lire ni écrire.
De plus, l’adresse de madame [O] a été modifiée dans le courrier de changement du bénéficiaire de la clause du contrat d’assurance vie et mise au domicile de monsieur [O], frère, alors qu’elle n’y vivait pas en 2009 puisque la société « interaction services » expose qu’elle intervenait au domicile de madame [O] pendant cette période qui n’était pas à « Air Bel » comme indiqué dans le courrier. Monsieur [O] a certainement voulu que le courrier concernant l’assurance vie de sa sœur lui parvienne directement.

Toutefois, le fait que madame [O] ne sache ni lire ni écrire n’était pas lié à son état de santé mais à une absence d’apprentissage qui était également présente lors de la rédaction du contrat d’assurance vie en 2009, ce qui est visible à sa signature, identique dans le contrat de 2002 et dans le courrier de 2009, alors que le contrat et le courrier semblent avoir été écrits par d’autres personnes.
La démonstration de l’apparition des troubles mentaux de madame [O] remontent à l’année 2016, puisque l’attestation de l’aide à domicile fait remonter son état de dépendance à l’année 2016, même si elle a commencé à intervenir chez sa fille pour madame [V] en 2006.

Dans ces conditions, alors que le courrier de modification de la clause date de 2009, il est impossible pour le tribunal de savoir si les facultés mentales de madame [O] étaient altérées avant 2016 et si oui, plus de 7 années avant, au vu des éléments qui lui sont rapportés.

Par conséquent, madame [J] [G] échouant à rapporter la preuve que les facultés mentales de sa mère étaient altérées en 2009, au moment de la modification de la clause du contrat d’assurance vie au profit de son oncle monsieur [O], il conviendra de la débouter de ses demandes.

Sur les autres chefs de demandes

Il convient de condamner madame [J] [G] à payer à la SA CNP ASSURANCES la somme équitable de 1000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'au paiement des dépens de la présente instance.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL

STATUANT en matière civile ordinaire, publiquement, par jugement réputé contradictoire, en premier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi,

DEBOUTE madame [J] [G] de l'ensemble de leurs demandes;

CONDAMNE madame [J] [G] à payer à la SA CNP ASSURANCES la somme de 1000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

REJETTE le surplus des demandes ;

CONDAMNE madame [J] [G] aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile;

RAPPELLE que l’exécution provisoire du présent jugement est de droit.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au Greffe de la Troisième Chambre section B du Tribunal Judiciaire de MARSEILLE le 16 mai 2024.
Signé par Madame GARNIER, Président, et par Madame ROUX, Greffier présent lors de la mise à disposition au Greffe de la décision.

LE GREFFIER                                           LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 3ème chbre cab b1
Numéro d'arrêt : 21/05710
Date de la décision : 16/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 22/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-16;21.05710 ?
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