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13/05/2024 | FRANCE | N°19/02454

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 2ème chambre cab2, 13 mai 2024, 19/02454


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE


JUGEMENT N°


Enrôlement : N° RG 19/02454 - N° Portalis DBW3-W-B7D-WDZK

AFFAIRE : M. [E] [K] (Me Géraldine ADRAI-LACHKAR)
C/ S.A. FILIA MAIF (la SELARL CONVERGENCES AVOCATS)

Rapport oral préalablement fait

DÉBATS : A l'audience Publique du 08 Avril 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré

Président : Madame Elsa VALENTINI

Greffier : Madame Célia SANDJIVY, lors des débats

A l'issue de laquelle, la date du délibéré

a été fixée au : 13 Mai 2024

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N°

Enrôlement : N° RG 19/02454 - N° Portalis DBW3-W-B7D-WDZK

AFFAIRE : M. [E] [K] (Me Géraldine ADRAI-LACHKAR)
C/ S.A. FILIA MAIF (la SELARL CONVERGENCES AVOCATS)

Rapport oral préalablement fait

DÉBATS : A l'audience Publique du 08 Avril 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré

Président : Madame Elsa VALENTINI

Greffier : Madame Célia SANDJIVY, lors des débats

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au : 13 Mai 2024

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 13 Mai 2024

PRONONCE en audience publique par mise à disposition le 13 Mai 2024

Par Madame Elsa VALENTINI, Juge

Assistée de Madame Célia SANDJIVY, Greffier

NATURE DU JUGEMENT

réputée contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDEUR

Monsieur [E] [K]
né le [Date naissance 5] 1977 à [Localité 9], demeurant [Adresse 7] - [Localité 2]

Immatriculé à la sécurité sociale sous le n°[Numéro identifiant 1]

représenté par Me Géraldine ADRAI-LACHKAR, avocat au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DEFENDERESSES

FILIA-MAIF, immatriculée zu RCS de NIORT sous le n°341 672 681, dont le siège social est [Adresse 4] à [Localité 10] prise en la personne de son représentant légal en exercice

représentée par Maître Laurent LAZZARINI de la SELARL CONVERGENCES AVOCATS, avocats au barreau de MARSEILLE

CPAM DES BOUCHES DU RHONE, dont le siège social est sis [Adresse 6], [Localité 3] prise en la personne de son représentant légal en exercice

défaillant

**************

Le 11 mai 2009, Monsieur [E] [K], né le [Date naissance 5] 1977, a été victime, en qualité de piéton, d’un accident de la circulation impliquant un véhicule assuré auprès de la FILIA MAIF.

Son préjudice initial a été indemnisé. Son état de santé a ensuite connu une aggravation.

L’assureur a mandaté le docteur [J] aux fins d’expertise amiable. Celui-ci a rendu son rapport le 14 décembre 2017.

La société MAIF a versé amiablement une provision de 33.000 euros. Elle a été condamnée par ordonnance de référé en date du 19 septembre 2018 à verser une provision complémentaire de 40.000 euros.

Par actes des 20 et 21 février 2019 assignant la société FILIA MAIF et la CPAM des Bouches du Rhône, Monsieur [K] demande au tribunal de :
- CONDAMNER la requise à lui payer les sommes suivantes :
-DFTP : 8.460 €
-Souffrances endurées : 35.000 €
-Tierce personne : 2.046 €
-DFP : 32.500 €
-Préjudice d’agrément : 15.000 €
-Préjudice esthétique : 7.000 €
-PGPA : 140.467, 84 €
-Incidence professionnelle : 400.000 €
-PGPF : 1.872.000 €
-Assistance : 2.520 €
Total : 2.516.659, 84 €
- LA CONDAMNER à verser la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux entiers dépens.

Dans ses conclusions notifiées le 2 février 2021, la MAIF, ayant absorbé la FILIA MAIF, demande au tribunal de :
- DONNER ACTE à la MAIF qu’elle n’a jamais contesté le droit à indemnisation de Monsieur [E] [K]
- EVALUER l’entier préjudice de Monsieur [E] [K] en déclarant satisfactoires les offres d’indemnisation formulées dans ses conclusions à hauteur de 98.773,50 €
- DEDUIRE de cette somme allouée les provisions précédemment versées pour un montant de 73.000 €
- DEBOUTER Monsieur [E] [K] de toutes ses autres demandes,
- STATUER ce que de droit sur les dépens.

Par jugement en date du 25 avril 2022, le tribunal de céans a :
- CONDAMNÉ la société MAIF à payer à Monsieur [E] [K], les sommes suivantes, en deniers ou quittances, provisions non déduites, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, en réparation des préjudices suivants :
-2.520 euros au titre des frais d’assistance à expertise
-2.046 euros au titre de l’aide par tierce personne
-4.362 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels
-40.000 euros au titre de l’incidence professionnelle
-8.440, 20 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire
-28.000 euros au titre des souffrances endurées
-27.300 euros au titre du déficit fonctionnel permanent
-4.000 euros au titre du préjudice esthétique permanent
- DIT qu’il conviendra de déduire de ces sommes les provisions déjà versées à hauteur de 73.000 euros
- DÉBOUTÉ Monsieur [E] [K] de sa demande au titre du préjudice d’agrément

- SURSIS À STATUER sur la perte de gains professionnels futurs ;
- CONDAMNÉ la société MAIF aux dépens et à payer à Monsieur [E] [K] la somme de 1.300 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
- RENVOYÉ l’affaire à la mise en état pour production par Monsieur [K] de ses avis d’impositions pour les années 2016 à 2020 et de toute justificatif de sa situation professionnelle actuelle.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 20 janvier 2023, Monsieur [K] sollicite du tribunal qu’il condamne la requise à lui payer la somme de 1.950.052 euros au titre des PGPF et la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux entiers dépens.

Dans ses dernières écritures notifiées le 6 mars 2023, la société MAIF demande au tribunal de débouter Monsieur [K] de toutes ses demandes et de condamner celui-ci à lui verser la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions quant à l’exposé détaillé des prétentions et moyens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 16 mai 2023.

L’affaire a été appelée à l’audience du 8 avril 2024 et mise en délibéré au 13 mai 2024.

La CPAM des Bouches du Rhône, régulièrement assignée, n’ayant pas constitué avocat ; le présent jugement sera réputé contradictoire à l’égard de l’ensemble des parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la perte de gains professionnels futurs

Monsieur [K] expose qu’au moment de l’accident il exerçait comme commercial et pouvait espérer un revenu annuel de 60.000 euros ; qu’au moment de l’aggravation de son préjudice, il occupait un emploi de serveur dont il espérait un revenu annuel de 50.000 euros ; qu’il a été dans l’impossibilité de continuer et a donc dû se reconvertir ; qu’il occupe désormais un emploi de commercial en cigarette électronique ; que cet emploi est sédentaire puisqu’il consiste à faire du démarchage téléphonique ; que de ce fait son revenu est nettement inférieur.
Sur la base d’un revenu annuel de référence de 60.000 euros, il sollicite la somme de 1.950.052 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs.
En réponse aux arguments de l’assureur, Monsieur [K] reconnaît qu’il a tenté de créer deux activités, une concernant les trottinettes et l’autre le suivi de sleeve, dont il envisageait seulement de s’occuper de la gestion. Il indique que ces activités ne sont pas exploitées et qu’il n’en a tiré aucun revenu. Monsieur [K] concède s’être rendu sur un salon pour son employeur mais précise qu’il s’agissait d’un déplacement ponctuel et qu’il est resté assis. Il considère que cela n’est pas comparable à l’activité d’un directeur commercial. Par ailleurs, Monsieur [K] expose avoir subi une sleeve et avoir perdu beaucoup de poids ce qui l’a poussé à tenter de reprendre la course mais qu’il a rapidement senti les limites de son corps et n’a pas poursuivi cette activité.

La MAIF relève que Monsieur [K] se prévaut d’un poste de commercial au moment de l’accident alors qu’il était à l’essai et avait débuté seulement 6 jours avant celui-ci ; que cette activité n’aurait pu perdurer puisque la société a ensuite déposé le bilan ; que la preuve de cet emploi n’est pas rapportée, celui-ci n’étant pas repris dans le relevé de carrière de Monsieur [K].
Elle considère que les attestations de propositions d’embauche sont incohérentes au regard du cursus professionnel et de formation de Monsieur [K] puisque celui-ci a arrêté sa scolarité en 5ème après avoir redoublé deux fois, a obtenu un CAP dans la coiffure mais n’a jamais exercé cette activité et a ensuite occupé des emplois de serveur avec un niveau de rémunération de l’ordre du SMIC. Elle note qu’il ressort du relevé de carrière qu’au moment de l’accident en 2009, Monsieur [K] n’avait déclaré aucune activité depuis 2007. Elle relève que Monsieur [K] produit une promesse d’embauche pour la brasserie [8] avec une rémunération à hauteur de 5.121,99 € bruts mensuels ce qui ne correspond pas aux sommes effectivement perçues selon le relevé de carrière.
La MAIF considère par ailleurs que Monsieur [K] n’est pas inapte à occuper l’emploi de directeur commercial qui n’implique pas de rester debout en permanence.
Elle soutient qu’en tout état de cause, le préjudice initial a déjà été indemnisé de sorte que l’éventuelle perte de gains doit s’évaluer par référence au salaire de serveur perçu au moment de l’aggravation, soit un SMIC de 1.121, 71 € nets. Elle relève que Monsieur [K] exerce désormais la profession de commercial au sein de la société SARL ALAV avec un salaire de base de 1.900, 57 € bruts, outre le paiement d’heures supplémentaires et un revenu variable. Elle note qu’en 2021, il est mentionné sur le relevé de carrière de Monsieur [K] un revenu annuel de 41.672 €.
Par ailleurs, l’assureur indique que Monsieur [K] a créé une société qui a pour objet le ramassage de trottinettes et l’accompagnement en rééquilibrage alimentaire et qu’il a pu reprendre une activité sportive régulière. Elle souligne que Monsieur [K] a publié ses performances sportives entre le 11 novembre 2020 et le 19 mai 2022 et qu’il court régulièrement plus de 10 km en une heure. Elle indique également que Monsieur [K] se déplace dans toute la France pour représenter son entreprise.
L’assureur conclut que dans la mesure où les revenus actuels de Monsieur [K] sont supérieurs à ceux de 2013 il n’y a pas lieu à l’indemniser pour ce poste de préjudice.

Il convient de rappeler que le préjudice initial a été définitivement liquidé. Ainsi, il n’y a pas lieu de se référer à la situation professionnelle de Monsieur [K] au moment de l’accident mais à celle qui était la sienne au moment de l’aggravation intervenue le 22 novembre 2012. A cette date, Monsieur [K] occupait un emploi de serveur avec un salaire mensuel de 1.121, 71 euros nets, soit 13.458, 84 euros par an.
Or, l’expert a indiqué que : “les postes sollicitant les membres inférieurs et une station debout prolongée sont à écarter”.
De ce fait, il a été retenu une inaptitude à la poursuite de l’activité de serveur.
Par conséquent, la perte de gains éventuelles par rapport à la rémunération de cette activité doit être indemnisée.

Il convient de distinguer les périodes avant que Monsieur [K] ait commencé son activité de commercial au sein de la SARL ALAV à compter du 1er février 2021 et après.

Pour la période de la consolidation du 23/08/2016 au 01/02/2021
Sur cette période de 1624 jours, Monsieur [K] aurait gagné sans l’accident la somme de 60.721, 90 € [(1121, 71/30) x 1624 jours].
Il ressort des avis d’imposition versés au débat que Monsieur [K] a gagné 47.976 €, selon le détail suivant :
2016 : 2.995 €
2017 : 6.966 €
2018 : 12.975 €
2019 : 11.632 €
2020 : 13.408 €.
Ainsi la perte de gains pour cette période s’élève à la somme de 12.745, 90 €.

Il ressort du contrat de travail que le 1er février 2021, Monsieur [K] a débuté un emploi de commercial, en CDI, avec un salaire mensuel brut de 1.900, 57 euros. Selon le relevé de carrière produit au débat, Monsieur [K] a perçu en 2021 41.672 euros de rémunération pour cet emploi. Ainsi ses revenus sont nettement supérieurs à ceux perçus au moment de l’aggravation. Il n’y a donc pas de perte de gains futurs à compter du 1er février 2021.

Par conséquent, il sera alloué à Monsieur [K] la somme de 12.745, 90 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs.

Sur les demandes accessoires

La MAIF, qui succombe en la présente instance, sera condamnée aux dépens.

Il n’y a pas lieu d’allouer à Monsieur [K] une nouvelle somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile dans la mesure où cette nouvelle décision n’a été rendue nécessaire qu’en raison de sa carence probatoire.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL,

Statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, réputé contradictoire et en premier ressort,

CONDAMNE la société MAIF à payer à Monsieur [E] [K], la somme de
12.745, 90 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs ; cette somme avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;

DIT n’y avoir lieu à nouvelle condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et rejette les demandes à ce titre ;

CONDAMNE la société MAIF aux dépens.

AINSI JUGE ET PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DE LA DEUXIEME CHAMBRE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE
13 MAI 2024

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 2ème chambre cab2
Numéro d'arrêt : 19/02454
Date de la décision : 13/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-13;19.02454 ?
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