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02/05/2024 | FRANCE | N°17/02933

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc : urssaf, 02 mai 2024, 17/02933


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 5]
[Adresse 6]
[Localité 1]


JUGEMENT N°24/01759 du 02 Mai 2024

Numéro de recours: N° RG 17/02933 - N° Portalis DBW3-W-B7B-VQI2

AFFAIRE :

DEMANDERESSE
S.A [8]
[Adresse 3]
[Adresse 9]
[Localité 2]
représentée par Me Nicolas BLANCO, avocat au barreau d’AVIGNON


c/ DEFENDERESSE
Organisme URSSAF PACA
[Adresse 11]
[Localité 4]
représentée par Mme [F] [E], inspectrice juridique de l’organisme munie d’un pouvoir régu

lier




DÉBATS : À l'audience publique du 29 Février 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : GOSSELIN Patrick,...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 5]
[Adresse 6]
[Localité 1]

JUGEMENT N°24/01759 du 02 Mai 2024

Numéro de recours: N° RG 17/02933 - N° Portalis DBW3-W-B7B-VQI2

AFFAIRE :

DEMANDERESSE
S.A [8]
[Adresse 3]
[Adresse 9]
[Localité 2]
représentée par Me Nicolas BLANCO, avocat au barreau d’AVIGNON

c/ DEFENDERESSE
Organisme URSSAF PACA
[Adresse 11]
[Localité 4]
représentée par Mme [F] [E], inspectrice juridique de l’organisme munie d’un pouvoir régulier

DÉBATS : À l'audience publique du 29 Février 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : GOSSELIN Patrick, Vice-Président

Assesseurs : KASBARIAN Nicolas
AGGAL AIi

L’agent du greffe lors des débats : [S] [N]

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 02 Mai 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

RG N°17/02933

EXPOSE DU LITIGE

Le 19 janvier 2017, la SA [8] a saisi la présente juridiction afin de contester la décision de rejet partiel du 17 novembre 2016 de la commission de recours amiable portant sur une mise en demeure du 24 septembre 2015 faisant suite à une lettre d'observations du 23 avril 2015 à la suite d'une contrôle portant sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013 sur 6 établissements.

Le présent litige porte sur 4 chefs de redressement :
- chef de redressement N°3 : Versement transport : taux
- chef de redressement N°5 : Forfait social - Assiette - hors prévoyance
- chef de redressement N°6 : Indemnités de rupture forcée soumises intégralement à cotisations
- chef de redressement N°9 : Prévoyance complémentaire

L'affaire a été appelée et retenue à l'audience du 29 février 2024.

La SA [8], représentée par son conseil soutenant oralement ses conclusions, demande au tribunal de :
- annuler la décision de la commission de recours amiable du 17 novembre 2016 ;
- annuler les chefs de redressements 3, 5, 6 et 9 visés dans la lettre d'observations du 23 avril 2015 pour un montant total de 57.003 euros ainsi que les majorations de retard afférentes pour un montant de 11.244 euros.

L'URSSAF PACA, représentée par un inspecteur juridique soutenant oralement ses conclusions, sollicite pour sa part du tribunal de :
- confirmer la décision prise par la commission de recours amiable du 17 novembre 2016 ;
- débouter la SA [8] de ses demandes.

En application de l'article 455 du Code de procédure civile, il convient de se reporter aux observations et conclusions déposées par les parties à l'audience, reprenant l'exposé complet de leurs moyens et prétentions.

L'affaire a été mise en délibéré au 2 mai 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Chef de redressement N°3 Versement transport

En application du code général des collectivités territoriales, sont assujetties au versement transport les personnes physiques ou morales, publiques ou privées, qui emploient plus de neuf salariés s'agissant de l'année 2012 et 2013, dans le périmètre des transports urbains d'une autorité organisatrice ayant institué le versement transport (AOT).

Il est acquis que apprécier le seuil d'effectif de dix, il convient de considérer tous les établissements d'une même entreprise situés dans une zone assujettie.

Toutefois, et conformément au cinquième alinéa de l'article L.2333-64 du code général des collectivités territoriales, les employeurs qui, en raison de l'accroissement de leur effectif, atteignent onze salariés sont dispensés pendant trois ans du paiement du versement.
Le montant du versement est réduit de 75 %, 50 % et 25 %, respectivement chacune des trois années suivant la dernière année de dispense.

L'inspecteur du recouvrement a relevé que l'établissement de [Localité 10] et de [Localité 7] n'avait pas déclaré le versement transport au titre de l'année 2012 et 2013 alors ces deux établissement comportait plus de 9 salariés dans la zone.

La SA [8] conteste le point de départ de l'assujettissement progressif du versement transport estimant que le seuil de 9 salariés est dépassé pour les établissements de de [Localité 10] et [Localité 7] à compter de 2008 et non 2005 tel que retenu par l'urbain.

L'URSSAF estime pour sa part qu'il est que le point de départ du dispositif d'assujettissement progressif est fixé au premier jour de l'année suivant que l'effectif de l'établissement dépasse le seuil de 9 salariés dans le cas présent. Pour ce faire, elle se réfère à la DADS de 2005 faisant ressortir un effectif de 9 salariés pour les deux établissements avec l'application du régime progressif (exonération 2005, 2006, 2007, abattement 75% 2008, abattement 50% 2009, abattement 25% en 2010).

Selon les dispositions de l'article D 2333-91 du Code Général des Collectivités territoriales dans sa version applicable au présent litige " Pour l'application des dispositions prévues à l'article L. 2333-64, l'effectif des salariés, calculé au 31 décembre, est égal à la moyenne des effectifs déterminés chaque mois de l'année civile.

Pour la détermination des effectifs du mois, il est tenu compte des salariés dont le lieu de travail est situé dans le périmètre de l'une des zones mentionnées aux 1° et 2° de l'article L. 2333-64 et qui sont titulaires d'un contrat de travail le dernier jour de chaque mois, y compris les salariés absents, conformément aux dispositions des articles L. 1111-2, L. 1111-3 et L. 1251-54 du code du travail.

Pour un établissement créé en cours d'année, ou une implantation d'activité ne donnant pas lieu à création d'établissement, l'effectif est apprécié à la date de la création ou de l'implantation. Au titre de l'année suivante, l'effectif est apprécié dans les conditions définies aux deux alinéas précédents, en fonction de la moyenne des effectifs de chacun des mois d'existence de la première année.

Pour la détermination de la moyenne mentionnée aux premier et troisième alinéas, les mois au cours desquels aucun salarié n'est employé ne sont pas pris en compte ".

En l'espèce, la SA [8] apporte des éléments probants sur le calcul de la moyenne des effectifs de 9 salariés dans les établissements considérés (tableau des effectifs, bordereaux trimestriels URSSAF) qui n'était pas atteinte en 2005 et en 2006. La référence à la DADS en 2005 n'est pas révélatrice d'une moyenne d'effective mais d'un effectif présent au 31 décembre 2005.

En conséquence, il y a lieu de constater le redressement Versement Transport de l'URSSAF au titre de l'année 2012 et 2013 n'est pas contesté dans son principe mais dans son montant à juste titre sans qu'il soit possible cependant d'établir la situation des effectifs pour l'année 2007 et des abattements utiles pour l'année 2012 et 2013.

Aussi, le redressement est confirmé dans son principe et enjoint l'URSSAF PACA de procéder au calcul rectificatif en tenant compte de la moyenne des effectifs des établissements au titre de l'année 2007.

Chef de redressement N°5 Forfait social-assiette-hors Prevoyance

L'inspecteur du recouvrement a intégré dans la base du forfait social la rémunération perçue par M. [U] [P], président du conseil de surveillance de la SA [8], pour les années 2012 et 2013.

Aux termes de l'article R. 243-59, dernier alinéa, du Code de la sécurité sociale, dans sa version en vigueur jusqu'au 8 juillet 2016 : "...l'absence d'observation vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification, dès lors que l'organisme a eu les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause. Le redressement ne peut porter sur des éléments qui, ayant fait l'objet d'un précédent contrôle dans la même entreprise ou le même établissement, n'ont pas donné lieu à observations de la part de cet organisme ".

L'existence d'une décision implicite antérieure suppose que la situation soit identique lors des contrôles successifs effectués dans la même entreprise et que l'organisme de recouvrement ait pu vérifier l'ensemble des éléments constitutifs de la pratique contestée et se soit abstenu en toute connaissance de cause de la critiquer.

L'accord tacite n'est constitué que lorsque deux éléments sont simultanément réunis à savoir :

- l'absence d'observation de la part de l'inspecteur ou de l'URSSAF concernant des pratiques vérifiées lors du précédent contrôle et conduisant à une application erronée des dispositions de sécurité sociale, susceptible d'engendrer un redressement. Ces pratiques litigieuses doivent cependant avoir été appliquées dans des conditions identiques lors du précédent contrôle et la législation ne doit pas avoir été modifiée depuis.

- le silence gardé en toute connaissance de cause, alors que l'inspecteur ou l'URSSAF disposait des moyens de se prononcer, cette condition étant remplie si l'inspecteur a examiné les points litigieux, s'il a reçu toutes les informations nécessaires pour leur vérification et s'il n'a formulé aucune observation.

Enfin, la preuve de l'accord tacite incombe au cotisant.

La société invoque l'existence d'un précédent contrôle portant sur les années 2009 et 2010 en produisant les lettres d'observations du 27 janvier 2012, les procès verbaux de délibérations du 31 décembre 2007 et du 28 juin 2010 faisant état de cette rémunération et un extrait de compte de la comptabilité consultée.

Il est relevé qu'il n'est pas apporté la preuve que les 2 procès verbaux des délibérations des conseils de surveillance étaient intégrés dans le registre des délibérations. De même, l'extrait comptable du grand livre compte 641800 rémunération du président du conseil de surveillance sur le contrôle antérieur ne permet d'établir que ce point de législation a été consulté et validé par le précédent inspecteur du recouvrement en toute connaissance de cause validant ainsi cette pratique. Le silence gardé par l'inspecteur lors du contrôle précédent ne suffit pas à lui seul à établir que l'URSSAF a implicitement accepté la pratique de l'employeur.

La société n'apporte aucun élément de nature à établir que ce point aurait été évoqué ou abordé antérieurement, ni que la pratique était identique lors du précédent contrôle, ni que l'URSSAF aurait pris une décision en toute connaissance de cause.

En conséquence, la preuve de l'existence d'un accord tacite antérieur n'est pas rapportée.

Le chef de redressement 5 est maintenu.

Chef de redressement N°6 indemnités de rupture forcée

En application des anciens articles L.122-8 et L.122-9 du Code du travail, applicables au présent litige devenus articles L.1234-5 et L.1234-9, le licenciement pour faute grave prive le salarié du bénéfice de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité de licenciement.

L'article L.242-1 du Code de la sécurité sociale prévoit un assujettissement des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur à hauteur de la fraction de ces indemnités soumise à l'impôt sur le revenu en application de l'article 80 duodecies du Code général des impôts.

Dès lors que l'indemnité transactionnelle est conclue pour une somme globale et forfaitaire, il appartient au juge du fond de rechercher, nonobstant la qualification retenue par les parties, si ce montant n'inclut pas des éléments de rémunération légaux ou conventionnels, tels que l'indemnité de préavis, demeurant soumis à cotisations, par distinction de la partie purement indemnitaire destinée à mettre fin à un litige concernant l'exécution ou la rupture du contrat de travail.

Dans le cadre d'un règlement amiable intervenu à l'occasion d'un licenciement pour faute grave, il est constant que les concessions réciproques ayant permis aux parties de transiger impliquent nécessairement pour l'employeur l'abandon de la notion de faute grave reprochée au salarié, qui si elle avait été maintenue ne pouvait que conduire à priver le salarié de toute indemnité, de quelque nature que ce soit.

En l'espèce, l'inspecteur du recouvrement a relevé qu'une transaction suite à un licenciement pour faute grave a été conclu pour M. [W] [L] pour un montant de 15000 euros entraînant un rappel de cotisations et de contributions.

La SA [8] soutient que la position de l'URSSAF n'est pas fondée au motif que lorsque les sommes versées au titre d'un protocole transactionnel sont identifiées par les parties comme des dommages et intérêts visant à réparer un préjudice, elles ne doivent pas être soumise à cotisations.

Il y a lieu de rappeler que la charge de la preuve du caractère exclusivement indemnitaire des sommes versées en exécution la dite transaction incombe à la SA [8].

En l'espèce, il est rappelé que la volonté des parties sur la nature de leur transaction s'apprécie au moment de celle-ci et non lors de la saisine initiale de la juridiction prudhommale. Il est relevé à la page 4 dans le protocole transactionnel du 7 juin 2012 entériné par le jugement du 26 juin 2012 que " M. [W] [L] renonce tout particulièrement à prétendre au paiement de l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement et à l'indemnité compensatrice de préavis ".

Cette transaction est suffisante à démontrer que cette indemnité forfaitaire globale versée au salarié concerné avait uniquement la nature de dommages et intérêts destinés à réparer un préjudice né de la perte de l'emploi ou des circonstances de la rupture.

Par voie de conséquence, le redressement 6 indemnités de rupture forcé est annulé.

Chef de redressement N°9 Prévoyance complémentaires

L'inspecteur de recouvrement a réintégré dans la base des cotisations la participation patronale à la prévoyance complémentaire des salariés en l'absence de respect des règles de formalisme.

Selon l'article R.243-59 du Code de la sécurité sociale, l'absence d'observations vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification, dès lors que l'organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause. Le redressement ne peut porter sur des éléments qui, ayant fait l'objet d'un précédent contrôle dans la même entreprise ou le même établissement, n'ont pas donné lieu à observations de la part de cet organisme.

Le tribunal rappelle que l'existence d'un accord tacite suppose la réunion de plusieurs conditions cumulatives :
- une même législation applicable pour les deux contrôles en cause dans la même entreprise ou le même établissement ;
- une identité de situations de fait sur la pratique existante ;
- la preuve que le précédent inspecteur du recouvrement s'était abstenu de toute observation et redressement en toute connaissance de cause et de façon univoque alors que la pratique concernée était susceptible d'entraîner un redressement, étant précisé que la simple possibilité de connaissance de la pratique litigieuse est insuffisante.

Il appartient à la société cotisante d'apporter la preuve de cet accord tacite issu d'un précédent contrôle.

La société invoque l'existence d'un précédent contrôle portant sur les années 2009 et 2010 en produisant ces contrats existants depuis 1974 avec leur avenants.

Pour ce seul motif, la société requérante ne peut valablement se prévaloir de la protection juridique prévue par l'article R.243-59 du Code de la sécurité sociale.

Aucun élément probant n'est apporté sur l'identité entre les deux contrôles, sur la pratique litigieuse, appliquées dans des conditions identiques, sans modification de la législation ni même que l'inspecteur de recouvrement a validé cette pratique en toute connaissance de cause.

Le chef de redressement 9 est maintenu.

La SA [8], succombant partiellement à ses prétentions, supportera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort :

CONFIRME partiellement la décision de la commission de recours amiable de l'URSSAF PACA en date du 17 novembre 2016 ;

ANNULE le chef de redressement n°6 indemnités de rupture forcée intégralement soumise à cotisations de la lettre d'observations du 23 avril 2015 ;

CONFIRME le redressement n°3 versement transport Taux dans son principe mais renvoie devant l'URSSAF PACA quant à son calcul ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

CONDAMNE la SA [8] aux dépens de l'instance ;

DIT que tout appel de la présente décision doit être formé, sous peine de forclusion, dans le délai d'un mois à compter de la réception de sa notification, conformément aux dispositions de l'article 538 du code de procédure civile.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 2 mai 2024.

LA GREFFIERELE PRÉSIDENT

Notifié le :


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc : urssaf
Numéro d'arrêt : 17/02933
Date de la décision : 02/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-02;17.02933 ?
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