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19/04/2024 | FRANCE | N°18/00422

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc : urssaf, 19 avril 2024, 18/00422


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 1]


JUGEMENT N° 24/01910 du 19 Avril 2024

Numéro de recours: N° RG 18/00422 - N° Portalis DBW3-W-B7C-VRKR

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
S.A. [6]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 2]
représentée par Me Frédéric BERGANT, avocat au barreau de MARSEILLE


c/ DEFENDERESSE
Organisme URSSAF PACA
[Adresse 5]
[Localité 3]
représentée par Mme [T] [O] (Inspecteur juridique), munie d’un pouvoir régulier

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COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : PASCAL Florent, Vice-Présid...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 1]

JUGEMENT N° 24/01910 du 19 Avril 2024

Numéro de recours: N° RG 18/00422 - N° Portalis DBW3-W-B7C-VRKR

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
S.A. [6]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 2]
représentée par Me Frédéric BERGANT, avocat au barreau de MARSEILLE

c/ DEFENDERESSE
Organisme URSSAF PACA
[Adresse 5]
[Localité 3]
représentée par Mme [T] [O] (Inspecteur juridique), munie d’un pouvoir régulier

DÉBATS : À l'audience publique du 13 Février 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : PASCAL Florent, Vice-Président

Assesseurs : MOLINO Patrick
ACHOUR Salim

Lors des débats : ELGUER Christine, Greffier

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 19 Avril 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE :

La société [6] a fait l'objet d'un contrôle d’un inspecteur du recouvrement de l’URSSAF PACA ayant donné lieu à une lettre d’observations du 30 mars 2017 comportant deux chefs de redressement pour la période des années 2014 et 2015, suivie d’une mise en demeure n°63229312 du 27 septembre 2017 d’un montant total de 209.761 €, dont 27.838 € de majorations de retard.

La société [6], par courrier du 25 octobre 2017, a saisi la commission de recours amiable de l’URSSAF PACA d’une contestation d’un seul des chefs de redressement relatif à l’assujettissement et affiliation de droit au régime général de contrats de sponsoring ou parrainage de sportifs professionnels.

Par requête expédiée le 29 décembre 2017, la société [6], représentée par son conseil, a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône d’un recours contentieux à l’encontre de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de l’URSSAF PACA.

Par décision du 25 juillet 2018, la commission de recours amiable de l’organisme de recouvrement a explicitement rejeté la contestation de la société et maintenu le chef de redressement, dans son principe comme son montant.

L’affaire a fait l’objet, par voie de mention au dossier, d’un dessaisissement au profit du pôle social du tribunal judiciaire de Marseille, en vertu de la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle.

L’affaire a été retenue à l’audience de fond du 13 février 2024.

Par voie de conclusions soutenues oralement par son conseil, la société [6] demande au tribunal de :

- déclarer son recours recevable et bien fondé ;
- retenir l’autorité de la chose jugée attachée au jugement rendu le 10 septembre 2001 par le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône ;
- annuler le redressement pour cause d’irrégularité de la lettre d’observations du 30 mars 2017 ;
- sur le fond, annuler le redressement relatif aux contrats de sponsoring au titre des exercices des années 2014 et 2015 ;
- à titre infiniment subsidiaire, réduire l’assiette de réintégration envisagée ;
- condamner en tout état de cause l’URSSAF PACA à lui verser la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

L’URSSAF PACA, représentée par une inspectrice juridique soutenant oralement ses conclusions, sollicite pour sa part du tribunal de :
- à titre principal, déclarer le recours irrecevable faute de contestation de la décision explicite de la commission de recours amiable en date du 25 juillet 2018 ;
- à titre subsidiaire, débouter la société [6] de l’ensemble de ses demandes et prétentions ;
- condamner la société [6] au paiement de la somme de 209.761 € au titre de la mise en demeure du 27 septembre 2017, ainsi que 4.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

En application de l’article 455 du Code de procédure civile, il convient de se reporter aux pièces et conclusions déposées par les parties à l’audience, reprenant l’exposé complet de leurs moyens et prétentions.

L’affaire a été mise en délibéré au 19 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur l’autorité de la chose jugée

En vertu de l’article 1355 du Code civil, l'autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

La société [6] se prévaut d’un jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône du 10 septembre 2001, rendu entre elle-même et l’URSSAF des Bouches-du-Rhône sur un problème juridique identique, pour opposer une autorité de la chose jugée dans le cadre du présent litige.

Or, la force exécutoire d’un jugement n’est attachée qu’à ce qui a été tranché.

En l’espèce, le jugement cité de 2001 concernait un contrôle antérieur pour la période du 1er novembre 1994 au 30 septembre 1997, alors que le présent litige concerne un contrôle pour la période des années 2014 et 2015.

Compte tenu de l’effet relatif du jugement, l’autorité de la chose jugée invoquée n’est pas fondée.

Sur la recevabilité du recours

En application de l’article R.142-18 alinéa 3 du Code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, la forclusion ne peut être opposée au cotisant ayant introduit une requête contestant une décision implicite de rejet d’un organisme effectuant le recouvrement pour le seul motif de l’absence de saisine du tribunal contestant la décision explicite de rejet intervenue en cours d’instance.

En l’espèce, l’URSSAF PACA oppose à la société [6] son absence de recours à l’encontre de la décision de la commission de recours amiable du 25 juillet 2018, pour soutenir que celle-ci serait définitive et que le cotisant n’est plus recevable à en contester le bien-fondé.

Il résulte néanmoins des pièces du dossier que la société [6] a régulièrement saisi la commission de recours amiable de sa contestation, par courrier recommandé du 25 octobre 2017, dans le mois suivant la mise en demeure du 27 septembre 2017 délivrée en exécution du redressement litigieux.

L’URSSAF PACA a accusé réception de la saisine de la commission de recours amiable, par courrier du 23 novembre 2017, en informant la société cotisante qu’elle disposait d’un délai de deux mois pour saisir la juridiction sociale à compter, soit du délai d’un mois en l’absence de décision de la commission, soit de la réception de la décision de la commission.

Par requête du 29 décembre 2017, la société [6] a saisi le tribunal d’un recours contentieux à l’encontre de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de l’URSSAF PACA.

Son recours est en conséquence recevable, et il ne peut lui être opposée une forclusion au seul motif de l’absence de saisine du tribunal quant à la décision explicite de rejet intervenue en cours d’instance.

Sur la régularité de la procédure de contrôle

La société [6] relève que la lettre d’observations du 30 mars 2017 de l’inspecteur du recouvrement de l’URSSAF PACA ne mentionne pas que la personne contrôlée dispose d’un délai de trente jours pour répondre à ces observations et qu’elle a, pour ce faire, la faculté de se faire assister d’un conseil de son choix.

L’URSSAF PACA produit en réponse la charte du cotisant contrôlé adressée, à titre préalable, à la société [6] par courrier recommandé, et mentionnant que la réception de la lettre d’observations engage une période contradictoire, que le cotisant dispose d’un délai de trente jours pour faire part, par écrit de ses remarques, et qu’il a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix.

L’organisme soutient également que l’irrégularité soulevée n’entache ni la procédure ayant conduit au recouvrement, ni la saisine du tribunal, en l’absence de tout grief.

Il convient en effet de constater que, suite à la réception de la lettre d’observations du 30 mars 2017, la société [6] a formulé, par courrier circonstancié du 28 avril 2017, ses propres observations sur le chef de redressement contesté, auxquelles l’inspecteur a répondu le 28 août 2017, soit avant la délivrance de la mise en demeure du 27 septembre suivant.

Il s’ensuit que le principe du contradictoire, ainsi que les droits de la défense de la société [6], ont été respectés dans le cadre de la présente procédure de contrôle.

Le grief fondé sur la violation de l’article R.243-59 du Code de la sécurité sociale n’est en conséquence pas fondé.

Sur l’assujettissement et affiliation de droit au régime général (point n°2 : 182.013 €)

En application des articles L.7123-2 à L.7123-4 du Code du travail, est considérée comme exerçant une activité de mannequin, même si cette activité n’est exercée qu’à titre occasionnel, toute personne qui est chargée :

1° Soit de présenter au public, directement ou indirectement par reproduction de son image sur tout support visuel ou audiovisuel, un produit, un service ou un message publicitaire;
2° Soit de poser comme modèle, avec ou sans utilisation ultérieure de son image.

Tout contrat par lequel une personne s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un mannequin est présumé être un contrat de travail.

La présomption de l’existence d’un contrat de travail subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération ainsi que la qualification donnée au contrat par les parties.
Elle n’est pas non plus détruite par la preuve que le mannequin conserve une entière liberté d’action pour l’exécution de son travail de présentation.

Aux termes de la lettre d’observations du 30 mars 2017, l’inspectrice du recouvrement, ayant rappelé que la société [6] a pour activité la commercialisation d’articles de sport, a constaté qu’elle faisait appel à des sportifs afin de promouvoir les objets de la marque.

La société reconnaît avoir conclu des contrats de sponsoring ou parrainage avec des athlètes de haut niveau, principalement des joueurs de football mais également de handball.

Selon l’URSSAF, il ressort de l’analyse des contrats que ceux-ci portent sur une activité de mannequinat, qui est assujettie de plein droit au régime général, selon les termes de l’article L.311-3 15° du Code de la sécurité sociale.

L’activité de mannequinat comportant une présomption d’activité salariée, les sommes versées aux sportifs dans le cadre des contrats les liant à la société ont été analysées en éléments de rémunération au sens de l’article L.242-1, et réintégrées dans l’assiette des cotisations.

Selon la société [6], la finalité des contrats de sponsoring, de nature commerciale, est d’utiliser la notoriété des sportifs, et non leur image, pour assurer la promotion des produits de la marque.

A la différence du mannequinat, le sportif professionnel permet l’exploitation commerciale de son image lors de son activité sportive exercée dans le respect du contrat le liant à son employeur, à savoir son club.
Selon la société, à aucun moment le parrainé ne présente de produit au public ou ne pose comme modèle.

Le présent litige intervient après de multiples décisions juridictionnelles, rendues entre la société [6] et l’URSSAF PACA, portant sur des contrôles et des périodes antérieures mais sur le même problème juridique.

Le tribunal ne peut ainsi que relever et rappeler les termes de la décision ultime de la Cour de cassation relative au contrôle de la société [6] par l’URSSAF PACA pour la période des années 2007, 2008 et 2009.

Selon cet arrêt du 12 mai 2021 rendu par la 2ème chambre civile de la Cour de cassation (pourvoi n°19-24.610), entre les mêmes parties :

« les conventions litigieuses emportaient pour les athlètes concernés l’obligation, moyennant rémunération, de porter les équipements de la marque en vue d’en assurer la promotion à l’occasion de diverses manifestations sportives, de sorte que ces contrats étaient présumés être des contrats de travail de mannequin, et qu’il appartenait à la société de renverser cette présomption en apportant la preuve de l’absence de lien de subordination ».

Statuant sur renvoi après cassation, la cour d’appel d’Aix-en-Provence, par arrêt du 23 mai 2023 (n°RG 21/14908) dont le tribunal adopte entièrement les motifs, développe notamment la motivation suivante :

« l'affirmation de la société selon laquelle le sportif, acteur de la compétition qui véhicule des valeurs positives aux yeux du public et se révèle comme un excellent support d'une image attrayante, commercialise au travers des contrats de sponsoring sa propre notoriété, est sans incidence sur le présent litige, dès lors que cette observation est tout autant applicable à de nombreux mannequins, identifiés comme très attrayants par le public et auxquels a recours le complexe économique mode/beauté.

L'argument suivant selon lequel la société a pour activité la commercialisation d'articles de sport et n'est nullement une « société de spectacle », est également sans incidence sur l'appréciation de la nature du contrat litigieux, les sociétés commercialisant des produits de beauté, de mode, de décoration ou de tout autre produit soumis à promotion publicitaire assurée par le recours aux mannequins n’étant pas davantage, sauf preuve contraire, des sociétés de spectacle.

Il ressort des contrats conclus entre la SA [6] et différents footballeurs que la marque, qui jouit d'un prestige reconnu dans le monde entier dans le domaine des équipements de football, entend se constituer au travers de l'athlète, en raison de ses performances sportives et de l'image qu'il véhicule auprès du public, un soutien promotionnel lui permettant de renforcer l'image de marque de ces produits sur le marché français.

L’athlète s'engage :

- à ne pas être lié à un autre contrat de ce type portant sur la promotion d'équipements de sport ou de produits de la marque d'un équipementier concurrent,
- à utiliser exclusivement les équipements [6] à l'occasion des entraînements, matchs amicaux, de championnat, de coupe, nationaux ou internationaux et pour toute autre manifestation ayant trait à son activité de joueur de football,
- à promouvoir la marque [6] chaque fois que possible, et notamment lors des interviews, emportant les produits promotionnels de type blousons, casquettes, t-shirts...,
- à conférer à [6] le droit d'utiliser son nom et son image, pendant la durée d'exécution du contrat, dans le cadre de la commercialisation des équipements de gardien de but [6] ; son nom et son image pourront être utilisés dans des catalogues, lors de campagnes promotionnelles et sur l'emballage des équipements [6],
(...)

La société s'engage :

- à fournir gratuitement à l'athlète les équipements sportifs nécessaires à son activité pour une valeur de 2.000,00 € par saison en ligue 2 et de 3.000,00 € en ligue 1 au tarif général,
- en garantie de la licence concédant à [6] le droit d'utiliser son nom, à verser à l'athlète en fin de saison des indemnités précisées en annexe ( celle-ci prévoit le versement d'indemnités fixes annuelles croissant année par année, suivant la classification du club il est salarié, allant de 10.000,00 € à [30].000,00 € outre des primes de résultat selon le niveau de compétition, le résultat du club et le nombre de matchs joués).

Il en résulte que ces contrats emportent pour les athlètes concernés l'obligation, moyennant rémunération, de porter les équipements de la marque et exclusivement ces équipements, en vue d'en assurer la promotion, à l'occasion de diverses manifestations, peu important que les clichés fournis par l'athlète en exécution du contrat soient ou non utilisés dans les catalogues de promotion publicitaire des produits commercialisés par la société.

Il en résulte qu'en application de l'article L.7123-2 précité, la mise en œuvre de cette obligation conduit à considérer que l'athlète exerce bien une activité de mannequin.

Il revient en conséquence à la société, pour combattre l'assujettissement aux cotisations de sécurité sociale des sommes versées en exécution du contrat d'apporter la preuve de l'absence de lien de subordination l'unissant à ses cocontractants.

À cet égard, l'affirmation de ce que les sportifs, tous sous contrat de travail avec un club de football, répondent aux seules contraintes professionnelles et directives imposées par leur club employeur est insuffisante. Aucune impossibilité ni contradiction d'aucune sorte ne vient interdire aux joueurs d'exercer une autre activité rémunérée que celle de footballeur au sein de leur club. Il n'en est à tout le moins aucunement justifié par la société.

La SA [6] fait ensuite valoir qu'elle ne dispose d'aucun moyen lui permettant d'exercer la moindre contrainte sportive ou financière sur le sportif parrainé, encore moins s'agissant de joueurs professionnels notoirement connus, champions du monde ou gardien titulaire dans les clubs de football les plus prestigieux par exemple.

Cependant la notion de contrainte ne doit pas être analysée au regard des obligations sportives des joueurs, mais uniquement au regard des obligations qui les lient à la SA [6].

Il résulte précisément des contrats que la société impose aux joueurs un certain nombre de directives précises :

- utiliser exclusivement les équipements qu'elle lui fournit,
- les utiliser à l'occasion des entraînements, et des matchs amicaux de championnat, de coupe, nationaux ou internationaux, mais également pour toute autre manifestation ayant trait à son activité de joueur de football.

Ces directives contiennent ainsi l'interdiction de porter tout autre équipement, à l'occasion de quelque activité que ce soit, de jeux ou de compétition ou d'entraînements ou même de toute autre manifestation, dès lors que l'action ou la représentation auquel se livre l'athlète a trait à son activité de joueur de football. Il s'agit d'une contrainte déterminée et constante.

Le contrat contient encore la directive selon laquelle le joueur doit promouvoir la marque chaque fois que possible, et notamment lors des interviews, en portant les produits promotionnels listés. Il s'agit là encore d'une contrainte précise, et cette fois détachée d'une action ou d'une représentation nécessairement liée à l'activité de joueur de football. Ce peut être le cas lors d'une interview quelconque sur la situation personnelle de la star du football concernée.

Par le contrat, l'athlète concède à la société le droit d'utiliser son nom et son image, dans des conditions extrêmement générales qui s'appliquent pendant toute la durée d'exécution du contrat, conclu généralement pour [3] années.
(...)

Il en résulte la caractérisation de directives précises et conséquentes données à ses cocontractants par la SA [6].

La société dénie encore détenir un quelconque pouvoir de sanction à l'encontre des joueurs, autres que la faculté de dénoncer le contrat.

Néanmoins, les « modalités du contrat » figurant en rubrique V, stipulent que :

- l'athlète doit [être titulaire dans un championnat national] et s'il se trouve contraint d'interrompre son activité pour une période supérieure à quatre mois (retraite, maladie, blessure, suspension…), la société aura la faculté de dénoncer unilatéralement le contrat, l'athlète ne conservant que les équipements déjà fournis,
- si l'athlète joue dans une équipe autre que celle citée dans l'annexe susvisée les montants définis par cette annexe seraient à redéfinir par les parties,
- dans le cas d'une descente en division 2, l'athlète restera sous contrat mais seules les dotations d'équipement demeureront obligations de la société,
- dans le cas d'une descente en division inférieure à la division 2, la société aura la faculté de dénoncer unilatéralement le contrat.

Par ailleurs, la rubrique VIII relative à la dénonciation et à la résiliation anticipée du contrat donne pouvoir à la SA [6] de résilier de plein droit et sans préavis le contrat par courrier RAR si :

- l'athlète évolue en division inférieure à la division 2,
- l'athlète utilise du matériel autre que du matériel [6],
- l'athlète est positif à un contrôle antidopage,
- l'athlète évolue dans un championnat autre que les championnats français, anglais, italien, allemand et espagnol,
- l'athlète est sanctionné disciplinairement par son club par une fédération sportive et/ou par une instance juridictionnelle compétente, pour une peine égale ou supérieure à deux mois.

Les dispositions précédentes relèvent sans conteste possible d'un pouvoir de sanction de différents types de comportements, et notamment d'obligations précises imposées par le contrat, telle celle de ne porter que des équipements [6], ou de comportements contraires à l'esprit de promotion poursuivi, tous sont listés avec précision.

Les sanctions sont variables, de la dénonciation à la résiliation sans préavis, ou encore de nature financière par la suppression du droit aux indemnités.

Il en résulte que la société échoue à apporter la preuve de l'absence de lien de subordination résultant de l'application des articles L.7123-3 et L.7123-4 précités.

Il s'ensuit que le redressement fondé sur l'article L.311-3 15° du Code de la sécurité sociale est justifié.

La société conteste à titre subsidiaire l'assiette de réintégration envisagée, laquelle englobe la totalité des sommes versées aux athlètes, alors qu'elle affirme verser des indemnités en rétribution de la seule notoriété du sportif parrainé, appréciée selon les résultats personnels et le bilan final du club professionnel au sein duquel il évolue.

Toutefois, la proportionnalité des indemnités allouées en application du mode de calcul ci-dessus rappelé est sans emport sur la nature desdites indemnités qui rémunèrent la notoriété du joueur à la place qui est la sienne dans la hiérarchie sportive née de la compétition et de la notoriété du niveau de cette dernière, dont découlent à proportion l'impact publicitaire de la prestation promotionnelle à laquelle se livre le joueur pour le compte de la société.

Au demeurant, la SA [6] ne fait état d'aucun critère ni d'aucun indicateur de quelque nature qu'il soit, qui permettrait de différencier la rémunération de la prestation de mannequin tel que ci-dessus caractérisée, d'une contrepartie financière alléguée d'une cession d'un droit à l'image.

En outre, les contrats visent, outre la fourniture gratuite à l'athlète des équipements sportifs, pour les montants précités qui n'ont pas donné lieu à redressement, le versement global et indistinct des indemnités telles que fixé en annexe 1, lesquels sont différenciés suivants la classification du club, le type de compétition, et, pour les primes de résultat, selon le classement et le nombre de matchs joués dans chaque type de compétition. Comme le fait justement remarquer la société, dans la mesure où son activité est totalement distincte de celle du club sportif auquel est affiliée le joueur, il s'en déduit que ces sommes vont croissant suivant l'impact promotionnel attendu eu égard aux résultats du club d'affiliation ainsi qu'au public touché, plus important à mesure que le niveau de la compétition augmente. Aucune autre distinction ne figure dans les contrats quant à la nature des sommes allouées.

Il s'ensuit que c'est à bon droit que l'inspectrice du recouvrement a réintégré dans l'assiette sociale l'ensemble des sommes versées au sportif dans le cadre de l'exécution des contrats précités ».

Compte tenu de l’ensemble de ces motifs pertinents et applicables à l’espèce, relatifs spécialement à l’insuffisance de preuve par la société [6] de l'absence de lien de subordination, il y a lieu de la débouter de son recours et de la condamner à payer à l’URSSAF PACA la somme de 209.761 €, dont 27.838 € de majorations de retard, au titre du redressement opéré par la mise en demeure du 27 septembre 2017 pour les années 2014 et 2015.

La partie succombant à l’instance en supporte les dépens, conformément à l’article 696 du Code de procédure civile.

Les considérations tirées de l’équité ne justifie pas toutefois de condamnation sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Compte tenu de la nature et de l’ancienneté du litige, la présente décision sera assortie de l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort,

REJETTE la fin de non-recevoir opposée par la SA [6] relative à l’autorité de la chose jugée ;

DECLARE recevable, mais mal fondé, le recours de la SA [6] à l’encontre de la décision de rejet implicite de la commission de recours amiable de l’URSSAF PACA saisie de sa contestation de la mise en demeure n°63229312 du 27 septembre 2017, consécutive au redressement notifié par lettre d’observations du 30 mars 2017, pour la période des années 2014 et 2015 ;

DEBOUTE la SA [6] de ses demandes et prétentions ;

CONDAMNE la SA [6] à payer à l’URSSAF PACA la somme de 209.761 €, dont 27.838€ de majorations de retard, au titre de la mise en demeure n°63229312 du 27 septembre 2017 ;

DIT n’y avoir lieu à condamnation sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE la SA [6] aux dépens de l’instance ;

ORDONNE l’exécution provisoire de la présente décision.

Conformément aux dispositions de l'article 538 du Code de procédure civile, tout appel de la présente décision doit être formé, sous peine de forclusion, dans le délai d’un mois à compter de la réception de sa notification.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 19 avril 2024.

Notifié le :

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc : urssaf
Numéro d'arrêt : 18/00422
Date de la décision : 19/04/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 27/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-19;18.00422 ?
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