TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE
TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION B
JUGEMENT N°24/182
Enrôlement : N° RG 19/10471 - N° Portalis DBW3-W-B7D-WZ45
AFFAIRE :
M. [E] [D] (Me Henry BOUCHARA/ Me Mickaël COHEN)
Madame[H] [V] épouse [D] (Me Henry BOUCHARA/ Me Mickaël COHEN)
C/
S.A.S.U GDP VENDOME IMMOBILIER (Me Agnès STALLA/Me Florence DUBOSCQ )
S.A.S DOMUSVI (Me Evelyne MERDJIAN/ Me Etienne KOWALSKI)
S.A.S. CLINIQUE DE [8] Venant aux droits et obligations de la SAS REPOS [4] (Me Evelyne MERDJIAN/ Me Etienne KOWALSKI)
Rapport oral préalablement fait
DÉBATS : A l'audience Publique du 22 Janvier 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du prononcé
Président : Madame Corinne MANNONI, Vice-Présidente
Greffiers : Madame Inès MOUSSA, lors des débats
A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au : 15 Avril 2024
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 15 Avril 2024
PRONONCE en audience publique par mise à disposition au greffe le 15 Avril 2024
Par Madame Corinne MANNONI, Vice-Présidente
Assistée de Madame Sylvie PLAZA , Greffière
NATURE DU JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort
NOM DES PARTIES
DEMANDEURS
Monsieur [E] [D]
né le 20 Juillet 1948 à [Localité 5]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]
représenté par Maître Henry BOUCHARA, avocat au barreau de Marseille, avocat postulant
représenté par Maître Mickaël COHEN, avocat au barreau d’Annecy et Paris, avocat plaidant
Madame[H] [V] épouse [D]
née le 6 septembre 1951 à [Localité 5]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]
représentée par Maître Henry BOUCHARA, avocat au barreau de Marseille, avocat postulant
représentée par Maître Mickaël COHEN, avocat au barreau d’Annecy et Paris, avocat plaidant
C O N T R E
DEFENDERESSES
S.A.S.U GDP VENDOME IMMOBILIER
immatriculée au RCS de Paris sous le numéro B 429 982 929, dont le siège social est sis [Adresse 3], prise en la personne de son président domicilié en cette qualité audit siège
représentée par Maître Agnès STALLA, avocate au barreau de Marseille, avocate postulante
représentée par Maître Florence DUBOSCQ, de la SELARL PARETO AVOCATS, avocate au barreau de Paris, avocate plaidante
S.A.S DOMUSVI
immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro 519 158 794 , dont le siège social est sis [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
représentée par Maître Evelyne MERDJIAN, avocate au barreau de Marseille, avocate postulante
représentée par Maître Etienne KOWALSKI, de SIMMONS & SIMMONS LLP, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant
S.A.S. CLINIQUE DE [8]
immatriculée au RCS de Marseille sous le numéro 347 979 668, dont le siège social est sis [Adresse 11], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
VENANT AUX DROITS ET OBLIGATIONS DE LA SAS REPOS [4]
anciennement immatriculée au RCS de Marseille sous le numéro 066 804 345, dont le siège social est sis [Adresse 7], prise en la personne de son responsable légal domicilié en cette qualité audit siège
représentée par Maître Evelyne MERDJIAN, avocate au barreau de Marseille, avocate postulante
représentée par Maître Etienne KOWALSKI, de SIMMONS & SIMMONS LLP, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant
FAITS ET PROCEDURE
Entre 2007 et 2010, différents investisseurs ont acquis de la SCI OLYMPIA, aux droits et obligations de laquelle vient la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER, et de la société VENDOME PROMOTION, aux droits et obligations de laquelle vient la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER, différents lots de copropriété situés dans la résidence pour personnes âgées [4].
Les copropriétaires ont consenti des baux commerciaux d'une durée de neuf ans à la SAS REPOS [4] dont la dirigeante est la SAS DOMUSVI depuis le mois de décembre 2010. Auparavant, la dirigeante de la SAS REPOS [4] était la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER.
La SAS REPOS [4] était également la vendeuse du mobilier.
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Le 01 janvier 2009, en application de l'article L313-12 du Code de l'action sociale et des familles, une convention tripartite a été établie entre la SAS REPOS [4], le Préfet de la région PROVENCE ALPES COTE D'AZUR et le Président du Conseil Général des BOUCHES DU RHONE.
Cette convention prévoyait la nécessité pour la SAS REPOS BEAU SITEd’avoir à réaliser un certain nombre de travaux destinés à améliorer la qualité des espaces, en particulier la destruction des salles de bain avec reconstruction de nouvelles et création d’un ascenseur.
La SAS REPOS [4] n'a pas réalisé les travaux d'entretien et de mise aux normes qui étaient à sa charge.
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A compter du mois de juin 2016, la SAS REPOS [4] a fait délivrer des congés pour mettre fin aux baux commerciaux. Néanmoins, la SAS REPOS [4] exploitait toujours les locaux.
Suivant arrêté en date du 29 décembre 2017, le Directeur Général de l'AGENCE REGIONALE DE SANTE de la région ALPES COTE D'AZUR et le Président du conseil général des DU RHONE ont autorisé le transfert de l'activité de la résidence [4] vers un autre site.
Par ordonnance en date du 19 mars 2018, le Tribunal Administratif de MARSEILLE a rejeté la demande d'annulation de l'arrêté du 29 décembre 2017.
Les locaux sont libres de toute occupation depuis le 30 décembre 2019.
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Par ordonnance de référé en date du 02 janvier 2017, une expertise a été ordonnée concernant l'entretien et la mise aux normes de la résidence [4]. L'expert [R] a déposé son rapport le 22 janvier 2019.
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Dossier numéro 19/10000
Par acte en date du 17 juillet 2019. les investisseurs demandaient avec exécution provisoire :
- la réalisation des travaux sous astreinte,
- subsidiairement, la somme de 1.954.920,00 Euros avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement
- la somme de 1.000,00 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Dans leurs dernières conclusions, ils réclamaient :
- le financement des travaux,
- la somme de 1.000,00 Euros chacun sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Par jugement de ce jour, après avoir statué sur différentes fins de non recevoir, le Tribunal a :
- rejeté les demandes formées à l'encontre de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER, vendeur, considérant qu'elle n'avait pas manqué à son obligation de délivrance, dans la mesure où l'objet des ventes était des lots situés dans un ensemble immobilier dénommé [4] dans lequel était exploitée une maison de repos pour personnes âgées et où l'objet de la vente n'était donc pas des lots situés dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes,
- rejeté les demandes formées à l'encontre de la SAS DOMUSVI, dirigeant de la SAS REPOS [4], considérant qu'elle n'avait pas commis de faute intentionnelle d’une particulière gravité incompatible avec l’exercice normal de ses fonctions,
- rejeté les demandes formées à l'encontre de la SARL DOMUSVI CONSEIL IMMOBILIER, considérant qu'elle n'avait pas manqué à ses obligations d'assurer la sauvegarde des bâtiments et d'informer les copropriétaires,
- retenu la responsabilité de la SAS CLINIQUE DE [8] venant aux droits et obligations de laSAS REPOS [4] concernant les parties privatives, considérant qu'elle avait manqué à son obligation d'entretien et de mise aux normes,
- rejeté les demandes indemnitaires formées à l'encontre de la SAS CLINIQUE DE [8], considérant que l'indemnisation du préjudice des bailleurs devait être individualisée et évaluée chambre par chambre dans la mesure où il n'était pas démontré que les travaux nécessaires avait le même coût dans chacune des chambres et que l'indemnisation ne pouvait donc avoir lieu en fonction des tantièmes de la copropriété.
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dossiers numéros 20/2615 à 20/2668
Par acte en date du 05 août 2019, [E] [D] et [H] [V] épouse [D] ont a assigné la SAS REPOS [4] aux fins d'obtenir :
- la reconnaissance de la formation d'un nouveau contrat de bail commercial d'une durée de neuf ans à compter de la date pour laquelle le congé avait été donné,
- le montant des loyers contractuellement dus avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement,
- la somme de 2.000,00 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Dans ses dernières conclusions, le bailleur demande avec exécution provisoire :
- la reconnaissance de la formation d'un nouveau contrat de bail commercial d'une durée de neuf ans à compter de la date pour laquelle le congé avait été donné,
- le montant des loyers et des charges contractuellement dus,
- la somme de 5.000,00 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Par jugement en date de ce jour, le Tribunal a débouté [E] [D] et [H] [V] épouse [D] de toutes leurs demandes, fins et conclusions.
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Par acte en date du 24 janvier 2018, invoquant leur responsabilité, [E] [D] et [H] [V] épouse [D] ont assigné :
1. La SASU GDP VENDOME IMMOBILIER (numéro RCS 429 982 929) vendeur,
2. La SAS DOMUSVI (numéro RCS 519 158 794) présidente de la SAS REPOS [4] au moment des faits et de la SAS CLINIQUE DE [8] au moment du jugement, preneur, et présidente de la SASU IMMOBILIERE DOMUSVI 2 propriétaire des lots de service de la résidence,
3. La SAS REPOS [4] (numéro RCS 066 804 345) preneur à bail, aux droits et obligations de laquelle vient la SAS CLINIQUE DE [8] (347 979 668) intervenante volontaire.
Dans leurs dernières conclusions, [E] [D] et [H] [V] épouse [D] demandent :
- la somme de 117.438,85 Euros avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement à intervenir au titre de l'indemnisation de la perte de 70 % du capital investi,
- la somme de 5.000,00 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Ils sollicitent enfin que le jugement à intervenir soit assorti de l'exécution provisoire.
Concernant la prescription, [E] [D] et [H] [V] épouse [D] font valoir :
- qu'à l'époque des actes en cause, l'ancien article 2270-1 du Code Civil prévoyant une prescription décennale était applicable,
- que le point de départ de la prescription quinquennale était la date auquel le manquement était révélé,
- que les manquements aux obligations d'information et de garantie de la continuité de l'exploitation en EPHAD avaient été révélés par le courrier de l'ARS du 30 décembre 2016,
- que le manquement à l'obligation d'entretien avait été révélé au dépôt du rapport de l'expert [R] le 22 janvier 2019.
Concernant la qualité pour agir, il est indiqué :
- que les différents contrats constituaient une opération unique,
- qu'ils recherchaient la responsabilité des différents intervenants,
- que les griefs invoqués ne concernaient pas uniquement les baux mais aussi les ventes.
Concernant la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER, [E] [D] et [H] [V] épouse [D] font valoir :
- que la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER avait manqué à son obligation contractuelle de garantir une exploitation de la résidence conforme à sa destination,
- que chaque acquéreur devait offrir aux résidents au moins trois prestations sur les quatre suivantes, à savoir accueil, nettoyage régulier des locaux, service de petit déjeuner, fourniture de linge de maison,
- que cet engagement était repris dans les baux commerciaux et mis à la charge de la SAS REPOS [4],
- que, via la SAS REPOS [4], la GDP SASU IMMOBILIER s'était engagée à assurer l'entretien et la mise aux normes de la résidence ainsi que la pérennisation de l'exploitation en EPHAD au delà des neuf premières années,
- que la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER n'avait pas informé les investisseurs de la possibilité de transfert des lits vers une autre résidence,
- que, depuis le départ de la SAS REPOS [4], l'activité d'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes ne pouvait être exploitée au sein de la résidence.
Concernant la SAS DOMUSVI, il est indiqué :
- qu'à la suite d'une opération financière, la SAS DOMUSVI était venue aux droits et obligations de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER en sa qualité de vendeur des biens immobiliers en cause,
- qu'elle n'avait pas informé les bailleurs de la nécessité d'effectuer des travaux de remise aux normes et de restructuration de la résidence,
- qu'elle n'avait pas informé les bailleurs de la possibilité de transfert des lits.
Concernant la SAS REPOS [4], [E] [D] et [H] [V] épouse [D] font valoir :
- que la SAS REPOS [4] avait fait délivrer des congés avec transfert des lits vers une autre résidence appartenant également au groupe DOMUSVI,
- que ce transfert constituait un détournement de clientèle,
- que la SAS REPOS [4] n'avait pas fait réaliser les travaux d'entretien et de mise aux normes qui étaient à sa charge,
- que les bailleurs étaient privés de toute possibilité de relouer leur bien,
- qu'elle n'avait pas informé les bailleurs de la nécessité d'effectuer des travaux de remise aux normes et de restructuration de la résidence,
- qu'elle n'avait pas informé les bailleurs de la possibilité de transfert des lits.
Concernant le préjudice, il est indiqué :
- que les investisseurs avaient perdu une chance de réaliser un gain et d'investir dans un produit immobilier plus sécurisé qui leur aurait permis de percevoir des loyers et de constituer un patrimoine valorisé,
- que la perte de chance impliquait la privation d'une potentialité présentant un caractère de probabilité raisonnable et non un caractère certain,
- qu'aucune reprise d'exploitation n'était possible en raison de l'état de la résidence,
- que les lots étaient invendables.
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La SASU GDP VENDOME IMMOBILIER sollicite un sursis à statuer dans l'attente du jugement qui sera rendu dans l'instance 19/10000.
Elle soulève l'irrecevabilité de l'action, invoquant :
- la prescription, faisant valoir que le point de départ de la prescription
devait être fixé à la date de signature des actes de vente,
- l'absence d'intérêt pour agir, faisant valoir
- que les manquements allégués n'avaient pas trait à la vente
mais à l'exécution des baux,
- qu'elle n'était pas partie aux baux commerciaux.
Au fond, la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER conclut au débouté, faisant valoir :
- que les baux d'une durée de neuf ans ne comportaient aucune garantie de renouvellement,
- que les manquements invoqués étaient directement liés à l'exécution des baux commerciaux et qu'elle était tiers à ces derniers,
- qu'elle n'avait pas manqué à son obligation de délivrance, en ce que :
- l'exploitation en EHPAD n'était pas entrée dans le champ
contractuel,
- l'acquisition portait sur un bien immobilier et non sur une
activité,
- la résidence était conforme au moment de la vente,
- que les acquéreurs ne s'étaient jamais préoccupé de l'état de leur bien et qu'ils n'avaient jamais contrôlé les agissements de la SAS REPOS [4],
- que les travaux sur les parties communes incombaient aux copropriétaires et au syndicat des copropriétaires,
- que l'objectif pour lequel les demandeurs avaient investi dans la résidence [4] avait été atteint puisqu'ils avaient perçu des loyers et bénéficié d'avantages fiscaux,
- que les personnes ayant démarché les demandeurs n'avaient pas été assignées,
- qu'elle n'avait rien à voir avec la délivrance des congés,
- qu'avant ces congés, aucun grief n'avait été formulé à son encontre,
- que, lors de l'apport partiel d'actif à la société DVD PARTICIPATIONS, elle avait diminué la valorisation des titres de la SAS REPOS [4] du montant des travaux à hauteur de 467.000,00 Euros, si bien qu'elle avait participé indirectement à la réalisation desdits travaux,
- que la SAS REPOS [4] avait abandonné la résidence sans avoir effectué les travaux,
- que la SAS REPOS [4] et la SAS DOMUSVI avaient préféré construire un nouvel établissement plutôt que de réaliser les travaux,
- que les demandeurs multipliaient les recours, ce qui pouvait avoir pour conséquence une double indemnisation.
Subsidiairement, elle demande que la SAS CLINIQUE DE [8] et la SAS DOMUSVI soient condamnées à la relever et garantir des condamnations prononcées à son encontre, faisant valoir que la SAS REPOS [4] était directement à l'origine des congés et de l'abandon de la résidence au lieu de réaliser les travaux nécessaires.
La SASU GDP VENDOME IMMOBILIER conclut au rejet de l'appel en garantie formé par CLINIQUE DE [8] à son encontre, faisant valoir :
- que la SAS REPOS [4] était informée du montage juridique et financier de l'opération,
- que ses fautes étaient exclusivement à l'origine des dommages invoqués par les demandeurs.
Reconventionnellement, elle demande la somme de 10.000,00 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
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La SAS DOMUSVI et la SAS CLINIQUE DE [8] soulèvent l'irrecevabilité de l'action, invoquant :
- la prescription, faisant valoir que le point de départ de la prescription
devait être fixé à la date de signature des actes de vente,
- l'absence d'intérêt pour agir à l'encontre de la SAS DOMUSVI, faisant valoir
- qu'elle n'était pas partie à l'acte de vente ni au bail
commercial,
- qu'elle n'existait pas au moment de l'opération litigieuse,
- qu'elle n'était pas détentrice de l'autorisation d'exploitation
de la résidence,
- qu'elle était une entité distincte de la SASU GDP VENDOME
IMMOBILIER.
Au fond, la SAS CLINIQUE DE [8] conclut au débouté, faisant valoir :
- que la SAS REPOS [4] n'avait commis aucune faute,
- qu'il ne pouvait pas être fait grief à la SAS REPOS [4] de ne pas avoir informé les bailleurs de la durée du bail,
- que les bailleurs dénonçaient un risque qui était inhérent au statut des baux commerciaux,
- que le droit au renouvellement du bail ne pouvait être invoqué que par le preneur des locaux,
- que le bailleur n'avait aucun droit au renouvellement du bail,
- que la durée du bail, soit neuf ans, était précisée dans l'ensemble des documents contractuels,
- qu'aucune information trompeuse n'avait donc été délivrée aux bailleurs,
- que la SAS REPOS [4] était la seule bénéficiaire de l'autorisation d'exploitation qui était personnelle et non réelle,
- que l'exploitant d'un établissement accueillant des personnes âgées avait la possibilité de transférer son activité vers un autre établissement répondant aux objectifs légaux,
- que les bailleurs n'avaient aucune garantie quant à l'exploitation illimitée de la résidence en EHPAD,
- que les bailleurs ne pouvaient pas invoquer un détournement de clientèle,
- que les bailleurs n'étaient pas associés à l'activité de la SAS REPOS [4] ou à ses résultats,
- qu'à supposer qu'une clientèle puisse être rattachée à la résidence, celle-ci appartiendrait à la SAS REPOS [4].
La SAS DOMUSVI conclut au débouté, faisant valoir :
- qu'elle n'avait commis aucune faute,
- qu'elle n'était lié à aucun contrat avec les investisseurs et que sa responsabilité contractuelle ne pouvait pas être engagée,
- qu'au moment de la conclusion des contrats, elle n'existait pas,
- qu'elle n'avait pas été subrogée dans les droits et obligations de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER,
- qu'elle était une entité juridique distincte de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER,
- que sa responsabilité en tant que dirigeant de la SAS REPOS [4] ne pouvait pas être engagée en l'absence de démonstration d'une faute d'une particulière gravité,
- que dans le cadre de groupe de sociétés, les sociétés conservaient leur indépendance et que la responsabilité de la société-mère ne pouvait pas être engagée en raison des manquements de ses filiales sauf à ce qu'il soit démontré une faute intentionnelle d'une particulière gravité incompatible avec les prérogatives normales attachées à la qualité d'associé,
- que tout investissement locatif comportait un risque,
- que que les investisseurs ne démontraient pas le risque de pertes liées à l'investissement ni la possibilité de réaliser un meilleur investissement,
- que la reconversion du bâtiment, un changement de destination ou la recherche d'un nouvel investisseur étaient possibles,
- que l'évaluation de la perte de valeur à 70 % était arbitraire,
- que les investisseurs avaient bénéficié de la perception des loyers et d'avantages fiscaux,
- que le préjudice allégué était donc hypothétique.
Subsidiairement, la SAS REPOS [4] et la SAS CLINIQUE DE [8] concluent au rejet de l'appel en garantie formé par la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER à leur encontre et demandent que cette dernière soit condamnée à les relever et garantir des condamnations prononcées à son encontre, faisant valoir :
- que la SAS REPOS [4] était intervenue à l'acte de vente uniquement quant à la vente du mobilier,
- que la SAS REPOS [4] avait respecté ses obligations contractuelles de preneur à bail commercial quant à la délivrance du congé,
- que le transfert d'exploitation était régulier,
- que la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER était responsable des manquements invoqués par les investisseurs,
- que la SAS REPOS [4] et la SAS DOMUSVI n'étaient pas intervenues dans le cadre de la commercialisation et de l'information.
Reconventionnellement, elles demandent la somme de 2.000,00 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
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MOTIFS
- Sur le sursis à statuer
Il n'y a pas lieu à sursoir à statuer dans la mesure où l'instance 19/10000 est fixée à la même audience de plaidoiries que la présente instance et où ces deux instances seront étudiées en même temps.
- Sur la procédure
La SAS REPOS [4] a été radiée du RCS le 12 février 2021.
L'article 384 du Code de Procédure Civile prévoit notamment :
En dehors des cas où cet effet résulte du jugement, l'instance s'éteint accessoirement à l'action par l'effet de la transaction, de l'acquiescement, du désistement d'action ou, dans les actions non transmissibles, par le décès d'une partie.
L'extinction de l'instance est constatée par une décision de dessaisissement. (...)
La radiation d'une personne morale du RCS peut être assimilée à la mort dans la mesure où elle implique la disparition de sa personnalité juridique.
En l'état de sa radiation du RCS, l'instance introduite à l'encontre de la SAS REPOS [4] est éteinte et le Tribunal est dessaisi de ce chef.
Il convient de déclarer recevable l'intervention volontaire de la SAS CLINIQUE DE [8] venant aux droits et obligations de la SAS REPOS [4].
- Sur la prescription
L'article 2224 du Code Civil prévoit :
Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
L'article L110-4 du Code de Commerce prévoit :
I.-Les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.
Les investisseurs invoquent les manquements suivants :
- manquement à l'obligation précontractuelle d'information
- manquement à l'obligation de garantie de l'exploitation en EPHAD
- manquement à l'obligation d'entretien
- Sur l'action fondée sur l'obligation précontractuelle d'information
L'action en responsabilité pour manquement au devoir précontractuel d'information se prescrit par cinq ans à compter de la réalisation du dommage ou à la date à laquelle il est révélé à la victime et non au jour de la régularisation du contrat.
Le point de départ de la prescription est le jour où les demandeurs ont été informés du transfert de l'activité de la SAS REPOS [4] sur d'autres sites, information mentionnée dans une correspondance adressée le 30 novembre 2016..
En l'état de la délivrance de l'assignation le 24 janvier 2018, l'action introduite de ce chef est recevable en ce qu'elle n'est pas prescrite.
- Sur l'action fondée sur l'obligation de garantie de la continuité de l'exploitation en EPHAD
Le point de départ de la prescription est le jour de la découverte du manquement invoqué.
Comme précédemment, le point de départ de la prescription est le jour où les demandeurs ont été informés du transfert de l'activité de la SAS REPOS [4] sur d'autres sites, information mentionnée dans une correspondance adressée le 30 novembre 2016.
En l'état de la délivrance de l'assignation le 24 janvier 2018, l'action introduite de ce chef est recevable en ce qu'elle n'est pas prescrite.
- Sur l'action fondée sur l'obligation d'entretien
Le point de départ de la prescription est le jour où le dommage est connu.
Il n'est pas démontré que les demandeurs avaient été informés de la nécessité de procéder à des travaux et à la mise aux normes de la résidence [4] au moment de la signature des baux, la clause concernant les travaux à la charge du preneur figurant dans les baux étant générale et ne pouvant permettre d'établir cette information.
Il n'est pas justifié de la date de communication aux bailleurs de la convention tripartite du janvier 2009 prévoyant la nécessité pour la SAS REPOS [4]d’avoir à réaliser un certain nombre de travaux destinés à améliorer la qualité des espaces, en particulier la destruction des salles de bain avec reconstruction de nouvelles et création d’un ascenseur ni même de cette communication.
Il ne saurait être fait grief aux bailleurs d'avoir tardé à réclamer à la SAS REPOS BEAU SITEla justification de la réalisation des travaux nécessaires dans la mesure où il n'est invoqué aucun élément de nature à leur permettre de soupçonner que ces travaux n'avaient pas été réalisés. La nécessité de vérification est apparue, en 2016, à la suite de l'information de l'apport d'actifs et de l'information donnée par la SAS REPOS BEAU SITEqui a indiqué aux bailleurs qu'elle n'était pas sûre de rester sur le site.
Par ordonnance de référé en date du 02 janvier 2017, une expertise a été ordonnée concernant l'entretien et la mise aux normes de la résidence [4]. L'expert [R] a déposé son rapport le 22 janvier 2019.
La prescription a été interrompue par l'assignation en référé et suspendue jusqu'au dépôt du rapport de l'expert [R].
En l'état de la délivrance de l'assignation le 24 janvier 2018, l'action est recevable en ce qu'elle n'est pas prescrite.
- Sur la qualité et l'intérêt pour agir des demandeurs
L'article 31 du Code de Procédure Civile prévoit :
L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
Les investisseurs invoquent les manquements suivants :
- manquement à l'obligation précontractuelle d'information
- manquement à l'obligation de garantie de l'exploitation en EPHAD
- manquement à l'obligation d'entretien
- Sur l'action introduite à l'encontre de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER, vendeur
La SASU GDP VENDOME IMMOBILIER est tenue d'une obligation précontractuelle d'information et d'une obligation de délivrance.
L'action introduite à son encontre est donc recevable de ces chefs.
Par contre, l'obligation d'entretien et de mise aux normes incombait à la SAS REPOS [4] seule en application des baux commerciaux. La SASU GDP VENDOME IMMOBILIER n'étant débitrice d'aucune obligation de ce chef, l'action est irrecevable.
- Sur l'action introduite à l'encontre de la SAS CLINIQUE DE [8] venant aux droits et obligations de la SAS REPOS [4] preneur à bail
La SAS CLINIQUE DE [8] ne soulève pas l'irrecevabilité de l'action pour défaut d'intérêt pour agir.
- Sur l'action introduite à l'encontre de la SAS DOMUSVI, dirigeant de la SAS REPOS [4] aux droits et obligations de laquelle vient la SAS CLINIQUE DE [8]
Les tiers ont intérêt à rechercher la responsabilité du dirigeant d'une société s'il a commis une faute séparable de ses fonctions.
L'action des demandeurs est donc recevable.
- Sur la responsabilité de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER, vendeur des locaux
- Sur le manquement à l'obligation précontractuelle d'information
L’obligation d’information précontractuelle consiste en l’obligation faite aux parties de donner à l’autre cocontractant les informations de nature à lui permettre de donner un consentement libre et éclairé dans la conclusion du contrat.
Le vendeur doit informer l'acheteur de ce qui forme la substance de son engagement, fournir les éléments d'information permettant d'identifier la chose vendue et indiquer, notamment, de la nature et du contenu de son obligation de délivrance et de garantie. L'obligation d'informer porte donc sur les éléments essentiels du contrat.
Il appartient au débiteur de l'obligation d'information de démontrer qu'il a rempli cette obligation.
Si l'objet des ventes était des lots situés dans un ensemble immobilier dénommé [4] dans lequel était exploitée une maison de repos pour personnes âgées, il n'en demeure pas moins que l'autorisation d'exploitation en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes était mentionné dans certains actes. Il s'en évince que cette exploitation était entrée dans le champ des pourparlers.
Il appartenait dès lors au vendeur d'informer complètement les acquéreurs des conditions de cette exploitation et notamment du fait que l'autorisation était personnelle à l'exploitant, en l'espèce, la SAS REPOS [4] et non à l'établissement ou aux copropriétaires.
Par ailleurs, si les acquéreurs ne peuvent pas faire grief au vendeur de ne pas avoir attiré leur attention sur le risque d'absence de renouvellement du bail, il lui appartenait également de les avertir avec précision sur les conséquences de cette absence de renouvellement au regard de l'autorisation d'en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes.
En outre, le Tribunal a retenu qu'il n'était pas démontré que les demandeurs avaient été informés de la nécessité de procéder à des travaux et à la mise aux normes de la résidence [4] au moment de la signature des baux, la clause concernant les travaux à la charge du preneur figurant dans les baux étant générale et ne pouvant permettre d'établir cette information et qu'il n'était pas justifié de la date de communication aux bailleurs de convention tripartite du janvier 2009 prévoyant la nécessité pour la SAS REPOS [4]d’avoir à réaliser un certain nombre de travaux destinés à améliorer la qualité des espaces, en particulier la destruction des salles de bain avec reconstruction de nouvelles et création d’un ascenseur ni même de cette communication.
Le fait qu'un conseiller en gestion de patrimoine soit intervenu dans l'élaboration de l'opération de défiscalisation n'est pas de nature à permettre à la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER de s'exonérer de sa responsabilité en tant que vendeur. Il en est de même de l'intervention du notaire qui n'a pas pour obligation d'informer l'acquéreur sur les risques économiques de l'acte qu'il régularise.
En l'état de ces éléments le manquement à l'obligation d'information sera retenu.
- Sur le manquement à l'obligation de garantie de la continuité de l'exploitation en EPHAD
L'article 1604 du Code Civil selon lequel :
La délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur.
Il y a manquement à l'obligation de délivrance quand la chose délivrée n'est pas conforme à la chose vendue. La conformité fait défaut lorsque la chose délivrée ne correspond pas à ce qui était contractuellement prévu. L'obligation de délivrance couvre les qualités de la chose vendue, à savoir l'ensemble des propriétés de la chose que les parties ont eu en vue au moment du marché avant de se déterminer à contracter.
L'obligation de délivrance est une obligation de résultat. Le respect de cette obligation est exempt de toute référence à la bonne ou à la mauvaise foi du vendeur, s'agissant d'une notion objective.
L'objet des ventes était des lots situés dans un ensemble immobilier dénommé [4] dans lequel était exploitée une maison de repos pour personnes âgées. L'objet de la vente n'est donc pas des lots situés dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes.
Tous les actes de vente ne sont pas produits. Les attestations notariées ne comportent aucune mention de l'exploitation d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes.
Dans l'acte authentique concernant [Z] [G], dans l'acte authentique concernant [I] [M] et dans l'acte authentique concernant [L] [P] figure la mention d'un arrêté du Président du Conseil Général des BOUCHES DU RHONE autorisant l'exploitation d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes de 120 lits. Les autres actes authentiques produits ne comportent pas mention de cette autorisation.
En tout état de cause, la seule mention de l'autorisation de l'exploitation d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes en fin d'acte n'est pas de nature à remettre en cause le contenu de l'obligation de délivrance, tel que figurant dans l'objet de la vente. La SASU GDP VENDOME IMMOBILIER a donc parfaitement rempli ladite obligation.
Le manquement à l'obligation de délivrance ne sera dès lors pas retenu.
- Sur la responsabilité de la SAS CLINIQUE DE [8] venant aux droits et obligations de la SAS REPOS [4], preneur à bail
- Sur le manquement à l'obligation précontractuelle d'information
L’obligation d’information précontractuelle consiste en l’obligation faite aux parties de donner à l’autre cocontractant les informations de nature à lui permettre de donner un consentement libre et éclairé dans la conclusion du contrat.
Il appartient au débiteur de l'obligation d'information de démontrer qu'il a rempli cette obligation.
Un certain nombre de manquements retenus à l'encontre de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER sont également imputables à la SAS CLINIQUE DE [8] venant aux droits et obligations de la SAS REPOS [4], à savoir :
- absence d'information du que l'autorisation d'exploitation en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes était personnelle à l'exploitant, en l'espèce la SAS REPOS [4], et non à l'établissement,
- absence d'information des conséquences de l'absence de renouvellement au regard de l'autorisation d'en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes,
- absence d'information de la nécessité de procéder à des travaux et à la mise aux normes de la résidence,
- absence de communication aux bailleurs de la convention tripartite du 01 janvier 2009.
En conséquence, le manquement à l'obligation d'information sera retenu.
- Sur le manquement à l'obligation de garantie de la continuité de l'exploitation en EPHAD
La SAS REPOS [4] avait toute liberté de résilier le bail commercial en respectant les prescriptions légales. La SAS REPOS [4] n'avait donc aucune obligation de rester au sein de la résidence [4] et d'y poursuivre l'exploitation d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes.
Aucun manquement ne peut lui être reproché de ce chef.
- Sur le manquement à l'obligation d'entretien
L'action des bailleurs relative à la prise en charge des travaux à réaliser dans les parties privatives est recevable contrairement à l'action relative à la prise en charge des travaux à réaliser dans les parties communes.
L'article 1754 du Code Civil prévoit notamment :
Les réparations locatives ou de menu entretien dont le locataire est tenu, s'il n'y a clause contraire, sont celles désignées comme telles par l'usage des lieux (...)
Les baux prévoient :
LE PRENEUR S’OBLIGE : (...)
A entretenir les lieux en bon état de réparations locatives et d’entretien pendant la durée du bail (...)
A acquitter toutes les dépenses liées à son exploitation, y compris, pendant la durée du premier bail, les grosses réparations, telles que définies à l’article 605 et l’article 606 du Code Civil.
Le Preneur fera son affaire personnelle et exclusive de tous travaux, installations, mises aux normes, quelle qu’en soit la nature, qui seraient imposées par les autorités administratives, la loi ou les règlements, en raison de ses activités présentes ou futures.
L'expert [R] n'a pas visité toutes les chambres. Il a relevé :
- que les sanitaires des chambres 9, 12, 13 ,14 et 17 du bâtiment [Adresse 10] ou [Adresse 9] n'étaient pas conformes aux normes d'accessibilité aux personnes handicapées,
- que les chambres du bâtiment [Adresse 10] ou [Adresse 9] étaient équipées comme des chambres doubles alors que leur surface correspondait à des chambres simples,
- que, concernant le bâtiment [Adresse 6], les chambres comprenant la salle de bain avec le WC n'étaient pas conformes aux normes d'accessibilité aux personnes handicapées et que le WC isolé des chambres du deuxième étage n'était pas conforme.
Ces désordres qui ne sont pas spécifiques à 'exploitation d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes permettent de caractériser les manquements de la SAS REPOS [4] aux obligations du bail commercial concernant les parties privatives.
- Sur la responsabilité de la SAS DOMUSVI
La SAS DOMUSVI est la présidente de la SAS REPOS [4] aux droits et obligations de laquelle vient la SAS CLINIQUE DE [8], preneur, et de la SASU IMMOBILIERE DOMUSVI 2, propriétaire des lots de service de la résidence.
Si elle vient aux droits de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER, c'est en qualité de dirigeante de la SAS REPOS [4] avant 2010 et non en qualité de vendeur des biens immobiliers en cause.
L'article L227-8 du Code de Commerce prévoit :
Les règles fixant la responsabilité des membres du conseil d'administration et du directoire des sociétés anonymes sont applicables au président et aux dirigeants de la société par actions simplifiée.
L'article L225-251 du Code de Commerce prévoit
Les administrateurs et le directeur général sont responsables individuellement ou solidairement selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés anonymes, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion.
La responsabilité personnelle d'un dirigeant à l'égard des tiers ne peut être retenue que s'il a commis une faute séparable de ses fonctions. La faute de gestion implique un comportement contraire à l’intérêt social. Le dirigeant engage donc sa propre responsabilité à l’égard des tiers s’il commet une faute intentionnelle d’une particulière gravité incompatible avec l’exercice normal de ses fonctions.
Tel n'est pas le cas en l'espèce, les demandeurs ne caractérisant aucune faute à son encontre répondant à ces critères. Les demandes formées à son encontre entrent dès lors en voie de rejet.
- Sur la synthèse des différents éléments retenus par le Tribunal et leurs conséquences
- SASU GDP VENDOME IMMOBILIER, vendeur :
- manquement à l'obligation d'information,
- pas de manquement à l'obligation de délivrance,
- irrecevabilité de l'action fondée sur le défaut d'entretien,
- SAS CLINIQUE DE [8], preneur à bail :
- manquement à l'obligation d'information,
- pas de manquement au titre de la continuité de
l'exploitation en EHPAD,
- manquement à l'obligation d'entretien,
- SAS DOMUSVI, dirigeant :
- aucun manquement.
Chacun des coauteurs d'un même dommage, conséquence de leurs fautes respectives, doit être condamné in solidum à la réparation de l'entier dommage, chacune des fautes ayant concouru à le causer tout entier
La condamnation in solidum ne suppose pas l'unité ou l'identité des fautes. En effet, il n'est pas nécessaire que les responsables soient coauteurs d'une faute commune ou d'une même faute. L'obligation in solidum suppose uniquement que le dommage résulte de faits, fautifs ou non, qui ont chacun contribué, peu importe dans quelle proportion, à la réalisation de ce dommage, peu important que la responsabilité des divers auteurs soit d'une nature distincte.
En conséquence, la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER et la SAS CLINIQUE DE [8] seront condamnées in solidum à réparer le préjudice subi par les demandeurs.
En l'état du rejet des demandes formées à l'encontre de la SAS DOMUSVI, l'appel en garantie formé à l'encontre de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER est sans objet.
En l'état des appels en garantie réciproques formés par la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER et par la SAS CLINIQUE DE [8], il convient de statuer sur la proportion de responsabilité leur revenant.
Il a été retenu deux manquements à l'encontre de la SAS CLINIQUE DE [8] venant aux droits et obligations de la SAS REPOS [4] dont le plus grave est l'absence d'entretien et de mise aux normes de la résidence. La répartition des responsabilités sera effectuée de la façon suivante :
- 2/3 à la charge de la SAS CLINIQUE DE [8],
- 1/3 à la charge de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER.
- Sur l'indemnisation du préjudice
Les demandeurs ont investi sans avoir été complètement informés du statut d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, de ses conséquences et des risques encourus. Ces manquements ont entraîné une perte de chance de ne pas contracter.
Par ailleurs, ils ont subi les manquements de la SAS REPOS [4] quant à son obligation d'entretien et de mise aux normes. Ces manquements ont entraîné une perte de chance de donner à bail leurs lots dès le 01 janvier 2020. Il convient de préciser que, si les demandes des bailleurs ont été rejetées dans le cadre de l'instance numéro RG 19/10000, le principe de la responsabilité de la SAS CLINIQUE DE [8] concernant les parties privatives a été retenu, le rejet étant motivé par l'adoption d'un mode de calcul du préjudice erroné.
La demande relative à la perte d'une partie du capital investi est donc justifiée dans son principe.
Quand bien même la SAS REPOS [4] n'a pas effectué les travaux nécessaires dans les parties privatives, les travaux nécessaires relatifs aux parties communes incombaient aux copropriétaires, à l'exception des travaux relatifs aux lots de services qui sont la propriété de la société IMMOBILIERE DOMUSVI 2. La dégradation de l'état des parties communes qui est imputable aux copropriétaires contribue à la perte de valeur des lots de la résidence et à l'impossibilité de relouer à court terme.
Le quantum de la perte de chance sera évalué à 50 % du capital investi.
Il revient dès lors à [E] [D] et à [H] [V] épouse [D] la somme de 83.884,86 Euros (167.769,79 /2) de ce chef.
Le point de départ des intérêts au taux légal sera fixé au jour du présent jugement.
- Sur les autres chefs de demandes
Il convient d'allouer à [E] [D] et à [H] [V] épouse [D] ensemble la somme équitable de 3.000,00 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER les frais irrépétibles par elle exposés.
Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la SAS CLINIQUE DE [8] et de la SAS DOMUSVI les frais irrépétibles par elles exposés.
En raison de la nature et de l'ancienneté des faits, il convient d'ordonner l'exécution provisoire du présent jugement.
*
PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL
STATUANT en matière civile ordinaire, publiquement, par jugement contradictoire, en premier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi,
CONSTATE l'extinction de l'instance concernant la SAS REPOS [4] et le dessaisissement du Tribunal de ce chef,
DECLARE recevable l'intervention volontaire de la SAS CLINIQUE DE [8] venant aux droits et obligations de la SAS REPOS [4],
REJETTE la demande de sursis à statuer formée par la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER,
*
DECLARE recevable l'action introduite à l'encontre de la SAS CLINIQUE DE [8] venant aux droits et obligations de la REPOS [4] en ce qu'elle n'est pas prescrite,
*
DECLARE recevable l'action introduite à l'encontre de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER en ce qu'elle n'est pas prescrite,
DECLARE recevable l'action introduite à l'encontre de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER du chef de manquement à l'obligation précontractuelle d'information,
DECLARE recevable l'action introduite à l'encontre de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER du chef de manquement à 'obligation de garantie de la continuité de l'exploitation en EPHAD,
DECLARE irrecevable l'action introduite à l'encontre de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER du chef de manquement à l'obligation d'entretien,
*
DECLARE recevable l'action introduite à l'encontre de la SAS DOMUSVI en ce qu'elle n'est pas prescrite,
DECLARE recevable l'action introduite à l'encontre de la SAS DOMUSVI en ce que [E] [D] et [H] [V] épouse [D] ont intérêt pour agir,
DEBOUTE [E] [D] et [H] [V] épouse [D] de toutes leurs demandes fins et conclusions formées à l'encontre de la SAS DOMUSVI,
DECLARE sans objet l'appel en garantie formé par la SAS DOMUSVI à l'encontre de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER,
*
CONDAMNE in solidum la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER et la SAS CLINIQUE DE [8] à indemniser le préjudice subi par [E] [D] et par [H] [V] épouse [D],
PARTAGE la responsabilité de la façon suivante :
- 2/3 à la charge de la SAS CLINIQUE DE [8],
- 1/3 à la charge de la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER,
CONDAMNE la SAS CLINIQUE DE [8] à relever et garantir la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER à hauteur des 2/3 des condamnations prononcées à son encontre,
CONDAMNE la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER à relever et garantir la SAS CLINIQUE DE [8]à hauteur de 1/3 des condamnations prononcées à son encontre,
*
CONDAMNE in solidum la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER et la SAS CLINIQUE DE [8] à verser à [E] [D] et à [H] [V] épouse [D] ensemble :
- la somme de 83.884,86 Euros avec intérêts au taux légal à compter du jour du présent jugement au titre de l'indemnisation de la perte de 50 % du capital investi,
- la somme de 3.000,00 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
REJETTE la demande formée par la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
REJETTE la demande formée par la SAS CLINIQUE DE [8] et par la SAS DOMUSVI sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
REJETTE toute autre demande,
ORDONNE l'exécution provisoire du présent jugement,
CONDAMNE in solidum la SASU GDP VENDOME IMMOBILIER et la SAS CLINIQUE DE [8] aux dépens,
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au Greffe de la Troisième Chambre section B du Tribunal Judiciaire de MARSEILLE le15 avril 2024 .
Signé par Madame MANNONI, Président, et par Madame PLAZA, Greffier présent lors de la mise à disposition au Greffe de la décision.
LE GREFFIER LE PRESIDENT