REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE
POLE SOCIAL
[Adresse 8]
[Adresse 11]
[Localité 4]
[XXXXXXXX01]
JUGEMENT N°24/01373 DU 12 Avril 2024
Numéro de recours: N° RG 23/01754 - N° Portalis DBW3-W-B7H-3OLP
AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [S] [I]
[Adresse 10]
[Adresse 9]
[Localité 2]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2024-000040 du 03/01/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Marseille)
comparant en personne assisté de Me Mouaz RIKABI, avocat au barreau de MARSEILLE
C/ DEFENDERESSE
Organisme MDPH DES BOUCHES-DU-RHONE
[Adresse 7]
[Adresse 12]
[Localité 3]
non comparante, ni représentée
Appelé(s) en la cause:
Organisme CAF DES BOUCHES DU RHONE
[Adresse 6]
[Localité 5]
non comparante, ni représentée
DÉBATS : A l'audience Publique du 01 Mars 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :
Président : FRAYSSINET Marie-Claude
Assesseurs : LEVY Philippe
ZERGUA Malek
Greffier lors des débats : DISCAZAUX Hélène,
A l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 12 Avril 2024
NATURE DU JUGEMENT
réputée contradictoire et en premier ressort
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Monsieur [S] [I], né le 6 septembre 1974, a sollicité le 18 juillet 2022, le bénéfice de l’Allocation aux Adultes Handicapés auprès de la Maison Départementale des Personnes Handicapées des Bouches-du-Rhône.
La Commission des Droits et de l’Autonomie des Personnes Handicapées des Bouches-du-Rhône siégeant au sein de la Maison Départementale des Personnes Handicapées, dans sa séance du 15 décembre 2022, s’est prononcée défavorablement sur sa demande, en lui reconnaissant un taux d’incapacité compris entre 50 et 79 % mais sans restriction substantielle et durable pour l’acès à l’emploi. Sa demande a en conséquence été rejetée.
Monsieur [S] [I] a exercé un recours administratif préalable obligatoire devant la Commission des Droits et de l’Autonomie des Personnes Handicapées qui a, le 30 mars 2023, maintenu la décision initiale.
Le 11 mai 2023, Monsieur [S] [I] a saisi le Pôle Social du Tribunal Judiciaire de Marseille, d’un recours tendant à contester la décision de rejet.
Le tribunal a, avant dire droit, ordonné une consultation médicale préalable confiée au Docteur [U], médecin consultant, avec pour mission, en regard du guide-barème pour l’évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées et des autres dispositions réglementaires et législatives applicables, de dire si, à la date de la demande soit à la date du 18 juillet 2022, le requérant satisfaisait aux conditions médicales de l’Allocation aux Adultes Handicapés.
Le médecin consultant a réalisé sa consultation médicale le 17 octobre 2023 et a rendu un rapport médical qui a été adressé aux parties.
L’affaire a été appelée à l’audience du 1er mars 2024 à laquelle les parties ont été convoquées dans les formes et délais légaux.
À l’audience, la Présidente a fait un rapport du dossier, puis le Tribunal a entendu les parties en leurs demandes.
Madame [G] [E] se présente en personne à l’audience.
Monsieur [S] [I] est présent à l’audience, assisté de Maître [P] et a maintenu sa demande en expliquant que sa situation avait été mal appréciée.
Son conseil a demandé la reconnaissance d’un taux d’incapacité de 80 % et à titre subsidiaire un taux compris entre 50 et 79 % mais avec restriction substantielle et durable d’accès à l’emploi.
Monsieur [S] [I] a expliqué à l’audience qu’il était syrien et était arrivé en France en 2018 car son fils avait besoin d’être opéré des jambes et sa fille, du coeur ; qu’il avait été lui-même été opéré du coeur. Il a ajouté qu’en Syrie il avait été vendeur de meubles puis avait été propriétaire de deux patisseries ; qu’il avait tout perdu dans la guerre ; qu’en France, il n’avait jamais travaillé ; qu’il était inscrit à Pôle Emploi ; que son épouse qui était coiffeuse en Syrie, était maintenant femme au foyer ; qu’ils avaient quatre enfants âgés de 21, 16, 12 et 8 ans et percevaient le RSA ainsi que les allocations familiales.
La Maison Départementale des Personnes Handicapées des Bouches-du-Rhône qui a produit des observations et des documents relatifs aux situations socio-professionnelle et médicale du requérant, conformément aux dispositions de l’article R. 143-8 du Code de la Sécurité Sociale, n’est pas représentée à l’audience.
Elle a fait parvenir un mémoire reçu par le tribunal le 14 décembre 2023 aux termes duquel elle a demandé la confirmation de la décision du 30 mars 2023 rejetant la demande d’Allocation d’Adulte Handicapé.
La Caisse d’Allocations Familiales des Bouches-du-Rhône, appelée en la cause, n’a produit aucune observation. Elle n’est pas représentée à l’audience.
Le tribunal a indiqué que le jugement serait rendu le 12 avril 2024, date à laquelle il sera mis à disposition au Greffe et sera notifié aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception.
MOTIFS DE LA DÉCISION
En application des dispositions de l’article 474 du Code de Procédure Civile, le présent jugement sera réputé contradictoire.
Sur le fond
À titre liminaire, le Tribunal rappelle que le médecin désigné qui examine le dossier médical soumis au Pôle Social du Tribunal Judiciaire de Marseille est chargé de se prononcer sur l’état de santé de Monsieur [S] [I] à la date de la demande, soit en l’espèce, à la date du 18 juillet 2022.
En cas d’aggravation postérieure, il appartiendra à l’intéressé de formuler une nouvelle demande auprès de la Maison Départementale des Personnes Handicapées dont il dépendra.
Les pièces médicales contemporaines produites, soit postérieures à la date d’effet, ne pourront, dès lors, pas être prises en considération.
Sur le bien fondé de la demande d’Allocation aux Adultes Handicapés
VU l’annexe 2-4 du Code de l’action sociale et des familles établissant le guide barème pour l’évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées ;
VU les articles L.821-1, L.821-2, R 821-5, R 827- 7, D 821-1 et D 821-1-2 du Code de la sécurité sociale ;
.../...
L’Allocation aux Adultes Handicapés est accordée à la personne qui peut justifier, en application des articles précités du Code de la Sécurité Sociale, d’un taux d’incapacité d’au moins 80 %, le guide-barème pour l’évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées, codifié à l’annexe 2-4 du Code de l’Action Sociale et des Familles, définissant la reconnaissance d’un taux d’incapacité de 80 % comme étant une incapacité sévère entraînant une perte d’autonomie pour les actes de la vie courante.
Si son incapacité permanente, sans atteindre le pourcentage de 80%, a un taux compris entre 50 et 79 %, l’Allocation aux Adultes Handicapés peut être octroyée si la commission lui reconnaît, compte tenu de son handicap, une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi.
Cette restriction est substantielle lorsque la partie requérante rencontre, du fait de son handicap même, des difficultés importantes d’accès à l’emploi.
La restriction est durable, dès lors qu’elle est d’une durée prévisible d’au moins un an à compter du dépôt de la demande d’Allocation aux Adultes Handicapés, même si la situation médicale de la partie demanderesse n’est pas stabilisée.
Le Docteur [U], médecin consultant, expose dans son rapport médical communiqué aux parties que Monsieur [S] [I] présentait à la date du 18 juillet 2022, date impartie pour statuer, des déficiences de la vision (acuité visuelle : 1/10ème -+ 9/10ème) ; des déficiences viscérales et générales (insuffisance mitrale opérée, troubles thyroïdiens, tuberculose latente) ; des déficiences de l’appareil locomoteur (spondylarthropathie HLA B27 négative) ; importante polypathologie, notamment rhumatisme inflammatoire mal stabilisé chez un homme de 49 ans, refugié syrien en cours d’apprentissage du français. Troubles locomoteurs avec nettes difficultés au déshabillage et à la marche ce jour, maîtrise de la langue française en cours.
Selon le médecin consultant le taux d’incapacité de Monsieur [S] [I], est compris entre 50 et 79 % avec restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi pour 3 ans.
Au vu des éléments soumis à l’appréciation des juges, et compte tenu de l’avis du médecin consultant, dont il adopte les conclusions, le Tribunal décide de porter le taux d’incapacité de Monsieur [S] [I] à un taux compris entre 50 et 79 % avec restriction substantielle et durable d’accès à l’emploi pendant 3 ans.
Dès lors, le Tribunal fait droit à la demande d’Allocation aux Adultes Handicapés à compter du 1er août 2022 (soit à compter du 1er jour du mois civil suivant le dépôt de la demande en application de l’article R 821-7 du code de la sécurité sociale) pour une durée de trois ans.
Sur les dépens :
L’article 696 du Code de Procédure Civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
En l’espèce, la Maison Départementale des Personnes Handicapées des Bouches-du-Rhône qui succombe supportera les éventuels dépens de la procédure, à l’exclusion des frais de la consultation médicale ordonnée préalablement à l’audience par la présente juridiction, conformément aux dispositions de l’article L. 142-11 du Code de la Sécurité Sociale, qui incomberont à la Caisse Nationale de l’Assurance Maladie.
PAR CES MOTIFS
Le Pôle Social du Tribunal Judiciaire de Marseille, statuant publiquement par jugement réputé contradictoire, par mise à disposition du jugement au Greffe le 12 avril 2024,
REÇOIT en la forme le recours de Monsieur [S] [I],
AU FOND, le déclare bien fondé,
DIT QUE Monsieur [S] [I], qui présentait à la date impartie pour statuer du 18 juillet 2022 un taux d’incapacité compris entre 50 et 79 % avec restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi pendant 3 ans, peut prétendre, à ce titre, au bénéfice de l’Allocation aux Adultes Handicapés, pour une durée de trois ans à compter du 1er août 2022 sous réserve de remplir les conditions administratives règlementaires,
LAISSE les dépens à la charge de la Maison Départementale des Personnes Handicapées des Bouches-du-Rhône , à l’exclusion des frais de la consultation médicale ordonnée préalablement à l’audience par la présente juridiction, qui incomberont à la Caisse Nationale de l’Assurance Maladie ;
RAPPELLE QUE la présente décision peut être immédiatement frappée d’appel dans le mois de la réception de sa notification, à peine de forclusion.
La greffière,La Présidente,
H.DISCAZAUXM-C. FRAYSSINET