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09/04/2024 | FRANCE | N°22/00093

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc: rd/carsat, 09 avril 2024, 22/00093


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 2]

JUGEMENT N°24/01570 du 09 Avril 2024


Numéro de recours: N° RG 22/00093 - N° Portalis DBW3-W-B7G-ZSLK

AFFAIRE :

DEMANDEURS
Madame [W] [B] épouse [F]
née le 14 Juillet 1958 à [Localité 8] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 3]
Représenté par Me Fanny ESCARGUEL, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [K] [B]
né le 05 Septembre 1956 à [Localité 6] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse

10]
[Adresse 10]
[Localité 5]
Représenté par Me Fanny ESCARGUEL, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [G] [B]
né le 15 Avril 1962 à [Lo...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 2]

JUGEMENT N°24/01570 du 09 Avril 2024

Numéro de recours: N° RG 22/00093 - N° Portalis DBW3-W-B7G-ZSLK

AFFAIRE :

DEMANDEURS
Madame [W] [B] épouse [F]
née le 14 Juillet 1958 à [Localité 8] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 3]
Représenté par Me Fanny ESCARGUEL, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [K] [B]
né le 05 Septembre 1956 à [Localité 6] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 10]
[Adresse 10]
[Localité 5]
Représenté par Me Fanny ESCARGUEL, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [G] [B]
né le 15 Avril 1962 à [Localité 8] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 1]
[Localité 8]
Représenté par Me Fanny ESCARGUEL, avocat au barreau de MARSEILLE

c/ DEFENDERESSE
Organisme CARSAT DU SUD EST
FLUX ENTRANT
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représenté par [T] [S] (Chargée d’Etudes juridiques) munie d’un pouvoir régulier

Appelé(s) en la cause:
Organisme AGIRC-ARRCO
[Adresse 9]
[Adresse 9]
[Localité 2]
ni présente, ni représentée

DÉBATS : À l'audience publique du 09 Janvier 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : MOLCO Karine, Vice-Présidente

Assesseurs : BARBAUDY Michel
BUILLES Jacques

L’agent du greffe lors des débats : KALIMA Rasmia,

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 09 Avril 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en dernier ressort

----------------------------------------

RG/22/00093
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [R] [B], ancien mécanicien, était bénéficiaire d’une allocation de réversion versée par l’association générale des institutions de retraite des cadres - association pour le régime de retraite complémentaire des salariés (ci-après l’AGIRC-ARRCO), et d’une pension de base versée par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (ci-après la CARSAT) du Sud-Est.
A compter du 1er février 2005 la CARSAT (anciennement caisse régionale d’assurance maladie du Sud Est) a stoppé ses paiements.
Monsieur [R] [B] est décédé le 1er mars 2021.
Par courrier du 9 juin 2021, adressé à Maitre [J] [N], notaire, la CARSAT Sud-Est l’a informé qu’elle devait 95 064,8 euros à la succession de Monsieur [R] [B] après clôture de son compte retraite.
Suivant courrier du 12 août 2021, toujours adressé à Maitre [J] [N], notaire, la CARSAT Sud-Est a rectifié sa précédente notification, appliquant la prescription de droit commun prévue par l’article 2224 du code civil, elle a finalement considéré devoir la somme de 31.137,81 euros au titre des arrérages de pension dus au décès de Monsieur [R] [B] pour la période de mars 2016 à mars 2021.
Par courrier daté du 6 octobre 2021, Messieurs [K] et [G] [B] et Madame [W] [B] épouse [F], héritiers de Monsieur [R] [B], ont saisi la commission de recours amiable de la CARSAT Sud-Est afin de contester la dernière notification de la caisse, en particulier l’application de la prescription, et solliciter le versement de la somme de 63.927 euros par cette dernière.
En l’absence de réponse de la commission de recours amiable de la CARSAT, valant rejet implicite de leur recours gracieux, par requête remise au service d’accueil unique du justiciable du tribunal judiciaire de Marseille le 6 octobre 2022, transmise au pôle social le 7 janvier 2022, Messieurs [K] et [G] [B] et Madame [W] [B] épouse [F] ont saisi ledit tribunal afin de solliciter le versement de la somme de 63.927 euros par la CARSAT au titre des arrérages de pension de retraite de leur père.
L’affaire a été appelée à plusieurs audiences de plaidoirie sans qu’elle soit en état d’être jugée.
Lors de l’audience du 21 septembre 2023, elle a fait l’objet d’un ultime renvoi à l’audience de plaidoirie du 9 janvier 2024, notamment dans le but de mettre en cause l’AGIRC-ARCCO.
Par voie de conclusions oralement soutenue par leur conseil, Madame [W] [B] et Messieurs [K] et [G] [B] demandent au tribunal de condamner la CARSAT au paiement de la somme de 63.927 euros à la succession de Monsieur [R] [B] et de la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La CARSAT Sud-Est, régulièrement représentée, sollicite pour sa part du tribunal :
A titre principal : sa mise hors de cause ; A titre subsidiaire : de dire et juger qu’elle n’est redevable envers l’hoirie que de la somme de 31.137,81 euros, somme déjà versée ; de débouter Monsieur [B] de son recours et de l’ensemble de ses demandes ; Le condamner solidairement au paiement de la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.Bien que régulièrement convoquée, l’AGIRC-ARRCO n’est ni présente, ni représentée à l’audience, et n’a pas sollicité de dispense de comparution.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé plus ample de leurs prétentions et moyens.

La présente affaire a été mise en délibéré au 9 avril 2024.

MOTIFS DE LA DECISION
Sur la mise hors de cause de la CARSAT
En l’espèce, les consorts [B] demandent à la CARSAT Sud-Est le versement des arrérages de la pension de retraite qu’aurait dû percevoir selon eux, leur père, Monsieur [R] [B].
La CARSAT Sud-Est ne peut donc être mise hors de cause.
Sur la demande principale
En application de l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Selon l’article 2219 du code civil, la prescription extinctive est un mode d'extinction d'un droit résultant de l'inaction de son titulaire pendant un certain laps de temps.
L’article 2224 du même code prévoit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
L’article 2251 du même code dispose que la renonciation à la prescription est expresse ou tacite. La renonciation tacite résulte de circonstances établissant sans équivoque la volonté de ne pas se prévaloir de la prescription.
***
En l’espèce, les enfants de Monsieur [R] [B] estiment que la CARSAT Sud-Est doit la somme de 63.927 euros à sa succession au titre de sa pension de retraite de base non versée de son vivant.
Il n’est pas contesté que Monsieur [R] [B] était bénéficiaire d’une pension de base par la CARSAT Sud-Est.
Il est également constant qu’en 2005 l’AGIRC-ARRCO a commis une erreur en enregistrant le décès de Monsieur [R] [B], en lieu et place de celui de son épouse, Madame [Z] [B], et qu’elle a transmis cette information à la CARSAT Sud-Est.
La CARSAT Sud-Est reconnait qu’ayant reçu cette information erronée de la part de l’AGIRC-ARRCO elle a stoppé le paiement de la retraite personnelle de Monsieur [R] [B] à compter du 1er février 2005.
Les demandeurs produisent un courrier daté du 30 avril 2005 (pièce n°2 des demandeurs), adressé au service retraite de l’AG2R de [Localité 2], par lequel leur père aurait, selon eux, informé l’AGIRC-ARRCO de son erreur. Pour reprendre les termes du courrier, Monsieur [R] [B] demandait « la remise à jour de son dossier ».
Toutefois, la CARSAT Sud-Est indique, pour sa part, n’avoir reçu aucune réclamation à la suite de la suspension de ses versements en février 2005.
Elle estime qu’elle est désormais libérée de son obligation envers la succession de Monsieur [R] [B], dès lors qu’elle a réglé la somme de 31.137,81 euros dont elle était redevable (correspondant à la pension de base de Monsieur [R] [B] de mars 2016 à mars 2021) et que pour le reste son obligation était éteinte par l’effet de la prescription extinctive prévue par l’article 2224 du code civil.
Les demandeurs contestent l’application de cette prescription.

En premier lieu, ils font valoir que Monsieur [R] [B] pouvait légitimement ignorer ne pas avoir perçu sa pension de retraite de base de la part de la CARSAT, de sorte que le délai de prescription n’aurait jamais commencé à courir à son égard.
Autrement dit, ils contestent le point de départ de la prescription retenu par la caisse, arguant que leur père n’a jamais connu ou pu connaitre les faits lui permettant d’exercer son action envers la CARSAT Sud-Est.
Plus précisément, selon eux, l’ignorance de leur père résultait :
Du fait qu’il avait accompli les diligences nécessaires pour obtenir le paiement de sa retraite en informant l’AGIRC-ARRCO d’une erreur de leur part ; Du contexte, concomitant au décès de sa femme, dans lequel il a perdu sa pension de retraite de base, qui a pu l’induire en erreur pour évaluer sa situation financière ; Du fait qu’il n’était pas le gestionnaire des finances du ménage et n’avait pas les compétences pour procéder au calcul de sa pension de base. Toutefois, il résulte des pièces versées aux débats, et en particulier :
du courrier du régime social des indépendants en date du 9 mai 2012 (pièce n°8 des demandeurs) ;de la notification de pension de base datant de 1991 (pièce n°3 de la CARSAT Sud-Est) – il n’est pas contesté que monsieur [R] [B] en ait eu connaissance ; que Monsieur [R] [B] savait ou aurait dû savoir qu’il était bénéficiaire d’une retraite de base en plus de sa retraite complémentaire.

La CARSAT Sud-Est indique que sa retraite personnelle de base lui été régulièrement servie depuis le 1er décembre 1991, ce qui n’est pas contesté par les demandeurs.

Aussi, Monsieur [R] [B] qui percevait sa retraite personnelle depuis cette date était en mesure de se rendre compte de l’arrêt de ce versement à compter de février 2005, et ce d’autant plus que l’erreur commise par l’AGIRC-ARRCO aurait pu l’inciter à vérifier ses versements.

Le délai de prescription de son action en paiement de sa retraite de base à donc pu commencer à courir à compter du mois février 2005, date à laquelle il savait ou aurait dû savoir que le versement de sa retraite personnelle de base dont il était bénéficiaire avait été stoppé.

En second lieu, les ayants droit de Monsieur [R] [B] soutiennent que la circulaire AGIRC-ARRCO 2004-16 DRE constitue un engagement unilatéral de la part de la CARSAT Sud-Est par lequel elle aurait renoncé à se prévaloir de la prescription en cas de faute de sa part.

Néanmoins, elle ne démontre aucunement en quoi la CARSAT Sud-Est est concernée par cette circulaire de l’AGIRC-ARCCO. Ce moyen est en conséquence inopérant.

Il n’est, en outre, pas démontré que Monsieur [R] [B] pouvait se prévaloir d’une cause d’interruption ou de suspension de la prescription. Le courrier du 30 avril 2005 dont les demandeurs se prévalent étant insuffisant à constituer une telle cause.

En application des règles de droit commun, son action en paiement pour sa retraite de base était donc prescrite pour la période de février 2005 à mars 2016.

Compte tenu de ce qu’il précède, les ayants-droits de Monsieur [R] [B] pouvaient agir pour obtenir le paiement de sa pension de base uniquement pour la période durant laquelle ce dernier disposait d’une telle action, soit de mars 2016 à mars 2021.

En conséquence, c’est à bon droit que la CARSAT Sud- Est leurs oppose la prescription pour le paiement de la pension de base de Monsieur [R] [B] pour la période antérieure à mars 2016.

En revanche, le tribunal ne dispose pas des pièces lui permettant de confirmer précisément la somme due par la CARSAT Sud-Est à la succession de Monsieur [R] [B] sur la période non prescrite.

Enfin, la juridiction ne peut se substituer à l’organisme pour apprécier l’opportunité de renoncer ou non à la prescription quinquennale en l’espèce.

Les demandeurs échouent donc à démontrer que la CARSAT Sud-Est doit la somme de 63.927 euros à la succession de Monsieur [R] [B].

Par conséquent, ils seront déboutés de leur demande tendant à ce que la CARSAT Sud-Est verse cette somme à la succession de Monsieur [R] [B].

Sur les demandes accessoires

En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, Madame [W] [B] et Messieurs [K] et [G] [B], succombant en leurs prétentions, seront condamnés aux dépens de l’instance.

Compte tenu de la situations financières des parties, l’équité ne justifie pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par mise à disposition au secrétariat, par jugement contradictoire en dernier ressort,

DEBOUTE Madame [W] [B], Messieurs [K] et [G] [B] de l’ensemble de leur demande ;

DIT n’y avoir lieu à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Madame [W] [B], Messieurs [K] et [G] [B] solidairement aux dépens de l’instance.

Ainsi jugé et mis à disposition le 9 avril 2024.

LA GREFFIERELA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc: rd/carsat
Numéro d'arrêt : 22/00093
Date de la décision : 09/04/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 22/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-09;22.00093 ?
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