La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/04/2024 | FRANCE | N°21/02011

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc: rd/carsat, 09 avril 2024, 21/02011


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
Caserne du Muy
CS 70302 – 21 rue Ahmed Litim
13331 Marseille cedex 03


JUGEMENT N°24/01568 du 09 Avril 2024

Numéro de recours: N° RG 21/02011 - N° Portalis DBW3-W-B7F-ZBX6

AFFAIRE :
DEMANDERESSES
Madame [J] [P]
née le 25 Juin 1990 à [Localité 7] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 3]
Représentée par Me Delphine CO, substituée par Me avocat au barreau de MARSEILLE

Madame [D] [R]
née le 20 Décembre 1980 à [Localité 7]

(BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 5]
[Localité 1]
Représentée par Me Aude-Sarah BOLZAN, avocat au barreau d’AVIGNON


c/ DEFENDERESSE
Organism...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
Caserne du Muy
CS 70302 – 21 rue Ahmed Litim
13331 Marseille cedex 03

JUGEMENT N°24/01568 du 09 Avril 2024

Numéro de recours: N° RG 21/02011 - N° Portalis DBW3-W-B7F-ZBX6

AFFAIRE :
DEMANDERESSES
Madame [J] [P]
née le 25 Juin 1990 à [Localité 7] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 3]
Représentée par Me Delphine CO, substituée par Me avocat au barreau de MARSEILLE

Madame [D] [R]
née le 20 Décembre 1980 à [Localité 7] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 5]
[Localité 1]
Représentée par Me Aude-Sarah BOLZAN, avocat au barreau d’AVIGNON

c/ DEFENDERESSE
Organisme CAISSE DE PREVOYANCE ET DE RETRAITE DU PERSONNEL DE LA SNCF
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Guillaume MABRUT, avocat au barreau de MARSEILLE

DÉBATS : À l'audience publique du 09 Janvier 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : MOLCO Karine, Vice-Présidente

Assesseurs : BARBAUDY Michel
BUILLES Jacques

L’agent du greffe lors des débats : KALIMA Rasmia,

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 09 Avril 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

-------------------------

RG 21/02011
EXPOSE DU LITIGE
Par lettre recommandée avec avis de réception reçue le 12 août 2021 au greffe du Pôle social de Marseille, Madame [J] [P], exerçant l’activité d’infirmière libérale, a entendu contester l’indu notifié le 3 février 2021 après contrôle de facturations à hauteur de 24.994,10 euros par la caisse de prévoyance de retraite du personnel de la SNCF, ci-après la CPRP SNCF, confirmé par décision de la commission de recours amiable de l’organisme le 9 juin 2021.
Ce recours a été enregistré sous la référence numérique 21/02011.
Par lettre recommandée avec avis de réception reçue le 8 octobre 2021 au greffe du Pôle social de Marseille, Madame [D] [R], exerçant l’activité d’infirmière libérale, a entendu contester l’indu lui aussi notifié le 3 février 2021 après contrôle de facturations à hauteur de 72.330,62 euros par la CPRP SNCF, confirmé par décision de la commission de recours amiable de l’organisme le 21 septembre 2021.
Ce recours a été enregistré sous la référence numérique 21/020512.
Par jugement du 28 septembre 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille a prononcé la jonction de ces deux affaires avec poursuite de l’instance sous le seul numéro 21/02011 et ordonné la reprise des débats à l’audience du 12 décembre 2022.
L’affaire a été appelée à deux audiences de plaidoirie et renvoyée à deux reprises, avant d’être appelée et évoquée à l’audience de plaidoirie du 9 janvier 2024.
Par voie de conclusions soutenues oralement par son conseil, Madame [J] [P], demande au tribunal de :
Accueillir l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ; Constater l’absence de fraude de sa part ; Ordonner une expertise médicale technique pour vérifier la cohérence des soins facturés avec l’état de santé des patients ; Annuler la décision rendue par la CRA en date du 9 juin 2021 ; Juger qu’il ne peut être retenu aucun indu frauduleux à son encontre ;
Condamner la CPRP SNCF au paiement de 3.000 euros au titre de l’article 700 code de procédure civile ; Condamner la CPRP SNCF aux entiers dépens d’instance.
Ni Madame [D] [R], ni son conseil ne comparaissent. Ce dernier selon courrier daté du 4 janvier 2024 a demandé au tribunal de bien vouloir excuser son absence et transmis son entier dossier de plaidoirie.
Aux termes de ses dernières conclusions, soit les conclusions n°1, datées du 21 septembre 2022, Madame [D] [R], représentée par son conseil demande au tribunal de :
A titre principal :
Prononcer la nullité de la notification d’indu à son encontre ; Prononcer la nullité de la mise en demeure à son encontre ; Annuler subséquemment la décision implicite de rejet rendue par la commission de recours amiable et plus généralement toute réclamation qui lui a été adressée ; A titre subsidiaire :
Prononcer la nullité du contrôle mené par la CPRP SNCF ; Annuler subséquemment l’indu mis à sa charge et plus généralement toute réclamation adressée à son encontre ; A titre très subsidiaire :
Constater qu’aucune fraude n’est démontrée de sa part ; Constater que les sommes réclamées antérieurement au 3 février 2018 sont prescrites ; Constater que la CPRP SNCF n’apporte pas la preuve des griefs qu’elle lui reproche ; Dire et juger infondée en ses demandes et réclamations la CPRP SNCF et la débouter de toute demande à son encontre ; Réduire à de plus justes proportions les sommes mises à sa charge et lui accorder les plus larges délais de paiement pour s’en acquitter ; En tout état de cause :
Condamner la CPRP CNF au paiement de la somme de 3.000 euros en réparation du préjudice qu’elle a subi du fait des retenues abusives d’honoraires ; Ecarter l’exécution provisoire de droit par application de l’article 514-1 du code de procédure civile ;Condamner la CPRP SNCF au paiement de la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ; Condamner la CPRP SNCF aux entiers dépens, en application de l’article 696 du code de procédure civile.
La CPRP SNCF, représentée par son avocat, soutient oralement ses dernières conclusions aux termes desquelles elle demande au tribunal de :
Concernant Madame [R]
Constater la régularité de la notification de l’indu et de la procédure de contrôle menée à l’encontre de Madame [R] ; Constater que Madame [R] facturait la CPRP SNCF des indemnités forfaitaires de déplacement indus, surfacturait des soins, facturait des majorations de nuit indues, facturait des soins sur la base de prescriptions médicales falsifiées ; Constater que Madame [R] facturait des soins sur la base de prescriptions falsifiées et procédait à des majorations de nuit injustifiées ; En conséquence, condamner Madame [R] à lui verser la somme de 72.330,62 euros relative au solde de l’indu. Concernant Madame [P]
Constater que Madame [P] facturait la CPRP SNCF des soins sur la base de prescriptions médicales falsifiées et surfacturait des soins ; Constater sa pleine responsabilité s’agissant des indus perçus ;Constater l’absence de nécessité que soit ordonnée une expertise médicale demandée par Madame [P] ; En conséquence, la débouter de sa demande d’expertise médicale ; Condamner Madame [P] à lui verser la somme de 29.994,10 euros relative au solde de l’indu.En tout état de cause :
Condamner in solidum Madame [R] et Madame [P] à lui verser la somme de 3.600 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;Ordonner l’exécution provisoire.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé plus ample de leurs prétentions et moyens.

La présente affaire a été mise en délibéré au 9 avril 2024.

MOTIFS DE LA DECISION
En vertu de l’article 4 alinéa 1er et de l’article 5 du code de procédure civile, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. Le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.
A titre préliminaire, le tribunal rappelle que seule Madame [D] [R] a soulevé l’irrégularité de la procédure de contrôle de son activité menée par la CPRP SNCF.
Sur la régularité de la procédure de contrôle menée à l’encontre de Madame [R] et de la notification de l’indu
Sur l’agrément et l’assermentation de l’agent contrôleur
Aux termes de l'article L 114-10 du code de la sécurité sociale : « Les directeurs des organismes chargés de la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale ou du service des allocations et prestations mentionnées au présent code confient à des agents chargés du contrôle, assermentés et agréés dans des conditions définies par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale ou par arrêté du ministre chargé de l'agriculture, le soin de procéder à toutes vérifications ou enquêtes administratives concernant l'attribution des prestations, le contrôle du respect des conditions de résidence et la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles. Des praticiens-conseils et auditeurs comptables peuvent, à ce titre, être assermentés et agréés dans des conditions définies par le même arrêté. Les constatations établies à cette occasion par ces agents font foi jusqu'à preuve du contraire.
Lorsque cela est nécessaire à l'accomplissement de sa mission, un agent chargé du contrôle peut être habilité par le directeur de son organisme à effectuer, dans des conditions précisées par décret, des enquêtes administratives et des vérifications complémentaires dans le ressort d'un autre organisme. Les constatations établies à cette occasion font foi dans les mêmes conditions que celles mentionnées au premier alinéa et le directeur de ce dernier organisme tire, le cas échéant, les conséquences concernant l'attribution des prestations et la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles ».

La Cour de cassation juge que l'obligation d'agrément et d'assermentation prescrite par ce texte ne s'applique aux agents qui procèdent, sur le fondement de l'article L. 133-4 du code de la Sécurité Sociale, au contrôle de l'application des règles de tarification ou de facturation par un professionnel de santé que lorsqu'ils mettent en œuvre des prérogatives de puissance publique (voir notamment : 2ème chambre civile du 16 mars 2023 - numéro 21-11.471).

Ainsi, la cour de cassation a notamment validé les pénalités prononcées par l'agent qui :
s'était contenté d'opérer un contrôle administratif de facturation « par analyse et recoupement des documents émanant du professionnel de santé » (Cass. 2e civ., 1er déc. 2022, n° 20-22.759) ou qui avait seulement examiné « des documents adressés à la caisse aux fins de prise en charge des actes y figurant » (Cass. 2e civ., 7 juill. 2022, n° 21-11.998) sans établir de procès-verbal (Cass. 2e civ., 9 sept. 2021, n° 20-17.029).
Il résulte de l’étude la jurisprudence de la Cour de cassation que le champ des
« prérogatives de puissance publique » est restreint aux actes d'instruction conduits par l'agent de contrôle.

Conformément à l’arrêt de la cour de cassation du 16 mars 2023 précité :
L’absence de publication de l'agrément n'affectant pas son existence, elle est sans incidence sur la régularité des vérifications et enquêtes administratives auxquelles procède l'agent d'un organisme de sécurité sociale agréé et assermenté.La preuve de l'agrément peut être rapportée par tous moyens.
Enfin, la cour de cassation juge que l'irrégularité ou l'omission de la formalité d'agrément ou d'assermentation prive les agents de leur pouvoir de contrôle, et, dès lors, entraîne la nullité de tous les actes postérieurs qui en sont la conséquence.

****

En l’espèce, Madame [D] [R] fait grief à la CPRP SNCF de ne pas justifier de l’identité de l’agent chargé du contrôle de facturation dont elle a fait l’objet, ni a fortiori de son agrément et de son assermentation.

Il ressort des pièces versées aux débats que la CPRP SNCF a mis en œuvre un contrôle de l’activité professionnelle de Madame [D] [R] sur le fondement de l’article L.133-4 du code de la sécurité sociale.

L’agent chargé de ce contrôle ne s’est pas contenté d’analyser et regrouper les documents de facturation de l’infirmière puisqu’il a interrogé par courriers écrits des médecins et patients afin de vérifier la facturation de Madame [D] [R] (voir notamment les pièces n°16, 19 ; 20 ; 21 et 27 de la CPRP).

Il a donc mis en œuvre des prérogatives de puissance publique.

Il s’ensuit qu’il devait pour ce faire obligatoirement être assermenté et agrémenté.

Or, la CPRP SNCF ne justifie d’aucun élément permettant d’établir que l’agent ayant effectué le contrôle de l’activité de Madame [D] [R] était assermenté et agrémenté.

L'omission de la formalité d'agrément ou d’assermentation a privé son agent de son pouvoir de contrôle et entraîne en conséquence la nullité des actes postérieurs, soit celle de la notification d’indu litigieuse du 3 février 2021 et de la mise en demeure du 6 mai 2021, toutes deux fondées sur ce contrôle.

Il n’y a pas lieu d’examiner les autres moyens soulevés au soutien de sa demande d’irrégularité de la procédure de contrôle.

La notification de payer du 3 février 2021 et la mise en demeure consécutive du 6 mai 2021 adressées à Madame [D] [R] par la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF seront en conséquence annulées.

La procédure de contrôle de l’activité professionnelle de Madame [D] [R] étant irrégulière, il n’y a pas lieu d’examiner sa contestation sur le fond de l’indu.

Sur la demande de dommages et intérêts de Madame [D] [R]

En application de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Il incombe à celui qui se prévaut de cet article pour obtenir des dommages et intérêts de la part d’un organisme de sécurité sociale de rapporter la preuve d’une faute commise par cette dernière, du préjudice dont il a souffert et du lien de causalité entre les deux.
En l’espèce, Madame [D] [R] se contente de porter « à l’attention de la juridiction que la caisse n’a pas hésité à retenir arbitrairement une partie des honoraires lui revenant ».
Ces allégations sont insuffisantes à elles seules à rapporter la preuve d’une faute de la CPRP SNCF, du préjudice qu’elle a subi et du lien de causalité entre les deux.
Elle sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts fondée sur l’article 1240 du code civil.
Sur la contestation de Madame [J] [P] sur le fond, soit sur le bien-fondé de l'indu de facturation d'actes infirmiers
Aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Conformément à l'article 9 du code de procédure civile, 1358 et 1382 du code civil, il appartient à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention, cette preuve pouvant être apportée par tout moyen sauf si la loi en dispose en autrement le cas échéant au moyen de présomptions suffisamment graves, précises et concordantes.
Il est de jurisprudence constante qu' il appartient à l'organisme d'assurance maladie de rapporter, à l'appui de sa demande de répétition de l'indu fondée sur les dispositions de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, la preuve du non-respect des règles de tarification et de facturation (2ème Civ., 16 décembre 2010, pourvoi n 09-17.188, 2ème Civ., 10 mai 2012, pourvoi n 11-13.969, 2e Civ., 28 mai 2020, pourvoi n° 19-13.584), au besoin par la production d'un tableau récapitulatif (2e Civ., 28 novembre 2013, no 12-26.506, 2e Civ., 23 janvier 2020, pourvoi n° 19-11.698) et au professionnel ou l'établissement de santé de discuter des éléments de preuve produits par l'organisme à charge pour lui d'apporter la preuve contraire (2ème Civ., 28 novembre 2013, pourvoi n 12-26.506 ; 2e Civ., 19 septembre 2013, pourvoi n 12-21.432).
****
En l'espèce, la CPRP SNCF reproche à Madame [J] [P] de lui avoir :
Facturé des majorations de coordinations infirmiers (MCI) alors qu’elle n’a pas effectué de soins correspondant à cette facturation ; Sur-facturé des séances de soins infirmiers (AIS3) ; Facturé des soins sur la base de prescriptions falsifiées ; Pour les patients Monsieur [V] [C], Madame [N] [C] et Madame [B] [W] entre le 14 août 2018 et le 29 août 2020.

Afin de le démontrer, elle verse aux débats les résultats de son enquête portant sur la facturation de Mesdames [R] et [J] [P], infirmières libérales, et notamment :

les déclarations des médecins prescripteurs et des patients concernés ;un tableau récapitulatif détaillé des versements qu’elle estime avoir versés à tort à Madame [J] [P], joint à la notification d’indu du 3 février 2021 (pièce n°9 de la CPRP), permettant de justifier le montant total de 24.994,10 euros dont elle réclame le remboursement.
Il résulte effectivement de ces pièces, que les actes facturés par Madame [J] [P] sont en contradiction et non conformes aux déclarations faites par les médecins prescripteurs et les assurés ayant bénéficié eux-mêmes de ces soins.
En défense, Madame [J] [P] soutient, en premier lieu, qu’elle n’a commis aucune fraude dès lors qu’elle s’est contentée de mettre en application des soins visés par des ordonnances qui lui ont été transmises dans le cadre du remplacement de Madame [D] [R].
En second lieu, elle reproche à la CPRP SNCF de sous-estimer la durée de soins nécessaire pour les soins de Madame [N] [C], Monsieur [V] [C] et Madame [B] [K].
Elle précise qu’elle a parfaitement exposé les raisons permettant de retenir une durée de soins de 2 heures, dès lors que les patients avaient besoin d’une assistance médicale plus accrue.
Elle en déduit que l’évaluation de la durée et de la difficulté des soins qu’elle devait réaliser pour ces trois patients constitue une difficulté d’ordre médical que le tribunal ne pourra trancher qu’en ayant préalablement recours à une expertise.
Elle n’apporte aucun élément précis pour contredire les autres griefs soulevés par la caisse.
Or d’une part, ses propres allégations sont insuffisantes à elles seules à remettre en cause les éléments de preuve apportés par l’organisme grâce à son enquête s’agissant de la durée des soins nécessaire.
D’autre part, il n’existe aucune difficulté d’ordre médical qui justifierait d’avoir recours à une expertise dès lors que le tribunal s’estime suffisamment éclairé par les déclarations de médecins prescripteurs et des patients.
La CPRP SNCF rapporte donc la preuve qu’elle n’avait pas à prendre en charge les actes infirmiers litigieux, et peut en solliciter le remboursement sans avoir à rapporter la preuve de la mauvaise foi de Madame [J] [P] ou d’une quelconque fraude de sa part.
Madame [J] [P] n'apportant pas de contradiction utile aux griefs formés par la CPRP SNCF, il conviendra de dire bien fondé l'indu de facturation d'actes infirmiers d'un montant de 24.994,10 € dont le recouvrement est sollicité pour la période du 14 août 2018 au 29 août 2020 par cette dernière.
En conséquence, Madame [J] [P] sera condamnée à payer à la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF la somme de 24.994,10 € à titre d'indu de facturation d'actes infirmiers pour la période du 14 août 2018 au 29 août 2020.

Par ailleurs, il n’y a pas lieu d’infirmer ou de confirmer les décisions de la CPRP SNCF, ni celles de la commission de recours amiable s’agissant de décisions administratives auxquelles le présent jugement a vocation à se substituer.
Sur les demandes accessoires
La CPRP SNCF et Madame [J] [P], qui succombent, seront tenues de partager la charge des dépens de l’instance à part égale en application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
Compte tenu de l’issue du litige et des circonstances de l’espèce, l’équité justifie de ne pas faire droit aux demandes fondées sur l’article 700 du même code.

PAR CES MOTIFS,
Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort,
CONSTATE l’irrégularité de la procédure de contrôle de l’activité professionnelle de Madame [D] [R], infirmière libérale, ayant donné lieu à la notification d’indu du 3 février 2021, en l’absence d’agrément et d’assermentation de l’agent ayant effectué ce contrôle ;
ANNULE en conséquence la notification d’indu du 3 février 2021 ainsi que la mise en demeure du 6 mai 2021 émises par la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF à l’encontre de Madame [D] [R] ;
DEBOUTE en conséquence la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF de sa demande de condamnation de paiement de Madame [D] [R] au solde de l’indu fondé sur ce contrôle irrégulier ;
DEBOUTE Madame [D] [R] de sa demande de condamnation de la CPRP SNCF au paiement de dommages et intérêts ;
DEBOUTE Madame [J] [P] de sa demande d’expertise médicale ;
CONDAMNE Madame [J] [P] à payer la somme de 24.994,10 euros à la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF au titre d’un indu de prise en charge de factures d’actes infirmiers sur la période du 14 août 2018 au 29 août 2020 ayant fait l’objet d’une notification le 3 février 2021 ;
RAPPELLE que le présent jugement se substitue aux décisions prises par l’organisme et la commission de recours amiable ;

DÉBOUTE les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires ;
DIT n’y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF et Madame [J] [P] à partager les dépens de l’instance par moitié ;
DIT que tout appel de la présente décision doit être formé, sous peine de forclusion, dans le délai d’un mois à compter de la réception de sa notification, conformément aux dispositions de l'article 538 du Code de procédure civile.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 9 avril 2024.

LA GREFFIERELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc: rd/carsat
Numéro d'arrêt : 21/02011
Date de la décision : 09/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-09;21.02011 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award