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09/04/2024 | FRANCE | N°20/09793

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 1ère chambre cab2, 09 avril 2024, 20/09793


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE


JUGEMENT N°24/ DU 09 Avril 2024


Enrôlement : N° RG 20/09793 - N° Portalis DBW3-W-B7E-YBS4

AFFAIRE : S.A. [17] ( l’ASSOCIATION [19])
C/ M. [O] [D] [U] et M. [R] [F] [U] (Me Paul-victor BONAN)


DÉBATS : A l'audience Publique du 13 Février 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente

Greffier lors des débats : BERARD Béatrice,

Vu le rapport fait à l’audience

A l'iss

ue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 09 Avril 2024

Jugem...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N°24/ DU 09 Avril 2024

Enrôlement : N° RG 20/09793 - N° Portalis DBW3-W-B7E-YBS4

AFFAIRE : S.A. [17] ( l’ASSOCIATION [19])
C/ M. [O] [D] [U] et M. [R] [F] [U] (Me Paul-victor BONAN)

DÉBATS : A l'audience Publique du 13 Février 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente

Greffier lors des débats : BERARD Béatrice,

Vu le rapport fait à l’audience

A l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 09 Avril 2024

Jugement signé par JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente et par BERARD Béatrice, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDERESSE

S.A. [17], inscrite au RCS de Lyon sous le n° [N° SIREN/SIRET 13] prise en la personne de son directeur général y domicilié, dont le siège social est sis [Adresse 12]

représentée par Maître Hubert ROUSSEL de l’ASSOCIATION ROUSSEL-CABAYE & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DEFENDEURS

Monsieur [O] [D] [U]
né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 14]
de nationalité Française, domicilié : chez Monsieur [L] [U], [Adresse 11] (UKRAINE)

Monsieur [R] [F] [U]
né le [Date naissance 7] 1955 à [Localité 18] (ALGÉRIE)
de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

Tous deux représentés par Me Paul-victor BONAN, avocat au barreau de MARSEILLE

EXPOSE DU LITIGE

Par acte en date du 26 octobre 2020, la SA [17] a fait assigner [O] [U] et [R] [U] devant le Tribunal judiciaire de Marseille en licitation partage des biens immobiliers sis [Localité 16]) cadastrés section CD n°[Cadastre 10]-[Cadastre 3]-[Cadastre 4]-[Cadastre 5]-[Cadastre 6].

Par acte en date du 6 novembre 2020, [O] [U] a fait assigner la SA [17] devant le Tribunal judiciaire de Marseille afin de la voir condamner à procéder à la radiation des hypothèques prises le 12 juillet 2018 sur les biens immobiliers sis à [Localité 16] cadastrés section CD n°[Cadastre 10]-[Cadastre 3]-[Cadastre 4]-[Cadastre 5]-[Cadastre 6], et section CM n°[Cadastre 8]-[Cadastre 9].

Par ordonnance en date du 25 mai 2021, les deux affaires ont fait l’objet d’une jonction.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 6 février 2023 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé des moyens, la SA [17] demande au Tribunal de :
- débouter purement et simplement [O] [U] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- juger que les règlements effectués au cours de l’année 2009 ont interrompu la prescription,
- juger que la prise d’inscription de l’hypothèque a également interrompu la prescription, conformément aux dispositions des articles 2244 et 2245 du Code civil,
- voir ordonner le partage de l’indivision existant entre [O] [U] et [R] [U] sur les biens suivants : un immeuble sis à [Localité 16] et figurant au cadastre de ladite commune section CD n°[Cadastre 10]-[Cadastre 3]-[Cadastre 4]-[Cadastre 5]-[Cadastre 6] conformément aux dispositions des articles 815 et suivants du Code civil et 1360 du Code de procédure civile et 1341-1 du Code civil,
- juger qu'il sera procédé à la vente aux enchères publiques et à la barre du Tribunal judiciaire de Marseille des biens ci-dessus mentionnés aux clauses et conditions du cahier des charges qui sera dressé par l'avocat du demandeur sur la mise à prix de 125.000 euros,
- juger que la publicité et les formalités d'enchères se feront conformément aux dispositions du décret du 26 juillet 2006 relatif aux ventes sur saisie immobilière,
- nommer tel notaire qu'il plaira au tribunal pour recueillir le prix et juger qu’il sera chargé de liquider les droits des parties avec notamment leurs droits à récompense respectifs,
- condamner solidairement [O] [U] et [R] [U] à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- juger que les frais de vente à intervenir seront réglés par l’adjudicataire en sus de son prix, les frais de la présente instance étant considérés comme des frais privilégiés de partage distraits au profit de Maître [X].

Elle indique être créancière de [O] [U] de la somme de 333.013,51 euros, selon décompte arrêté au 20 février 2020, outre intérêts au taux légal majoré depuis cette date et ce jusqu’à parfait paiement, selon jugement rendu par le Tribunal de commerce de Marseille du 10 octobre 2005 signifié le 24 octobre 2005 et confirmé par un arrêt du 8 novembre 2007 rendu par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence signifié le 7 décembre 2007; qu’en garantie de cet engagement, la banque a inscrit notamment une hypothèque sur des immeubles situés à [Localité 16] figurant au cadastre de ladite commune, section CD n°[Cadastre 10]-[Cadastre 3][Cadastre 4]-[Cadastre 5]-[Cadastre 6]; que la prescription du titre a été interrompue par les versements effectués par les co-débiteurs solidaires le 30 septembre 2008, le 19 janvier 2009 et le 2 mars 2009; qu’ainsi, chaque paiement a interrompu la prescription et a fait repartir un délai de dix ans; qu’en outre, la prise d’inscription de l’hypothèque a également interrompu la prescription ; que Monsieur [U] ne justifie pas avoir informé son créancier de son changement de domiciliation en Ukraine, l’acte ayant été signifié à sa dernière adresse connue.

En défense, dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 22 juin 2023 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé des moyens, [O] [U] et [R] [U] demandent au Tribunal de :
- débouter la société [17] de toutes ses demandes, fins et conclusions, comme infondées ;
- ordonner que la créance de la société [17] à l’égard de [O] [U], d’un montant en principal de 311.931,46 €, jugé par arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence en date du 8 novembre 2007, signifié le 7 décembre 2007, est prescrite depuis le 19 juin 2018,
- ordonner que la créance de la société [17] à l’égard de [O] [U], d’un montant en principal de 311.931,46 €, jugé par arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence en date du 8 novembre 2007, signifié le 7 décembre 2007, prescrite depuis le 19 juin 2018, n’a fait l’objet d’aucune interruption de prescription,
- ordonner que la signification de l’opposition à partage, effectuée le 14 décembre 2018 à l’égard de [O] [U], est nulle et de nul effet,
- ordonner que la signification de la dénonce de dépôt d’une inscription d’hypothèque judiciaire, signifiée le 12 juillet 2018 à l’égard de [O] [U], est nulle et de nul effet,
- condamner la société [17] à procéder, dans les 8 jours du prononcé de la décision à intervenir, à la radiation des hypothèques prises le 12 juillet 2018, à l’encontre de [O] [U] sur les biens suivants :
1°) un ensemble immobilier sis à [Localité 16] et figurant au cadastre de ladite commune section CD n° [Cadastre 10]-[Cadastre 3]-[Cadastre 4]-[Cadastre 5]-[Cadastre 6],
2°) un immeuble sis à [Localité 16] et figurant au cadastre de ladite commune section CM [Cadastre 8]-[Cadastre 9],
Et ce, sous astreinte de 300 € par jour de retard,
- condamner la société [17] à payer à [O] [U] la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Ils font valoir que la prescription extinctive concernant l’exécution de l’arrêt de la Cour d’appel en date du 8 novembre 2007, était définitivement acquise au 19 juin 2018, qu’il n’y a eu aucun acte interruptif de prescription entre l’arrêt de la Cour d’appel et le 19 juin 2018 ; qu’ainsi, la créance de la société [17] à l’égard de [O] [U] est prescrite ; que les versements effectués par Madame [U] uniquement n’ont pas interrompu la prescription à son égard, les pièces communiquées par la société [17] ne démontrant pas en quoi Monsieur et Madame [U] seraient tenus solidairement des sommes réclamées; qu’ainsi s’il était admis que Madame [U] avait procédé à certains paiements, cela n’aurait eu aucune incidence sur la dette de Monsieur [U], en l’absence de solidarité entre Monsieur et Madame [U] ; qu’en outre, la société [17] ne démontre à aucun moment que [O] [U] aurait procédé à un paiement, qui aurait pu éventuellement constituer une reconnaissance de dette, le paiement de Madame [Z] [K] ne pouvant valoir reconnaissance de dette, et partant une interruption de la prescription, à l’égard de son ex-époux ; que la prise d’une hypothèque n’entraîne pas à elle-seule une interruption de la prescription ; qu’en effet, c’est la dénonce au débiteur de cette prise d’hypothèque qui entraîne l’interruption de la prescription ; que la prise d’hypothèque alléguée par la société [17], qui n’est pas versée aux débats, n’est pas interruptive de prescription car elle n’a pas jamais été dénoncée à [O] [U], et que la créance principale est donc désormais prescrite depuis le 17 juin 2018 ; qu’en tout état de cause, l’inscription d’hypothèque aurait été inscrite aux hypothèques le 12 juillet 2018, or, à cette date, la créance de la société [17] était déjà prescrite, depuis le 19 juin 2018 ; qu’ainsi, la prétendue prise d’hypothèque était déjà manifestement tardive, et il n’est pas possible d’interrompre une prescription qui a déjà été acquise ; que l’hypothèque judiciaire signifiée à une adresse erronée le 12 juillet 2018 et l’opposition à partage signifiée à cette même adresse le 14 décembre 2018 sont nulles puisque [O] [U] ne résidait plus en France depuis 2015, date à laquelle il s’est enregistré auprès du fisc ukrainien comme résident fiscal ukrainien ; que par ailleurs, l’huissier significateur ne s’est pas rendu à [Localité 15], à la dernière adresse connue de Monsieur [U], les mentions indiquées par l’huissier ne permettant pas de s’assurer que [O] [U] était bien domicilié chez son oncle; que l’huissier significateur n’a effectué aucune diligence; que de plus, l’acte de signification ne comporte pas l’indication, en caractères très apparents, que le débiteur peut demander la mainlevée de la sûreté comme il est dit à l'article R. 512-1, ni la reproduction des articles R. 511-1 à R. 512-3 et R. 532-6, et ce, en totale contravention avec les dispositions des 2° et 3° de l’article R532-5 du Code des procédures civiles d’exécution, qui prévoient comme sanction la nullité ; que la signification de la dénonce de dépôt d’une inscription d’hypothèque judiciaire, le 12 juillet 2018 à l’égard de [O] [U], est nulle et de nul effet; que la signification d’une opposition à partage signifiée à une adresse erronée le 14 décembre 2018 est également nulle et de nul effet puisque le nom [U] était nécessairement inscrit sur la boîte aux lettres, mais l’huissier n’a pas indiqué quel(s) prénom(s) y aurait été inscrit en plus, et en tout état de cause, l’huissier n’a pas indiqué que “[O] [U]” était inscrit sur la boîte aux lettres; qu’il convient donc de condamner sous astreinte la société [17] à procéder, dans les huit jours du prononcé de la décision à intervenir, à la radiation des hypothèques.

La procédure a été clôturée à la date du 9 janvier 2024.

A l’audience, les parties ont été invitées à présenter leurs observations sur l’irrecevabilité des fins de non-recevoir soulevées devant le juge du fond en application des dispositions de l’article 789 alinéa 6 du Code de procédure civile issu du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019.

Par note en délibéré reçue le 16 février 2024, [O] [U] a indiqué que la prescription de l’inscription hypothécaire dont il était demandé la mainlevée était un moyen de fond de nature à déterminer l’issue du litige et les demandes, relevant de la compétence du Tribunal statuant au fond.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il y a lieu de rappeler que l’article 123 du Code de procédure civile énonce que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu'il en soit disposé autrement et sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.
Les règles spécifiques aux procédures écrites engagées devant le tribunal judiciaire, lorsque la représentation par avocat est obligatoire, imposent, depuis le 1er janvier 2020, de soulever les fins de non -recevoir avant le dessaisissement du juge de la mise en état.
En effet, le juge de la mise en état est désormais seul compétent pour statuer sur les fins de non-recevoir, y compris lorsque cela implique de trancher préalablement une question de fond, en vertu de l’article 789 alinéa 6 du Code de procédure civile issu du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019.
Dès lors, pour les instances introduites avant le 1er janvier 2020, seul le Tribunal statuant au fond a compétence pour statuer sur les fins de non-recevoir soulevées.
En revanche, pour les instances introduites à compter du 1er janvier 2020, les parties doivent impérativement soulever les fins de non-recevoir devant le juge de la mise en état par voie de conclusions d’incident, distinctes de celles au fond, sous peine de voir déclarer irrecevables les fins de non-recevoir soulevées devant le juge du fond, à moins que celles-ci ne surviennent ou soient révélées postérieurement au dessaisissement du juge de la mise en état.

En l’espèce, Monsieur [U] agit en radiation des hypothèques prises par la [17] sur deux biens immobiliers sis à [Localité 16] et cadastrés section CD n°[Cadastre 10]-[Cadastre 3]-[Cadastre 4]-[Cadastre 5]-[Cadastre 6], et section CM n°[Cadastre 8]-[Cadastre 9], aux motifs que ces hypothèques ont été prises tardivement, après l’expiration du délai de prescription.

La société [17] agit en licitation partage du bien indivis sis à [Localité 16] et cadastrés section CD n°[Cadastre 10]-[Cadastre 3]-[Cadastre 4]-[Cadastre 5]-[Cadastre 6], en qualité de créancier de [O] [U].

Les deux affaires ont été jointes. Il sera relevé que l’action de la [17] ne porte pas sur le bien immobilier sis à [Localité 16] section CM n°[Cadastre 8]-[Cadastre 9].

La prescription de l’inscription hypothécaire soulevée par Monsieur [U] au soutien de sa demande de mainlevée est bien un moyen de fond qui relève de la compétence du Tribunal.

La société [17] agit sur le fondement de l’article 815-17 du Code civil aux termes duquel : “ Les créanciers qui auraient pu agir sur les biens indivis avant qu'il y eût indivision, et ceux dont la créance résulte de la conservation ou de la gestion des biens indivis, seront payés par prélèvement sur l'actif avant le partage. Ils peuvent en outre poursuivre la saisie et la vente des biens indivis.
Les créanciers personnels d'un indivisaire ne peuvent saisir sa part dans les biens indivis, meubles ou immeubles.
Ils ont toutefois la faculté de provoquer le partage au nom de leur débiteur ou d'intervenir dans le partage provoqué par lui. Les coïndivisaires peuvent arrêter le cours de l'action en partage en acquittant l'obligation au nom et en l'acquit du débiteur. Ceux qui exerceront cette faculté se rembourseront par prélèvement sur les biens indivis.”

La société [17] agit en partage sur le fondement d’une créance résultant d’un arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence en date du 8 novembre 2007 devenu définitif.
Cet arrêt été signifié à [O] [U] le 7 décembre 2007.
Une inscription d’hypothèque judiciaire a été déposée par la société [17] le 12 juillet 2018 et dénoncée au débiteur à la même date.
Une opposition à partage a également été signifiée le 14 décembre 2018.

Aux termes de l’article L111-2 du Code des procédures civiles d’exécution, le créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l'exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d'exécution.

Il résule des dispositions de l’article L111-4 que l’exécution des titres exécutoires tels que les décisions des juridictions de l'ordre judiciaire lorsqu'elles ont force exécutoire ne peut être poursuivie que pendant dix ans, sauf si les actions en recouvrement des créances qui y sont constatées se prescrivent par un délai plus long.

La loi n°2008-561 du 17 juin 2008 a réduit à dix ans le délai de prescription d’exécution des jugements.
La prescription extinctive concernant l’exécution de l’arrêt de la Cour d’appel en date du 8 novembre 2007, signifié le 7 décembre 2007, était définitivement acquise au 19 juin 2018, soit dix ans après l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008.

La société [17] prétend que la prescription du titre a été interrompue par les versements effectués par les co-débiteurs solidaires le 30 septembre 2008, le 19 janvier 2009 et le 2 mars 2009, et que la prise d’inscription de l’hypothèque a également interrompu la prescription.

L’article 2244 du Code civil prévoit en effet que le délai de prescription est interrompu par une mesure conservatoire prise en application du Code des procédures civiles d'exécution ou un acte d'exécution forcée, et l’article 2245 indique que l'interpellation faite à l'un des débiteurs solidaires par une demande en justice ou par un acte d'exécution forcée ou la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription contre tous les autres, même contre leurs héritiers.

L’inscription d’hypothèque judiciaire a été déposée et dénoncée le 12 juillet 2018, soit après l’expiration du délai de dix ans. La société [17] ne justifie pas avoir pris une mesure conservatoire avant cette date.

Par ailleurs, s’il apparaît que des paiements ont bien été réalisés les 30 septembre 2008, le 19 janvier 2009 et le 2 mars 2009, soit avant l’expiration du délai de prescription, il n’est pas contesté que ceux-ci proviennent d’[H] [K].
La société [17] soutient qu’il s’agit d’un paiement effectué par un codébiteur solidaire, ce qui interrompt la prescription pour l’autre co-débiteur solidaire.

Elle ne démontre pas cependant que Monsieur et Madame [U] étaient co-débiteurs solidaires de cette dette envers elle.
En effet, la solidarité ne se présume pas. L’arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence ne prononce pas de condamnation solidaire entre [O] [U] et [H] [K] divorcée [U].
La condamnation a été prononcée sur le fondement d’engagements de cautions souscrits par [O] [U] et [H] [K] divorcée [U] au profit de la société [20]. Chacun de ces engagements de caution est souscrit de manière solidaire avec le cautionné, soit la société [20], mais il n’est nullement prévue de solidarité entre les cautions; les actes de cautionnement du 3 mai 2002 ont d’ailleurs été souscrits séparément pour un montant de 65.000 euros chacun et sont dénommés “cautionnement solidaire à la garantie de l’ensemble des engagements du client cautionné”, ce dernier étant la société [20]; l’acte de cautionnement en date du 25 juin 2003 a été souscrit par [O] [U] seul, pour un montant de 300.000 euros.
Par ailleurs, les époux [U] sont divorcés depuis le jugement en date du 7 mars 2005, transcrit sur leur acte de mariage le 19 juillet 2005.

Les paiements effectués par [H] [K] divorcée [U] n’ont donc pas interrompu la prescription à l’encontre de [O] [U].

L’inscription d’hypothèque du 12 juillet 2018 est donc intervenue après l’expiration du délai de prescription; sa radiation doit donc être ordonnée.

La société [17] sera condamnée à procéder à la radiation des inscriptions hypothécaires prises le 12 juillet 2018 à l’encontre de [O] [U], sur les biens sis à [Localité 16] et figurant au cadastre de ladite commune section CD n° [Cadastre 10]-[Cadastre 3]-[Cadastre 4]-[Cadastre 5]-[Cadastre 6] et section CM [Cadastre 8]-[Cadastre 9], sous peine passé un délai de 30 jours à compter de la signification du présent jugement d’une astreinte de 200 euros par jour de retard.
En outre, la demande de licitation et partage est également fondée sur une créance prescrite et doit être rejetée.

La SA [17] sera donc déboutée de l’intégralité de ses demandes.

La SA [17] , qui succombe, sera condamnée aux dépens, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de [O] [U] l’intégralité des frais irrépétibles qu’il a été contraint d’exposer ; la SA [17] sera donc condamnée à lui payer la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

Le présent jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire rendu en premier ressort,

Déboute la SA [17] de l’intégralité de ses demandes,

Condamne la SA [17] à procéder à la radiation des inscriptions hypothécaires prises le 12 juillet 2018 à l’encontre de [O] [U], sur les biens immobiliers sis à [Localité 16] et figurant au cadastre de ladite commune section CD n° [Cadastre 10]-[Cadastre 3]-[Cadastre 4]-[Cadastre 5]-[Cadastre 6] et section CM [Cadastre 8]-[Cadastre 9], sous peine passé un délai de 30 jours à compter de la signification du présent jugement d’une astreinte de 200 euros par jour de retard,

Condamne la SA [17] aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile,

Condamne la SA [17] à payer à [O] [U] la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

AINSI JUGE ET PRONONCE ET MIS A DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIÈRE CHAMBRE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE 9 AVRIL 2024.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 1ère chambre cab2
Numéro d'arrêt : 20/09793
Date de la décision : 09/04/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-09;20.09793 ?
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