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04/04/2024 | FRANCE | N°19/02892

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc: cpam, 04 avril 2024, 19/02892


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 2]


JUGEMENT N° 24/01614 du 4 Avril 2024

Numéro de recours : N° RG 19/02892 - N° Portalis DBW3-W-B7D-WGKA

AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [L] [R]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]
comparant assisté de Me Henry BOUCHARA, avocat au barreau de MARSEILLE


c/ DEFENDEUR
Organisme CPCAM DES BOUCHES-DU-RHONE
[Adresse 3]
comparant






DÉBATS : À l'audience publique du 8 Janvier 2024
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COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : DEPARIS Eric, Vice-Président


Assesseurs : MAUPAS René
ACHOUR Salim

La greffière lor...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 2]

JUGEMENT N° 24/01614 du 4 Avril 2024

Numéro de recours : N° RG 19/02892 - N° Portalis DBW3-W-B7D-WGKA

AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [L] [R]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]
comparant assisté de Me Henry BOUCHARA, avocat au barreau de MARSEILLE

c/ DEFENDEUR
Organisme CPCAM DES BOUCHES-DU-RHONE
[Adresse 3]
comparant

DÉBATS : À l'audience publique du 8 Janvier 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : DEPARIS Eric, Vice-Président

Assesseurs : MAUPAS René
ACHOUR Salim

La greffière lors des débats : DI GIACOMO Alexia,

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 4 Avril 2024

NATURE DU JUGEMENT

Contradictoire et en premier ressort
19/02892

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [L] [R], conducteur de travaux salarié-gérant de la Société A Responsabilité Limitée [8], a été admis au bénéfice des indemnités journalières au titre du risque professionnel accidentel, par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Bouches-du-Rhône ( dite ci-après CPAM ) à compter du 22 février 2013 jusqu'au 20 juillet 2017.

La CPAM a effectué un contrôle a posteriori du paiement de ces indemnités journalières ayant donné lieu à un rapport d'enquête concluant que Monsieur [L] [R] n'avait pas respecté de nombreuses obligations mises à sa charge en tant qu'assuré en arrêt de travail, notamment en ne justifiant pas du salaire de référence, en ayant exercé des activités non autorisées et quitté la circonscription à plusieurs reprises.

Par lettre recommandée datée du 7 août 2017, la CPAM a notifié à Monsieur [L] [R] un indu pour la somme totale de 185 123, 84 € correspondant aux prestations servies pour la période précitée pour le motif d'infraction aux dispositions des articles L. 323-6, L. 433-1, L. 431-2-3 et suivants du Code de la sécurité sociale, ainsi qu'à celles visées à l'article 104 du Règlement intérieur des Caisses primaires.

Par courrier recommandé expédié le 5 octobre 2017, Monsieur [L] [R] a contesté cet indu devant la Commission de recours amiable de la CPAM des Bouches-du-Rhône.

Par décision rendue le 5 février 2019, la Commission de recours amiable a rejeté son recours et maintenu l'indu notifié par la Caisse.

Par lettre recommandée expédiée le 18 mars 2019, Monsieur [L] [R] a saisi le Pôle social du Tribunal de grande instance de Marseille ( devenu Tribunal judiciaire ) afin de contester cette décision de rejet.

L’affaire a été retenue à l'audience utile du 8 janvier 2024.

Aux termes de conclusions soutenues oralement par son Conseil, Monsieur [L] [R] demande au Tribunal de :
- le recevoir en son recours ;
- débouter la CPAM de sa demande de remboursement des indemnités journalières, atteinte par la prescription biennale ;
- subsidiairement, déclarer acquise la prescription biennale pour les sommes perçues avant le 5 janvier 1017 si les conclusions de la CPAM du 4 avril 2019 étaient reconnues comme acte interruptif de prescription ;
- condamner la CPAM à lui payer la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
A l'appui de ses prétentions, Monsieur [L] [R] soutient n'avoir commis aucune fraude, ayant au contraire justifié de son salaire des mois de janvier et février 2013 et de ses deux déplacements à l’étranger.

Aux termes de ses conclusions soutenues oralement à l’audience par une inspectrice juridique, la CPAM des Bouches-du-Rhône demande au Tribunal de :
- la recevoir en ses conclusions ;
- confirmer l'indu et condamner Monsieur [L] [R] à lui rembourser la somme de 185 123, 84 € ;
- débouter Monsieur [L] [R] de son recours et de toutes ses demandes ;
- condamner Monsieur [L] [R] à lui verser la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions, la CPAM fait valoir l’enquête administrative relatant que Monsieur [L] [R] a commis une fraude qui étend le délai de prescription à cinq ans en produisant de faux salaires de référence, et que sans autorisation il s‘est absenté hors circonscription et a travaillé.

En application de l’article 455 du Code de procédure civile, il convient de se reporter aux observations et conclusions des parties à l’audience, reprenant l’exposé complet de leurs moyens et prétentions.
L'affaire a été mise en délibéré au 4 avril 2024.

       
    
MOTIFS DE LA DÉCISION

           Aux termes de l'alinéa 3 de l'article L. 332-1 du Code de la Sécurité Sociale, « L'action de l'assuré pour le paiement des prestations en espèces de l'assurance maladie se prescrit par deux ans, à compter du premier jour du trimestre suivant celui auquel se rapportent lesdites prestations ; pour le paiement des prestations en espèces de l'assurance maternité, elle se prescrit par deux ans à partir de la date de la première constatation médicale de la grossesse.
L'action des ayants droit de l'assuré pour le paiement du capital prévu à l'article L. 361-1 se prescrit par deux ans à partir du jour du décès.

Cette prescription est également applicable, à compter du paiement des prestations entre les mains du bénéficiaire, à l'action intentée par un organisme payeur en recouvrement des prestations indûment payées, sauf en cas de fraude ou fausse déclaration. »

           L'article 2224 du Code Civil dispose que « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. »

Il n’est pas contesté qu’en application des articles L. 433-1 et L. 433-2, R. 433-4 et R. 433-5 et R. 436-1 du Code de la Sécurité Sociale, le salaire servant de base au calcul de l’indemnité journalière prévue au titre du risque professionnel est égal à 1 / 30, 42 du montant de la dernière paye antérieure à la date de l’arrêt de travail, si le salaire est réglé mensuellement.

           En l'espèce, s’agissant d’un accident du travail du 21 février 2013, le salaire de référence est celui du mois de janvier 2013.

Monsieur [L] [R] produit le bulletin afférent mentionnant un salaire brut de 4 712, 35 € et un net à payer de « 3 842, 11 € réglés le 31/01/2013 » .

Cependant, il ne produit aucune preuve d’encaissement d’un quelconque salaire.

Il ne produit d’une part que les copies d’un relevé bancaire et d’un, pour le moins, étonnant chèque de la Société A Responsabilité Limitée [8] d’un montant de 7 000 € , daté du 3 juillet 2013, encaissé sur le compte bancaire de la Société A Responsabilité Limitée à la date précitée et à l’ordre, non de Monsieur [L] [R] mais de Madame [E] [C] ( présentée selon un procès-verbal de plainte ultérieur, comme étant à l’époque son épouse, alors que la requête introductive d’instance justifiait d’un acte de mariage en 1997 et de la première page d’une d’ordonnance de non-conciliation le concernant avec Madame [N] [R] épouse [R] ) .
Et d’autre part, il produit une non moins étonnante attestation datée du 8 septembre 2017, sous la seule dénomination Société par Actions Simplifiée [7] [Adresse 4] à [Localité 9], disant agir « en qualité de conseil - Comptable de la SARL [8] » , sans nom ni qualité de la personne rédactrice, et indiquant que Monsieur [L] [R] a perçu de novembre 2012 à février 2013 différents salaires détaillés, « Soit une rémunération totale de 13 947.27 € ( … ) Son salaire a été payé en deux versements de 5600.00 € et 7000.00€ » et est produite une photocopie de la quasi-identique attestation avec pour différence la disparition du paragraphe relatif aux deux montants précités, remplacé par « Son salaire de Janvier et Février 2013 a été payé par la SARL [8] en un versement de 7000.00 € par chèque dûment encaissé « pour un montant de 6 786. 70€ de salaire dues par la SARL et la différence de 213.30€ correspond à un remboursement de frais engagés pour le compte de la SARL par M [R] ».

Il ressort de l’ensemble de ces éléments que le paiement du salaire de base allégué de 3 842, 11 € n’est sérieusement pas démontré mais encore que les justificatifs fantaisistes et contradictoires produits caractérisent la fraude reprochée par la CPAM.

Dès lors, en application du principe « Fraus omnia corrumpit » ( la fraude corrompt tout ) , faisant exception à toutes les règles, le délai de prescription applicable à l'action en répétition des prestations indûment servies court du jour de la connaissance par le solvens de la fraude dont s'est rendu coupable l'accipiens et non du jour du versement des prestations indues ; la prescription quinquennale prévue par l'article 2224 du Code civil est en conséquence applicable ;

En l’espèce, le délai de cinq ans s’applique sur la période s’étendant du 22 février 2013 jusqu'au 10 août 2017, date à laquelle l’assuré reconnait dans son courrier de saisine de la Commission de recours amiable s’être vu notifié l’indu du 7 août 2017, soit dans une période inférieure au délai de prescription.

Par ailleurs, l'article L. 433-1 du Code de la sécurité sociale prévoit l'octroi d'indemnités journalières à l'assuré, victime d'un accident de travail ou d'une maladie professionnelle, pour chaque journée pendant toute la période d'incapacité de travail qui précède soit la guérison complète, soit la consolidation de la blessure ou le décès.

L'article L. 323-6 du Code précité dispose que le service de l'indemnité journalière est subordonné à l'obligation pour le bénéficiaire :
1° D'observer les prescriptions du praticien ;
2° De se soumettre aux contrôles organisés par le service du contrôle médical prévu à l'article L.315-2 ;
3° De respecter les heures de sorties autorisées par le praticien selon les règles et modalités prévues par décret en Conseil d'État après avis de la Haute Autorité de santé ;
4° De s'abstenir de toute activité non autorisée ;
En cas d'inobservation volontaire de ces obligations, le bénéficiaire restitue à la caisse les indemnités versées correspondantes.
En outre, si l'activité mentionnée au 4° a donné lieu à une rémunération, à des revenus professionnels ou des gains, il peut être prononcé une sanction financière dans les conditions prévues à l'article L. 162-14.
En cas de recours formé contre les décisions de la caisse, les juridictions visées à l'article L. 142-2 contrôlent l'adéquation du montant de la sanction prononcée par la caisse à l'importance de l'infraction commise par l'assuré.

Ainsi, il n’est pas contesté que Monsieur [L] [R], sans autorisation préalable, a établi les chèques de salaire produits pendant la période normalement consacrée au repos total et a quitté la circonscription de la Caisse à deux reprises pendant dix et dix-neuf jours en février 2014 et février 2017 pour se rendre en Algérie ; celui-ci s'est absenté à de multiples reprises de son domicile en dehors de sorties autorisées, alors qu'il était en arrêt de travail sans le justifier réellement puisqu’il allègue les nécessités d’une procédure judiciaire en Algérie mais ne produit que la copie d’une plainte déposée en France à l’encontre de madame [E] [C] née à [G] en TUNISIE pour des délits uniquement commis en FRANCE.

Compte tenu de l’ensemble des éléments produits, les manquements de Monsieur [L] [R] aux obligations mises à sa charge sont parfaitement établis de sorte que la CPAM des Bouches-du-Rhône était fondée à lui notifier l’indu de 185 123, 84 € .

Il convient en conséquence de débouter Monsieur [L] [R] de son recours et de le condamner à rembourser les sommes réclamées par la CPAM.

Sur les demandes accessoires

Compte tenu de la nature du litige, il sera fait droit à la demande formulée par la CPAM des Bouches-du-Rhône au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et Monsieur [L] [R] sera condamné à lui payer la somme de 3 000 € à ce titre.
Il convient enfin de laisser les dépens de la présente instance à la charge de la partie qui succombe, conformément aux dispositions de l'article 696 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort,

Rejette l’exception de prescription biennale ;

Déclare recevable, mais mal fondé, le recours de Monsieur [L] [R] ;

Déboute Monsieur [L] [R] de l’ensemble de ses demandes, moyens et prétentions ;

Confirme l'indu daté du 7 août 2017 notifié le 10 août 2017 par la CPAM des Bouches-du-Rhône à Monsieur [L] [R] pour la somme totale de 185 123, 84 € correspondant aux prestations en espèce servies à compter du 22 février 2013 jusqu'au 20 juillet 2017 à tort pour fraude à la déclaration de salaire, et pour déplacements hors circonscription sans autorisation du Service médical ;

Condamne Monsieur [L] [R] à rembourser à la CPAM des Bouches-du-Rhône la somme de 185 123, 84 € au titre des indemnités journalières versées à tort ;

Condamne Monsieur [L] [R] à payer à la CPAM des Bouches-du-Rhône la somme de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne Monsieur [L] [R] aux dépens de l'instance ;

Dit que tout appel de la présente décision doit être formé, sous peine de forclusion, dans le délai d’un mois à compter de la réception de sa notification, conformément aux dispositions de l'article 538 du Code de procédure civile.

           Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 4 avril 2024.

                       LA GREFFIÈRE                                         LE PRÉSIDENT

Notifié le :


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc: cpam
Numéro d'arrêt : 19/02892
Date de la décision : 04/04/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-04;19.02892 ?
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