La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/03/2024 | FRANCE | N°23/01549

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc: rd/carsat, 28 mars 2024, 23/01549


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 2]


JUGEMENT N°24/01625 du 28 Mars 2024

Numéro de recours: N° RG 23/01549 - N° Portalis DBW3-W-B7H-3MRV

AFFAIRE :

DEMANDEUR
Monsieur [U] [D]
[Adresse 4]
[Localité 1]
comparant en personne


c/ DEFENDERESSE
Organisme CARSAT DU SUD EST
[Adresse 3]
[Localité 2]
représentée par Mme [M] [L], chargée d’étude juridique de l’organisme munie d’un pouvoir régulier



DÉBATS : À l'audie

nce publique du 21 Décembre 2023

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : DEPARIS Eric, Vice-Président

Assesseurs : DUNOS Olivie...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 2]

JUGEMENT N°24/01625 du 28 Mars 2024

Numéro de recours: N° RG 23/01549 - N° Portalis DBW3-W-B7H-3MRV

AFFAIRE :

DEMANDEUR
Monsieur [U] [D]
[Adresse 4]
[Localité 1]
comparant en personne

c/ DEFENDERESSE
Organisme CARSAT DU SUD EST
[Adresse 3]
[Localité 2]
représentée par Mme [M] [L], chargée d’étude juridique de l’organisme munie d’un pouvoir régulier

DÉBATS : À l'audience publique du 21 Décembre 2023

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : DEPARIS Eric, Vice-Président

Assesseurs : DUNOS Olivier
KATRAMADOS Marc

L’agent du greffe lors des débats : GRIB Assya

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 28 Mars 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

RG 23/01549

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [U] [D] a été affilié au régime social indépendant en qualité d'artisan.

Il a effectué une demande de retraite en ligne avec une date d'effet choisie au 1er janvier 2023.

En décembre 2022, la Caisse de Retraite et de Santé au Travail (ci-après la CARSAT) Sud-Est l'a informé de l'attribution de sa pension de retraite à compter du 1er janvier 2023.

Par notification du 20 février 2023, elle l'a informé qu'à compter du 1er janvier 2023, le calcul de sa retraite de base était modifié après régularisation de sa carrière en appliquant les éléments suivants :
- Revenu de base (en euros) : 28 479,05
- Taux applicable au calcul de votre retraite : 50 %
- Durée de l'assurance : 167 (maximum autorisé).

Il lui était également indiqué qu'il bénéficiait d'une retraite complémentaire pour les activités qu'il avait exercé en qualité de travailleur indépendant, calculée avec un taux de pension à 100 % et un nombre de points acquis de 3541.

Par requête remise en main propre au greffe du Pôle social du Tribunal judiciaire de Marseille le 3 mai 2023, Monsieur [U] [D] a contesté la décision implicite de rejet de son recours par la commission de recours amiable de la CARSAT Sud Est formé le 5 janvier 2023 visant à ce que ses arriérés de cotisations 2019 et 2021 soient pris en compte dans le calcul de sa pension.

Ce recours a été enregistré au répertoire général sous le numéro RG 23/01549.

Par notification du 14 juin 2023, la CARSAT Sud-Est a informé l'assuré qu'à compter du 1er janvier 2023, le calcul de sa retraite était modifié après régularisation de sa carrière en appliquant les éléments suivants :
- Revenu de base (en euros) : 28 881,37
- Taux applicable au calcul de votre retraite : 50 %
- Durée de l'assurance : 167 (maximum autorisé).

Il lui était également indiqué qu'il bénéficiait d'une retraite complémentaire pour les activités qu'il avait exercé en qualité de travailleur indépendant, calculée avec un taux de pension à 100 % et un nombre de points acquis de 3571.

Par requête remise en main propre au greffe du Pôle social du Tribunal judiciaire de Marseille le 11 octobre 2023, Monsieur [U] [D] a contesté la décision implicite de rejet de son recours par la commission de recours amiable de la CARSAT Sud Est formé le 11 juillet 2023 par lequel il contestait la date d'arrêt des comptes fixée au 31 décembre 2022 pour le calcul de sa pension de retraite, la non prise en compte de ses cotisations versées pour l'année 2022 par la CARSAT Sud-Est et sollicitait le remboursement de ses cotisations vieillesse payées en excès.

Ce recours a été enregistré au répertoire général sous le numéro RG 23/04363.

Ces affaires ont été appelées et retenues à l'audience de plaidoirie du 21 décembre 2023.

Monsieur [U] [D] comparait à l'audience et soutient oralement ses conclusions écrites communes aux deux affaires.

Il relève que le litige est désormais clos pour les années 2019 et 2021 compte tenu des dernières écritures de la CARSAT.

Néanmoins il maintient sa contestation sur la prise en compte de l'année 2022 pour le calcul de ses droits, partant il demande au tribunal :
- d'intégrer la totalité de ses revenus 2022, soit la somme de 19 382 euros dans le calcul de sa retraite de base et complémentaire à compter du 1er janvier 2023 ;
- de condamner la CARSAT Sud-Est à lui verser la somme de 1 euros à titre de dommages et intérêts symbolique.

A l'appui de ses prétentions, il fait principalement valoir que les articles L.133-6-4 III et D 133-4 du code de la sécurité sociale ne lui sont pas applicables contrairement à ce que prétend la CARSAT Sud-Est. Il ajoute que la CARSAT Sud-Est ne l'a pas suffisamment conseillé et que s'il avait eu connaissance des règles applicables il aurait pu régler ses charges complémentaires avant décembre 2022.

En défense, la CARSAT Sud-Est, représentée par une chargée d'étude juridique dument habilitée, accepte de consulter à l'audience les conclusions écrites du demandeur, qui ne lui avaient pas été communiquées en amont.

Elle s'en remet à ses dernières écritures, également communes aux deux affaires, aux termes desquelles elle demande au tribunal de bien vouloir joindre les recours portant les numéros 23/01549 et 23/04363 et débouter Monsieur [U] [D] de l'ensemble de ses demandes.

Au soutien de ses prétentions, dans un premier temps elle argue que :
- les cotisations pour l'année 2021 versées avant la date limite de versement des dettes antérieures (DVLDA) ont été prises en compte dans le calcul de sa pension de retraite et qu'une nouvelle notification rectificative lui a été adressée le 21 février 2023 ;
- les cotisations pour l'année 2019 versées le 25 octobre 2022, postérieurement à la DVLDA, ont été prises en compte, à titre exceptionnel, et qu'une nouvelle notification de retraite a été transmise à Monsieur [U] [D] le 14 juin 2023 en ce sens.

Dans un second temps, elle soutient que les cotisations de l'année 2022, dont ce dernier sollicite le remboursement, ont été payées postérieurement à la date d'arrêt du compte, soit postérieurement au 31 décembre 2022, de sorte qu'elles ne pouvaient être prises en compte dans le calcul de sa pension de retraite et qu'en tout état de cause ces cotisations sont obligatoires et non remboursables.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé plus ample de leurs moyens et prétentions.

L'affaire a été mise en délibéré au 28 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la jonction des recours

En application des dispositions de l'article 367 du code de procédure civile, il convient préliminairement de constater qu'il est de l'intérêt d'une bonne justice d'ordonner la jonction du recours enregistré sous le numéro RG 23/04363 au recours numéro 23/01549 et de statuer par un seul jugement.

Sur l'objet du litige

En application des articles 4 et 5 du code de procédure civile, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. Ces prétentions sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense. Toutefois l'objet du litige peut être modifié par des demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

Le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.

En l'espèce, la CARSAT Sud-Est indique que :
- les cotisations pour l'année 2021 versées avant la date limite de versement des dettes antérieures (DVLDA) ont été prises en compte dans le calcul de sa pension de retraite et qu'une nouvelle notification rectificative lui a été adressée le 21 février 2023 ;
- les cotisations pour l'année 2019 versées le 25 octobre 2022, postérieurement à la DVLDA, ont été prises en compte, à titre exceptionnel, et qu'une nouvelle notification de retraite a été transmise à Monsieur [U] [D] le 14 juin 2023 en ce sens.

Aux termes de ses conclusions écrites, soutenues oralement à l'audience, Monsieur [U] [D] indique qu'il a pris acte de ces explications apportées par la CARSAT Sud-Est et en conclu que le litige est désormais clos pour les années 2019 et 2021.

En revanche, il indique maintenir sa contestation pour l'année 2022.

En conséquence, le présent litige sur le calcul de la pension de retraite de Monsieur [U] [D] porte uniquement sur l'année 2022.

Sur la prise en compte de l'année 2022 dans le calcul de la pension de retraite de Monsieur [U] [D]

L'article R. 351-1 du code de la sécurité sociale prévoit que les droits à l'assurance vieillesse sont déterminés en tenant compte des cotisations versées au titre de la législation sur les assurances sociales et arrêtées au dernier jour du trimestre civil précédant la date prévue pour l'entrée en jouissance de la pension, rente ou allocation de solidarité aux personnes âgées.

Selon l'article R. 351-10 du même code, la pension ou la rente liquidée dans les conditions prévues aux articles R. 351-1 à R. 351-9 n'est pas susceptible d'être révisée pour tenir compte des versements afférents à une période postérieure à la date à laquelle a été arrêté le compte de l'assuré pour l'ouverture de ses droits à l'assurance vieillesse dans les conditions définies à l'article R. 351-1.

L'article R. 351-11 du même code prévoit, toutefois, qu'il est tenu compte, pour l'ouverture du droit et le calcul des pensions de vieillesse prévues aux articles L. 351-1, L. 351-7 et L. 352-1, de toutes les cotisations d'assurance vieillesse versées pour les périodes antérieures à la date d'entrée en jouissance de la pension, quelle que soit la date de leur versement.

L'article D. 634-1 du code de la sécurité sociale, pris sur le fondement de l'article L. 634-2 du même code, rend applicables, en matière d'assurance vieillesse, aux travailleurs indépendants, les dispositions des articles R. 351-1 et R. 351-10 mais il exclut l'application à ce régime de celles de l'article R. 351-11.

Par ailleurs, l'article 5 du règlement du régime complémentaire d'assurance vieillesse des indépendants, artisans, industriels et commerçants, approuvé par arrêté du 9 février 2012, prévoit de la même manière que les cotisations afférentes à des périodes antérieures à la date d'arrêt du compte, versées au régime d'assurance vieillesse complémentaire obligatoire après cette date d'arrêt du compte, ne sont pas productives de droits.

Ces dispositions excluent la prise en considération, pour le calcul de la pension de retraite de base et de la pension de retraite complémentaire, des cotisations d'assurance vieillesse acquittées par les travailleurs indépendants après la date d'entrée en jouissance de la pension, même lorsqu'elles se rapportent à une période antérieure à cette entrée en jouissance.

La cour de cassation a jugé que si ces dispositions constituaient " une ingérence dans le droit de propriété des assurés affiliés à ce régime en portant atteinte à la substance de leurs droits à pension ", celle-ci était justifiée. En effet, selon la haute cour, " cette ingérence, qui repose sur des dispositions légales et réglementaires de droit interne, accessibles, précises et prévisibles, poursuit un motif d'intérêt général dès lors qu'elle contribue à assurer l'intangibilité des droits à pension liquidés ". Elle considère ce régime juridique ménage " un juste équilibre entre les intérêts en présence en ce qu'il neutralise les effets sur le montant de la pension de l'annualité des cotisations d'assurance vieillesse des travailleurs indépendants, que ces effets soient favorables ou défavorables à l'assuré, de sorte que les dispositions litigieuses ne portent pas une atteinte excessive au droit fondamental garanti au regard du but d'intérêt légitime qu'elles poursuivent "(Cour de cassation, 6 avril 2023, n°21-19.603).

En l'espèce, la pension de retraite de Monsieur [U] [D] a pris effet le 1er janvier 2023 conformément à sa demande.

La CARSAT Sud-Est a considéré, à bon droit, que ses droits à l'assurance vieillesse était calculés en fonction des cotisations versées jusqu'au dernier jour du trimestre civil précédant la date prévue d'entrée en jouissance de la pension, soit jusqu'au 31 décembre 2022.

Il n'est pas contesté que les cotisations de régularisation pour l'année 2022 ont été versées par Monsieur [U] [D] postérieurement à la date d'entrée en jouissance de sa pension et a fortiori postérieurement à la date d'arrêt des comptes, de sorte que c'est à bon droit que la CARSAT ne les a pas pris en compte dans le calcul de ses droits à pension.

Il s'ensuit que seules les cotisations provisionnelles versées pour l'année 2022 et le revenu ayant servi de base pour déterminer ces cotisations peuvent être retenus pour le calcul de la retraite de l'assuré.

En conséquence, Monsieur [U] [D] sera débouté de sa demande de prise en compte de ses revenus réels de l'année 2022 pour le calcul de sa pension de retraite.

Sur les dommages et intérêts sollicités par l'assuré

En application de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
L'article 1353 du même code prévoit que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Il résulte de l'application combinée de ces articles, qu'il incombe à l'assuré qui sollicite une réparation en raison d'une faute commise par un organisme de sécurité sociale, de rapporter la preuve de cette faute, du préjudice qu'il a subi et d'un lien de causalité entre les deux.

En l'espèce, l'assuré relève que la CARSAT Sud-Est a failli à son rôle de conseiller et que s'il avait eu connaissance des règles applicables il aurait pu régler ses charges complémentaires avant décembre 2022.

Il n'apporte aucun autre élément de droit ou de fait au soutien de sa demande.

Ces éléments sont insuffisants pour démontrer l'existence d'une faute de l'organisme, du préjudice qu'il a subi, et du lien entre les deux.

Il sera en conséquence débouté de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les dépens

En application de l'article 696 du code de procédure civile, Monsieur [U] [D], partie perdante, sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort :

ORDONNE la jonction du recours portant le numéro RG 23/04363 au recours portant le numéro RG 23/01549 ;

DEBOUTE Monsieur [U] [D] de l'ensemble de ses demandes ;

LAISSE les dépens à la charge de Monsieur [U] [D] ;

DIT que tout appel de la présente décision doit être formé, sous peine de forclusion, dans le délai d'un mois à compter de la réception de sa notification, conformément aux dispositions de l'article 538 du code de procédure civile

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 28 mars 2024.

LA GREFFIERE LE PRÉSIDENT

Notifié le :


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc: rd/carsat
Numéro d'arrêt : 23/01549
Date de la décision : 28/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-28;23.01549 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award