La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/03/2024 | FRANCE | N°20/02753

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, Gnal sec soc: cpam, 26 mars 2024, 20/02753


REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 9]
[Adresse 10]
[Localité 4]


JUGEMENT N°24/01438 du 26 Mars 2024

Numéro de recours: N° RG 20/02753 - N° Portalis DBW3-W-B7E-YBXH

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
Madame [V] [K] veuve [A]
née le 14 Juin 1956 à [Localité 12] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Julie ANDREU, avocat au barreau de MARSEILLE


c/ DEFENDERESSE
S.C.P. [11], liquidateur de la société [13]
[Adresse 7]
[Localité 3]
non comparante

, ni représentée


Appelés en la cause:
Organisme CPCAM DES BOUCHES-DU-RHONE
[Localité 5]
représentée par Madame [Y] [J] (Inspecteur juridique...

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 9]
[Adresse 10]
[Localité 4]

JUGEMENT N°24/01438 du 26 Mars 2024

Numéro de recours: N° RG 20/02753 - N° Portalis DBW3-W-B7E-YBXH

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
Madame [V] [K] veuve [A]
née le 14 Juin 1956 à [Localité 12] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Julie ANDREU, avocat au barreau de MARSEILLE

c/ DEFENDERESSE
S.C.P. [11], liquidateur de la société [13]
[Adresse 7]
[Localité 3]
non comparante, ni représentée

Appelés en la cause:
Organisme CPCAM DES BOUCHES-DU-RHONE
[Localité 5]
représentée par Madame [Y] [J] (Inspecteur juridique), munie d’un pouvoir spécial

Organisme FIVA
[Adresse 14]
[Adresse 1]
[Localité 8]
représentée par Me Alain TUILLIER, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Jean-Baptiste LE MORVAN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

DÉBATS : À l'audience publique du 31 Janvier 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : GOSSELIN Patrick, Vice-Président

Assesseurs : CAVALLARO Brigitte
ZERGUA Malek

L’agent du greffe lors des débats : [S] [M]

À l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 26 Mars 2024

NATURE DU JUGEMENT

réputé contradictoire et en premier ressort


EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [I] [A] a travaillé en qualité de monteur mécanicien pour le compte de la société [13] du 1er juillet 1970 au 14 février 1995.

Il est décédé le 25 juin 2017 des suites d'un adénocarcinome bronchique primitif de stage IV.

Sur la base d'un certificat médical du 11 août 2017 constatant un "adénocarcinome bronchique primitif de stade IV", les consorts [A] ont effectué une demande de reconnaissance de maladie professionnelle au titre de la maladie professionnelle n°30 bis auprès de la caisse primaire centrale d'assurance maladie (CPCAM) des Bouches-du-Rhône le 8 août 2017.

Par courrier du 20 décembre 2017, la CPCAM des Bouches-du-Rhône a notifié à Madame [V] [K] veuve [A], veuve de Monsieur [I] [A], la reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie, et l'a pris en charge au titre du tableau n°30 des maladies professionnelles.

Par courrier de la même date, elle a reconnu le caractère professionnel du décès de Monsieur [I] [A].

Selon courrier du 24 avril 2018, la CPCAM des Bouches-du-Rhône a informé Madame [V] [A] qu'en sa qualité d'ayant droit de Monsieur [I] [A], une rente lui était attribuée à compter du 26 juin 2017.

Suivant courrier adressé par son conseil le 3 décembre 2019, Madame [V] [A] a saisi la CPCAM des Bouches-du-Rhône d'une demande de conciliation dans le cadre de la procédure en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

Les consorts [A] ont saisi le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (ci-après le FIVA) en mars 2019 et accepté, en mai 2019, les offres présentées par ce dernier pour réparer leurs préjudices personnels, puis le 6 février 2020 celle présentée le 30 avril 2019 à hauteur de 118.697,01 euros pour réparer les préjudices subis par Monsieur [I] [A].

Par requête expédiée le 3 novembre 2011, et en l'absence de conciliation, Madame [V] [A] a, par l'intermédiaire de son conseil, saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur de Monsieur [I] [A], la société [13], dans la survenance de la maladie professionnelle n°30 bis dont il était atteint et dont il est décédé.

Après une phase de mise en état, l'affaire a été appelée et retenue à l'audience de plaidoirie du 31 janvier 2024.

Madame [V] [A], représentée par son conseil, reprend oralement ses dernières conclusions et demande au tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, de :
déclarer recevable et bien-fondé son recours ;dire que la maladie professionnelle dont était atteint et est décédé Monsieur [A] est la conséquence de la faute inexcusable de son employeur, la société [13] ;en conséquence, fixer au maximum la majoration de la rente de conjoint survivant qu'elle a perçue.
La S.C.P [11], bien que régulièrement convoquée pour représenter la société [13], en qualité de liquidateur, ne comparaît pas à l'audience, n'est pas représentée et n'a pas sollicité de dispense de comparution.

Le FIVA, représenté par son conseil, soutenant ses conclusions récapitulatives, sollicite du tribunal de :
déclarer recevable la demande formée par les consorts [A] dans le seul but de faire reconnaître l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur;déclarer recevable sa demande, étant subrogé dans les droits des ayants droit de Monsieur [I] [A] ;dire que la maladie professionnelle dont était atteint Monsieur [I] [A] est la conséquence de la faute inexcusable de la société [13] ;fixer à son maximum la majoration de la rente servie au conjoint survivant de la victime, en application de l'article L .452-2 du code de la sécurité sociale, et dire que cette majoration sera directement versée à ce conjoint survivant par l'organisme de sécurité sociale ;fixer l'indemnisation des préjudices personnels de Monsieur [I] [A] comme suit : souffrances morales : 67.700 euros ;souffrances physiques : 21.900 euros :préjudice d'agrément : 21.900 euros ;préjudice esthétique : 2.500 euros ;TOTAL : 114.000 euros
fixer l'indemnisation des préjudices moraux de ses ayants droit comme suit: Madame [V] [A] (veuve) : 32.600 euros ;Monsieur [T] [A] (enfant au foyer) : 15.200 euros ;Monsieur [E] [A] (enfant) : 8.700 euros ;Monsieur [F] [A] (petit-enfant) : 3.300 euros ;Monsieur [N] [A] (petit-enfant) : 3.300 euros ;dire que la caisse primaire d'assurance maladie de Marseille devra lui verser ces sommes, en application de l'article L. 452-3 alinéa 3 du code de la sécurité sociale, soit un total de 177.100 euros ;condamner la partie succombant aux dépens en application des articles 695 et suivants du code de procédure civile.
La CPCAM des Bouches-du-Rhône, représentée par un inspecteur juridique, indique se rapporter à ses conclusions écrites régulièrement communiquées aux autres parties aux termes desquelles elle s'en rapporte à droit quant à la demande de reconnaissance de faute inexcusable de l'employeur formée par Madame [A] [V], veuve de Monsieur [A] [I].
Dans l'hypothèse où celle-ci serait reconnue, elle précise s'en rapporter à droit quant à la majoration de la rente attribuée au conjoint survivant et demande au tribunal de :
ramener à de plus justes proportions le montant de l'indemnisation sollicitée par le FIVA au titre des souffrances physiques, morales et esthétique, endurées par M. [A] [I] ;ramener à de plus justes proportions le montant de l'indemnisation sollicitée par le FIVA au titre des préjudices moraux des ayants droit de M. [A] [I] ; débouter le FIVA de sa demande d'indemnisation du préjudice d'agrément; par conséquent, limiter le règlement maximal à intervenir entre les mains du FIVA des divers préjudices de M. [A] [I] à hauteur de 155.200 euros.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé plus ample de leurs prétentions et moyens.

L'affaire est mise en délibéré au 26 mars 2024.

MOTIFS

Sur la recevabilité de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable

La recevabilité de l'action introduite par Madame [V] [A] n'est pas contestée.

Sur la faute inexcusable

En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat. Le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver, ces critères étant cumulatifs.

Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de la maladie du salarié. Il suffit qu'elle en soit la cause nécessaire pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée, alors même que d'autres fautes auraient concouru au dommage. Cependant, une relation de causalité entre les manquements susceptibles d'être imputés à l'employeur et la survenance de la maladie doit exister à défaut de laquelle la faute inexcusable ne peut être retenue.

Il appartient au salarié de rapporter la preuve que les éléments constitutifs de la faute inexcusable à savoir la conscience du danger et l'absence de mise en place des mesures nécessaires pour l'en préserver, sont réunis.

En outre, la prise en charge au titre de la législation professionnelle par l'organisme social, ne prive pas l'employeur de contester le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie dans le cadre de l'instance en reconnaissance de la faute inexcusable.

Il appartient alors au demandeur de rapporter la preuve du caractère professionnel, d'une part, et de la faute inexcusable de l'employeur à l'origine de la maladie ou de l'accident, d'autre part.

Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de la maladie du salarié. Il suffit qu'elle en soit la cause nécessaire pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée, alors même que d'autres fautes auraient concouru au dommage.

S'agissant de l'exposition au risque

La Cour de cassation, après avoir pu admettre que seules la fabrication et l'utilisation de l'amiante comme matière première étaient susceptibles d'engager la faute inexcusable de l'employeur, a considéré que l'exposition au risque peut résulter de l'utilisation de matériels fabriqués avec de l'amiante ou de la simple inhalation de poussières dans les locaux de l'entreprise.

La haute cour a, par ailleurs, posé le principe selon lequel l'exposition doit être habituelle et non pas permanente et continue.

En l'espèce, il ressort de la déclaration de la maladie professionnelle en date du 11 aout 2017 à laquelle était joint un certificat médical initial du 8 août 2017 et de la décision de prise en charge de la maladie et du décès de Monsieur [I] [A] au titre de la légalisation professionnelle par la CPCAM des Bouches-du-Rhône en date du 20 décembre 2017, que Monsieur [I] [A] a souffert et est décédé d'un adénocarcinome bronchique primitif de stade IV provoqué par l'inhalation de poussières d'amiante pendant son parcours professionnel.

Selon le certificat de travail établi par son employeur, Monsieur [I] [A] a travaillé au sein de la société [13], en qualité de " monteur P3 ", du 1er juillet 1970 au 28 février 1995.

Les témoignages précis et concordants de collègues de travail de Monsieur [I] [A] qu'il produit (pièces n°9 et 10 du demandeur) confirment la réalité de l'exposition à l'amiante par inhalation de poussières d'amiante dans l'exercice de son travail habituel de mécanicien.

La société [13] a par ailleurs été inscrite sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.

Il résulte de ces éléments que l'exposition à l'amiante est caractérisée en l'espèce et résulte de l'inhalation habituelle de poussières.

Sur la conscience du danger auquel était exposé son salarié par l'employeur

La société [13], si elle ne fabriquait ni ne transformait de l'amiante, en utilisait couramment dans les chantiers navals, et ne pouvait ignorer les dangers de ces produits dans la mesure où :
il existait dès la loi des 12 et 13 juin 1893 concernant l'hygiène et la sécurité des travailleurs et le décret du 10 juillet 1913, une législation de portée générale sur les poussières, reprises dans le code du travail mettant à la charge des employeurs des obligations de nature à assurer la sécurité de leurs salariés ;concernant spécifiquement l'amiante, ce risque sanitaire provoqué par ce matériau a été reconnu par l'ordonnance du 3 août 1945 créant le tableau numéro n° 25 des maladies professionnelles à propos de la fibrose pulmonaire consécutive à l'inhalation de poussières enfermant de la silice ou de l'amiante, et que cette reconnaissance a été confirmée par le décret du 31 août 1950, puis par celui du 3 octobre 1951 créant le tableau numéro n° 30 propre à l'asbestose, fibrose pulmonaire consécutive à l'inhalation de poussières d'amiante ;ce risque d'asbestose a été identifié dès le début du XXème siècle de nombreux travaux études scientifiques ont été publiés sur les conséquences de l'inhalation des poussières d'amiante avant même la publication du décret du 17 août 1977.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société [13], compte-tenu de son activité, de son importance et de son organisation, avait ou aurait dû avoir conscience du danger représenté par l'emploi de l'amiante.

S'agissant des mesures prises pour protéger les salariés des risques liés à l'amiante

Les attestations de Messieurs [W] [H] et [P] [C] concordent sur l'absence de mesures de protection contre l'inhalation de poussières d'amiante.

Elles confirment donc l'absence de mesures de protection efficaces.

En conséquence, la maladie professionnelle dont a souffert et est décédé Monsieur [I] [A] sera jugée imputable à la faute inexcusable de son employeur, la société [13].

Sur les conséquences de la faute inexcusable

L'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale dispose que lorsque l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur ou de ceux qu'il s'est substitué dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles suivants.

Selon l'article 53-VI 4ème alinéa de la loi du 2 décembre 2000, "La reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, à l'occasion de l'action à laquelle le fonds est partie, ouvre droit à la majoration des indemnités versées à la victime ou à ses ayants droit en application de la législation de la sécurité sociale. L'indemnisation à la charge du fonds est alors révisée en conséquence".

Sur la majoration de la rente du conjoint survivant

Selon l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale, dans le cas mentionné à l'article précédent, la victime ou ses ayants droit reçoivent une majoration des indemnités qui leur sont dues en vertu du présent livre. Lorsqu'une rente a été attribuée à la victime, le montant de la majoration est fixé de telle sorte que la rente majorée allouée à la victime ne puisse excéder, soit la fraction du salaire annuel correspondant à la réduction de capacité, soit le montant de ce salaire dans le cas d'incapacité totale.

Par courrier du 24 avril 2018, la CPCAM des Bouches-du-Rhône a attribué à Madame [V] [A] une rente à compter du 26 juin 2017 en sa qualité d'ayant droit de Monsieur [I] [A]. Il ressort de cette notification que le taux retenu pour le calcul n'a pas été fixé à son maximum.

En vertu des dispositions précitées, il y a lieu d'ordonner sur le principe la majoration de la rente perçue par Madame [V] [A] à son taux maximum.

La majoration de rente sera versée directement à la demanderesse.

Sur l'indemnisation des préjudices de Monsieur [I] [A]

Aux termes de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, indépendamment de la majoration de rente qu'elle reçoit, la victime a le droit de demander à l'employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément, du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle, ainsi que de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du dit code.

Madame [V] [A] ne sollicite aucune indemnisation à ce titre puisqu'elle a accepté, tout comme ses enfants, l'indemnisation des préjudices de son époux proposée par le FIVA lequel est donc subrogé dans leurs droits.

La CPCAM des Bouches-du-Rhône sollicite du tribunal qu'il ramène à de plus justes proportions le montant de l'indemnisation sollicité par le FIVA, et s'oppose en particulier à l'indemnisation du préjudice d'agrément estimant qu'il n'est pas suffisamment démontré.

Monsieur [I] [A] est décédé le 25 juin 2017 à l'âge de 64 ans des suites d'un adénocarcinome bronchique primitif de stade IV diagnostiqué en 2017.

Son état de santé s'est donc dégradé très rapidement, de sorte que l'indemnisation de ses préjudices sera fixée de la manière suivante :

* Compte-tenu de l'âge relativement jeune auquel Monsieur [I] [A] a appris qu'il était atteint d'un adénocarcinome bronchique primitif de stade IV, de sa conscience de la gravité de son affection et de son caractère irréversible outre de l'angoisse suscitées, et du fort sentiment d'injustice qu'il a ressenti, ses souffrances morales, peuvent être qualifiées de très importantes et justifier une indemnisation à hauteur de 67.700 euros.

* Compte-tenu du nombre d'hospitalisations subies par Monsieur [I] [A] et de cures de chimiothérapie accompagnées d'effets secondaires habituellement rencontrés, ses souffrances physiques peuvent être qualités d'importantes et justifier une indemnisation à hauteur de 21.900 euros.

* Compte-tenu des suites des traitements par chimiothérapie (perte de poids notamment), la réparation du préjudice esthétique sera fixée à 2.500 euros.

* Sur le préjudice d'agrément, l'indemnisation de ce poste de préjudice suppose de rapporter la preuve de l'exercice d'une activité spécifique sportive ou de loisir antérieur à la maladie afin de démontrer que les souffrances invoquées ne sont pas déjà réparées au titre du déficit fonctionnel permanent. En l'espèce, le FIVA indique que Monsieur [I] [A] ne pouvait plus pratiquer aucune activité. Il n'est pas contestable que son état de santé a considérablement affecté ses activités sportives ou de loisir qu'il ne pouvait plus pratiquer comme avant sa maladie. L'indemnisation à hauteur de 21.900 euros allouée par le FIVA pour réparer ce poste de préjudice apparaît juste et proportionnée.

Par conséquent, il convient sur ces points de faire droit aux demandes du FIVA selon les modalités prévues au dispositif de la présente décision, et de dire que ces sommes lui seront versées par la CPCAM des Bouches-du-Rhône en sa qualité de créancier subrogé.

Sur l'indemnisation des préjudices personnels subis par les consorts [A]

En vertu de l'article L. 452-3 alinéa 2 du code de sécurité sociale, en cas d'accident suivi de mort, les ayants droit de la victime mentionnés aux articles L. 434-7 et suivants, ainsi que les ascendants et descendants qui n'ont pas droit à une rente en vertu desdits articles, peuvent demander à l'employeur réparation du préjudice moral devant la juridiction précitée.

Madame [V] [A] ne sollicite aucune indemnisation à ce titre puisqu'elle a accepté, tout comme ses enfants et petits-enfants, l'indemnisation de ses préjudices moraux telle que proposée par le FIVA, lequel est donc subrogé dans leurs droits.

La CPCAM des Bouches-du-Rhône sollicite du tribunal qu'il ramène à de plus justes proportions le montant de l'indemnisation sollicité par le FIVA au titre de la réparation des préjudices des consorts [A].

Monsieur [I] [A] est décédé à l'âge de 64 ans. Il était marié depuis 41 ans avec Madame [V] [A]. Il avait deux enfants et deux petits-enfants.

Le préjudice moral de Madame [V] [A], résultant de la perte de la personne avec laquelle elle a partagé sa vie, n'est pas contestable, ni celui de leurs deux enfants et deux petits-enfants, qui ont accompagné la victime dans sa maladie.

Les préjudices moraux ont été indemnisés par le FIVA comme suit :
Madame [V] [A] (veuve) : 32.600 euros ;Monsieur [T] [A] (enfant au foyer) : 15.200 euros ;Monsieur [E] [A] (enfant) : 8.700 euros ;Monsieur [F] [A] (petit-enfant) : 3.300 euros ;Monsieur [N] [A] (petit-enfant) : 3.300 euros.
Le montant des indemnisations versées par le FIVA aux consorts [A] correspond à une juste évaluation des préjudices subis, tenant compte en particulier de la gravité de la pathologie et de l'âge de la victime au moment de l'apparition de celle-ci.

Il convient donc sur ces points de faire droit aux demandes du FIVA selon les modalités prévues au dispositif de la présente décision, et de dire que ces sommes lui seront versées en sa qualité de créancier subrogé par la CPCAM des Bouches-du-Rhône.

Sur l'action récursoire de la CPCAM des Bouches du Rhône

La société [13] a fait l'objet d'une radiation du registre des commerces et des sociétés.

Elle n'a donc plus d'existence juridique de sorte que la CPCAM des Bouches-du-Rhône ne dispose pas d'action récursoire à son encontre.

Sur les demandes accessoires et l'exécution provisoire

Les dépens seront mis à la charge de l'État.

Compte-tenu de l'ancienneté et de la nature des faits, il y a lieu d'ordonner l'exécution provisoire de la présente décision par application des dispositions de l'article R. 142-10-6 du code de la sécurité sociale.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant après débats publics, par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort :

DIT que " l'adénocarcinome bronchique primitif stade IV ", maladie professionnelle dont a souffert et est décédé Monsieur [I] [A], est imputable à la faute inexcusable de son employeur, la société [13] ;

ORDONNE la majoration de la rente servie à Madame [V] [K] veuve [A] à son taux maximum ;

FIXE l'indemnisation des préjudices personnels de Monsieur [I] [A] à la somme totale de 114.000 euros, se décomposant comme suit :
souffrances morales : 67.700 euros ;souffrances physiques : 21.900 euros ;préjudice esthétique : 2.500 euros ;préjudice d'agrément : 21.900 euros ;
FIXE l'indemnisation du préjudice moraux subi par les consorts [A] à la somme totale de 63.100 euros, se décomposant comme suit :
Madame [V] [A] (veuve) : 32.600 euros ;Monsieur [T] [A] (enfant au foyer) : 15.200 euros ;Monsieur [E] [A] (enfant) : 8.700 euros ;Monsieur [F] [A] (petit-enfant) : 3.300 euros ;Monsieur [N] [A] (petit-enfant) : 3.300 euros.
DIT que la CPCAM des Bouches-du-Rhône devra directement verser la somme de 177.100 euros au FIVA, subrogé dans les droits de Monsieur [I] [A] et ses ayants droit ;

CONSTATE que la CPCAM des Bouches-du-Rhône ne dispose pas d'action récursoire à l'encontre de l'employeur ;

LAISSE les dépens à la charge de l'État ;

ORDONNE l'exécution provisoire de la présente décision,

DIT que tout appel de la présente décision doit, à peine de forclusion, être formé dans le délai d'un mois à compter de la réception de sa notification en application des dispositions de l'article 538 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : Gnal sec soc: cpam
Numéro d'arrêt : 20/02753
Date de la décision : 26/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-26;20.02753 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award